Il n'existe pas de définition consensuelle reconnue du
concept de pauvreté en dépit d'une abondante littérature
sur le sujet. Qu'il s'agisse des courants économistes, des approches
sociales, culturelles ou anthropologiques, ou encore du point de vue des
institutions internationales, la pauvreté n'est jamais définie
par ellemême, mais en fonction d'autres concepts comme ceux du
bien-être, de besoins essentiels, de l'exclusion sociale, ~
A défaut de trouver une définition de la
pauvreté elle-même, beaucoup d'auteurs l'appréhendent
à partir de ses victimes. Ainsi, « peuvent être
considérés comme pauvres les individus ou les familles dont les
ressources (matérielles, culturelles et sociales) sont si faibles qu'ils
sont exclus des modes de vie minimaux acceptables dans l'Etat membre dans
lequel ils vivent » (A. BEITONE et al, 2002).
La diversité des références dans la
définition de la pauvreté amène à en distinguer
trois types : la pauvreté absolue, la pauvreté relative et
l'ultra pauvreté.
disposer d'un revenu inférieur à un minimum
conventionnel en deçà duquel l'existence biologique est
menacée. Ce seuil est déterminé à partir d'un
panier de consommation minimal exprimé en unité physique dont on
calcule la valeur monétaire (PNUD, 1998).
· La pauvreté relative : être
pauvre au sens de la pauvreté relative, c'est se trouver en
deçà d'un seuil fixé en fonction du revenu moyen
médian de la population à laquelle on appartient. La
pauvreté est alors appréhendée comme un niveau de
ressource trop faible entraînant l'exclusion de l'individu ou du
ménage des modes de vie minimaux permettant une participation à
la vie sociale (A. BEITONE et al, 2002).
· L'extrême pauvreté : un
ménage se trouve en situation d'ultra pauvreté lorsqu'il n'est
pas en mesure de satisfaire à 80% des besoins calorifiques minimaux
définis par l'OMS et la FAO, et ce même lorsqu'il consacre 80% de
ses revenus à l'achat de produits alimentaires (PNUD,
1998.).
Dans le but d'appréhender la pauvreté et de la
mesurer sur toutes ses dimensions et aussi d'apprécier sa dynamique, des
outils ont été forgés. Au nombre de ceux-ci le seuil,
l'incidence et la profondeur de la pauvreté.
Le seuil de pauvretéIl indique
le niveau en deçà duquel les ressources économiques ne
permettent
pas de satisfaire les besoins minimaux en termes
d'alimentation. Il existe trois méthodes pour mesurer la pauvreté
alimentaire. Les pays en développement qui ont défini des seuils
de pauvreté nationaux utilisent généralement pour cela la
méthode de la mesure alimentaire de la pauvreté.
La méthode de la ration alimentaire consiste à
calculer le coüt d'un budget alimentaire permettant d'acheter des
éléments nutritifs en quantité tout juste suffisante. Si
l'on part de l'hypothèse que le coût des nutriments essentiels
représente le tiers (1/3) de la consommation totale d'un ménage,
le seuil de pauvreté sera fixé à trois fois le niveau du
coût des nutriments (PNUD, 1998).
Au Burkina Faso, le seuil de pauvreté a
été établi à 82.672FCFA par adulte et par an selon
la dernière EBCVM, notamment celle de 2003.
L'incidence de pauvreté
Elle est aussi appelée taux de pauvreté. C'est
une estimation de la proportion des personnes vivant en deçà du
seuil de pauvreté. C'est ainsi que l'on peut dire que, selon l'EBCVM de
2003, l'incidence de pauvreté au Burkina Faso est de 46,4%, ce qui
signifie que 46,4% de la population burkinabé ont moins de 82.672FCFA/an
(INSD, 2003 b).
L'acuité ou profondeur de la
pauvreté
C'est le revenu à ajouter au pauvre moyen pour qu'il
se présente au seuil de la pauvreté. Ce revenu manquant est
généralement rapporté à l'indicateur du seuil de
pauvreté pour l'exprimer en proportion. Ainsi, on peut dire que la
profondeur de la pauvreté au Burkina Faso est de 15,6%
(INSD, 2003b). On l'appelle aussi intensité ou
acuité de la pauvreté.
En plus du fait que l'incidence de la pauvreté est
plus importante en milieu rural, la pauvreté rurale semble se
singulariser par rapport à celle urbaine. En effet, selon le forum
européen sur la coopération sur le développement
rural8, la pauvreté rurale comprend les revenus bas, un
accès inéquitable aux biens de production, des connaissances
insuffisantes en matière d'hygiène et de nutrition, une
dégradation des ressources naturelles ainsi que
vulnérabilité et faible pouvoir politique. Pour notre part, la
pauvreté rurale traduit la situation de dénuement dans laquelle
se trouvent les populations rurales comprenant le bas revenu, l'accès
très limité aux services sociaux de base, ainsi que leur
vulnérabilité socio-économique.
