III.2.2 En France
Les premières versions numériques des journaux
français sur Internet apparaissent au milieu des années 90. Mais
« plusieurs journaux se disputent la paternité du premier site
sur le web» (Lebert, 1999, p. 64), à savoir : « Le Monde
», « Libération» « l'Humanité » et
« Ouest-France ». Ainsi, en 1994, « Le Monde» propose en
ligne seulement des articles de son mensuel « Le Monde diplomatique
», avant de créer un site en 1996 dédié au journal.
Aussi, « Libération» en 1995, partage en ligne un contenu
réduit de sa version papier.
À l'inverse, dès son lancement en
numérique « en septembre 1996, L'Humanité a
été le premier quotidien français à proposer la
version intégrale du journal sur le web » (Lebert, 1999, p.
65). Par contre, pour l'Institut national de l'audiovisuel (INA) c'est «
Ouest-France» en 1995 (Simon, 2019) qui est le précurseur.
Au début, les titres de presse hexagonaux optent pour
la gratuité de leurs versions en ligne, mais dès 2002 avec «
Le Monde », les journaux français changent de stratégie en
proposant des articles en ligne gratuits, et d'autres payants pour les
abonnées.
a) Le Figaro
« Le Figaro» est fondé le 15 janvier 1826. Au
début simple feuille satirique, il devient quotidien à partir du
16 novembre 1866. Son nom renvoie au personnage du Figaro dans la pièce
de théâtre « Le mariage de Figaro» (1778) oeuvre de
Beaumarchais (1732-1799). D'ailleurs, la devise du journal : « Sans la
liberté de blâmer, il n'est point d'éloge
flatteur» est l'une des répliques du personnage.
Journal dont la ligne éditoriale penche à droite
dans l'échiquier politique hexagonal (Balbir, 2017), « le
Figaro» est le quotidien national français payant le plus lu tous
les supports confondus en 2021 (AFP & Decant, 2021). Il lance sa version
numérique en 1999, proposant un contenu exclusivement gratuit. Mais
à l'instar des autres quotidiens français, le journal lance
à son tour une version payante « Le Figaro Premium» en 2015.
En 2020, il revendique plus de deux-cent-mille (200 000) abonnés
numériques (Debouté, 2020).
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Éléments théoriques
III.2.3 Au Québec
Les trois principaux journaux québécois se
dotent d'une version numérique au milieu des années 1990
(Carbasse, 2009, pp. 65-66). Le premier à le faire est « Le Journal
de Montréal» en 1996, via le portail internet Canoë
(Canadian Online
Explorer). L'année suivante (1997), c'est le quotidien
« Le Devoir» qui propose son contenu en ligne. De son
côté, « La Presse» lance sa version électronique
en 2000.
Au niveau économique, les journaux
québécois n'adoptent pas la même stratégie en ligne.
En effet, si « Le Journal de Montréal» et « La
Presse» sont totalement gratuits (à condition de créer un
compte), d'autres quotidiens en revanche, comme « Le Devoir »,
après quelques articles lus gratuitement, exigent des abonnements
payants pour accéder à la totalité des publications.
À souligner que depuis 2020, les formats numériques
dépassent en nombre de lecteurs les formats papier (Centre
d'études sur les médias, 2021).
a) La Presse
« La Presse» sur sa page internet se présente
comme : « Un média d'information francophone de
référence au Canada » dont la mission est : «
De produire une information de qualité accessible gratuitement au plus
grand nombre ». Fondé en 1884, il est « le plus
ancien quotidien francophone d'Amérique du Nord» (Courrier
International, s. d. -a).
Le journal démarre, comme souligné au-dessus, sa
version en ligne en 2000, sous l'appellation « Cyberpresse
», cette dernière sera abandonnée en 2011, date
à laquelle le journal change de logo et reprend son nom « La
Presse» pour son site web. En 2013, le quotidien lance son application
pour téléphones et tablettes « La Presse+ ».
En 2018, avec « l'adhésion massive à La
Presse+ » (La Presse, 2017), le journal abandonne sa version papier
et opte pour le 100 % numérique gratuit tout en faisant auprès de
ses lecteurs des appels de dons.
III.3 La qualité linguistique comme
stratégie de fidélisation des lecteurs
La numérisation du paysage médiatique a
poussé les journaux traditionnels à adopter plusieurs
stratégies afin de monétiser l'information. Ainsi, alors que
certains titres de presse ont misé sur les dons et/ou la
publicité pour maintenir la gratuité en ligne (les journaux
algériens, La Presse). D'autres (Le Figaro) ont
préféré lancer des versions payantes via divers
abonnements.
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Éléments théoriques
Mais, quelle que soit la stratégie adoptée par
ces journaux, l'objectif est identique, il s'agit de fidéliser le
maximum de lecteurs (Labracherie, 2017) pour attirer d'une part des annonceurs
publicitaires et de l'autre des abonnées pour les versions payantes. Une
quête qui pousse ces médias, à chercher continuellement
à produire du contenu de qualité surtout pour séduire le
lectorat « prémium » (cadres, dirigeants, hauts revenus,
intellectuels...), cible prioritaire des journaux.
En effet, une étude datant de 2015 de l'organisme
français « Audipresse » (aujourd'hui ACPM)
révèle que 98,6 % de cette population lit la presse
écrite, quel que soit le support en Hexagone (ADN, 2015). Une
catégorie de potentiels lecteurs représentant en France pour
l'année 2010 « un pouvoir de consommation de 75 milliards
d'euros annuels » (Larroque, 2010)
Le contenu de qualité se manifeste dans un journal
francophone par une information crédible et pertinente, mais aussi par
l'usage d'un français également considéré de «
qualité ». En effet, des études marketing démontrent
que les consommateurs évaluent positivement ou négativement le
sérieux d'une entreprise, entre autres, par la «
qualité» de la langue employée dans les produits que cette
société propose (Pedraz-Delhaes & Sénécal,
2009).
Pour les journaux, les produits en question sont les articles,
qui de surcroît reposent essentiellement sur un contenu linguistique,
destiné à la consommation des lecteurs. Par conséquent,
l'emploi régulier d'unités phraséologiques latines
contribue à améliorer la perception de ces lecteurs
vis-à-vis du journal et de l'auteur de l'article puisque comme
indiqué précédemment dans la partie consacrée au
latin, l'usage de la langue de Cicéron est synonyme de sérieux et
d'une grande culture. Deux qualités pouvant séduire les
prémiums.
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