I.3. Causes de glissements :
Les mouvements de terrain sont des déplacements (avec
ou sans rupture) vers l'aval de masses rocheuses compactes ou
désagrégées et/ou de terrain meuble (sols y compris) et
d'eau, sous l'effet de la gravité.
Ils peuvent se produire sous forme de processus brutaux
(chute de pierres et de blocs, éboulement et écroulement,
glissement soudain, coulée boueuse, effondrement) ou lents et
progressifs (fluage, glissement lent permanent).
Les processus à l'origine des mouvements de terrain
sont très complexes et dépendent rarement d'une seule cause. La
géologie, le relief et l'exposition sont des paramètres
fondamentaux, plus ou moins constants sur de longues périodes; ils
déterminent la prédisposition générale du terrain
aux phénomènes d'instabilité. Le processus qui mène
à une telle instabilité commence en fait dès la formation
de la roche, c'est à dire lorsque les propriétés chimiques
et physiques de celle-ci sont bien établies. Ces
propriétés déterminent notamment son comportement face
à l'altération et à l'érosion.
Les mouvements de terrain résultent d'un changement de
l'équilibre des forces dans le versant (rapport entre forces
résistantes et forces motrices), à la suite de processus
physiques et / ou chimiques qui, à leur tour, dépendent de
différents facteurs. Ainsi, les processus d'altération agissant
à long terme (conduisant à une diminution des forces
résistantes), de même que les fluctuations de la nappe
phréatique, influencent la stabilité d'un versant de
manière continue. Par ailleurs, une pente peut aussi être
déstabilisée rapidement, soit à la suite
de l'érosion par une rivière au pied du versant,
soit, mais plus rarement, suite à un tremblement de terre.
En général, l'eau joue un rôle
déterminant pour les mouvements de terrain, elle produit des pressions
hydrostatiques dans les pores (pressions interstitielles), les fissures et les
failles, de même que des forces de percolation.
A l'état de glace, elle a en plus la capacité
d'induire des mécanismes de rupture notables. Par ailleurs, elle peut
provoquer le gonflement des minéraux argileux (pression de gonflement).
La stabilité des pentes en équilibre critique peut être
sensiblement réduite par ces divers effets.
Le déclenchement d'un processus dangereux survient
lorsque la valeur limite d'un des facteurs déterminants est atteinte ou
dépassée. Les cycles de gel / dégel, les
précipitations éventuelles, de forte intensité ou de
longue durée - éventuellement combinées à la fonte
des neiges -, conduisent souvent à des mouvements de terrain
spontanés.
Il n'est pas rare que les mouvements de terrain soient
favorisés par des influences anthropiques. Ainsi, la surcharge d'une
pente par des bâtiments et des remblais, les excavations sans dispositifs
de protection dans un versant lors de travaux de construction, la
surélévation du niveau de l'eau souterraine, le dynamitage,
l'exploitation inappropriée de matières premières ou
l'affectation inadéquate du sol peuvent accroître le danger de
mouvements de terrain. Les effets anthropiques peuvent aussi contribuer
à une déstabilisation à long terme du versant, en relation
avec d'autres activités comme le déboisement, l'entretien
insuffisant des forêts, le surpâturage, l'exploitation intensive et
la dénudation du sol.
Dans la majorité des cas, les glissements de terrain
dépendent de deux causes principales : l'eau et la présence des
fractions fines.
I.3.1. L'eau et les risques de glissements de
terrain:
Les eaux souterraines et de surface jouent un rôle
déstabilisant sur les sols et les massifs rocheux avec des
manifestations qui peuvent être extrêmes comme les glissements de
terrain ou les éboulements de roches.
Pour prévenir ces risques, la modélisation
hydro-mécanique et hydro-géologique doit aller de pair avec des
opérations de drainage des eaux et une surveillance.
Les nappes souterraines, et plus exactement leurs
fluctuations liées aux conditions météorologiques ou
parfois aux actions humaines, sont très souvent à l'origine de
déclenchements des mouvements de versants: glissements,
éboulements, coulées ou laves torrentielles.
