II.5.2 Au niveau grammatical
Les locutions latines se divisent en quatre catégories
grammaticales selon les dictionnaires de langue française, les ouvrages
consultés et les critères de classification établis par
Grevisse et Goosse (2007, p. 196) :
? Les nominales : statu quo
(état actuel des choses), mea culpa (aveu, repentance)...
? Les adjectivales : sine qua non
(indispensable), honoris causa (honorifique)...
? Les adverbiales : in fine
(finalement), ipso facto (ce qui résulte
nécessairement) . . .
? Les locutions phrases : veni,
vidi, vici (je suis venu, j'ai vu et j'ai vaincu), dura lex, sed lex
(la loi est dure, mais c'est la loi)...
Néanmoins, il y a des locutions pouvant appartenir
à plusieurs catégories, selon le contexte de leur utilisation,
comme dans le dictionnaire de l'Académie française pour a
priori (en partant de ce qui est avant, au premier abord) qui est
répertoriée comme adverbe (argumenter a priori),
adjectif (Raisonnement a priori), et nom (formuler un a
priori).
Mais les dictionnaires de langue française divergent
des fois sur la nature grammaticale à attribuer. À titre
d'exemple persona grata, littéralement « personne
bienvenue », est définie comme nom invariable (locution nominale)
dans le Robert et dans le Trésor de la langue française alors que
dans le dictionnaire de l'Académie française et Le Larousse,
c'est une locution adjectivale.
Autre cas, sine die (sans jour fixé) est
répertoriée comme adverbe dans Le Robert. Ce dernier illustre sa
définition par l'exemple « D'un autre côté, un
report sine die risquerait d'encourager... » Un usage semblable
au passage « Les motions (...) tendant au renvoi sine die ou
conditionnel du débat » qu'utilise le Trésor de la
langue française pour montrer à l'inverse l'emploi adjectival.
En analysant les deux exemples, il semblerait que Le Robert
utilise sine die au sens littéral « sans jour
fixé» alors que le Tlfi l'emploie comme synonyme de l'adjectif
« indéfini ». Cela démontre les difficultés
parfois à traduire convenablement les locutions latines dans le contexte
de leur utilisation et par extension de déterminer à quelle
catégorie grammaticale elles appartiennent.
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Éléments théoriques
II.6 Classification des locutions latines
L'un des problèmes récurrents en
phraséologie réside dans la classification des unités
phraséologiques. À titre d'exemple, Pecman (2004) dénombre
onze (11) différentes typologies se basant entre autres sur la nature
grammaticale (nominale, adjectivale...), la structure syntaxique, le contenu
sémantique, l'étymologie...
En ce qui concerne cette recherche, nous avons opté pour
des classifications :
II.6.1 Selon le domaine étymologique
Pour Pecman (2004, p. 141), cette classification des
locutions consiste à : « Définir l'origine de celles-ci,
qu'il s'agisse de leur origine historique, géographique ou chronologique
». Il cite d'autres chercheurs optant pour cette typologie, à
l'instar de Jernej et Mel'èuk, avant de donner lui-même un exemple
d'un classement étymologique selon le domaine d'origine : historique,
mythologique, antique, religieux, littéraire et populaire.
Dans ce mémoire, en tenant compte de la dimension
historique du latin, la catégorisation se fera aussi selon
l'étymologie tout en adaptant les domaines cités par Pecman aux
locutions latines en s'inspirant notamment d'une typologie établie par
Derradj (1999) pour les emprunts de la langue française à l'arabe
algérien dans laquelle il distingue trois types d'emprunts selon la
dimension religieuse, le domaine politico-institutionnel et enfin ceux qui
relèvent de la culture et de l'art.
À cet effet, en se basant sur la partie
consacrée précédemment aux différents latins dans
la langue française, ainsi que sur les dictionnaires consultés et
les ouvrages sur le latin, les locutions latines sont réparties dans
quatre grandes classes, chacune de ces classes rassemblant plusieurs
domaines.
a) Classe I (Droit, géopolitique, sciences,
économie, administration...)
Elle comporte les unités phraséologiques
latines issues des domaines : juridique, économique,
géopolitique, administratif, sciences naturelles et techniques... Le
choix de rassembler ces éléments sous la même classe se
justifie par la difficulté dans certains cas de déterminer avec
exactitude le domaine auquel une locution appartient.
À ce titre par exemple, statu quo
(état actuel des choses) se réfère au Droit et
à la politique. Parmi les éléments de cette classe :
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Éléments théoriques
· De facto : «
Droit. De fait, en se fondant sur le fait accompli » (AF).
· In vivo : « Du
latin scientifique, dans ce qui est vivant » (AF).
· Persona grata : «
Locution du latin diplomatique moderne signifiant «personne
bienvenue» » (Tlfi).