Paupérisation
M. GRAWITZ (1994) définit la
paupérisation comme un processus d'appauvrissement et appelle à
distinguer la paupérisation absolue qui est un abaissement du revenu et
la paupérisation relative d'après laquelle les travailleurs ne
participent pas au progrès économique proportionnellement
à leur travail et à leur
8 Le courrier ACP-UE, n°194 septembre-octobre
2002, Développement rural. Réduction de la pauvreté
rurale : quelles solutions ? pp68-69
nombre. Nous entendons ici par paupérisation, celle
absolue telle que définie par GRAWITZ, autrement dit,
une dégradation continue des conditions d'existence, un appauvrissement
matériel et moral et une augmentation de la
vulnérabilité.
La vulnérabilité
Selon le PNUD, ce terme renvoie à
deux réalités : vis-à-vis de l'intérieur, il
représente le manque de moyen de défense face aux chocs, aux
tensions et aux risques et vis-à-vis du pauvre lui-même,
intérieurement, cette fragilité représente l'absence de
possibilité de faire face à des crises sans dommages
dévastateurs. Pour R. CHAMBERS (1990), la
vulnérabilité correspond à l'incapacité à
faire face aux imprévus, telles que les obligations sociales (dots,
mariages et funérailles), les catastrophes, l'incapacité
physique, les dépenses improductives et l'exploitation. Pour le cas du
Burkina Faso, l'institution qui s'occupe des études sur la
pauvreté (INSD) perçoit la vulnérabilité comme une
notion intimement liée à la cause de la pauvreté. Elle
traduit la non faculté d'un individu ou d'un groupe social à
faire face - à résister - à la survenance d'un
événement générateur de pauvreté, en
l'occurrence la cause. Les causes ordinaires et régulières,
celles que l'on vit au quotidien, ne sont pas toutes à considérer
d'emblée dans le cadre de l'analyse de la vulnérabilité.
Les causes à considérer à ce titre (chocs ou risques) sont
celles qui, par essence, sont ou deviennent une raison majeure
d'appauvrissement accru. En général, de par sa survenance
insolite, elle induit une grande incertitude dans la maîtrise de la
situation jusque-là vécue et également une
célérité dans la détérioration des
conditions de vie et du bien être. (INSD, 2003 c,
p.84).
Développement (humain) durable
La commission mondiale sur l'environnement et le
développement (commission Brundtland), qui consacra la naissance du
concept en 1987, le définit comme un développement qui
répond aux besoins du présent sans compromettre la
capacité des générations futures à répondre
aux leurs. Deux concepts sont inhérents à cette notion : le
concept de besoins et plus particulièrement des besoins essentiels des
plus démunis à qui il convient d'accorder la plus grande
priorité et l'idée de limitation que l'état de nos
techniques et de notre organisation sociale impose sur la capacité
de l'environnement à répondre aux besoins
actuels et à venir (Rapport Brundtland). Vingt-sept (27) principes ont
été reconnus dans la déclaration de RIO sur
l'environnement adoptée en juin 1992 au Sommet de la terre. Ces
principes servent à « guider les actions, les politiques, les
lois et les règlements permettant d'atteindre les trois (3) objectifs
fondamentaux du développement durable, c'est-à-dire maintenir
l'intégrité de l'environnement et l'utilisation durable des
espèces et des écosystèmes, améliorer
l'équité sociale et améliorer l'efficacité
économique » (
www.menv.gouv.qc.ca). Le
concept de développement durable (ou soutenable) a été
institué en opposition au développent
éphémère qui utilise les ressources jusqu'à leur
épuisement.
Le vocabulaire de la forêt définit le
développement durable comme une approche globale de gestion des
ressources naturelles dont le but est de satisfaire les besoins et les
aspirations de l'être humain en veillant à la conservation des
ressources énergétiques, au maintien de la biodiversité et
à la minimisation des effets nuisibles sur l'air, l'eau et le sol et ce,
tant pour le bien-être des générations actuelles que
futures.
Le concept fait actuellement florès dans la
littérature des institutions internationales de développement. Le
défi se résume à comment répondre aux besoins
actuels sans limiter la capacité des générations futures
à satisfaire leurs propres besoins ? Le développement durable
vise l'équité entre les générations et
l'efficacité économique.
