B. Les supports d'information au RCCM
Le droit OHADA a rénové les supports
d'information au RCCM. Cet état de chose donne une nouvelle dynamique
à la tenue des fichiers (1) mais n'empêche que les insuffisances
du RCCM comme moyen d'information soient relevées (2).
1. La tenue des fichiers au RCCM
Le registre du commerce et de crédit mobilier est un
ensemble de dossiers assorti de fichiers récapitulatifs. Ce registre est
tenu au greffe du tribunal du lieu de situation du siège social de
l'entreprise et comprend un registre d'arrivée mentionnant par ordre
chronologique la date, le numéro de déclaration acceptée,
les
noms, prénoms, dénomination sociale du
déclarant et l'objet de la déclaration. Il comprend
également un assemblage de dossiers individuels tenus par ordre
alphabétique avec des mentions différentes. C'est l'occasion de
louer la finesse du l'OHADA qui à l'exemple de ses partenaires dans le
monde des pays développés prévoit l'informatisation du
RCCM. Ce support matériel d'information que constituent ces fichiers
informatisés est une garantie de célérité dans
l'acquisition des informations sur les entreprises de l'espace OHADA.
En plus, l'OHADA consacre une décentralisation des
fichiers qui sont organisés de façon pyramidale. Il
prévoit un fichier national tenu par chaque Etat partie qui
synthétise les informations transmises depuis les fichiers locaux et un
fichier régional qui coiffe les fichiers nationaux et est tenu
auprès de la Cour commune de justice et d'arbitrage38. Comme
le disait une célèbre personnalité, toute réforme
en appelle une autre, en dépit des efforts consentis par le
législateur OHADA afin d'améliorer l'information des potentiels
investisseurs beaucoup reste à faire pour parfaire cette visée ;
ce qui pose le problème des aléas du RCCM.
2. Les aléas du RCCM comme mécanisme
d'information
Le véritable handicape du RCCM est son
ineffectivité. La beauté des textes n'est pas le plus important,
encore faut-il les appliquer ou veiller à leur application.
En effet, à l'heure de la mondialisation des
économies, il est navrant de constater pour le regretter que les
fichiers informatisés prévus demeurent un v°u pieux dans les
pays membres de l'OHADA. A l'exception d'un rare pays tel que la Cote d'Ivoire
qui fait des efforts dans ce sens39, d'autres restent
indifférents à cet arrimage de l'OHADA à la
modernité comme c'est le cas sous d'autres cieux. Les supports jadis
utilisés et vétustes restent en vigueur. D'aucuns
soulèveront l'éternel
38 Saluant cette inspiration du législateur
OHADA un auteur déclarait : « Une mention spéciale doit
être faite au registre du commerce et du crédit mobilier. Ce
dernier conçu de façon originale au service de
l'intégration juridique en recevant, à la fois au niveau local,
national et régional auprès de la Cour Commune de Justice et
d'arbitrage à Abidjan, l'immatriculation des personnes physiques et
morales et l'inscription des sûretés mobilières... il
s'agit d'un exceptionnel instrument de publicité et de transparence
vital pour le climat des affaires, précieux pour tous les acteurs de la
vie économique y compris la communauté économique et
financière internationale», tiré de la préface
rédigée par DIOUF(A.) de l'ouvrage des Professeurs POUGOUE (P.G.)
et KALIEU ELONGO (Y.R.), Introduction critique à l'OHADA , PUA,
Yaoundé, 2008, p.15.
39 Et du Cameroun qui vient juste d'amorcer ce
processus d'informatisation des greffes.
problème des pays Africains à savoir « le
manque de moyens » mais cet argument ne pourra pas prospérer car
l'achat d'un ordinateur est désormais moins coûteux et en plus il
s'agit d'un bien amortissable. Ces Etats pourraient par exemple instaurer un
taux forfaitaire minimum à verser par chaque usager qui voudrait obtenir
des informations au RCCM cela permettrait d'assurer la gestion des sites et
l'entretien de ces services informatisés. En même temps le
système de règlement des frais par les usagers via les moyens de
paiement électronique pour ceux qui sont éloignés posera
problème. L'on continu de recourir à ces registres aux feuilles
jaunies dans nos greffes dont la marque du temps empêche de mieux
appréhender les informations précieuses qu'ils contiennent.
