La protection sécuritaire des personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays en R.D.C.: cas des camps de déplacés de Lushagala et Bulengo dans la province du Nord-Kivupar Alvine HADJI USSENI Université de Kisangani - Licence 2023 |
§2. Situation sécuritaire déplorable dans les sites des déplacésA. Les Attaques contre les sites des personnes déplacés à l'intérieur de leurs propres pays (déplacés internes) en R.D.CØ Explosions d'obus dans des sites des déplacés autour de Goma et Minova Au Nord-Kivu voisin, au moins cinq roquettes sont tombées, dans la matinée du 3 mai 2024, dans et aux environs de quatre sites de déplacés sur l'axe Goma - Sake, dans les quartiers Mugunga et Lac vert. Au total dix-huit (18) personnes déplacées ont été tuées et trente-deux (32) autres blessées dont vingt-sept (27) grièvement, en majorité des femmes et des enfants, selon le dernier décompte effectué par l'OCHA, relevant que les blessés sont pris en charge dans trois structures de santé de la ville de Goma. Il va sans dire que des nombreux blessés graves occasionnés par cette explosion ont perdu la vie en cours d'acheminement ou au niveau des structures sanitaires de prise en charge. A la suite de ces incidents meurtriers, la quasi-totalité des acteurs humanitaires intervenant dans la zone avaient dû suspendre préventivement leurs activités après cet événement du 3 mai 2024, afin de sécuriser leurs personnels et matériels de travail. Ces incidents ont conduit la Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations-Unies en République démocratique du Congo (RDC), Bintou Keita, à condamner dans les termes les plus forts le bombardement de sites de personnes déplacées à Lac-Vert et Mugunga, à une dizaine de kilomètres de Goma57(*). Les attaques contre les sites de déplacés par le groupes armés, constituent une violation flagrante de leurs obligations, conformément à l'Article 7 (5) de la convention de Kampala, relatives à la Protection et assistance aux personnes déplacées dans les situations de conflit armé. Au regard de cette disposition en matière de la protection et assistance aux personnes déplacées dans les situations de conflit armé, il est interdit aux groupes armés, de58(*) : - Procéder à des déplacements arbitraires ; - Entraver, en quelque circonstance que ce soit, la fourniture de la protection et de l'assistance aux personnes déplacées ; - Nier aux personnes déplacées, le droit de vivre dans des conditions satisfaisantes de dignité, de sécurité, d'assainissement, d'alimentation, d'eau, de santé et d'abri, et de séparer les membres d'une même famille ; Restreindre la liberté de mouvement des personnes déplacées à l'intérieur et à l'extérieur de leurs zones de résidence ; - Recruter, en quelque circonstance que ce soit, des enfants, de leur demander ou de leur permettre de participer aux hostilités ; - Recruter par la force des individus, de se livrer à des actes d'enlèvement, de rapt ou de prise d'otages, d'esclavage sexuel et de trafic d'êtres humains, notamment des femmes et des enfants ; - Empêcher l'assistance humanitaire et l'acheminement des secours, des équipements et du personnel au profit des personnes déplacées ; - Attaquer ou nuire au personnel et au matériel déployés pour l'assistance au profit des personnes déplacées, et de détruire, de confisquer ou de détourner ces matériels ; - Violer le caractère civil et humanitaire des lieux où les personnes déplacées sont accueillies et de s'infiltrer dans ces lieux. Ø Des bombardements ciblant des sites civils à Minova Depuis 2021, la Province du Nord-Kivu, à l'est de la République Démocratique du Congo, connaît un regain des violences entre les forces gouvernementales et les rebelles du M23/RDF. Le HCR évoque la poursuite d'une tendance profondément troublante « de l'utilisation accrue de l'artillerie lourde dans le conflit, avec des rapports de bombardements ciblant des sites civils dont celui à Minova 59(*)». Le bombardement d'un centre commercial le 20 mars 2024 a tué une (1) femme déplacée et blessé au moins trois (3) autres personnes, dont deux (2) enfants. « Les rapports faisant état des bombardements aveugles à Sake et à Goma au cours des dernières semaines, qui ont tué plus de trente (30) personnes et en ont blessé au moins quatre-vingt (80), sont également préoccupants, tout comme la menace d'engins non explosés », a détaillé le porte-parole du HCR60(*). En outre, les partenaires humanitaires ont observé « des incursions systématiques » de groupes armés dans des structures civiles telles que les sites de déplacement, les hôpitaux et les centres de santé61(*). En 2023 par exemple, vingt-cinq (25) écoles ont été occupées par des groupes armés non étatiques dans les seuls territoires de Masisi et de Rutshuru, et dix-sept (17) autres écoles ont été attaquées. En 2024, sept écoles ont été détruites par des bombardements62(*). Hormis les bombardements dans des sites civils des déplacés comme menaces sécuritaires, nous pouvons citer également : Ø Les violences sexuelles63(*) Plus de cinquante mille (50.000) cas de violence sexiste dont la moitié des viols ont été enregistré. Ø Le pillage64(*) Dans ce climat d'insécurité, le pillage des médicaments et du matériel essentiel dans les centres de santé entrave la capacité des humanitaires à soutenir les personnes déplacées, ont alerté les ONG. Ø Les enlèvements, recrutements forcés, mutilations et viols65(*) Le HCR a fait état de l'augmentation du nombreux élevé d'enfants déplacés, avec un grand nombre d'entre eux qui sont non accompagnés. Ces derniers sont aussi exposés à des risques et des violations graves, notamment des enlèvements, des recrutements forcés, des mutilations et des viols. En 2023, dans la seule Province du Nord-Kivu, plus de cinquante mille (50.000) cas de violence sexiste ont été signalés, dont plus de la moitié étaient des viols. Selon le HCR, 90% de ces victimes étaient des femmes et des filles, tandis que 37% étaient des enfants. En somme, la proximité de la ligne de front entre les belligérants à Sake et les sites des déplacés dans la ville de Goma, ainsi que la circulation des armes dans ces sites, compliquent la situation sécuritaire66(*). Le 03 avril 2024, les autorités provinciales ont promis de s'impliquer pour obtenir des différents groupes armés présents à Goma une régulation de la circulation de leurs membres dans la ville dans le but de réduire ces incidents67(*). * 57 BINTOU KEITA, déclaration suite aux bombardements des sites de Lushagala et Bulengo par les terroristes du M23/RDF contre les populations civiles-déplacées internes, 07 mai 2024, disponible sur Radiookapi.net. Consulté le 0- juin 2024. * 58 UA : Convention de l'Union Africaine sur la protection et l'assistante des personnes déplacées en Afrique (CONVENTION DE KAMPALA), adoptée le 22 octobre 2009 et entrée en vigueur en 2012 ; Article 7 (5) * 59 UNHCR : 1,3 million de personnes déplacées par les violences dans l'est de la République Démocratique du Congo ; disponible le 26 mars 2024 sur https://www.unhcr.org. Consulté le 06 juin 2024 * 60 Idem * 61 Idem * 62 Idem * 63 Idem * 64 Idem * 65 Idem * 66 UN News : L'OIM appelle à une action urgente face à la crise humanitaire alarmante dans l'est de la RDC, disponible le 2 juillet 2024 sur https://news.un.org. Consulté le 06 juin 2024. * 67 Idem |
|