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Approche comparative de la conception des droits de l'homme dans la philosophe africaine et dans la philosophie politique contemporaine en occident

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par Julien Rajaoson
Sciences Po Grenoble - Master 2008
  

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1°) La justice chez Rawls

L'originalité de la thèse de Rawls concernant sa Théorie de la justice117(*), c'est qu'elle a fourni une tentative de réponse possible au défi représenté par le pluralisme grandissant des sociétés civiles dans les régimes démocratiques. Dès lors, son souci consistera à établir un consensus politique de base qui assure des libertés égales à tous les citoyens sans considération pour leurs origines culturelles, ni de leurs convictions religieuses, ni de leurs projets de vie individuelle.

Rawls décrit la société comme étant constitué de différents individus occupant des positions particulières en vue d'un avantage mutuel, mais en arrière plan de cette société se situe l'économie de marché qui donne un sens au réseau social de redistribution des biens marchands et non-marchands. Cette société pouvant être le théâtre de conflits d'intérêts, Rawls veut donc trouver les principes qui permettent l'arbitrage entre les revendications concurrentes légitimes des acteurs sociaux. Ces principes sont ceux de la justice sociale dont la compréhension correspond à la notion classique de justice distributive. L'idée centrale de Rawls est que tous les biens sociaux premiers à savoir les droits, libertés, revenu, richesse, respect de soi-même, c'est-à-dire, « tout ce qu'un être rationnel désirera quels que soient ses autres désirs »118(*), doivent être distribués de façon égalitaire sauf si une distribution inégale de ces biens devait bénéficier aux plus défavorisés. « L'injustice alors est simplement constituée par les inégalités qui ne bénéficient pas à tous »119(*). Selon lui, un égalitarisme strict étouffera la liberté, telle est son intuition et la raison pour laquelle le renoncement au communisme est justifié.

La justice pour Rawls n'est pas une valeur parmi d'autres mais elle est le canon par lequel sont évaluées toutes les valeurs. En somme, elle est un étalon servant à réconcilier des valeurs conflictuelles. C'est en ce sens que la théorie de la justice est déontologique : Rawls établit la primauté du juste sur toutes les conceptions particulières du Bien. Autrement dit, c'est parce que le sens de la justice ne peut plus être déduit d'un contenu préétabli, et ce, en raison du pluralisme caractérisant les sociétés démocratiques, qu'il est nécessaire de substituer à la conception substantielle de la justice une conception procédurale. Celle-ci dans sa forme parfaite est rare comme toutes choses égales par ailleurs, et c'est un des points sur lequel Nozick est en désaccord. L'idée de cette justice procédurale est que le respect des procédures garanti l'équité.

Si la thèse de Rawls consiste à affirmer que la justice sociale doit reposer sur un modèle procédural, il nous reste à démontrer que la justice elle-même est indispensable et possible dans une économie de marché qui produit son lot d'inégalités, et partant, elle devient intuitivement nécessaire au regard du contexte social dans lequel elle prend forme afin de corriger ces inégalités. Rawls précise qu'il y a des circonstances de la justice120(*), et il les présente sous deux formes : objectives (territoire géographique limité, rareté relative des ressources naturelles, etc.) et subjectives (les individus ont des projets de vie différents). Si ces circonstances viennent à rendre nécessaire la justice en tant que canon à partir duquel arbitrer les conflits d'intérêts, il faut néanmoins qu'elle soit possible. Or, pour Rawls elle est possible car tous les membres de la société civile sont selon lui reconnus comme étant raisonnables et rationnels, ce qui est pour Rawls une double faculté morale des citoyens : d'une part, ils sont capables de développer un sens de la justice comme terme équitable de la cohésion sociale, d'autre part, ils sont en mesure de développer une conception originale et personnelle du Bien. Cette conception étant déterminée par le projet rationnel de vie que les individus forment grâce à leurs facultés de jugement et de délibération. Nous devons remarquer que le domaine rationnel et le champ du raisonnable sont deux idées distinctes, c'est-à-dire que l'on ne peut faire dériver l'une de l'autre, tout en étant complémentaires dans le sens où l'un ne peut exister sans l'autre.

