2) Le SIGAL comme « marque »
différenciée
Des éléments relatifs à la communication
au niveau intercommunal nous permettent également de s'attarder sur ce
qui tend à quelque peu distinguer cet échelon des communes. Avant
même la naissance légale de cette intercommunalité, il y a
eu un travail en amont, durant l'année 1995, pour travailler à
l'identité qu'aurait celle-ci. Une commission ad-hoc a ainsi
planché sur des projets de dénomination du SIVOM. Il est
intéressant de voir que les partenaires communaux sont ainsi
tombés d'accord pour tenter de différencier le syndicat des
quatre villes en travaillant à des projets d'identité nominale ne
faisant point apparaître explicitement celles-ci. Une première
proposition a ainsi été SIDAL pour syndicat
intercommunal pour le développement de l'aérodrome de
loisirs. Une autre idée, plus originale et d'ailleurs plus
appréciée parmi les élus, était ICARE,
acronyme de Intercommunalité pour le développement de
l'aérodrome de loisirs et la Revalorisation de son environnement.
Nous voyons avec ces deux propositions non retenues qu'il s'agissait alors
de construire une identité laissant à voir les vocations
aéronautique et loisirs de la plateforme et à permettre, selon
les souhaits des élus, une identification du grand public à ce
terrain. Pour le coup, il nous semble préférable de parler de
« l'image sociale » de l'intercommunalité que ces acteurs ont
souhaité former et canaliser.
Dans cette perspective, nous adoptons la définition
proposée par Martina Avanza et Gilles Laferté,
c'est-à-dire que « la construction d'une image sociale n'est bien
que la production de discours et de représentations »26.
Ici, les élus locaux des quatre villes se sont mis d'accord pour mettre
en visibilité les grandes vocations projetées de leur nouveau
territoire, d'où le travail chrono-phage autour d'une
dénomination. A ce sujet, sera finalement adopté SIGAL,
pour syndicat intercommunal pour la gestion de l'aérodrome de
loisirs, le choix étant explicitement fait pour stimuler une
association « champêtre »27avec la cigale.
26 AVANZA M., LAFERTE G., Dépasser la «
construction des identités » ? Identification, image sociale,
appartenance, Genèses, n°61, 2005, pp. 134-152.
27 Terme utilisé par un représentant de l'APCA-LM;
entretien du 11/05/09.
(source : SIGAL)
Si tout un travail de fond, nous l'avons vu, a
été mené afin de trouver une dénomination
jugée la plus optimale en terme de communication et d'identification des
tierces personnes vis-à-vis de cette nouvelle entité
politico-administrative, celui-ci a été accompagné d'une
aussi notable démarche d'imagination, dans le sens de construction d'une
représentation iconographique du syndicat intercommunal,
représentation qui, là-aussi, ne laisse guère de place
à des dispositifs susceptibles de rappeler l'existence des villes de
Bondues, Wambrechies, Marcq-en Baroeul et Marquette-lez-Lille.
Par contre, les références construites en amont
sont bel et bien là, avec la manche à air et le papillon,
toujours, selon nous, dans cette optique (en l'occurrence
délibérée de la part des élus municipaux) de
construction d'une image spécifique de l'intercommunalité.
Cette entreprise de démarcation du SIGAL
vis-à-vis des communes nous paraît encore plus évidente si
nous nous attardons quelque peu sur la communication effective
opérée par les fonctionnaires du SIVOM. Rappelons ici qu'il y a
un agent permanent chargé de mission en communication depuis 2001. Cette
personne est chargée de faire la promotion des évènements
organisés par le SIGAL. Cette communication
différenciée des mairies passe par plusieurs canaux et
médias. Par exemple, un site a été mis en place dans le
but d'y présenter l'actualité des projets définis au
niveau intercommunal et de mettre en lumière les différents
moyens de contacter les fonctionnaires intercommunaux. La communication passe
également par la réalisation de plaquettes informatives
spécifiques pour le SIGAL, au sein desquelles la
marque intercommunale est mise en avant par rapport aux
représentations des quatre municipalités. En outre, les
fonctionnaires de l'intercommunalité ont noué des relations
propres avec les journalistes de la presse quotidienne régionale, comme
l'indique une des deux permanentes interrogée :
« Les journalistes ont les invite aux comités
syndicaux, à chaque conseil ils sont invités et puis après
on communique pendant les manifestations en fait et là c'est plus
ponctuel là on les appelle on fait une petite conférence de
presse. En général pour notre meeting on essaie de communiquer
pas mal dessus. Bon après ça dépend aussi des
évènements, ils nous appellent aussi parfois. Ils nous avaient
appelé au moment du début des travaux parce qu'on les connait.
Ceux qui font la presse locale (sourire), on les connait donc on
les appelle et voilà, quand on a besoin ou eux ont
besoin de communiquer sur quelque chose. »28
Parallèlement à cela, un travail de terrain est
mené par ces agents pour diffuser les affiches et plaquettes
informatives auprès des offices de tourisme de la métropole
lilloise.
Daniel Gaxie a montré29 que, comparativement
à d'autres collectivités locales, les intercommunalités
semblent peu communiquer. Sur ce point, notre cas nous permet ici de nuancer
cette idée. Ceci dit, il s'agit peut-être plus d'une exception que
d'une nouvelle tendance profonde.
Si nous avons insisté sur les indices susceptibles d
'envisager d'un certain processus d'autonomisation et de démarcation du
SIGAL, c'est paradoxalement pour constater que ceux-ci nous semblent
bien peu faire le contrepoids vis-à-vis des éléments nous
permettant de soutenir que l'échelon intercommunal est pour le moins
neutralisé par les communes, notamment par les majorités
municipales. D'ailleurs, il est notable de souligner que ce qui a pu nous
permettre de voir des signes d'autonomie intercommunale ont été
définis par les élus délégués des quatre
villes.
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