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Exploration d'un passé et d'une culture à  travers l'étude de ça tire sous le sahel de Frédéric Titinga Pacere (étude déconstructive)

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par K. Landry Guy Gabriel YAMEOGO
Université de Ouagadougou - DEA 2008
  

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I.2 Aperçu général de l'oeuvre

Ça tire sous le sahel, sous-titré «Satires nègres », puis « Satires », est un recueil de poèmes. Il comporte en tout six poèmes n'ayant pas la même consistance. Le poème le plus long est « L'appel du tambour ». L'ensemble des techniques qui régissent l'organisation d'un poème en vers réguliers n'a pas été pris en compte par le poète. Ainsi les vers des poèmes dont les mesures sont mêlées selon le caprice du poète sont libres et spasmodiques.

Le livre est une oeuvre de jeunesse au même titre que Refrains sous le sahel. Il est un recueil de satire et on y retrouve évidemment l'esprit de révolte. Une superposition de styles à savoir celui de la parenté à plaisanterie (Rakiré) \u9334(c)é, celui de la circonlocution et enfin celui où l'on fait parler les animaux qui est un style particulier du milieu traditionnel et qui invite à voir les choses sous l'angle imagé. Le poète use aussi de beaucoup de comparaisons qui renforcent la dénonciation.

Signalons que le rakiré ou dakiré est une institution réglant par des lois spéciales, certains domaines des rapports entre conjoints et leur belle - famille, entre familles alliées ou entre ethnies entières. A partir de cette définition nous pouvons distinguer plusieurs types de parentés à plaisanterie. Prosper KOMPAORE en distingue trois :

« 1 - La parenté à plaisanterie basée sur une légende ou un mythe.

Ce type de parenté affecte généralement des ethnies ou des castes différentes.

(3) Le Rakiré est une forme satirique courante dans la culture des sociétés africaines que le poète utilise beaucoup dans ses écrits sous qu'elle ne ôte le style de son caractère acéré.

2 - La parenté à plaisanterie basée sur l'histoire ou des récits à caractère historique ; elle affecte généralement des ethnies ou des castes différentes situées dans des villages différents.

3 - La parenté à plaisanterie basée sur des relations d'alliance ; ce type de parenté le plus courant, affecte des villages ou des familles liés par des relations d'alliance. » (4)

Tous ces types de parenté à plaisanterie visent à prévenir les conflits et à promouvoir une coexistence pacifique.

Des injures peuvent être proférées par les individus sans qu'une tension quelconque ne naisse car cela relève toujours des plaisanteries qui alimenteront de simples causeries ou atténueront une douleur (décès par exemple). Ainsi donc ça tire sous le sahel apparaît être une critique plaisante

mais qui se veut conscientisante. André NYAMBA, du département de sociologie, à l'université de Ouagadougou nous dresse un tableau des alliances et des parentés à plaisanterie qui existent entre ethnies (5).

(4) Prosper KOMPAORE, « La parenté à plaisanterie : une catharsis sociale au profit de la paix et de la cohesion au Burkina Faso in les Grandes Conférences du Ministère de la Communication et de la Culture, Ouagadougou, 1999, PP 109 - 110

(5) André NYAMBA, « La problématique des alliances et des parentés à plaisanterie au BF : Histoire, pratique et devenir » in Les Grandes Conférences du Ministère de la Communication et de la Culture, Ouagadougou, 1999, P7

Ethnies concernées

Ethnies Alliées

Bissa

Gourounsi, Yarcé, Samo

Birifor

Lobi, Goin, Dafing

Bwaba

Peulh, Sembla, Dafing

Bobo

Peulh, Sembla, Dafing

Bozo

Dogon

Dafing ou Marka

Peulh, Bobo-Dioula, Bwaba

Dagara

Siamu, Sénoufo, Goin

Djan

Goin

Dogon

Bozo

Fulsé

Gourounsi, Gourmantché, Bissa

Gourounsi

Bissa, Yarcé, Djerma

Gourmantché

Yarcé

Goin

Lobi, Djan, Dagara

Jula

Lobi

Lobi

Jula, Goin, Birifor

Mossi

Samo

Peulh

Bobo, Yarcé, Bambara, Marancé, Dioussambé

Pougouli

Dagara, Peulh, Goin, Bwaba, Turka, Sénoufo

Samo

Mossi, Bissa

Sénoufo

Dagara, Lobi, Djan

Sembla

Toussian, Bobo - Dioula, Bwaba

Siami

Djan, Lobi, Dagara, Pougouli

Toussian

Sembla, Lobi, Dagara

Turka

Peulh, Bwaba

Vigué

Peulh, Bwaba

Winy

Peulh, Bossa, Goin, Logana, Djerma

Yana

Zaoussè, (Diabo)

Par ailleurs, tous les poèmes sont irrigués par des refrains qui véhiculent les messages clés des différents poèmes. Léon YEPRI relèvera leur « retour cyclique » (6) dans son ouvrage.

