PREMIERE PARTIE:
CADRE THEORIQUE ET METHODOLOGIQUE
CHAPITRE I : CADRE THEORIQUE
1. La revue de la littérature
La recherche, qui s'inscrit dans une perspective de
continuité, autorise et encourage la confrontation, souvent
contradictoire entre les résultats des différentes recherches.
L'Anthropologie a commencé à investir le domaine de la
santé comme l'affirme J. DUFRESME : depuis quelques années,
lÕanthropologie a entrepris de scruter avec ses propres lunettes
conceptuelles méthodologiques populaire domaine de la santé
4
et le . En
effet, même si nous ne nous intéressons pas
spécifiquement à la santé dans sa
généralité, il est important de signaler que la
problématique de la vente illicite des médicaments et la
recherche de soins médicamenteux ne peuvent et ne doivent pas être
dissociées des problemes de santé. Des lors, l'étude de la
vente illicite des médicaments au marché parallele de « Keur
Serigne bi È s'inscrit en droite ligne dans la perspective de
l'anthropologie de la santé. Ainsi, comme le note F. LAPLANTINE, si
lÕinterprétation de la maladie est un phénoméne
social qui nÕest pas seulement le fait du spécialiste mais
dÕabsolument de tout le
4 DUFRESME J., DUMONT, F., et MARTIN, Y., in, Petite
bibliothèque dÕanthropologie médicale, BENOIT, J.,
2002, Karthala, p. 122.
monde5, la santé elle aussi est
l'affaire de tous. L'étude de la vente illicite des
médicaments au marché parallèle de Ç Keur Serigne
bi È nous a permis de faire une recherche documentaire ayant trait
à la recherche de soins médicaux et à la vente illicite
des médicaments en particulier.
Cette étude qui inclut des facteurs socio
-économiques autant que des facteurs politiques et juridiques exige une
approche globale et singulière en vue d'apporter une explication
objective. Ainsi, le sociologue ou l'anthropologue peut s'autoriser d'apporter
sa contribution pour la compréhension de tout phénomène
affairant au social. Certains chercheurs se sont intéressés aux
soins médicamenteux et aux différentes considérations qui
les entourent tandis que d'autres s'appesantissent sur la vente illicite des
médicaments.
GEEST V., et WHYTE R.6 cernent la dialectique qui
sous-tend le rapport aux médicaments et qui s'organise autour de
l'opposition entre la popularité et le scepticisme. Pour ces derniers,
les médicaments sont perçus comme des substances
séduisantes non seulement pour les professionnels de la santé
mais aussi pour les consommateurs. Selon eux, les raisons qui expliquent cet
engouement sont multiples.
De prime abord, leur efficacité éprouvée
par les populations et leur dimension tangible, permettent d'intervenir de
façon significative et matérielle sur le corps malade. Ensuite,
leur efficacité fournit aussi un moyen de localisation et
d'appréhension de la maladie que les consommateurs légitiment
ainsi. En outre, GEEST et WHITE affirment que l'origine étrangère
de certains médicaments contribue aussi à leur plus grande
attraction. Pour ces derniers, leur attirance est renforcée par les
campagnes de publicité, les modes d'emballage et leur apparence. Par
ailleurs, ils montrent aussi en tant que signes échangés, ils
contribuent au renforcement des relations sociales à travers des dons et
des contre-dons qu'ils
5LAPLANTINE F., 1986, Anthropologie de la
maladie, Paris, Payot, p.17.
6 GEEST S., WHYTE R. (dir), 1988, «The Context of Medicines
in Developing Countries Studies in
Pharmaceutical Anthropology», in Revue Anthropologie et
Sociétés, 2003, Université Laval.
impliquent. GEEST et WHITE soutiennent que le pouvoir des
médicaments dérive aussi de celui des professionnels de
santé qui les recommandent et les prescrivent. Ils ajoutent que leur
succès est également lié au fait qu'ils permettent de
court-circuiter certains des contrôles sociaux auxquels les individus
sont confrontés. Selon eux, leur usage privé ou secret, contribue
à l'autonomie dans les choix de vie et de traitement.