· Homo oeconomicus :
« Le concept d'«homme économique» Homo economicus,
est apparu à la fin du XIXe siècle sous la plume de
critiques des écrits d'économie politique de John Stuart
Mill » (Ricard, 2013, p. 630).
b) Classe II :( philosophie, religion,
littérature, rhétorique, histoire...)
Cette classe réunit les locutions dont les domaines
d'origines ont trait à la mythologie, à la culture et l'art,
à la spiritualité et aux sciences humaines et sociales. Elles
proviennent essentiellement du latin philosophique (scolastique), religieux
(ecclésiastique, mythologique), littéraire ou encore de proverbes
et de la rhétorique. Par exemple :
· A fortiori : «
Expression du latin scolastique, par une raison plus forte »
(AF).
· Ad hominem : «
Locution latine signifiant : à l'homme, ad hominem :
(dirigé) contre l'interlocuteur (...). Terme de l'art
oratoire» (Tlfi).
· Urbi et orbi : «
À la ville et à l'univers. Liturgie catholique.
La bénédiction que le Pape donne à Rome et au monde
entier... » (Le Robert).
· Bis repetita : « bis
repetita placent» « Ceci mérite d'être redit,
répété «aphorisme forgé d'après
un vers de l'Art poétique d'Horace» » (Le
Robert).
c) Classe III : (latin en
général)
Cette classe est réservée aux locutions
répertoriées dans les dictionnaires de langue française
consultés, mais à l'étymologie inconnue. Parmi les
locutions de cette classe :
· Extra muros :
« Locution latine extra muros, proprement : hors des
murs» (AF).
· In fine : «
Du latin in fine : proprement : à la fin» (AF).
· Ex aequo : «
Du latin ex aequo : à égalité»
(AF).
· Stricto sensu :
« Mots latins : au sens strict»
(Le Robert).
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Éléments théoriques
d) Classe IV : (latin de cuisine et locutions non
référencées à l'origine inconnue)
Cette dernière classe comporte d'un côté
les locutions du latin de cuisine ou macaronique, c'est-à-dire celles
créées sous le prisme de l'humour. De l'autre, elle rassemble
toutes les locutions latines non référencées dans les
dictionnaires français et dont l'origine est inconnue. À cette
classe appartiennent, par exemple, les locutions :
? Verbocination latiale : «
«le parler du Latium», latin macaronique de François RABELAIS
dans Pantagruel, livre VI » (Walter 2014, p. 112).
? Homo orientalis : « homme
(homo) oriental (orientalis) » (Biblissima).
II.6.2 Selon leur statut dans les dictionnaires
français
Les locutions latines utilisées en français ne
sont pas toutes référencées dans les dictionnaires de la
langue française. Si pour les proverbes, les citations ou encore les
néologismes cela peut paraître logique étant donné
l'absence, généralement, de ces catégories dans les
dictionnaires, il n'existe pas, en revanche, d'explications pour certaines
locutions dont l'usage en langue française remonte à des
siècles comme pour ad nauseam (jusqu'à la nausée)
(Usito) qui date du XVIIe siècle.
À cet effet, deux groupes de locutions latines se
dégagent. Le premier contient celles référencées
dans au moins l'un des dictionnaires de langue française
consultés à savoir : « Le dictionnaire de l'Académie
française », « Le Robert» (en ligne ou
électronique v2.0) », « Le Trésor de la langue
française informatisé» et enfin « Le Larousse (en
ligne) ». Le second groupe, quant à lui, rassemble les locutions
qui sont absentes de tous les dictionnaires consultés.
Cette classification permet de graduer les usages. En effet,
l'emploi des locutions latines non lexicalisées (rares,
néologismes, proverbes, citations historiques...) serait
réservé à des auteurs jouissant d'une culture
générale assez élevée.
III. Aperçu sur la presse électronique
francophone III.1 Émergence de la presse électronique
La notion de presse électronique renvoie à
toutes les versions numériques de la presse écrite accessibles
sur Internet, et aux sites exclusivement en ligne entièrement
dédiés au traitement de l'actualité et de l'information en
général. L'émergence de ce type de médias
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Éléments théoriques
est favorisée par le développement d'Internet au
début de 1990 et la création du web (la toile) et des navigateurs
comme « Explorer» permettant l'accès à « un
nouvel espace médiatique, un nouvel espace public de diffusion de
l'information, de publication et de communication » (Proulx, 2004, p.
24).
Le « San José Mercury News»
(États-Unis) en mai 1993 est le premier journal de l'histoire à
offrir à ses lecteurs une version électronique. D'abord,
hésitant à proposer leurs contenus gratuitement, les autres
journaux créent progressivement leur support en ligne de peur de perdre
leur lectorat et leur prestige au profit des sites d'informations. Ces versions
internet attirent un public de plus en plus nombreux puisqu'elles permettent
aux lecteurs de feuilleter sur un simple clic les quotidiens, hebdomadaires et
magazines de leurs choix sans contrepartie financière.
Une évolution rapide qui n'est pas sans
conséquence pour la presse écrite traditionnelle laquelle
connaît une chute des ventes, surtout avec l'apparition des Smartphones
et des réseaux sociaux et le rajeunissement des potentiels lecteurs plus
sensibles aux technologies. Le sénateur français D. Assouline
(2014, p. 9) parle même de la : « Descente aux enfers de la
presse papier» pour décrire la domination aujourd'hui des
journaux et des sites d'information numériques. D'ailleurs, certains
prédisent à moyen ou à long terme la disparition de la
presse écrite surtout avec la crise de la Covid19 qui comme l'affirme le
rapport 2020 de l'institut Reuters a : « Accéléré
quasi certainement le passage à un futur 100 % numérique »
(AFP & Szirniks, 2020).
III.2 La presse électronique francophone III.2.1
En Algérie
La presse électronique en Algérie est à
ses débuts exclusivement d'expression française. En effet, c'est
le quotidien « El Watan » qui lance en 1997 le premier support
journalistique numérique dans le pays. Il est rejoint l'année
suivante par les journaux étatiques : « Horizons» et « El
Moudjahid », ainsi que par des titres de presse privés comme «
La Tribune» et « Le Matin» entre autres. La même
année voit aussi la création du premier site d'information
électronique « Algéria Interface» (disparu en 2003).
Dès lors, les journaux et plus particulièrement
les pages d'informations se multiplient en ligne touchant un public de plus en
nombreux, grâce notamment à une couverture internet plus large
dans le pays, mais aussi parce que, comme l'affirme Taiebi Moussaoui (2016)
:
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Éléments théoriques
« La création d'un site d'information demeure
plus facile et permet d'éviter une série de lourdeurs
bureaucratiques ». Toutefois, en 2020, le gouvernement
algérien décide de réglementer l'activité des
médias en ligne (AFP & le Figaro, 2020) en adoptant un décret
imposant aux journaux électroniques d'être hébergés
seulement sur des serveurs locaux.
a) El Watan
Sur sa page, le quotidien « El Watan », fondé
le 08 octobre 1990, se présente comme le : « Premier journal
indépendant du matin, d'expression française, à être
édité en Algérie ». Aussi, comme : « Un
lieu de débat et de réflexion pour les intellectuels
algériens ».
Selon l'outil d'analyse « ALEXA » (Ouazi, 2020),
« El Watan », qui lance sa page internet en 1997, est le quotidien
algérien francophone le plus lu en ligne en 2020.
b) Le Soir D'Algérie
« Le Soir d'Algérie» est l'un des premiers
titres de presse privée à voir le jour en Algérie. Il est
fondé le 03 septembre 1990. À ses débuts, il n'est
disponible que l'après-midi jusqu'au 06 octobre 2001. Date à
laquelle le quotidien commence à paraître le matin.
Selon l'outil d'analyse « ALEXA » (Ouazi, 2020),
« Le Soir d'Algérie », qui crée son site internet en
novembre 1998, est le troisième quotidien algérien francophone le
plus consulté en ligne en 2020.
c) Liberté
« Liberté» est un quotidien algérien
indépendant créé le 27 juin 1992. Sur sa page, il se
présente comme un journal qui : « Défend les principes
de démocratie, de justice et les idéaux de liberté et de
presse ». Sa devise est « Le droit de savoir et le devoir
d'informer».
Selon l'outil d'analyse « ALEXA » (Ouazi, 2020),
« Liberté », qui initie sa version en ligne en 1998, est le
deuxième quotidien algérien francophone le plus lu en ligne en
2020. Le 14 avril 2021, le journal cesse de paraître après 30 ans
d'existence suite à la liquidation de l'entreprise détentrice du
journal.
d) Le Quotidien d'Oran
« Le Quotidien d'Oran » est un journal
algérien créé en 1994. D'abord, réservé
à la région de l'Oranie seulement, il devient national en 1997.
Il est décrit par l'hebdomadaire français d'information Courrier
International (s. d. -b) comme un titre de presse : «
Sérieux,
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Éléments théoriques
surtout lu par les cadres, il rassemble les meilleures
signatures de journalistes et d'intellectuels d'Algérie dans son
édition du jeudi».
Selon l'outil d'analyse « ALEXA » (Ouazi, 2020), Le
Quotidien d'Oran, qui lance sa version en ligne en janvier 2001, est le
quatrième quotidien algérien francophone le plus consulté
en ligne en 2020.
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