CHAPITRE 4
METHODOLOGIE ET DONNEES
D'ANALYSE
4-1- Modélisation du
TCR et de la fonction des parts de marché
4-1-1- Modélisation du
taux de change réel et détermination du degré de
mésalignement
Le taux de change réel utilisé dans le cadre de
cette étude est défini comme étant le prix relatif des
biens échangeables par rapport aux non échangeables (PE
/ PN). La dérivation théorique du TCR n'est pas
très opérationnelle. La difficulté principale
réside dans la manière d'obtenir le prix des non
échangeables. Les biens non échangeables constituent un large
groupe hétérogène de biens de production et de
consommation, ou des services qui tendent à être substituables
à plusieurs biens échangeables dans la production, la
consommation, ou qui ont des composantes associées aux biens
échangeables respectivement.
Comme proxy pour le prix des non échangeables, nous
avons utilisé le déflateur du PIB. En supposant que les prix des
biens échangeables évoluent en général en accord
avec les prix étrangers, alors le taux de change réel
opérationnel devient le taux de change nominal corrigé par le
rapport de la moyenne pondérée des prix des importations et des
exportations sur l'indice des prix intérieurs appropriés (le
déflateur du PIB). Comme Baye et Khan (2008) cette relation du TCR peut
s'écrire de la façon suivante :
Où :
TCN= taux de change nominal
=prix internationaux des exportations
=prix internationaux des importations
=indice des prix intérieurs des exportations
=indice des prix intérieurs des importations
Déflateur du PIB
Les variations du taux de change réel sont
capturées à la fois par les facteurs structurels qui
comprennent : l'aide extérieure, la consommation publique et les
politiques commerciales ; En plus des facteurs de court terme qui sont
constitués du crédit intérieur à l'économie
et les politiques fiscales et monétaires.
Les composantes retenues dans la modélisation du TCR
sont les suivantes :
- La consommation publique en bien échangeable et non
échangeable (CP)
Le TCR est affecté par la consommation publique (CP).
Mais ceci dépend de la distribution des dépenses gouvernementales
entre les échangeables et les non échangeables. Si les
dépenses gouvernementales sur les biens non échangeables sont
supérieures à celles sur les biens échangeables (comme
c'est souvent le cas), cela pourrait conduire à une appréciation
du TCR puisque les prix des non échangeables auraient tendance à
augmenter.
-L'ouverture de l'économie (OE)
La variable OE représente la libéralisation du
commerce ou encore l'ouverture de l'économie. Le consensus
général est qu'elle se caractérise par la réduction
ou l'élimination des taxes sur les exportations et sur les tarifs
d'importation qui mènent à une augmentation du volume du
commerce. Une élimination des tarifs sur les importations par exemple,
permet aux importateurs d'acheter plus de devises étrangères sans
augmenter le niveau de leurs dépenses totales. L'augmentation de la
demande de devises étrangères qui en résulte sous un
régime de taux de change flexible, cause une hausse
(dépréciation) du TCR. Le TCR augmente aussi sous un
régime de taux de change fixe, mais provient du fait que la contraction
de la masse monétaire intérieure, cause une baisse du niveau
général des prix d'une part. D'autre part, une réduction
ou élimination des droits de douanes à l'exportation
réduit les dépenses requises pour une quantité
d'exportation donnée. Les exportations deviennent tellement plus
attrayantes que leur courbe d'offre se déplace vers la droite. Par
conséquent, le TCR s'apprécie. Sous un régime de taux de
change fixe, la conversion d'une grande quantité de devises en monnaie
nationale cause une expansion de la masse monétaire. Le niveau des prix
augmente et le TCR baisse (s'apprécie). Les tarifs sur les importations
et les taxes sur les exportations n'ont de l'importance que pour une politique
commerciale implicite, mais la politique commerciale implicite a
également été importante pour le Cameroun et le Nigeria.