A cause de cet état de chose la distance continue
d'être un obstacle pour les investisseurs situés dans d'autres
espaces économiques ou entre deux investisseurs situés dans des
pays différents mais membres de l'OHADA. L'investisseur désirant
souscrire à l'émission d'actions ou d'obligations va buter contre
l'inaccessibilité de celle-ci alors qu`une mise en marche effective de
ces fichiers aurait permis à un investisseur situé aux Etats-Unis
d'Amérique de placer des capitaux par l'achat des titres après
avoir obtenu des renseignements fiables sur le site et ayant reçu une
copie des documents y afférant. Cela aurait constitué un gain de
temps et d'argent surtout pour des pays Africains comme la Guinée
Equatoriale et la République Centrafricaine qui sont des pays
enclavés. Cela est de nature à freiner l'intégration
régionale ou sous régionale par le marché des capitaux ou
par l'investissement dans les industries et un frein à la
mobilité des facteurs de production car qui dit industries dit emplois,
salaire, bien être social.
Il faut par ailleurs préciser que le législateur
OHADA est muet sur les lieux où sont tenus les fichiers nationaux.
Comment sont-ils constituer ? Face à ce vide juridique, il est apparu
que les greffiers font feu de tout bois. Certains, les plus consciencieux
envoient des décisions par des agences de voyage. D'autres
prétextent le manque de moyens mis à leur disposition pour
conserver les inscriptions au niveau local. Il est par conséquent urgent
de créer un système de connexion au réseau Internet,
auquel seront connectés les greffes et où les investisseurs
disposeront de toutes les informations. L'informatisation doit donc
s'entendre aussi bien de l'utilisation de la logistique
d'informatique tel que les ordinateurs comme cela se fait progressivement mais
aussi de la connexion au réseau internet.
Toute autre lacune du RCCM est l'insuffisance des informations
qu'il véhicule.
En effet, ces informations se limitent aux renseignements sur
la société, son fonctionnement et même sa mort. C'est le
comble ! Comment prétendre informer suffisamment les investisseurs si
l'on ne prévoit nulle part la possibilité de publier des
informations détaillées liées aux titres comme lorsque la
société propose ses titres auprès d'une bourse de valeur.
Il aurait été nécessaire d'envisager une rubrique
consacrée aux titres sociaux émis ou à émettre par
la société, la précision sur leur montant nominal minimum
et autres informations, même si ce montant peut varier au gré de
l'offre et de la demande comme dans les système d'économie
libérale, ainsi le RCCM constituerait un système d'information
complet car en le consultant on saura directement si la société
est cotée et quelles sont les titres qu'elle vend.
Par dessus tout, l'on s'interroge sur le choix arbitraire des
sûretés mobilières par le législateur OHADA. Comment
justifier ce choix? Les sûretés immobilières sont parfois
plus consistantes. Les sûretés personnelles aussi.
Déjà l'inscription des sûretés mobilières
rend l'information touffue mais l'option la plus logique aurait
été la publication de toutes les sûretés.
Par ailleurs le formalisme de l'immatriculation est
très lourd 40 s'il faut y ajouter des autorisations
administratives nécessaires. Un pays comme le Cameroun est
réputé pour la lourdeur du formalisme de création
d'entreprise pour les entreprises ce qui est de nature à
décourager les entrepreneurs et à développer un vice en
sens contraire qui consistera par exemple à falsifier les documents
sociaux pour obtenir une validation rapide de l'immatriculation ce qui est un
paradoxe pour un droit OHADA voulant garantir une meilleure information des
acquéreurs des titres. En voulant faire simple, il a au contraire rendu
la tache ardue pour les
40 V. ANOUKAHA (F.) et al op.cit., p.98.
entreprises d'où il y a lieu de consacrer une
nécessaire conciliation entre les deux partenaires sociaux que sont la
société émettrice et tous les investisseurs.
L'on peut aussi reprocher au législateur OHADA de
n'avoir envisagé qu'un contrôle de la régularité
formelle au lieu de prévoir un véritable pouvoir de
contrôle du fond diligenté par le greffier du tribunal
compétent lorsqu'il effectue des vérifications sur les documents
qui lui sont donnés aux fins d'immatriculation.
Le RCCM comme mécanisme classique d'information est
suivi de son corollaire de publication d'informations dans les journaux.
§2. LA DIFFUSION DE L'INFORMATION DANS LES
JOURNAUX
L'information de l'acquéreur non associé ou non
est renforcée par le recours aux informations que la
société qui est appelée à contracter avec eux met
à leur disposition. Ces moyens d'informations sont nécessaires
car l'on comprend bien que sans leur diffusion, un acquéreur de titres
ne sera jamais informé. Du moins le plus grand nombre parce que ne
disposant pas d'autres voix d'accès à celle-ci. Il faut
déterminer les journaux en question (A) avant de faire état des
informations qu'ils contiennent (B).
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