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L'engagement francais dans le processus d'internationalisation des droits de l'homme


par Aurelia Kergueno epouse Peuch
Université Pierre Mendes France de Grenoble - DEA "histoire, droit, droits de l'homme" 1996
  

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B-L'acceptation du recours individuel: une nécessité pour l'application internationale de la Convention

L'inefficacité de l'action étatique n'en rendait que plus pressante l'acceptation du droit de requête individuelle.

1-Inefficacité de l'action étatique

En ratifiant la Convention européenne, la France avait du même coup accepté l'application de son article 24, qui prévoit la saisine de la Commission par toute partie contractante, en cas de manquement présumé à ses dispositions par une autre partie contractante.

Entre 1953 et 1981, seules 14 requêtes étatiques avaient été déposées, concernant cinq groupes d'affaires300(*). Pour quatre d'entre eux l'Etat demandeur avait un intérêt direct et politique à voir le problème réglé.

Le système des requêtes étatiques, s'il paraissait en théorie efficace puisqu'il investissait chaque pays d'un rôle de ministère public garant du respect des valeurs fondamentales d'une organisation internationale, s'est avéré très décevant à l'épreuve de la pratique, les Etats ne souhaitant pas risquer de faire aux autres ce qu'ils ne désiraient pas qu'on leur fît.

"Ainsi [l'Etat] se trouve-t-il dans cette situation ambigüe de redresseur de torts qui sait à l'occasion être lui-même l'auteur des torts."301(*)

Comme le soulignait en 1965 le professeur François MONCONDUIT l'action étatique ne peut être considérée comme suffisante pour assurer la protection efficace des droits et des libertés garantis, car toute intervention d'Etat présente l'inconvénient inévitable de politiser le débat. Paralysé par des considérations diplomatiques, les Gouvernements sont mal placés pour apprécier l'importance et la gravité des violations subies par les personnes, surtout si les victimes n'ont pas leur nationalité302(*).

2- La France adhère pleinement aux idéaux de la Convention

Le 2 octobre 1981, André CHANDERNAGOR, Ministre délégué auprès du Ministre des Relations Extérieures, remettait au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe la déclaration suivante303(*):

"Au nom du Gouvernement de la République française, je déclare, conformément à l'article 25 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme [...] reconnaître pour une période de cinq ans à compter de la présente déclaration, la compétence de la Commission européenne des droits de l'homme pour être saisie d'une requête adressée au Secrétariat Général du Conseil de l'Europe par toute personne physique, toute organisation non gouvernementale ou tout groupe de particuliers qui se prétend victime d'une violation, par l'une des Hautes parties contractantes, des droits reconnus dans la Convention[...]"

La France tirait trois catégories d'avantages à agir ainsi304(*).

En premier lieu, elle donnait une portée effective à son engagement en permettant, par la déclaration de l'article 25, que les personnes privées se trouvent hissées au rang de véritables sujets du droit international. Après avoir fait valoir leurs droits devant les tribunaux nationaux, les particuliers, groupes de particuliers ou organisations non gouvernementales, peuvent désormais agir au plan international en saisissant la Commission européenne d'une requête contre l'Etat. Celle-ci cherche à obtenir un règlement amiable entre les parties. En cas d'échec, l'affaire peut-être déférée à la Cour européenne des droits de l'homme, dans les trois mois qui suivent la transmission du rapport de la Commission à l'Etat intéressé et au Comité des Ministres. La Cour peut être saisie par l'Etat, la Commission, et, depuis 1994, par les personnes privées305(*).

En second lieu, elle rompait l'isolement de la France. A l'époque en effet, seules Chypre, l'Espagne, la Grèce, Malte et la Turquie l'accompagnaient dans le refus d'effectuer la déclaration de l'article 25. La reconnaissance du droit de requête individuelle permit à la France de prendre place, à part entière, au sein de la Communauté des libres démocraties d'Europe.

En troisième lieu, l'acceptation du recours individuel rendait probable une évolution des mentalités. Autorités administratives, juges et législateurs devaient se montrer attentif à ne pas commettre d'excès susceptibles d'être condamnés par les autorités de Stasbourg. Les juristes, la doctrine, et même l'opinion publique devaient devenir plus sensibles à la protection européenne des droits de l'homme. Rappelons que la Convention était mal connue en France, même après sa ratification. Dans un article datant de 1977, le président de la Cour d'appel de Paris apportait par exemple une "mise au point' suite à la parution d'une note dans laquelle on lisait que les juridictions françaises ne pouvaient appliquer que les lois françaises et devaient faire abstraction des conventions diplomatiques, même régulièrement ratifiées et publiées au "Journal Officiel"306(*). Le président rappelait non sans ardeur la volonté des Constituants307(*):

"Dans la conjoncture actuelle, la civilisation occidentale doit se résigner à s'organiser ou à disparaître à plus ou moins brève échéance. Il est donc vital d'assurer sur le plan national l'exécution des conventions passées dans le cadre de la Communauté européenne; c'est ce que veut notre Constitution du 4 octobre 1958 [...]."

* 300 Alain PELLET, op.cit., pp.90-91.

* 301 idem, citant Karel VASAK, La Convention européenne des droits de l'homme, p.182.

* 302 Idem., citant François MONCONDUIT, La Commission européenne des droits de l'homme, Sijthoff, Leyde, 1965, p. 181.

* 303 Gérard COHEN-JONATHAN, La reconnaissance par la France du droit de recours individuel devant la Commission européenne des droits de l'homme, in Annuaire français de droit international, 1981, p.271., citant J.O., 14 octobre 1981,p. 2783.

* 304 Alain PELLET, op.cit., p.92.

* 305 Protocole 9, entré en vigueur le 10 octobre 1994. Sur le détail du mécanisme d'application de la Convention, v. notamment AMNESTY INTERNATIONAL, Au-delà de l'Etat, pp. 261 à 266.

* 306 L'auteur de la note recommandait de faire prévaloir les lois internes sur la Convention européenne

* 307 Georges CHEVALLIER, Au sujet de l'application par les juridictions françaises de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, J.C.P., 1977, I-2832.

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