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Les auditeurs de Skyrock face à l'intolérance - Fonctionnement, valeurs et portée du discours de l'émission "Radio libre" dans le traitement des problèmes d'intolérance vécus par ses auditeurs

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par Mathieu Sicard
Université Paris III Sorbonne Nouvelle - DEA - Master 2 recherche 2006
  

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Itinéraire d'une recherche universitaire en entreprise

A la rentrée 2002/03, venant de valider mon Deug d'Administration économique et sociale (AES), j'intègre la deuxième année de Deug Médiation culturelle et communication (MCC) de l'Université d'Avignon et des Pays de Vaucluse (UAPV). Ce cursus prévoit la validation d'un stage.

1 Laurent Gago est ATER à l'Université de Marne la Vallée, UFR Arts et Technologies, enseignant à l'Université Paris 3 - Sorbonne Nouvelle à l'UFR Communication, chercheur au CREDAM, Centre de Recherches sur l'Education aux Médias.

Plus attiré par les médias que la communication d'entreprise, et particulièrement par la radio, j'entame des démarches pour faire quelques recherches au sein d'une station nationale, sans préférence particulière pour l'une d'elle. Si le statut de stagiaire en Deug 2 se prête peu pour la plupart des dirigeants de stations à proposer à un étudiant de travailler sur son antenne, mon réseau de connaissance m'a amené, de façon inattendue, à rencontrer David Roizen, responsable de la communication et des relations institutionnelles de Skyrock.

Les problématiques qui concernent son service s'inscrivent en grande partie dans une stratégie de défense de l'antenne, notamment dans la lutte qui l'oppose au Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA), particulièrement attentif au contenu de l'émission Radio libre, présentée chaque soir de la semaine de 21 heures à minuit par Difool (David Massart, par ailleurs directeur de l'antenne).

La mission que me propose David Roizen est de procéder à une veille de cette émission, en élaborant des piges précises de son contenu s'agissant des interventions des auditeurs au sujet de problèmes qu'ils connaissent, des réactions de l'équipes et des autres auditeurs.

Mon travail a donc été au mois de mai 2003 d'écouter les émissions des mois de janvier et février précédents et d'élaborer un document de travail précisant quelles étaient chacune de ces interventions et de quels effets (réponses) étaient-elles suivies (cf annexe).

Le tableau Excel ainsi obtenu au prix de longues heures d'écoutes attentives est une synthèse de tous les thèmes de la « skysolidarité » pendant cette période. Je le considère alors plus comme une prise de note, assez personnelle au sens où elle appelle beaucoup de souvenirs plus précis dans ma mémoire. Mon intérêt était alors de tenter, grâce à cet outil de référence et de traitement statistique, de présenter les aspects positifs contenus dans l'émission autour de cette thématique de skysolidarité.

Ce travail ne se destinait qu'à être l'aboutissement de mes écoutes dans une perspective de première approche de la recherche af in de compléter de façon aboutie mon rapport de stage. Si mon appréciation de la dimension de solidarité dans l'émission, objet de mes écoutes, m'est apparue comme un aspect positif de l'émission -je ne me suis par ailleurs alors exprimé sur rien d'autre- les outils que j'ai utilisé étaient très personnels et ne relevaient évidemment pas d'une méthodologie universitaire pour un mémoire en sciences de l'information et de la communication (je rappelle en outre que je n'étais alors qu'en seconde année de Deug MCC... sans avoir fait la première année !)

David Roizen ne m'avait pas demandé ce travail, mais il l'a apprécié et l'a largement diffusé comme un outil supplémentaire de promotion de l'émission phare, à une époque où le CSA était déjà vigilant à son égard et où le rapport de Blandine Kriegel allait affecter son appréciation et justifier un peu plus ses mises en garde sur le caractère cru de certains propos tenus dans l'émission.

La station avait tous les droits de disposer de ce travail comme une étude réalisée en interne par un étudiant stagiaire et, à ma connaissance, il a trouvé un certain écho dans le milieu de la radio et une partie du monde politique de la culture comme au cabinet de Jack Lang. Michel Meyer l'a repris dans Paroles d'auditeurs1, reproduisant les dix-huit pages de mon tableau de notes et citant de façon référencée deux pages de mon rapport. Je pense que cette citation est pour beaucoup dans l'admission de ma candidature à l'Université de Paris 3 - Sorbonne Nouvelle à la rentrée 2003. J'ai appris au Salon Radio 2006, en rencontrant Nicolas Becqueret, que le docteur en science de l'information et communication avait aussi fait référence à ce rapport dans sa thèse.

Si la citation de Meyer est flatteuse en recevant mes observations comme seul contre argumentaire cité dans son ouvrage largement à charge contre la tonalité du moment des émissions de libre antenne, Nicolas Becqueret a été largement plus critique sur mon travail. S'il valorise certains aspects de l'antenne, il n'est

1 Parole d'auditeur, Michel Meyer, Paris, Syrtes, 2003, 345 pages.

pas une étude rigoureuse de tous les aspects de la communauté d'auditeurs créée par l'émission. Nicolas Becqueret précise notamment le caractère excluant de cette communauté à l'égard de ceux qui n'en sont pas.

La concision et la visée de mon rapport, nous l'aurons compris, laissait seulement la place à la valorisation de l'émission selon mon appréciation de la solidarité qui figure dans le contrat qui la lie à ses auditeurs. En aucun cas, il ne s'agissait là du résultat de recherches au sens universitaire, ne serait-ce que dans la construction de la réflexion et dans le format de la chose.

La question de l'ambiguïté de la recherche universitaire en entreprise se pose logiquement à moi aujourd'hui, alors que je travaille sur le discours développé dans la skysolidarité pour mon mémoire de Master 2 recherche et que je suis, par ailleurs... salarié par Skyrock !

La station m'emploie en effet depuis un an et demi, à la place des stagiaires successifs qu'elle recrutait jusque-là (dont j'ai donc fait partie en mai 2003), à « piger » les interventions de Radio libre autour de la thématique de la skysolidarité. C'est-à-dire à continuer la prise de note que nous avons précédemment définie selon l'écoute de toutes les émissions depuis la rentrée 2004.

Dans la mesure où cette prise de note n'est que la retranscription du contenu de l'émission et que l'usage qui peut en être fait par la station m'est étranger (ou plutôt que j'y suis étranger), je ne fais pas un cas moral troublant de partager ce travail dans le cadre de mes recherches. Bien au contraire ! Aurais-je pu bénéficier d'un tel corpus dans la seule année de recherche de mon Master 2 ? Certainement pas. C'est parce ce traitement de l'émission est aussi mon activité professionnelle, qui paie mon loyer et me nourrit, que j'ai pu y consacrer le temps que nul n'aurait pu consacrer dans une année universitaire dans le cadre de ses recherches. Cela au bénéfice d'un corpus de référence plus étendu, permettant de dégager des statistiques préalables pour contextualiser l'objet particulier de mes recherches, permettant d'éviter les erreurs d'appréciation liées à la

représentativité des éléments qui seront traités, permettant de dégager des perspectives en respectant leur cadre dans la skysolidarité et sans jamais perdre de vue la part des recherches de mon mémoire dans le tout que forme l'émission.

Et la station met à ma disposition un disque dur qui peut se connecter à mon ordinateur personnel et qui regroupe toutes les émissions de la saison, économisant au chercheur le travail fastidieux d'enregistrement ou de consultation à l'Inathèque de France, et permettant une consultation à courtoisie, à domicile, sans contrainte d'horaires ou de coûts techniques, avec la meilleure flexibilité dans l'organisation des recherches.

David Roizen n'est pour moi pas tout à fait un patron ni tout à fait un ami. Nous entretenons de bonnes relations mais nous nous voyons très peu et s'il voit je crois d'un bon oeil mes recherches sur la matière qui nous lie par contrat de travail, il ne s'intéresse pas à l'avancée de mes travaux ni même à l'intitulé de mes recherches, à leur angle, à ma problématique. Il découvrira mes résultats une fois mon mémoire soutenu et j'accueillerais volontiers ses observations.

Je sais que s'il m'était utile pour ce mémoire d'effectuer par exemple des entretiens, il me faciliterait largement la tâche ; alors que si je lui étais étranger, il me serait ardu, je n'en doute pas, de le rencontrer lui, Difool ou le directeur de la station Pierre Bellanger, ou d'obtenir certaines informations que seule détient la station.

Pour ces raisons, je trouve pertinent et même utile la recherche universitaire en entreprise. J'imagine qu'il doit y avoir des cas de conscience éthiques ou loyaux pour certains chercheurs dans cette situation. J'ai la chance d'en être à l'abri.

Ce sont ces quelques mots avec les interpellations de Jacques Gonnet et d'autres chercheurs qui ont déclenché la maturation du projet de l'écriture de ce mémoire.

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"L'imagination est plus importante que le savoir"   Albert Einstein