Le traitement médiatique de l'anorexie mentale, entre presse d'information générale et presse magazine de santé( Télécharger le fichier original )par Audrey Arnoult - Institut d'Etudes Politiques de Lyon 2006 |
2. Le Monde : une performance peu détailléea) Quelques indices quant aux pratiques anorexiquesLe Monde mentionne peu tout ce qui à trait à la performance de l'actant sujet, aux pratiques que l'anorexique met en place pour atteindre son objectif. Un seul article fait référence à l'engagement dans la prise en main, en ces termes « elle décide de ne plus avoir faim » et « de ne manger que le minimum »518(*). De façon implicite, le journal suggère que l'anorexie de l'adolescente a commencé par un régime. Le terme « régimes » apparaît dans un autre article, où ils sont qualifiés de « draconiens »519(*) cependant, ils sont imposés par la discipline qu'exige la danse classique et ne résultent pas d'un choix volontaire520(*). Ce ne sont pas directement les pratiques anorexiques que le journal évoque dans ce récit mais la difficulté des conditions de vie imposées à Séverine. Elle doit se plier à « la discipline de fer de la danse classique » et faire « des heures de barre par jour ». L'intensité de l'activité sportive, souvent associée à la restriction alimentaire, n'est pas une pratique que met en place la « fillette » mais qui lui est imposée, comme une contrainte extérieure. Nous sommes donc face à un cas particulier qui ne correspond pas vraiment à la performance de l'anorexique telle que nous l'avons définie au début de cette partie. Le Monde détaille peu la phase du maintien de l'engagement et la phase du maintien de l'engagement malgré les alertes et la surveillance. Cependant, l'étude des articles nous a permis de trouver quelques indications. L'objet de l'actant sujet est de « maigrir »521(*). Sa performance consiste à « vomir »522(*), à réduire son alimentation à des « quarts ou [des] cinquièmes de biscuits »523(*) ou encore se dépenser « avec frénésie »524(*) est un « combat »525(*), « une lutte quotidienne »526(*). Ces deux termes sous-entendent que la réalisation de la performance est difficile mais aussi l'anorexique est confrontée à des anti-sujets que Le Monde désigne dans un autre article de la façon suivante : « lutter avec toute la famille et les médecins »527(*). La famille est souvent le premier anti-sujet qui s'oppose à la réalisation du programme narratif de l'anorexique. Les médecins apparaissent ensuite, au moment où débute le « circuit de professionnels ». C'est là que l'étiquette d'anorexique commence à s'imposer, l'adolescente doit alors lutter pour rejeter cette étiquette tout en continuant à réaliser sa performance. Le quotidien occulte ces détails et se contente de mentionner les anti-sujets. Enfin, nous avons relevé un détail qui n'apparaît dans aucun autre discours. Le journal nous raconte que c'est un « moniteur »528(*) de kayak qui a alerté les parents d'Anne, une adolescente anorexique. C'est donc la figure de l'alerteur qui apparaît, celui qui détecte la maladie. Ici, il n'appartient pas à l'entourage ce qui nous rappelle que bien souvent ce ne sont pas les parents qui s'aperçoivent de l'anorexie de leur fille. * 518 Le Monde, 4 février 1994, p. 3. * 519 Le Monde, 25 juillet 1992, p. 9. * 520 Nous avons déjà évoque cet article dans lequel Séverine, douze ans, devient anorexique suite aux exigences maternelles et la pratique de la danse classique. * 521 Le Monde, 4 février 1994, p. 3. * 522 Idem. * 523 Le Monde, 2 avril 1998, p. 30. * 524 Le Monde, 2 avril 1998, p. 30. * 525 Le Monde, 4 février 1994, p. 3. * 526 Le Monde, 25 avril 2005, p. 12. * 527 Le Monde, 4 février 1994, p. 3. * 528 Le Monde, 2 avril 1998, p. 30. |
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