« L'appel du tambour » est le premier poème du recueil. Il évoque un rituel car chez les moosé avant de commencer quelque chose d'important, il

(6) Léon YEPPRI, Titinga Frédéric PACERE, le Tambour de l'Afrique poétique, l'Harmattan 1999.

faut rassembler les gens et le tambour est utilisé à cet effet.

Le tambour, avec de nombreux autres instruments à corde ou à vent, est un instrument profane de musique. Au rassemblement qui aura lieu, il y aura des archers et leur présence présage une attaque car il y a un problème. A la rencontre toutes les couches socioprofessionnelles, certaines incarnant des vices, seront présentes : ministres, économistes, avocats, magistrats, journalistes, politiciens, dirigeants politiques, militaires, chefs coutumiers, griots, chefs déchus, philosophes, femmes de présidents d'institutions, musulmans, forgerons, tisserands, exilés politiques.

Dans le même poème, la fraternité parentale est constamment exaltée à travers l'élément du refrain :

« Fils de mes Pères »

« Le vouloir - vivre » est un poème où le problème de la différence, de la grandeur mais aussi de la faiblesse est évoqué. Une situation conflictuelle existe non seulement entre deux Peulhs (père et fils) mais aussi entre sédentaires - cultivateurs et nomades - éleveurs. Un Peulh doit être puni parce que :

« Le mil de sa grandeur

Ne saurait avoir pour destin

La langue d'une vache »

Le père ne voulant pas mourir veut livrer son fils à la colère du Naaba :

« Naaba

Naaba

Sambo et moi

Nous sommes tous des Peulhs !

Nous ne sommes pas des frères !:

C'est moi qui ai mis Sambo au monde

Mais,

Naaba,

Naaba,

Avouons,

Que Sambo aussi

N'est pas de ce siècle ! »

Signalons que le texte poétique réécrit un texte oral populaire. Des rapports textuels identifiables existent entre l'ordre de l'oral et celui du scriptural. Une étude d'intertextualité peut être faite et témoigner de l'attachement du poète à son milieu culturel qui l'inspire.

« Le concours de danse » s'assimile à une compétition, à une rivalité entre les hommes. Tout le monde est convié à ce concours et chacun danse avec ses moyens. Mais on sombre dans l'arbitraire car il n' y a pas eu de critères objectifs à partir desquels un verdict impartial devait être rendu. Le poète exprime alors sa révolte face à cette injustice sociale. Des personnages acteurs animaux jouent leurs rôles devant un public.

Dans le poème « Devant le juge », le thème abordé est la séparation. Un divorce est demandé au juge parce que chacun des protagonistes s'est rendu coupable d'adultère. Le poème est bâti sur la contrariété car les accusations sont réciproques et se succèdent.

« Voltacidé », le titre du cinquième poème est un mot composé de « volta » (qui vient de la Haute Volta) et de « cidé » (qui signifie tué). Ce mot « Voltacidé » traduit un désastre, lequel désastre compromet l'avenir des futures générations :

« Dans un trou,

Mamadou et Bineta pleurent !

C'est le carnaval des Maudits. »

Dans « Le serpent inaugure son marché », il est question d'une prise de décision qui consiste à créer un autre monde et un autre style plus acéré afin de rendre la dénonciation plus acerbe. La société africaine, dépourvue de ce qui lui était vital, est détruite. Le silence ne peut donc prévaloir après un tel ethnocide. Des souvenirs lourds de tortures subies par le poète et par des semblables seront évoqués dans presque tous ces poèmes, notamment dans Quant s'envolent les grues couronnées et dans Poèmes pour l'Angola.

En définitive tous les poèmes du recueil renferment la même thématique à savoir la décadence des sociétés africaines. Les facteurs et les manifestations de cette décadence apparaissent clairement dans les poèmes qui se complètent merveilleusement. La deuxième partie de notre mémoire sera consacrée à leur identification.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand