Le coton constitue aujourd'hui la première culture de
rente du département de Diabo quelques dix (10) ans seulement
après sa vulgarisation en tant que culture commerciale.
V.1. Historique
L'historique de la production cotonnière dans le
département de Diabo s'inscrit dans celui global du Burkina Faso
dépeint par A. SCHWARTZ (1993a)12. Alors,
dans la région de l'Est dont relève le département, le
coton est antérieur à la loi SARRAULT et au programme de
promotion du monde rural (création des ORD, 1966 pour celui de l'Est)
initié aux lendemains des indépendances par le jeune Etat. Avec
pour mission de promouvoir une agriculture moderne en associant
étroitement cultures vivrières et cultures de rente, les ORD
constituaient des espaces de promotion et d'encadrement de la production
cotonnière. Ainsi, le coton s'est toujours produit dans la région
de l'Est et dans le département de Diabo même si l'ampleur et la
portée économique n'ont jamais revêtu les dimensions
actuelles. Pour ce qui est du département de Diabo, les années 90
constituent un tournant décisif vers la situation actuelle.
Jusqu'en 1997, la production cotonnière dans le
département de Diabo demeurait une activité marginale ;
c'étaient de simples petits lopins de terrains qui étaient
exploités à des fins purement domestiques notamment pour le
filage13 par les vielles femmes. Ces fils étaient
utilisés soit à la maison pour coudre ou raccommoder les vieux
habits et les calebasses brisées, soit confiés à un
spécialiste local pour le tissage, ou encore simplement vendus sur le
marché. Les bandes tissées, teintes ou non, se retrouvaient en
partie sur la place du marché pour les besoins de sacrifices
12 Voir Introduction.
13 Le filage est une activité exclusivement
féminine alors que le tissage est le domaine réservé aux
hommes.
ou autres rituels, l'autre grande partie confiée aux
tisserands pour la confection de pagnes et d'habits. Ces pagnes tissés
traditionnellement sont aujourd'hui encore prisés surtout par les
femmes. Les hommes qui les affectionnent aujourd'hui sont pour la plupart des
hommes de tradition, dont les chefs traditionnels qui se font toujours
vénérer sous ces accoutrements traditionnels. Sur les
marchés des villages, le coton ne se rencontrait qu'en infime
quantité se vendant, non pas au kilogramme, mais par poignée. Par
ailleurs, le coton offrait une potentialité alimentaire bien
négligeable. Les grains de coton artisanalement égrené
servaient de semence pour la campagne prochaine mais pouvaient aussi être
utilisés dans la préparation d'un plat local : le
gaonré. La proportion des grains était du quart (1/4)
par rapport à la quantité de haricot à laquelle il est
combiné pour la recette. Au regard donc de sa marginalité
économique et de sa faible marge alimentaire, la production
cotonnière n'était que le fait des femmes qui la
réalisaient à côté de leur lopin de gombo en culture
annuelle ou à l'abri d'un couvert végétal en culture
pluriannuelle pour leur besoin de filage pendant la saison sèche. La
culture pluriannuelle étant rendue possible par les
caractéristiques même de l'espèce Gossypium
Arboretum qui, avec sa taille imposante et un fort branchage, pouvait
subsister et rester productive pendant trois (3) à quatre (4) campagnes
agricoles. Au tournant des années 1997, cette culture va connaître
un nouvel élan qui va la propulser à la tête de toutes les
autres productions de rente du département.