Elle inclut l'usage des contrôles de change, des quotas et des licences
d'importation. Nous utilisons comme proxy de OE, la somme des exportations et
des importations comme ratio du PIB. De cette manière, les politiques
commerciales implicites et explicites sont prises en compte (Elbadawi et Soto,
1997).
- Les termes de l'échange extérieur (TE)
L'effet du TE sur le TCR opère à travers les
variations des prix des importations et des exportations. Si les prix mondiaux
des exportations augmentent (c'est-à-dire, les termes de
l'échange s'améliorent), toutes choses égales par
ailleurs, l'offre de devises étrangères augmente. Sous un
régime de taux de change flottant, la courbe de l'offre des devises se
déplace vers la droite menant à une appréciation du TCR.
Dans un régime de taux de change fixe, l'augmentation des devises
étrangères mène à une expansion de la masse
monétaire et une augmentation du niveau général des prix,
avec pour résultat une appréciation du TCR d'une part. Un
changement des prix des importations d'autre part, peut entraîner la
demande de devise à augmenter ou à diminuer selon les
élasticités de la demande. Par conséquent, le TCR peut se
déprécier ou s'apprécier.
La relation entre le TCR et TE dépend de l'importance
des effets de revenu et de substitution. Si l'effet revenu est dominant, une
amélioration de TE se traduit par une augmentation de la demande des
biens échangeables et non échangeables. Au fur et à mesure
que les prix des échangeables sont cotés dans le marché
mondial, les prix des non échangeables augmentent, suite à
l'accroissement de la demande. Par conséquent, le TCR s'apprécie.
Si l'effet de substitution est dominant, alors une amélioration de TE
agit en sens inverse en diminuant le coût intérieur des intrants
apportés pour la production de biens non échangeables, et TE
prendra un coefficient positif. Mais habituellement, l'effet revenu d'une
amélioration de TE domine l'effet de substitution (Edwards, 1989).
- La dette extérieure (DE)
De manière générale une augmentation du
stock de la dette de long terme cause une appréciation du TCR et une
diminution présente un effet opposé. En particulier,
l'augmentation du ratio de la dette extérieure sur le PIB peut conduire
à une appréciation du taux de change réel. Cet afflux de
devises étrangères incombe surtout au gouvernement plutôt
qu'au secteur privé et est donc plus susceptible d'être
dépensé sur les biens non échangeables. Les
dépenses sur les biens non échangeables (agricoles et non
agricoles) conduisent invariablement à une augmentation relative des
prix de ces biens et une baisse du taux de change réel.
- Le taux de change nominal (TCN)
Une augmentation (ou une diminution) du TCN mène
à une hausse (ou baisse) du TCR. L'aptitude des variations du TCN
d'affecter le TCR dépend de la mesure dans laquelle les autres
politiques macroéconomiques sont compatibles avec l'objectif du
changement du taux de change nominal. Ces politiques compatibles pourraient
inclure l'ancrage de l'inflation (c'est-à-dire une stabilisation des
prix intérieurs). En particulier, une dépréciation
nominale du taux de change peut ne pas avoir beaucoup d'effets si les
politiques macroéconomiques d'accompagnement sont incohérentes
avec le régime du TCN.
- Le crédit intérieur à l'économie
(CIT)
L'effet du crédit intérieur sur le TCR sera
positif ou négatif selon que le crédit est dépensé
dans le secteur des échangeables ou bien des non échangeables.
- Le progrès technique (PT)
Le progrès technique (PT) accroît la
productivité, cause la baisse des prix des biens échangeables et
peut apprécier le TCR. Cette appréciation est atteinte en rendant
les exportations plus compétitives à cause de leur prix
relativement bas et de l'amélioration de la qualité. Ce
mécanisme a été dénommé " l'effet de
Ricardo-Balassa ". D'après Edwards (1989), Ghura et Grennes (1994),
l'effet du progrès technique est capturé par la croissance du PIB
réel. Le progrès technique peut aussi augmenter la demande des
non échangeables à travers un effet revenu réel. Le proxy
du (PT) est le taux de croissance du PIB.
