SECTION 2 : LES IMPACTS SOCIAUX DES CONFLITS
LIÉS À LA MOBILITÉ
PASTORALE
Les conflits liés à la mobilité pastorale
ont des impacts sociaux dévastateurs parmi lesquels les violations de
droits humains (Paragraphe I) et la mise en mal de la
sécurité des personnes dans la province et la
désorganisation sociale des pasteurs (Paragraphe
II).
PARAGRAPHE I : LES VIOLATIONS DES DROITS HUMAINS
Les conflits liés à la mobilité pastorale
sont des situations dans lesquelles les violations des droits humains sont
très fréquentes. Dans chaque conflit, des milliers de
48
citoyens sont blessés ou perdent la vie
(A) mais aussi et surtout beaucoup d'autres droits humains
sont mis en mal (B).
A. Les blessures et les pertes en vie humaine
L'interactionnisme stratégique nous conduit à
remarquer que les conflits liés à la mobilité pastorale
sont attisés par les intérêts partisans. En plus, ils sont
également attisés la circulation incontrôlée des
armes et des ressentiments vieux comme le monde dans l'environnement rural. Les
pouvoirs publics semblent incapables face l'escalade de la violence et le pays
continue de payer un lourd tribut en vie humaine.
Selon « Le Répertoire de foyers des conflits, des
violations des droits humains et quelques pistes de solutions
»92 du premier trimestre de l'année 2021, sur les dix
(10) conflits recensés, dans chaque conflit, il y a eu au moins trois
(3) morts et cinq (5) blessés.
Le droit à la vie est un droit fondamental reconnu par
la constitution de la République du Tchad en son article 17 qui dispose
: (1) « La personne humaine est sacrée et inviolable
» ; (2) « Tout individu a droit à la vie, à
l'intégrité de sa personne, à la sécurité,
à la liberté, à la protection de sa vie privée et
ses biens » et les instruments internationaux de droits humains dont
le Tchad fait partie notamment la Déclaration Universelle des Droits de
l'Homme du 10 décembre 1948 qui dit « Toute personne a droit
à la vie ». Ce droit ne peut être assuré que si
l'Etat crée des conditions nécessaires à la garantie de la
sécurité des personnes et garantit le droit à une vie
décente. C'est le sens de l'article 11 aliéna 1 et 2 du pacte
relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.
Ce phénomène est accentué par
l'apparition des nouveaux éleveurs c'est-à-dire les
autorités administratives et militaires propriétaires de
bétail. Ces derniers ne sont pas sur le terrain. Ils ont des bouviers
qui travaillent pour eux, ces bouviers sont souvent choisis parmi les anciens
éleveurs et les fils des éleveurs de la communauté peule
ou haoussa. Ces éleveurs sont armés par ces autorités sous
prétexte de protection. Les bergers sont des « vrais provocateurs
» selon le langage des agriculteurs. Ils font entrer les animaux dans les
champs sciemment car ils savent sur qui ils comptent en cas de conflit. Ces
bouviers ne peuvent pas être attaqués sur le terrain par les
agriculteurs parce qu'ils détiennent une arme de guerre et
92 C'est un document élaboré par le
Délégué Provincial des Droits de l'Homme à
l'attention du Gouverneur de la Province du Mayo-Kebbi Ouest qui
répertorie les conflits et les violations des droits humains et essaye
de proposer des solutions à ces derniers.
49
quand le problème ira un peu plus loin, les patrons
prendront la relève. Ces bouviers n'hésitent même pas
à tirer à bout portant sur les personnes avec lesquels ils sont
en conflit, la plupart succombent de suite des blessures. Comme nous le dit un
agriculteur de Carrière, il est fort probable qu'on t'ôte la vie
dans ton champ pour avoir dit un mot qui ne plait à un bouvier. Qui plus
est, les éleveurs peuls utilisent les flèches trempés dans
les matières toxiques pour tirer sur les ennemis en cas de conflit. Ces
flèches tuent au moindre contact, c'est ce qu'on appelle en droit
l'homicide volontaire. La plus grave des atteintes aux droits humains est
l'homicide volontaire mais lors des conflits liés à la
mobilité pastorale d'autres droits humains sont également
violés.
|