Sur les pentes, l'action déstabilisatrice de l'eau
infiltrée dans le sol est triple :
· Accroissement du poids volumique des sols par
augmentation de la teneur en eau: cet effet est le plus souvent mineur;
· Changement de comportement rhéologique: le sol
passe de l'état solide à l'état de fluide visqueux;
certaines coulées de boue ou laves torrentielles sont ainsi
engendrées par l'imbibition d'une masse de sol. On peut aussi
évoquer, lors d'un séisme, la liquéfaction des sables sous
nappe qui est à l'origine de nombreux glissements sur très faible
pente. Par ailleurs, des circulations d'eau souterraine peuvent engendrer sur
le long terme une altération progressive des terrains encaissants, avec
dégradation de leurs caractéristiques mécaniques ;
· Action mécanique défavorable des
pressions d'eau souterraine.
La lutte contre l'eau est une des actions les plus efficaces
pour prévenir, stabiliser ou ralentir un glissement de terrain. La
connaissance du mode d'alimentation de la nappe est indispensable pour
intervenir efficacement.
Cela démontre toute l'importance de l'étude
hydrogéologique pour la compréhension de l'évolution des
glissements de terrain, mais aussi pour la maîtrise du risque
correspondant.
Reposant sur les observations de terrain ou la pose de
piézomètres, cette étude doit être menée sur
une durée suffisante pour apprécier les fluctuations
saisonnières ou annuelles des nappes.
L'introduction d'un modèle hydrogéologique dans
l'étude de stabilité permet d'évaluer l'influence des eaux
souterraines sur la stabilité et de tester l'efficacité d'un
traitement par drainage. Il apparaît cependant que le couplage
hydraulique/mécanique est parfois complexe. Pour de grands versants
rocheux, la compréhension du rôle de l'eau dans la
déformation et le mouvement est donc encore très imparfaite.
I.3.2. La présence des fractions
fines:
Deux remarques relatives aux conditions du sol s'imposent. Les
problèmes les plus critiques de stabilité des pentes se
présentent d'ordinaire, en premier lieu, sur les sols à grains
fins et particulièrement sur les argiles. Ceci résulte en partie
de ce qu'il est difficile de les drainer et de ce que, sur ce genre de sol, les
processus d'érosion par ruissellement et vagues amènent de
nombreuses pentes au point de rupture.
Le second point concerne le comportement des sols à
grain fin impliqués dans un déplacement des terres. En
acquérant par moulage une autre forme, ils peuvent perdre une fraction
notable de leur résistance. On désigne l'importance de cette
perte sous le nom de sensibilité. Les hautes sensibilités
correspondent aux grandes pertes de résistance. Il se peut, que les
débris d'un glissement de terrain sur sols à haute
sensibilité ne séjournent pas au pied de la pente, mais se
dispersent et s'en éloignent. Il ressort de ce qui précède
que les sols à grain fin sensibles au changement de forme exigent une
attention spéciale sous le rapport de la stabilité des pentes.
I.4. Identification de danger de glissement :
L'identification des dangers dus aux mouvements de terrain
repose sur une documentation objective de diverses observations et mesures
impliquant un danger donné. Il faut s'assurer de prendre en compte les
différentes observations sur le site ainsi que les relevés
inclinométriques en essayant de bien les interpréter.
I.4.1. Documents de base :
· a)- Cartes topographiques :
La carte topographique est le document de base
pour toute analyse de stabilité. Elle contient nombre
d'informations pertinentes pour l'identification des dangers sous forme de
symboles, de signes et d'autres éléments graphiques. Ainsi, par
exemple, la morphologie des zones en glissement est souvent visible par le
bombement des courbes de niveau; des symboles de blocs éboulés au
pied d'une falaise peuvent laisser présager une production notable
d'éboulis.