Le développement humain durable c'est toute forme de
développement qui a l'homme comme objectif principal mais aussi toute
recherche d'amélioration progressive et durable de la condition de vie
humaine surtout dans les milieux de vie les plus défavorisés
(SANOU, 2001). Tout en souscrivant à cette
dernière conception dans le présent travail, nous entendons par
développement durable une amélioration qualitative des conditions
de vie des populations rurales, une amélioration s'inscrivant dans la
durée et se caractérisant par une augmentation des ressources
matérielles et financières au moyen de stratégies et de
moyens pérennes qui resteront efficaces pour les
générations futures.
Le développement rural est un concept en vogue dans
les projets de développement et dans le lexique des différentes
ONG intervenant dans le monde rural. Il vise à permettre à la
collectivité d'atteindre une viabilité à long terme.
Ainsi, par développement rural, nous entendons toute forme d'action
visant à sortir le
monde rural ou paysan du cercle vicieux de la pauvreté
dans lequel il est maintenu, à réduire sa
vulnérabilité et à créer des conditions de vie
décentes.
Sécurité alimentaire
Le concept à sa naissance en 1974 signifiait le fait
de « disposer à chaque instant d'un niveau adéquat de
produits de base pour satisfaire la progression de la consommation et
atténuer les fluctuations de la production et des prix » (
www.fao.org). Le terme
est ainsi défini parce que le rapport final de la conférence sur
l'alimentation où l'expression a été employée
faisait état d'une augmentation des prix des produits alimentaires et la
résolution était d'encourager l'offre des denrées et de
réguler les stocks. Pour la Banque Mondiale, la sécurité
alimentaire consiste à l'accès à toutes les personnes
à tout moment à suffisamment de nourriture pour mener une vie
active et saine.
Nous nous inscrivons dans cette définition de la FAO
qui, par sécurité alimentaire, entend que la nourriture est
disponible en tout tant, que toutes les personnes ont les moyens d'y
accéder, que d'un point de vue nutritionnel, cette nourriture est
adéquate en terme de quantité et de variété, et
qu'elle est bien acceptée au sein d'une culture donnée.
Ménage agricole
Selon le service des Statistiques Agricoles de la Direction
des Etudes et de la Planification (DEP) du Ministère de
l'agriculture, de l'hydraulique et des ressources halieutiques, le
ménage agricole correspond concrètement au groupe
constitué par l'ensemble des personnes vivant, produisant et consommant
ensemble, qu'elles soient ou non unies par un lien de parenté. Mais ce
concept de "ménage agricole" renvoie scrupuleusement à la
définition synthétique que l'INSD donne au "ménage
ordinaire", à savoir « l'unité socio-économique
de base au sein de laquelle les différents membres sont
apparentés ou non. Ils vivent ensemble dans la même maison ou
concession, mettent en commun leurs ressources et satisfont en commun à
l'essentiel de leurs besoins alimentaires et autres besoins vitaux »
(INSD, 2006, pp.11-12). Une telle unité peut constituer
un ménage agricole (cas de famille
restreinte), elle peut aussi être un sous-multiple du
ménage agricole (cas d'une famille étendue, le ménage
agricole comprenant alors plusieurs ménages démographiques).
Dans le présent travail, nous entendons par
"ménage agricole " (ou ménage tout court), l'ensemble des
individus constituant une unité de production et de consommation.
II.3. Variables et indicateurs
II.3.1. Variables
indépendantes
Comme variables indépendantes, nous retiendrons celles
suivantes susceptibles d'expliquer certains comportements ou variations :
> L'age : l'age du chef de ménage agricole ou
de l'unité de production influe sur les priorités dans la gestion
du revenu de la production
> Le sexe : selon que le chef de ménage est
homme ou femme, la production
varie en quantité ainsi les allocations des
dépenses aux différents postes.
> Le statut social : être aîné
ou cadet (dépendant) et à la tête de l'unité de
production est déterminant dans la gestion du revenu du
coton.
> Le statut matrimonial : selon que l'on est
célibataire, monogame ou polygame, la problématique de la
sécurité alimentaire se pose différemment ainsi que la
superficie de l'exploitation.
> Le nombre de dépendants : cette variable
permet de saisir le nombre de personnes à la charge du chef de
ménage, ce qui est déterminant dans l'accès aux services
sociaux de base et à la sécurité alimentaire.
> Le nombre d'actifs : cette variable
détermine la quantité produite ainsi que la superficie
exploitée et témoigne aussi des relations intra familiale en
cours dans le ménage.
> Le niveau d'instruction : être
alphabétisé, analphabète ou scolarisé
détermine la réceptivité aux innovations, au suivi des
prescriptions dans l'utilisation des intrants et le choix du coton produit.