Pour GEEST et WHYTE l'ensemble de ces avantages
n'empêche pas cependant que les médicaments soient
également l'objet de perceptions négatives liées à
leur toxicité, leur agressivité et leurs effets secondaires. Les
résistances à l'égard des médicaments peuvent aussi
s'exprimer selon eux par des formes de non observance, reflet d'un scepticisme
face au corps médical. Elles résultent aussi du non respect des
prescriptions des médecins ou même d'une rébellion contre
ses diktats. Ces positions sont sous-tendues et alimentées par les
effets iatrogènes7 des médicaments et la critique de
leur commercialisation d'après ces auteurs. Ils affirment que le refus
des médicaments est signifié par le choix de médecines
alternatives, en particulier dans les pays en voie de développement.
Pour eux, il existe dans les pays en développement des traditions
médicales développées revendiquées comme
l'expression d'une connaissance spirituelle visant une harmonie et un
équilibre, absent dans les thérapies occidentales.
Leur analyse a le mérite de confirmer la
polysémie des médicaments et leur statut ambivalent sinon
problématique. Leur étude montre en outre que les
médicaments ont autant d'influence positive que d'impact négatif
sur la santé des individus. Ces derniers révèlent aussi le
rôle que joue le médicament dans les relations sociales.
Cependant, le choix d'une médecine alternative n'est
pas seulement l'apanage des pays en voie de développement si l'on sait
que dans certains pays dits Ç développés È,
certaines populations disposant d'un revenu faible pourraient faire recours
à une forme de thérapie qui ne dérive pas de la
médecine moderne voire de celle occidentale. En effet, la vente
illégale
7 Effets iatrogènes : ce sont les états
pathologiques liés à l'administration des médicaments.
de médicaments constitue une alternative pour certains
(vendeurs) qui s'y activent et d'autres qui se procurent au niveau du
marché parallèle du médicament.
8
L'anthropologue FAIZANZ S.s'interroge sur le rapport à
l'ordonnance et aux médicaments dans des trois groupes d'appartenance
religieuse différente et plus précisément sur la place des
médicaments dans l'espace privé. Elle s'intéresse
également à leurs modalités de rangement et de
consommation qui semblent être régies par des
référents culturels. Elle prend appui sur un terrain distinctif,
auprès de groupes de patients d'origines protestante, catholique et
musulmane du Sud de la France et dont l'appartenance socio-économique et
professionnelle est diversifiée. Pour FAIZANG, la consommation et le
rangement des médicaments par les patients dans l'espace domestique
témoignent d'une relation à soi, à son corps et à
l'Autre. Elle s'intéresse aux pratiques individuelles et familiales
relatives à la consommation médicamenteuse et à la
disposition des médicaments dans l'espace domestique des familles
observées. Elle montre que les pratiques ne sont pas le résultat
d'un choix personnel. Elles sont socialement construites, et cette construction
diffère selon l'appartenance culturelle des patients. En outre, elle
tente de découvrir les logiques symboliques qui sous-tendent ces
pratiques.
Son analyse indique en premier lieu, des distinctions entre
l'usage individuel ou collectif des médicaments. Ainsi, FAIZANG
décrit les rapports entre les patients et les médecins, et les
stratégies de dosage des médicaments par les patients. Pour elle,
le rangement des médicaments à domicile est aussi
révélateur de visions du monde contrastées. Les lieux
privilégiés obéissent à des choix différents
dans les espaces personnels (chambre ou bureau) et dans les aires collectives
(cuisine ou salle de bains). Cet état de fait, reflète pour
FAIZANG, le caractère plus individualisé ou plus collectif, selon
les cas du rapport aux médicaments. Elle dévoile la relation
établie entre médicament et alimentation. Pour elle,
8 FAINZANG S., 2001, Médicaments et
sociétés. Le patient, le médecin et l'ordonnance.
Paris, PUF.
une étude ethnographique fine du rangement des
médicaments dans l'espace domestique permet de comprendre comment
s'articulent les conceptions du corps et celles du lieu d'habitation. Selon
FAIZANG, les espaces collectifs et privés se recoupent dans des espaces
intermédiaires, qui sont aussi le reflet des rapports particuliers aux
médicaments, au corps et à la « collectivité
familiale ».
Bien qu'importante, l'étude de FAIZANG n'a pas
abordé les sources d'approvisionnement officieux en médicaments
de certaines populations qui pourraient elles aussi, illustrer le rapport ou
les rapports que ces derniéres entretiennent avec le médicament.
Cependant, son travail a le mérite de montrer le rapport de certains
individus aux médicaments qui peut orienter des pratiques
spécifiques d'approvisionnement.
Par ailleurs, VINCENT S.9 se propose de faire
une anthropologie du médicament et parallélement, une
étude sur les conditions de sa réappropriation par les individus.
Pour elle, la consommation du médicament se trouve au cÏur d'un
paradoxe car à priori tres contrTMlée, elle ne cesse
d'échapper aux experts qui devraient en avoir la charge afin qu'elle
soit réappropriée par les individus. Elle affirme qu'au
delà du choix et du déroulement des itinéraires
thérapeutiques, les usages du médicament sont extremement
normés. Elle ajoute que différents risques sont associés
à la consommation médicamenteuse. De façon
générale, la perception du danger structure les usages du
médicament dans l'espace domestique tant au niveau de son rangement que
de sa consommation. Elle soutient en ces termes que lÕachat des
médicaments est en théorie inséré dans un protocole
: le patient ne peut acheter de médicaments sans avoir consulté
un médecin et possédé une ordonnance10.
VINCENT, affirme, cependant, que ces normes se trouvent en
porte à faux avec les pratiques, beaucoup moins protocolaires que ne
l'impose la norme sociale. Selon elle, le choix d'un itinéraire
thérapeutique repose sur l'interprétation que se fait l'individu
de ses
9 VINCENT, S., 2004, Une anthropologie du
médicament, la consommation de médicaments chez les 20-40 ans en
France, Mémoire de ma»trise, Paris, Sorbonne.
10 VINCENT S., op.cit. p.13.
symptômes. Elle soutient que dans le cadre d'un recours
allopathique11, cette interprétation se divise
schématiquement en deux groupes. Premièrement, lorsque les
symptômes paraissent non dangereux mais bénins, le malade
préfère généralement se soigner par
automédication. En revanche, elle note que quand les symptômes
semblent être plus dangereux, le malade se tourne vers un
itinéraire beaucoup plus protocolaire en faisant appel au
médecin.
En effet, S.VINCENT s'est beaucoup plus appesanti sur les
itinéraires thérapeutiques que sur la problématique de la
vente illicite des médicaments. Son étude a le mérite de
montrer deux voies
importantes dans la recherche de soins médicamenteux
dans la société francaise à savoir: l'itinéraire
allopathique ou protocolaire (qui consiste à respecter les étapes
habituelles et conventionnelles de délivrance du médicament) et
l'automédication. Toutefois, l'automédication en ce qui concerne
le Sénégal n'est pas uniquement déterminée par la
nature des symptômes. En effet, l'insuffisance de moyens financiers
conduit certains individus à ne plus respecter l'itinéraire
protocolaire qui est considéré à leur niveau comme un
surplus de dépenses pour un malade qui vit dans une situation de
précarité économique. Dans son article S.
FAYE12 montre que l'automédication est aussi une
réponse à la pauvreté : elle constitue donc une
alternative pour les catégories socialement
défavorisées.
A la différence des auteurs précités, D.
FASSIN13 s'est intéressé à la
problématique de la vente illicite des médicaments au
Sénégal. Selon lui, la vente illicite des médicaments est
une réponse pour les catégories sociales
défavorisées qui ne peuvent pas accéder aux soins
médicaux par les voies officielles. Selon lui, quand la consultation
débouche sur des médicaments au coüt élevé que
doivent payer des familles ou des chefs de ménages aux revenus faibles,
il n'est pas étonnant que le système secrète des solutions
de remplacement. Pour FASSIN, certaines populations, ne disposant pas souvent,
la somme nécessaire à
11 Médecine scientifique qui emploie des
médicaments tendant à contrarier les symboles et les
phénomènes morbides.
12 Faye S., 2005, Ç Se soigner à
domicile: une réponse à la pauvreté? È.
13 FASSIN D., 1986, La vente illicite des
médicaments au Sénégal, économies
parallèles, Etat et société, Politiques africaines,
Paris, Karthala.
l'achat d'une boite entière sont obligées
d'aller vers les marchés parallèles pour se procurer des
tablettes voire des comprimés en fonction de leur bourse. L'une des
causes de la persistance de la vente illicite est liée à
l'incapacité du gouvernement à résoudre la question de
l'accès aux médicaments pour les plus démunis selon
FASSIN.
Il montre que plusieurs réseaux d'importances très
inégales alimentent le commerce illicite des médicaments. Il
s'agit:
- avant tout, de la Gambie d'où les médicaments
achetés à faibles prix sont acheminés jusqu'à Touba
via Kaolack, par des camions chargés de paille ou de foin;
- du port de Dakar oü des médicaments sont
fréquemment pillés et autour duquel la vente illicite (gros et
détail) est particulièrement active.
- des hôpitaux, des dispensaires et des officines oü
le détournement par des employés donne lieu à une revente
en quantité modeste.
14
Dans Les enjeux politiques de la santé FASSIN,
s'intéresse aux politiques de santé. Selon lui,
appréhender les figures de la gouvernmentalité
particulière à la santé publique impose de saisir
l'ensemble réponses sociales 15
de ses . Pour lui, les politiques de
santé ne s'expriment pas uniquement à travers
les discours et les pratiques officiels des institutions internationales, des
ministères, des professionnels et des experts. Pour FASSIN, les
politiques de santé se manifestent aussi dans une multitude
d'énoncés et d'activités dont le statut va, de l'officieux
au clandestin. Il ajoute que son statut va également du
toléré au prohibé, et qui non seulement correspondent
à des réalités sociales et économiques importantes
en soi. Elles permettent également de faire une lecture négative
du secteur officiel dont elles révèlent les
ambigu ·tés et les contradictions. Il affirme que l'étude
de la vente illicite des médicaments au Sénégal montre
ainsi, comment les produits pharmaceutiques apparaissent comme des biens de
consommation particulièrement lucratifs. Il découvre
parallèlement ce qu'il appelle les liens mafieux entre la
confrérie
14 FASSIN D., 2000, Les enjeux politiques de la
santé. Etudes sénégalaises, équatoriennes et
francaises, Paris, Karthala.
15 FASSIN D., op.cit. p.17.
religieuse (mouride) qui en contrôle le commerce et
l'Etat qui en assure la régulation. Selon lui, la configuration spatiale
de la confrérie mouride s'avère propice pour le
développement de ce type d'activité. FASSIN pense que l'existence
d'un territoire désinvesti (Touba) par l'Etat appara»t comme une
condition qui n'est ni nécessaire ni suffisante, mais assurément
propice pour le dévelo ppement d'une économie
parallèle.
Son analyse a le mérite de montrer que la vente
illicite des médicaments ne doit pas être
appréhendée en dehors des politiques de santé. Il montre
que les politiques de santé ne répondent pas toujours aux besoins
des populations. Cette contradiction a été remarquée par
BONNICI16pour qui, la politique de la Santé, qui est par
essence, une politique de Santé publique, se heurte à une sorte
de Çmur d'argentÈ car selon lui, au marché des soins se
confrontent économiquement : une demande de soins et une offre de
Santé dans une optique marchande.
Les causes de la vente illicite des médicaments ont
fait l'objet d'une Thèse de Doctorat en pharmacie soutenue par DIAW
C.T.17. Selon ce dernier, l'une des principales causes de la vente
illicite des médicaments est la pénurie permanente de
médicaments qui caractérisent les districts sanitaires du secteur
public et leur incapacité à assurer la distribution des
médicaments à bas prix.
Selon lui, l'envoi direct des dons humanitaires de
médicaments aux populations participe aussi à
l'élargissement du marché parallèle. Il soutient que les
médicaments du marché parallèle semblent beaucoup plus
adaptés au contexte économique et social que ceux vendus dans les
officines.
A l'instar de FASSIN, il montre que la Gambie est la principale
source de ravitaillement du marché parallèle des
médicaments.
Toutefois, un autre facteur qui concourt à la vente
illicite des médicaments n'a pas était
16 BONNICI B., 1997,Les Politiques et Protection
sociale, Paris, PUF.
17 DIAW C. T., 1992, La vente illicite des
médicaments dans les marchés et rues au Sénégal.
Enquêtes effectuées dans les régions de Dakar, Kaolack, et
Diourbel., Thèse de Doctorat en pharmacie, UCAD.
souligné par C. DIAW. Certaines populations arrivant aux
termes de leurs traitements revendent (recyclent) souvent le reste de leurs
médicaments au niveau du marché parallèle.
Pour A. ANOI18, le commerce illicite des
médicaments est la résultante d'une combinaison de facteurs
socio-économiques. Selon lui, le prix élevé des
médicaments et des consultations et surtout de l'économie des
pays africains fondée pour la plupart sur des activités
informelles favorisent la consolidation des circuits informels. Ces
marchés communément appelés <<pharmacies
trottoirsÈ en Côte d'Ivoire, constituent pour lui une
véritable menace pour la santé des populations et la profession
pharmaceutique. En revanche, si les facteurs socio-économiques sont
importants dans l'explication du commerce illicite des médicaments,
d'autres facteurs non économiques pourraient contribuer dans la
compréhension du phénomène tels que : le déficit en
médicaments qui caractérise souvent le secteur public. Par
ailleurs, parmi les facteurs qui concourent à la vente illicite de
médicaments, il faut noter que certains fonctionnaires
bénéficiant d'un bon de médicaments dans les officines, en
prennent souvent certains produits pour les revendre au niveau du marché
parallèle.
En définitive, la revue de la littérature,
moment fort et crucial dans la recherche, nous a permis d'appréhender
les points de convergen ces et de divergences des différents chercheurs
abondant sur l'utilisation et la consommation du médicament en
général et la vente illicite des médicaments en
particulier. En r evanche, ces auteurs n'ont pas dévoilé le
rapport qui pourrait exister entre le système de soins et le commerce
illicite du médicament. En outre, ils n'ont pas montré la
position des pharmaciens, de la clientèle du marché
parallèle par rapport au commerce illicite du médicament. Ainsi,
nous remarquons qu'à la lumière de cette observation indirecte
que plusieurs facteurs se conjuguent dans l'explication du
phénomène de la vente illicite des médicaments. Cependant,
la vente illégale du médicament au marché parallèle
de <<Keur Serigne bi È requiert une analyse particulière
pour appréhender les différentes logiques et les enjeux qui
sous-tendent la persistance de << Keur
18 ANOI A., 1998, Le problème du marché
parallèle du médicament en Côte d'Ivoire, Thèse de
Doctorat en pharmacie, UCAD.
Serigne bi È dans le commerce illicite.
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