INTRODUCTION
En 1977, la Trentième Assemblée Mondiale de la
Santé a pris la résolution de faire accéder en l'an 2000
tous les habitants du monde à un niveau de santé qui leur
permette de
1
mener une vie socialement et économiquement productive .
Ainsi, naquit le slogan, largement repris sur le continent africain, <<
la santé pour tous d'ici l'an 2000 >>.
On a souvent coutume de dire que l'offre de soins est
meilleure en ville qu'en campagneÉ Mais, cette offre de soins n'est bien
souvent que virtuelle: << tous les citadins n'ont pas le même
accès à ces soins, faute d'argent de couverture sociale, de
conscience de la gravité de certains maux voire plus scandaleusement
d'introduction pour entrer à l'hôpital >>2.
En effet, depuis plus d'une décennie, la vente illicite
des médicaments gagne du terrain avec le développement des
circuits offici eux d'approvisionnement. Cette pratique peut être
inscrite dans le registre de l'informel car, les soins prodigués
à domicile sans intervention d'un thérapeute, est devenu une
réponse thérapeutique à part entière, au même
titre que le recours au dispensaire et au guérisseur3.
Dés lors, elle se développe dans un contexte
d'automédication généralisée jumelée d'une
gestion bureaucratique du médicament . Pratique persistante, le commerce
illégal du médicament est différemment
appréciée par la population sénégalaise. Les
officines, lieux habilités à vendre des médicaments, sont
aujourd'hui concurrencées par les marchés parallèles. Dans
les circuits officieux, les acteurs s'autorisent à administrer des
médicaments à une bonne partie de la population dakaroise.
Parmi les lieux d'approvisionnement illicite en
médicaments, <<Keur Serigne bi>> (<< la maison du
marabout >>) reste l'un des plus remarquables à Dakar gr%oce
à sa position géographique (centre ville), la
disponibilité et l'accessibilité de certains produits
pharmaceutiques. Il est considéré comme la principale source de
ravitaillement en
1 Stratégie mondiale de la santé pour tous d'ici
l'an 2000, OMS Genève, 1981.
2 FASSIN et JAFFRE, In GRUENAIS, M. et POURTIER, R., 2000, La
santé en Afrique, Anciens et nouveaux défis, Afrique
contemporaine, trimestriel n° I95.
3 Faye S. et al. , 2005,<< Soigner les enfants
exclusivement à domicile en cas de paludisme en milieu rural
sénégalais : un effet de la pauvreté? >>
médicaments pour diverses catégories sociales et
pour beaucoup de vendeurs qui circulent dans la ville de Dakar et dans d'autres
localités au niveau national.
Face à cet épineux problème, les
pharmaciens s'organisent pour la sauvegarde des intéréts de leur
corporation et exigent des mesures répressives de la part des
autorités publiques tandis que l'attitude de l'Etat préte
à équivoque.
Dès lors, une approche socio-anthropologique s'impose
pour comprendre et expliquer les raisons qui sous-tendent la vente illicite des
médicaments à l'heure oü la problématique de
l'accès aux soins médicamenteux constitue un enjeu majeur des
politiques de santé.
Dans ce travail, nous nous intéressons aux politiques
sanitaires et particulièrement à l'initiative de Bamako. Nous
montrons aussi l'organisation du secteur de la santé, la
régulation du système pharmaceutique au Sénégal et
les limites des politiques de santé.
En outre, nous y abordons l'organisation de la vente des
médicaments à ÇKeur Serigne bi È en
présentant d'abord le cadre d'étude et son historique. Il s'agit
également de faire la carte des acteurs en identifiant la
clientèle de ÇKeur Serigne bi È et ses réseaux
d'approvisionnement. En sus, nous exposons les causes de la vente illicite du
médicament avant de nous intéresser à la position des
pouvoirs publics sur la pratique, à l'appréciation des
pharmaciens sur la position des autorités publiques. Enfin, nous
montrons les causes de la persistance de Ç Keur Serigne biÈ dans
le commerce illicite du médicament, les conséquences de la vente
illégale du médicament sur la profession pharmaceutique, les
mesures de lutte prises et/ou préconisées avant de titrer les
conclusions générales de cette étude.
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