3) Le traitement de l'erreur
Situation de la séquence construite : Les
apprenants, la veille, ont appris des adjectifs servant à décrire
le corps humain. Il doivent décrire une personne qui est projetée
au tableau sous la forme d'un dessin.
1 : Prof : Vous observez ici des images
et...heu...Roberta...c'est qui ? c'est qui Roberta ?
2 : Roberta : C'est un madame.
3 : Prof : C'est une ?
4 : Roberta : C'est une madame.
5 : Prof : C'est une madame ?
6 : Roberta : C'est une femme.
En 3 Le professeur met en avant une première erreur
d'accord : il reprend l'article au féminin et demande à
l'élève de compléter. Il ne dit pas à Roberta que
« madame » est féminin il la laisse faire le rapprochement
entre l'article qu'il reprend corrigé et le nom.
En 5 l'erreur est culturelle : le mot est français mais
dans ce contexte l'utilisation n'est pas correcte. Par l'interrogation
l'enseignant met en avant l'erreur sémantique mais ne la corrige pas.
Cette forme d'interrogation est la manière la plus fréquente de
mettre en avant une erreur.
Situation de la séquence construite : Les
apprenants, la veille, ont appris des adjectifs servant à décrire
le corps humain. Il doivent décrire une personne qui est projetée
au tableau sous la forme d'un dessin.
1 : Prof : Elle est blonde d'accord...heu...elle est...elle
est maigre ?
2 : Lucie : Non, elle est corpulent.
3 : (inaudible)
4 : Prof : Elle est rondelette.
5 : Lucie : Corpulent
6 : Prof : Corpu...elle est quoi ?
7 : Lucie : Corpul.
8 : Prof : Corpul ? Non...elle est ? Corpulente ?
9 : Lucie : Corpul[e].
10 : Prof : Corpul[e] ? elle est corpulente. Hein ? Elle
est corpulente. D'accord, ok. Alors ici regardez l'image 1...hein...l'image
numéro 1 et dites moi ce qu'elle fait, qu'est-ce qu'elle fait ? Il y
plusieurs possibilités, donnez moi le maximum de possibilités
dans l'image 1 : qu'est-ce qu'elle fait ?
La séquence inaudible ne nous permet pas de savoir
comment de corpulent le professeur a compris rondelette. Peut-être
s'adresse-t-il à un autre élève. Mais il ne note pas
l'erreur sur « corpulent » ce qui amène l'élève
à se répéter, pensant qu'elle est juste (5). Le professeur
en 6 reprend le terme pour le valider mais se rend compte que c'est une erreur
alors par l'intonation de la répétition « elle est quoi
» il signale qu'il y a une erreur sans la corriger ce qui amène
Lucie à reprendre son adjectif erroné qu'elle transforme en
« corpul » en 7. De nouveau elle se trompe. Le professeur reprend le
terme mais ne le valide pas 8, à la place il lui propose «
corpulente », une proposition qui est exacte mais l'étudiante
saura-t-elle reconnaître le mot et faire le lien entre sa première
proposition « corpulent » et son féminin « corpulente
». Lucie fait de nouveau l'impasse sur le mot (9). L'enseignant a mis en
avant la faute en 6 et en 8 et en 8 lui a proposé de valider le bon
terme mais visiblement cela fait trois fois qu'elle se trompe, ce n'est pas une
étourderie, elle ne maîtrise pas ce mot de vocabulaire. En 10
l'enseignant n'a pas d'autre choix que de lui donner la réponse qu'il
répète deux fois
Situation de la séquence construite : La
couverture du livre les mythes de la science est projetée au tableau.
Des titres de mythes sont présentés, les élèves
doivent les reformuler, c'est un exercice de grammaire qui suit une
leçon sur les possessifs.
11 : Prof : la terre oui ? donc le ministère de
l'environnement c'est le ministère qui ?
12 : Roberta : s'occup[e] d[e] tout
13 : Prof : s'occup[e] ?
14 : Roberta : s'occ[u]pe de (essaie de prononcer «
sauvegarder »)
15 : Prof : sauvegarder
16 : Roberta : sauvegarder
17 : Prof : oui ?
18 : Roberta :l'environnement
19 : Prof : c'est le ministère qui s'occupe...
20 : Roberta : qui s'occupe
L'erreur principale se situe ici sur la prononciation du verbe
« s'occuper de », la faute de prononciation, peut-être prise
comme une faute de temps de la part de l'enseignant : cette étudiante
italienne prononce, comme beaucoup d'italiens le [?] comme un [e]. Le
professeur réemploie le mot erroné sous la forme d'une
interrogation pour centrer la correction sur le verbe en 13. Mais
l'apprenante, en reprononçant sa phrase va se tromper sur le [y] :
Est-ce qu'il a un seuil où il considère que la prononciation
est 23
suffisante même si elle est partiellement
erronée, s'il y a un moment où l'autocorrection devient une
méthode d'enseignement ? Ne se concentre-il pas sur une erreur en
faisant le choix de laisser l'élève elle-même se corriger
(20) ?
Le traitement de l'erreur constitue une part très
importante de l'enseignement, pourtant au cours des interactions que j'ai
transcrites et celles que j'ai étudiées, ou même aux cours
auxquels j'ai assisté, les règles grammaticales
déjà étudiées sont rarement reprises, sous
prétexte qu'elles ont déjà été
étudiées, mais une faute est difficilement distinguable d'une
erreur. Le feed back est la « réaction » à un
énoncé erroné plus que l'évaluation d'une faute, il
peut se manifester sous plusieurs formes : le « non » strict qui est
à éviter face à un apprenant cela risquerait de provoquer
un blocage, une peur de la faute, la mise en avant de l'erreur par une
interrogation « corpul[e]? » ou bien la correction d'une partie de
l'erreur « une... ? », dans tous les cas il est essentiel que
l'apprenant sache où est la faute et pourquoi il la fait.
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