A. L'abandon de la polygamie par les populations de
Nlong
Pour l'Eglise catholique, la polygamie constituait un frein
à la conversion. Le prélat avait toujours appuyé
l'idée de Monseigneur F.X. Vogt qui considérait la polygamie
comme « un fléau social » qu'il fallait combattre. Le fait
d'imposer la monogamie aux chrétiens supposait qu'on n'adoptait une
coutume occidentale au détriment de celle africaine1. Les
polygames de Nlong faisaient face à trois cas de figure :
- le premier était de contracter un mariage religieux avec
la première épouse puis, en ajouter d'autres selon la coutume
;
- le second était de rester indifférent aux voeux
des missionnaires en conservant toutes les femmes ;
1L.P. Ngongo, Histoire des institutions et des
faits sociaux du Cameroun, Paris, Berger Levrault, 1987, p. 172.
- le troisième consistait à répudier toutes
les femmes en retenant une seule pour un mariage chrétien.
Cette dernière issue était fréquente chez
les populations de Nlong. L'abandon de la polygamie par les populations s'est
fait avec douleur. Le fait d'avoir plusieurs femmes supposait détenir
des biens ; par contre l'abandon des biens voulait dire perdre sa place de
notable dans la société traditionnelle2.
B. Syncrétisme et inculturation à Nlong
L'inculturation est aujourd'hui un mot cher à l'Eglise
catholique. Le mot en fait est un néologisme qui exprime une
réalité qui a toujours préoccupé les africains
depuis l'intrusion du christianisme dans leur société. C'est
pourquoi, elle se comprend mieux par rapport au syncrétisme.
Depuis le concile Vatican II, la langue locale dans l'annonce
de l'évangile en pays jadis qualifiés de mission3 a
été introduite. L'inculturation entend donner une nouvelle
orientation à l'évangélisation dans ces pays là. Le
constat qui se dégage après le concile Vatican II est que l'Homme
de Nlong a toujours été l'Homme du milieu c'est-à-dire, un
homme à mis parcours entre le christianisme et ses rites et traditions
religieuses. Cette attitude n'est rien d'autre que du syncrétisme. La
situation aurait pu être autrement si les missionnaires avaient reconnu
quelques valeurs aux croyances traditionnelles. Aussi parce qu'ils n'ont pas
vite compris que dans chaque rencontre de culture, aucune n'est à
rejeter en bloc. A ce propos Nicolas Ossama relève que :
Les changements entraînés par la conversion des
camerounais de Yaoundé au catholicisme sont dus au fait que cette
conversion a exigé des catholiques camerounais (...) un certain nombre
d'attitudes, des comportements les obligeants à rompre avec des usages
traditionnels en honneur4.
2 P. Laburthe Tolra, Vers la lumière
où le désir d'Ariel à propos des Béti du Cameroun,
sociologie de la conversion, Paris, Karthala, 1999, p. 485.
3 J. Olson, Histoire de l 'Eglise : vingt
siècle et six continents, Yaoundé, CL E, 1972, p. 167.
4 Ossama, p. 162.
Ainsi les pratiques comme la polygamie, le recours aux
voyances, l'utilisation des totems, la croyance aux présages et songes,
la pratique des rites, l'infidélité, le concubinage sexuel
étaient observés même parmi les convertis.
Le processus par lequel la catéchèse s'incarne
dans les différentes cultures était la solution pour
remédier à cette situation. Monseigneur Paul Etoga a joué
un rôle dans ce sens. Il a toujours été souple dans
l'application des préceptes de l'Eglise. L'excommunication d'un
chrétien devait se faire seulement après avoir
épuisé toutes les possibilités. Certaines personnes ont
vite déclaré qu'il était complaisant.
C. t or XiLllp41Xffliil
L'école primaire catholique de Nlong et le juvénat
des Frères du Sacré
coeur ont joué un rôle important dans la formation
intellectuelle et morale des enfants de Nlong
Mt opvolution de lopFFOISLIP riLllfflialEXH41}11
OU
L'école primaire catholique de Nlong préparait les
élèves aux vocations si
bien que les candidats qui arrivaient au cours moyen II
étaient soit conduits au noviciat pour devenir Frère ou au
séminaire pour devenir prêtre, soit au juvénat pour
continuer leurs études.
En 1969, la section des filles ferma ses portes5.
Seule l'école primaire catholique St. Pierre et Paul ci-après
continua à fonctionner.
5 Entretien avec Joseph Ebode.
Photo N°8 : Ecole primaire catholique de
Nlong
Source : Cliché J. H. Ngah Ekani, Nlong
le 6 Décembre 2007.
Cette période correspond à la construction de
l'école primaire publique à Nlong. Le fonctionnement de cette
école a eu pour conséquences de réduire les effectifs de
l'école primaire catholique6 et il devenait impérieux
pour cette dernière d'appliquer les enseignements des programmes
officiels. Cette situation n'avait pas été acceptée de
gaîté de coeur par les catholiques. N. Ossama qui cite Monseigneur
Vogt déclare :
Que nous ayons dans nos écoles quelques livres des
écoles du gouvernement, j'en conviens, il le faut. Mais n'oublions pas
que ce n'est pas ce qu'il faut à nos enfants chrétiens. Dieu ne
doit pas être systématiquement écarté des
dictées, des leçons, des rédactions dans nos
écoles7.
A coté de l'école primaire catholique de Nlong se
trouvait le juvénat des Frères du Sacré coeur.
6 Entretien avec l'Abbé Théodore
Léandre Nzie.
7 Ossama, pp. 59-60.
2. Le juvénat des Frères du Sacré
coeur
Le juvénat des Frères du Sacré coeur a
été crée à Nlong en 1956. Son
directeur fondateur était le Frère Florent. Il
comprenait les classes de 6e et de 5e. Ceux des
élèves qui voulaient continuer leurs études pouvaient le
faire mais à Makak8. En 1968, le juvénat des
frères du sacré coeur va fermer ces portes par manque
d'élèves. En 1978, un internat est fondé par le
Frère Lucien Belinga. Il est baptisé internat St. Ange de Nlong
et revêt un aspect moderne comme le montre la photo ci-après :
Photo N°9 : Internat St. Ange de Nlong.
Source : Cliché J. H. Ngah Ekani, Nlong
le 6 Décembre 2007.
Le but de l'internat était d'encadrer intellectuellement
et spirituellement les enfants qui y étaient inscrits9.
8 Le juvénat de Makak des Frères du
Sacré coeur allait jusqu'en classe de 3e.
9 Entretien avec le Frère Jean Marie.
D. L'action sanitaire de la mission
L'action sanitaire de la mission catholique de Nlong a
été perturbée durant l'épiscopat de Monseigneur
Paul Etoga. Son dispensaire fonctionnait avec l'aide de la fondation Ad Lucem.
Il était dirigé par les Soeurs du très Saint sauveur. Les
Soeurs menaient une activité remarquable. Parfois certaines maladies ne
pouvaient pas être soignées par les Soeurs puisque le dispensaire
ne disposait pas de tous les appareils. Dans ce cas, elles transportaient le
malade à l'hôpital central de Yaoundé où il
était soigné. Ceux qui étaient hospitalisés
bénéficiaient gratuitement d'un suivi des Soeurs. En cas de
décès, le corps était transporté au village du
défunt et la famille était exemptée des frais de
transport. Les femmes suivies par les Soeurs pendant la grossesse accouchaient
gratuitement à Nlong10. Et, si l'une d'entre elles n'avait
pas la layette, les Soeurs lui donnaient quelques brassières et couches
de bébé11. Ces soins donnaient à Nlong une
réputation presque nationale puisque certaines personnes quittaient de
Yaoundé et Douala pour s'y faire soigner12.
Après 1956, le dispensaire de Nlong subit les
conséquences des positions politiques du prélat d'une part et
d'autre part les conséquences des rivalités entre Monseigneur
Réné Graffin et lui. En effet, l'archevêque avait
répandu la nouvelle selon laquelle Monseigneur Paul Etoga était
contre les français13. Ce qui lui mettait à dos tous
les français, y compris le clergé de la mission catholique de
Nlong.
Aussi, lors des élections législatives de
Décembre 1956 au Cameroun, Mgr. Paul Etoga apporta son soutien à
André Marie Mbida14 au détriment de L.P. Aujoulat.
Cela est indirectement l'une des raisons de la défaite de ce dernier.
Ces situations auront pour conséquences la réduction des
subventions
10 M.J.G. Owona « la mission catholique de Nlong
1923-1966 : origine et évolution », p. 94.
11 Entretien avec Brigitte Ngah.
12 Entretien avec Marc Ekani.
13 E. Abessolo, «L'épiscopat de
monseigneur Paul Etoga», p. 31.
14 Ossama, p. 133.
accordées au dispensaire de Nlong par la fondation Ad
Lucem15. Ainsi, le manque de médicaments sera à
l'origine de la perte progressive de l'efficacité et de la
renommée du dispensaire de Nlong16 ci-après :
Photo N°10 : Dispensaire
réhabilité de la paroisse de Nlong.
Source : Cliché J. H. Ngah Ekani, N long
le 7 Décembre 2007.
En dehors des domaines scolaire et sanitaire, d'autres domaines
à l'instar de l'économie ont connu des mutations durant
l'épiscopat de Mgr. Paul Etoga.
II. SUR LE PLAN ECONOMIQUE
L'économie est définie comme étant
l'ensemble des activités d'une collectivité humaine relative
à la production, la distribution et la consommation des
richesses17. Chez les populations de Nlong, la division du travail
se faisait par sexe et par tranche d'âge. Les travaux difficiles
étaient réservés aux hommes
15 Entretien avec l'Abbé Théodore
Léandre Nzie.
16 Les soeurs du très Saint sauveur sont
parties de N long en 1990. Le dispensaire est resté longtemps
fermé. Aujourd'hui, il est géré par un particulier.
17 Le Petit Larousse Illustré, Paris,
Larousse, 1992, p. 360.
et les moins pénibles aux femmes. L'agriculture
était la principale activité économique. Les missionnaires
s'étaient donc atteler à organiser cette branche
d'activité en demandant aux agriculteurs de produire d'autres cultures
autres que les cultures vivrières.
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