-Le flux d'aide extérieure (AID)
Un flux d'aide extérieure (AID) tend à causer
une appréciation du TCR par accroissement du revenu réel et par
conséquent de la demande des biens échangeables et non
échangeables. Etant donné que les prix des importables sont
déterminés sur le marché international, une hausse de la
demande de ces biens n'aura aucun impact sur les prix locaux. Une augmentation
de la demande des non échangeables cependant va entraîner une
augmentation des prix domestiques et ainsi causer une appréciation du
TCR. Il faut également noter que les flux d'aide extérieure
accroissent les ressources intérieures, améliorent la situation
économique globale et le TCR. Le degré d'amélioration
dépend de la manière dont ce surcroît de ressources est
utilisé.
-La dévaluation (DEV)
La dévaluation du franc CFA en 1994 et du Naira en 1992
est prise comme variable muette. Elle nous permet de voir son impact
éventuel sur le taux de change réel. Cette variable prendra la
valeur 0 avant la dévaluation et 1 après.
Le taux de change réel d'équilibre de long
terme (TCRE)
Edwards (1989) définit le TCRE comme le prix relatif
des échangeables sur les non échangeables qui, compte tenu des
valeurs d'équilibre durables et d'autres variables pertinentes
résulte en la réalisation simultanée d'un équilibre
interne (l'économie se trouve sur son sentier de croissance potentielle
ou soutenable) ; d'un équilibre externe (son compte courant est
soutenable à long terme). Sa détermination a été
élaborée par Edwards (1989), Elbadawi (1994), Nyoni (1997), Khan
et Baye (2005). Il convient dans cette analyse de séparer les variables
fondamentales qui sont des variables de long terme, des variables de court
terme qui affectent la structure dynamique du TCR.
A long terme le modèle du TCRE est le
suivant :
(1)
D'après Edwards (1989), la structure dynamique du TCR
est capturée par l'équation suivante :
(2)
Où z est un vecteur de politiques
macroéconomiques non durables qui ont tendance à introduire des
déviations de court terme entre TCR et TCRE. ë compris entre 0 et 1
est le coefficient d'ajustement. L'équation (2) stipule que : une
variation courante du TCR à un instant t est donnée par une
certaine fraction ë du taux de change désiré de la
période, augmenté des politiques macroéconomiques non
soutenables. Si ë=1, cela signifie que la différence entre le TCR
courant et le TCRE provient uniquement des politiques macroéconomiques
non durables de court terme. Cependant si ë=0, cela exprime que le
changement du TCR courant d'une période à l'autre est uniquement
dû aux composantes des politiques macroéconomiques non durables.
Théoriquement, ë est lié à ces 2 extrêmes car
l'ajustement du TCR au TCRE s'avère incomplète en terme de
composante durable d'où le nom de modèle d'ajustement partiel.
(3)
En substituant (3) et (1) dans (2) nous obtenons le
modèle de court terme du TCR suivant :
(4)
Avec , .
Puisque l'équation (1) représente
l'équation de long terme ou encore le taux de change réel
d'équilibre, l'équation (4) peut être défini comme
équation de court terme du TCR car, à court terme le TCR courant
n'est pas nécessairement égal à son niveau de long terme.
Nous estimons cette fonction de court terme et obtenons ainsi l'estimation du
coefficient ë (à partir du coefficient de TCRt-1), nous
pouvons dès lors dériver facilement la fonction de long terme en
divisant simplement les coefficients du coté droit de l'équation
(4) par ë et en omettant la variable retardée du TCR, ce qui nous
donne l'équation (5).
A long terme, . De telle sorte que le modèle de long terme du TCR
s'écrive comme suit :
(5)
Les contreparties de long terme
des estimations des coefficients () dans l'équation (1) sont donc données par.
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