Les débats sur la conception de la justice doivent se déployer sur un arrière fond commun sur lequel tout le monde s'accorde à dire qu'une société démocratique est juste lorsque l'on « ne fait aucune distinction arbitraire entre les personnes dans la fixation des droits et des devoirs de base et quand les règles déterminent un équilibre adéquat entre des revendications concurrentes à l'égard des avantages de la vie sociale »121(*). Pour y parvenir, il reprend à son compte la théorie du contrat qu'il porte à « un plus haut niveau d'abstraction » il en résulte son idée de position originelle (paragraphe 4 et chapitre 3) dans laquelle les acteurs sociaux sont sous le voile d'ignorance (paragraphe 24).

- La position originelle est un cadre fictif où les individus se trouvent dans une situation lors de laquelle leurs différences sociales sont éliminées afin de définir un cadre empirique acceptable pour tous.

- Le voile d'ignorance c'est le retrait de toute information susceptible d'améliorer le sort des individus. Plongés dans ce voile d'ignorance, les individus peuvent être convaincus par la même argumentation générale sur les principes de justice et ce, dans le but de permettre une hiérarchisation des revendications.

Ces deux expériences de pensées doivent conduire à un état d'esprit où la pertinence de la justice procédurale ne doit faire aucun doute pour les différents acteurs. Dans cette situation initiale, les parties prenantes doivent choisir les principes qui détermineront la distribution des biens sociaux premiers en étant soumis à des conditions strictes. En somme, selon Rawls les principes de justice choisis seront équitables car ils auront été choisis dans une situation qui est elle-même équitable. Autrement dit, cette situation initiale hypothétique est un test d'équité nous permettant de nous représenter l'égalité et la liberté des êtres humains en tant que personnes morales au sens kantien du terme. La fiction mis en place par Rawls a un caractère exclusivement heuristique dans la mesure où c'est sur cette base intellectuelle que la justice procédurale peut être conçue.

La position originelle ne décrit pas un contenu mais un cadre théorique, elle correspond à une forme de justice procédurale pure122(*). Les différents acteurs ne créent pas les principes de justice ex nihilo cependant ils font un choix parmi diverses possibilités qui sont acceptables dans le cadre de la culture démocratique123(*). Dès lors, selon Rawls, il sera envisageable pour les différents acteurs de s'accorder sur deux principes : (1) le « principe d'égale liberté » réglant la distribution des droits civiques et politiques. Ce premier principe est égalitaire en tant qu'aucune liberté ne peut être limitée. (2) Le principe régissant l'organisation socio-économique pose l'idée selon laquelle des inégalités sont préférables à une répartition égalitaire de certains avantages économiques et sociaux issus de la coopération sociale. Ce second principe est lui-même constitué de deux sous-principes, l'égalité des chances comme l'accès aux fonctions ouvert à tous, le principe de différence qui est un autre principe de maximisation.

Rawls ne réfute pas le système capitaliste en le diabolisant ou blâmant moralement les inégalités qu'il produit. Sa conviction est qu'il existe un point où la lutte contre les inégalités perd son sens, car l'injustice n'est liée d'après lui qu'à « des inégalités qui ne bénéficient pas à tous »124(*).

* 117 John Rawls, Théorie de la justice, éd, Point Seuil, Paris, 1997

* 118 John Rawls, op. Cit, p. 122 au paragraphe 15

* 119 John Rawls, op. Cit, p. 93 au paragraphe 11

* 120 John Rawls, ibid., au paragraphe 22

* 121 John Rawls, op. cit, p. 31

* 122 John Rawls, ibid, paragraphe 14

* 123 John Rawls, ibid, paragraphe 21

* 124 John Rawls, ibid, paragraphe 11

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius