VI. PROBLÉMATIQUE :
Ainsi, je viens d'explorer l'interdépendance de
l'humanisation des soins, avec l'empathie des soignants et la résilience
des patients. Il ressort de la vision globale que j'ai de ce triptyque, que
l'empathie occupe la place au centre, et qu'autour d'elle se dresse
l'humanisation et la résilience. Au cours de l'enquête
exploratoire, les infirmières ont mis en exergue de multiples facettes
de l'empathie, que j'ai évoqué en précisant que
finalement, j'avais défini l'empathie par ses actions et
conséquences sans dire véritablement ce qu'elle est. À
cheval entre la capacité, l'aptitude voire la compétence,
l'empathie semble insaisissable, propre à chacun, mouvante,
handicapante, bénéfique... Dès lors, comment l'appliquer,
la préserver, la stabiliser ? Peut-elle se gérer alors qu'elle
est multifactorielle ? L'empathie semble comme une plante, vendue aux
aléas de son environnement pour sa bonne croissance. Elle est comme une
graine qui se développe, si on veut bien lui donner l'espace
nécessaire. Dans ce cas, qu'est-ce qui favorise l'empathie, quel terrain
est propice à sa croissance ? L'empathie soignante est source de sa
propre résilience, puisqu'elle permet d'accepter ses émotions, et
génère la résilience du patient par l'espace et la
reconnaissance qui lui est donné. J'ai évoqué une certaine
relation miroir, qui se forme en ce sens et qui place au coeur le principe de
reconnaissance. En effet, elle révèle une relation d'humain
à humain, favorisée par l'empathie mutuelle. Elle s'extirpe ainsi
de la relation soignant/soigné qui traduit un ascendant de
l'infirmière sur le patient. Les références,
l'enquête et l'analyse ont montré que le patient agit aussi sur
son soignant en influençant la posture que ce dernier va adopter avec
lui. Ceci me rappelle la notion de symétrie dans la communication non
verbale : à savoir qu'il est préférable que le soignant se
mette à la hauteur du patient au lieu que celui-ci reste debout tandis
que le patient est allongé. Cela favorise la communication et la
relation de soin. Et, dans la mesure où l'empathie de
l'infirmière génère celle du patient et vice et versa, que
peut-on dire de la symétrie des affects dans la relation miroir ?
L'empathie semble produire une reconnaissance mutuelle de l'humain, du
semblable, à travers les rôles de patient et soignant. Une
reconnaissance mutuelle de sa propre vulnérabilité. Ce type de
relation met en évidence que le soin est une cocréation,
où le patient n'est pas seulement passif, et l'infirmière n'est
pas seulement active. L'empathie s'instaure alors en baromètre d'une
relation de soin constructive. Ceci interroge des principes éthiques
inhérents aux postures dans le soin. Si l'empathie est une porte ouverte
aux affects, à la faillibilité des émotions, quelle place
a-t-elle dans les considérations éthiques des soignants ?
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