V.1.2. A partir de 1997
C'est en 1997, le 07 juillet que le premier ATC est
arrivé dans le département de Diabo, un agent travaillant pour le
compte de la SOFITEX. Sa mission était de promouvoir la culture du coton
dans cette zone non productrice, du moins marginalement, en assurant
l'accompagnement technique et l'approvisionnement en intrants agricoles et
l'écoulement de la production. Cette mission s'inscrivait dans le cadre
du "plan d'actions pour la relance de la production cotonnière de
1995/96 à 2000/2001" initié par la SOFITEX et ses partenaires. Ce
programme de relance intervenait en réponse aux conséquences de
l'effondrement des cours mondiaux du coton en 1993. Cette crise a
particulièrement déstabilisé la filière coton du
Burkina Faso au plan financier et au plan de la production qui s'est
écroulée en 1993/94 à un moment où, par la
conjoncture de deux événements, les filières coton de la
zone du
FCFA retrouvaient l'équilibre et la
compétitivité sur le marché mondial. En effet, la
dévaluation du FCFA intervenue en janvier 1994 et le relèvement
des cours du coton sur le marché international ont bouleversé les
données du secteur coton en le faisant passer de secteur
structurellement déficitaire en un secteur susceptible de
générer une bonne croissance dans de bonnes conditions de
rentabilité. Ironie du sort, cet environnement favorable intervient
à un moment où le pays enregistrait son mauvais record de
production de coton graine, soit 116598 tonnes contre 163301 tonnes la campagne
précédente, c'est-à-dire 1992/93 (Plan d'actions pour la
relance de la production cotonnière de 1995/96 à 2000/2001,
annexe1). Dès lors, il est évident qu'il était de «
l'intérêt national que la récolte du coton graine
connaisse un essor important en volume et en quantité afin que le
Burkina, à l'instar de la majorité des pays africains de la zone
franc, puisse tirer profit du contexte économique
particulièrement favorable au coton » (Plan d'actions pour la
relance de la production cotonnière de 1995/96 à 2000/2001,
p.3)
Ainsi, l'Etat burkinabè, à travers le MARA, le
CNRST et le CRPA, s'est engagé aux côtés de la SOFITEX
appuyée par la CNCA, le Fonds de Développement et la CFD, pour
définir des axes d'intervention dans le but de tirer profit de cet
environnement plus que jamais faste. A l'issue d'un examen des origines de la
crise que traverse la filière coton, un certain nombre de pistes ont
été dégagées au nombre desquelles l'institution du
GPC comme niveau d'intervention en lieu et place du GV comme mesure
d'assainissement de la gestion des crédits, l'intensification de la
production dans les zones traditionnelles, et enfin l'extension de la culture
à de nouvelles zones de production potentielle. Et c'est suivant les
recommandations de cette nouvelle mesure que les provinces de l'Est du pays (la
région de l'Est) dont la province du Gourma et partant, le
département de Diabo ont été reconnues zones à
potentialités de production. Voilà pourquoi l'année 1995
peut être considérée comme l'année d'entrée
officielle du département dans la production cotonnière.
Dès lors, le coton devenait une activité économique. Du
fait de sa facilité d'écoulement, le coton a vite conquis les
espaces diabolais plaçant le département aux avant-postes des
grands producteurs de la province dès les premières heures de son
introduction. Déclassant les anciennes cultures de rente tels le soja,
le haricot et les arachides contrariées par l'incertitude du
marché, les difficultés de transport et de conservation, le coton
s'est imposé incontestablement comme la première culture de rente
du
département. Lors de sa visite au chef lieu du
département en 1995, le Président du Faso lui-même n'a pas
manqué de présenter l'extension de la production
cotonnière comme une opportunité de sortie de pauvreté
pour les pays et les inviter à s'y investir. Le tableau de l'annexe 7
montre l'évolution de la production cotonnière du
département depuis 1997. Lors de la campagne 2005/2006, sur l'aire
départementale, 62 GPC ont investi 2 500 ha de terrain qui ont produit 2
253 tonnes de coton soit un rendement moyen d'environ 900 kg/ha (Rapport du CC
du département). Ainsi, le plan d'actions pour la relance de la
production cotonnière de 1995/96 à 2000/2001 a consacré la
promotion du coton dans le département de Diabo en tant que culture de
rente, une production qui ne tarderait pas à faire ses preuves en tant
que facteur de mobilisation de ressources dans ce milieu rural.