Le levé topographique se fait à l'échelle
locale directement sur la zone concernée par le glissement, nous permet
de bien tracer le profil en travers du site et de bien décrire les
différentes couches des sols ainsi que leurs caractéristiques
physico - mécaniques pris en compte pour l'évaluation de la
stabilité du site.
· Cartes géologiques :
La carte géologique donne des renseignements utiles sur la
lithologie, sur l'agencement structural (orientation et pendage des couches et
des discontinuités) et sur la couverture quaternaire (moraine,
éboulis ou glissement de terrain, par exemple).
Elle donne encore des indications sur les circulations d'eau
souterraine en milieu poreux et fissuré. Sur la base de ces
données cartographiques, on peut reconstituer la structure
tridimensionnelle des unités géologiques et évaluer le
contexte de formation de possibles mouvements de terrain.
Les différents phénomènes
d'instabilité de pente, comme les glissements ou les éboulements
généralisés sont représentés en
général sur une carte géologique au 1:25000 par leur
périmètre. Il n'est pas fait mention de l'intensité ou de
la fréquence de ces divers phénomènes.
Ces informations permettent toutefois de localiser les zones
sensibles aux mouvements de terrain, qui devront faire l'objet d'études
plus poussées (voire chapitre V).
I.4.2. Documentation des événements
:
La documentation des événements correspond
à une liste d'événements observés. Cette
documentation comprend des données descriptives sur les processus
déterminants, les dommages constatés, la zone affectée,
les facteurs déclenchant (en particulier les conditions
météorologiques), de même que d'autres données
concernant le déroulement de l'événement.
La description d'un événement peut être
faite avec plus ou moins de détails selon son importance et selon les
dommages causés. Dans chaque cas, la documentation des
événements donne au moins une réponse à la question
«Que s'est-il passé, quand, où et avec quelle
ampleur?».
La documentation détaillée des
événements doit en outre répondre aux questions:
«Comment l'événement en cause s'est-il
déroulé?» et «Pourquoi y a-t-il eu des
dégâts?». Elle joue un grand rôle lors de
phénomènes ayant des effets considérables et devrait
être bien étayée.
I.4.3. Carte des phénomènes :
La carte des phénomènes et le texte qui
l'accompagne recensent les signes et indicateurs observés sur le terrain
et procède à leur interprétation objective. Elle
représente les phénomènes liés à des
processus dangereux et décrit les secteurs exposés
indépendamment du degré de danger.
L'analyse de terrain contribue à l'établissement
de la carte des phénomènes; elle est un complément
important de la documentation de l'événement et sert à la
reconnaissance et à l'estimation des types de danger possibles
(configuration, mécanisme de déclenchement, genre d'effets). Le
relevé de terrain s'appuie d'une part sur l'observation et
l'interprétation des formes du terrain (p.ex. les endroits critiques),
sur les propriétés structurales et géo- mécaniques
des surfaces de discontinuité dans la zone de départ des
processus d'éboulement, et d'autre part sur des informations
relevés sur place , (p.ex. blocs éboulés) résultant
des événements dangereux antérieurs et actuels.
Elle permet aussi de tirer au clair les causes, les
probabilités d'occurrence et d'autres facteurs importants ou
symptômes concomitants relatifs aux événements qui se sont
produits.
Afin de cartographier les dangers de manière
précise , il est essentiel de connaître à fond
l'état passé et actuel du terrain et d'évaluer quelle peut
être son évolution possible. Dans le cas des
phénomènes de falaise (éboulement et écroulement),
la simple représentation des dépôts récents
observés au pied des parois rocheuses ne suffit pas.
L'évaluation des aléas (dangers potentiels) et
des mécanismes de déclenchement possibles dans la zone de
provenance est alors indispensable. Cette étude comprend la
détermination de l'agencement structural des couches et des principales
discontinuités, du degré d'altération de la falaise, ainsi
que du volume probable des compartiments instables et de la taille des blocs.
Ces caractéristiques peuvent être synthétisées dans
une «carte des aléas».
I.4.4. Les effets dommageables possibles :
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