II-EBAUCHE D'UN SCHEMA DE DEVELOPPEMEMENT ET DE
CONSERVATION
Les résultats de ce travail se sont focalisés
sur la caractérisation de l'élevage camelin dans le Sud tunisien,
à la fois sur la base des modes de conduite et des pratiques des
éleveurs et de leur orientation et sa diversité
génétique, permettant d'aborder la question des programmes de
développement de l'élevage dans les régions de
l'étude. En se basant sur ces résultats, certains volets
(organisation, protection, valorisation et recherche) ont pu être
identifiés et peuvent orienter le schéma général de
la conservation et de développement de l'espèce cameline en
Tunisie. Ces volets constituent une ébauche d'une vision globale pour la
conservation et le développement durable de l'espèce, qui
possède réellement des aptitudes potentielles et favorables pour
l'élevage dans les zones arides.
1- Organisation du secteur camelin
La FAO estime que la reproduction pour les systèmes de
production à faibles intrants demeurera une responsabilité du
secteur public, mais pourrait être appuyée par des
coopératives de producteurs ou des initiatives communautaires.
Néanmoins, nombreux sont les pays qui n'ont aucun cadre juridique pour
l'enregistrement des animaux de races autochtones ou pour la création
d'associations de production animale. La mise en place de tels programmes, en
particulier au sein des communautés ayant peu ou pas
d'expériences de conservation, exige un important renforcement des
capacités d'organisation. L'organisation du secteur camelin
préalablement, doit s'articuler autour des points suivants :
1.1- Registres de données
L'enregistrement des performances est un élément
essentiel dans les programmes d'amélioration des races
spécialisées dans le monde. Cependant, il peut être
difficile de motiver les éleveurs à enregistrer les performances
individuelles des dromadaires, et les approches allant dans ce sens ne sont
viables que dans des milieux où les éleveurs possèdent un
certain niveau d'éducation. Or, la majorité des éleveurs
chameliers au Sud tunisien est illettrée (Figure 16).
Par ailleurs, les savoir faire locaux tiennent leur importance
dans la conservation des ressources génétiques camelines ainsi
que dans la valorisation des produits. Cependant, il est constaté que
ces savoirs faire sont peu valorisés pour les raisons suivantes :
· Manque d'organisation professionnelle des
éleveurs.
· Manque de coopératives pour la collecte et la
transformation des produis et sous produits camelins.
· Absence des normes et des standards de qualité
dans le secteur.
· Manque de technologies adaptées et manque
d'information et de formation pour les éleveurs.
La levée de ces contraintes permettrait une meilleure
valorisation des savoir faire existants. Laquelle valorisation serait à
même de contribuer à la conservation de la biodiversité et
d'améliorer les ressources de revenus des éleveurs par la vente
des produits issus de l'espèce.
La situation actuelle suggère des stratégies de
communication spécialisées et le développement de
techniques d'enregistrement appropriées. L'adoption de techniques
participatives parmi les professionnels (vétérinaires,
zootechniciens, etc.) travaillant avec les éleveurs constituerait un
pré-requis essentiel pour établir un protocole simple et
opérationnel de contrôle des performances. Toutefois,
l'intensification des actions de vulgarisation sera nécessaire pour
sensibiliser et inciter les éleveurs à participer vivement au
développement de l'élevage. Il est évident que le
contrôle des performances individuelles nécessite
préalablement un système efficace d'identification des animaux
à contrôler. Ce système d'identification, sera une
excellente alternative pour le système traditionnel "Sima" ou
marquage par le feu.
Pour créer un noyau représentatif de
contrôle de performances plusieurs scénarios sont possibles et
peuvent être proposés comme suit :
A court terme, instaurer des formules simples (contrat,
incitations, etc.) avec des éleveurs ayant des troupeaux de taille
importante peut constituer un élément crédible dans ce
sens. L'objectif principal de ces formules est de permettre l'accès au
contrôle des performances individuelles des animaux (vitesse de
croissance, production laitière, paramètres de reproduction). Les
formules adoptées doivent ainsi préparer tous les éleveurs
à s'inscrire dans un programme de développement du secteur pour
l'avenir (contrôle de performance et amélioration
génétique qui vont ensemble, etc.).
A moyen et à long terme, il faut créer des
sociétés modèles spécialisées en
élevage des dromadaires intensifié, à l'instar des bovins
au nord du pays et des dromadaires au Golfe. En premier lieu, ces
sociétés peuvent être initiées par l'Etat et en
second lieu inciter et encourager les éleveurs privés à
multiplier ces modèles. L'utilisation des technologies pour la conduite
des troupeaux sera un atout pour ces sociétés. L'intervention de
l'Etat à ce niveau est primordial en soutenant les éleveurs
investisseurs en matière de : vulgarisation, soins
vétérinaires, commercialisation, prêts avec des conditions
raisonnables, etc. Ces sociétés peuvent servir à la
diffusion du matériel génétique amélioré et
à la sélection des types qui s'adaptent avec les conditions
intensives.
17% Niveau sécondaire
21,3% Niveau primaire
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61,7% illetré
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Figure 16 : Niveau d'instruction des
éleveurs camelins
1.2- Associations des éleveurs
L'organisation des éleveurs en associations est une
étape importante dans le développement de l'espèce. Ces
associations se sont avérées efficaces dans les pays
développés ainsi que dans certains pays en développement
(cas de la Tunisie). Le principal enseignement tiré de
l'expérience de l'association de la race ovine Sicilo Sarde en Tunisie
semble avoir été le fait que les objectifs de
développement devaient être définis en étroite
coopération avec les éleveurs. Toutefois, la
conservation et le développement des ressources camelines doivent
s'appuyer sur les pratiques et les connaissances traditionnelles. La
mobilisation et le renforcement des pratiques et connaissances traditionnelles
doivent servir de point de départ à toutes les interventions
mises en oeuvre dans ce domaine. Les éleveurs peuvent à cet
égard beaucoup apprendre des méthodes participatives, que se soit
au niveau des programmes d'amélioration génétique ou de
commercialisation.
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