Le traitement médiatique de l'anorexie mentale, entre presse d'information générale et presse magazine de santé( Télécharger le fichier original )par Audrey Arnoult - Institut d'Etudes Politiques de Lyon 2006 |
c) L'anorexique n'est pas toujours une adolescenteLe journal a recours à différents termes pour désigner les anorexiques. La plupart du temps c'est une « adolescente »298(*), « une jeune fille »299(*) comme Vanessa qui vient témoigner dans une émission télévisée. Cependant, Libération précise que la maladie peut également toucher des « jeunes adultes »300(*). Dans l'un des récits, l'anorexique prend un visage masculin. Le quotidien nous fait part de la sortie d'un livre écrit par un jeune homme, anorexique à l'adolescence. L'article révèle déjà en lui-même que les garçons peuvent être concernés par cette maladie. Le récit le confirme en précisant que « la communauté de l'ana » est une « société secrète » qui compte « des jeunes filles et quelques jeunes hommes ». Nous pouvons penser que le qualificatif de « jeune » est employé au même titre que celui d' « adolescent » et que le terme « jeune homme » renvoie à un adolescent. Un autre récit301(*) nous révèle que l'anorexique peut être une femme adulte. Le journal consacre un article à un restaurant allemand dédié aux anorexiques et aux boulimiques, dont la patronne de 33 ans est « elle-même anorexique ». Il est intéressant de noter que Libération mentionne une « Miss Anorexie » dans le premier article de notre corpus302(*). Il est difficile de savoir si cette désignation résulte d'une confusion entre anorexie et maigreur ou s'il s'agit réellement d'un mannequin anorexique. En effet, le mot « anorexie » ne figure pas dans le corps de l'article, par contre nous y trouvons plusieurs termes appartenant au champ lexical de la maigreur tels que « si maigres » à deux reprises, « maigreur » et « maigres ». Cependant, certains mannequins américains sont effectivement connus pour leur anorexie, comme le rappelle l'un des discours de L'Humanité, ce qui ne permet pas de trancher. Libération s'intéresse peu à l'anorexie comme l'indique le rubricage qu'il adopte. En effet, il se contente de qualifier l'anorexie de maladie et nous fournit peu de données médicales. En outre, celles dont nous disposons sont peu fiables. Par exemple, le pourcentage qu'il nous donne sur la proportion des adolescents affectés par la maladie n'évolue pas malgré les années. Certains propos sont erronés comme l'indication qui concerne l'origine sociale des anorexiques. La spécificité des discours du journal réside dans la qualification de l'actant sujet qui peut être tantôt une adolescente, un adolescent ou encore une adulte. Enfin, nous n'avons trouvé qu'un indice concernant la personnalité de l'anorexique, rapporté par un expert, qui souligne que l'« adolescente prend le pouvoir dans sa famille et impose ses lois »303(*), autrement dit qu'elle est tyrannique, un terme que nous trouvons dans la littérature scientifique mais auquel ne se réduit pas la personnalité d'une anorexique. * 298 Libération, 5 novembre 2003, p. 31. * 299 Libération, 8 mai 2000, p. 30. * 300 Libération, 9 avril 2002, p. 42. * 301 Libération, « A Berlin, le couvert est mis pour les sans-appétit ; restau. Unique en Europe, le Sehnsucht est dédié aux anorexiques », 3 février 2005, p. 27. * 302 Libération, 23 mars 2000, p. 12. * 303 Libération, 5 novembre 2003, p. 31. |
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