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Chapitre 2 : IMPACT DE LA SURLIQUIDITE SUR
L'INVESTISSEMENT
INTRODUCTION
La surliquidité des banques au Sénégal
est la manifestation du caractère endogène de l'offre de monnaie;
elle est une traduction de l'économie d'endettement qui
se caractérise par:
· .La prédominance du financement indirect
des entreprises: les ménages n'assurent qu'une part faible des
besoins de financement des entreprises qui sont satisfaits au moyen d'emprunt
auprès des banques ou des intermédiaires non bancaires;
· ,.la prépondérance de la monnaie
interne ( qui a pour contrepartie un endettement du secteur
privé ). Gurley et Shaw distinguent la monnaie interne
de la monnaie externe ( qui a pour contrepartie un endettement de l'Etat et de
l'extérieur).
· .la disparition de l'ajustement par les taux:
le taux d'intérêt est déterminé par le
système bancaire et de ce fait , devient peu sensible aux variations de
l'activité économique
· .une analyse en terme de diviseur du
crédit: le système est en banque. les banques sont
structurellement endettées auprès de la banque centrale. C'est le
montant de crédit distribués par les banques qui détermine
celui des réserves que la banque centrale doit provisionner.
En l'absence de marché financier au
Sénégal, le financement est intermédié . Ainsi, le
comportement des banques devrait avoir une incidence sur le comportement
d'investissement du secteur privé. Un financement sain de
l'investissement implique la mobilisation de ressources stables, notamment :
l'épargne des ménages et l'épargne bancaire
assimilée ici aux dépôts à moyen et long terme.
La financement bancaire de l'investissement dans un monde
où l'hypothèse néoclassique de parfaite information est
violée introduit au concept de risque de défaut que la banque
doit gérer de manière à obtenir la confiance des
déposants et assurer la liquidité 'et la rentabilité des
crédits octroyés . Dans cette situation d'asymétrie
d'information, divers travaux relatives au traitement de l'information ont
été menés dont celui de Diamond qui assigne aux banques le
rôle de fournisseur d'information (gestion , surveillance et
résultat de l'investissement) et de liquidité .
A/ Le traitement de l'information.
A la suite des travaux d'Akerlof, la plupart
des modèles développés (Leland and Pyle; Diamond;
Dybvig; etc...) prennent les asymétrie d'information et la
malhonnêteté de certains investisseurs comme la source de la
naissance des intermédiaires financiers.
Ils sont présentés comme des agents ayant pour
fonction de collecter des fonds auprès des agents à
capacités de financement pour ensuite les répartir entre les
agents à besoins de financement.
L'existence des banques s'explique par la
nécessité de gérer deux types d'asymétrie
d'information :
·
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l'asymétrie d'information entre la banque et ses
déposants : l'impossible connaissance de la position et des besoins en
liquidité de chaque individu permet de rendre compte de l'utilité
des contrats de dépôt; mais elle explique aussi
l'instabilité des ressources bancaires.
· l'asymétrie d'information entre les
prêteurs et les emprunteurs, et elle explique l'existence d'une "
institution déléguée" chargée de contrôler le
bien fondée et les résultats de l'allocation des capitaux
prêtés.
Pour Diamond (1984), l'avantage des banques
dans le traitement de l'information ne peut exister que grâce à
une politique jointe d'évaluation (création d'informations) et de
diversification
1/ Le modèle de Diamond.
A l'origine du modèle, on trouve une asymétrie
d'information ex post entre des prêteurs potentiels et l'entrepreneur
à la recherche de capitaux pour investir dans un projet
risqué.
les prêteurs ne peuvent connaître expost le rendement
réel du projet qu'au prix d'un effort d'information coûteux alors
que l'information est gratuite pour l'emprunteur. Or, c'est sur la base de
cette information que l'entrepreneur reversera une partie des profits aux
investisseurs.
Diamond montre que dans une telle situation, le financement
optimale prend la forme d'un prêt à échéance fixe,
accompagné d'une pénalité de défaut, au moins
égale à l'échéance.
Pour être sûr de ne pas être trompé par
l'emprunteur (annonce d'un rendement fictif), les prêteurs se doivent
donc de surveiller la gestion et le résultat de l'investissement.
Ce sont ces coûts de surveillance qui font naître les
intermédiaires financiers bancaires.
Ceux-ci vont comme chez LELAND et PYLE procurer
le financement des projets sous forme de prêts à
pénalités, et en assurer le monitoring.
Mais, ces institutions ne possèdent un avantage
comparatif par rapport à un investisseur particulier (le marché )
que si leur portefeuille d'actifs est diversifié.
Si l'intermédiaire n'a investi que dans un seul projet,
au coût lié à la pénalité anticipée
que lui même est en droit de verser à ses créanciers,
s'ajoute les coûts de surveillance de la banque elle même. De ce
fait, cette solution reste inférieure à la solution de prêt
direct.
Dans ce cas, la diversification de l'actif bancaire sur de
nombreux projets indépendants va permettre de faire tendre la prime de
pénalité de l'intermédiaire vers zéro et cela
minimise la probabilité de faillite.
De plus, le fait de posséder un portefeuille de
prêts diversifiés va permettre d'alléger les coûts de
faillite bancaire supportés par les déposants. En effet, les
déposants, s'ils n'ont plus à s'intéresser aux
entreprises, doivent maintenant surveiller les banques pour éviter
qu'à leur tour elles ne les trompent ou qu'elles ne
prennent des risques inconsidérés.
Le fait que le portefeuille bancaire soit diversifié,
permet aux contrats de dette ( dépôt) entre les
intermédiaires financiers et leurs créanciers de supporter un
risque de défaut inférieur à celui du prêt direct
non diversifié. Plus le nombre de prêts bancaire augmente, et plus
le coût fixe de faillite des emprunteurs ( supporté par chaque
déposant) baisse.
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Le coût de surveillance de la banque (Cs) est alors
assimilé au coût engendré par sa faillite.
Si l'on note par :
S : la somme totale retirée par la banque de ses
investissements;
H : la valeur nominale des
dépôts;
P : la probabilité que les investissements soit telle que
la banque ne rentre pas dans
ses
fonds;
alors,
Cs=P(S-H)
Si les rendements des investissements sont indépendants
(Covariance = 0), alors plus les prêts sont importants et
diversifiés, plus sera petit le risque de faillite, et plus les
coûts de surveillance de la banque seront faible.
Donc les banques possèdent un avantage comparatif en
termes de gestion des prêts qui pousse les individus à les
préférer par rapport à l'investissement direct.
Les investisseurs financiers sont donc nés de la
nécessité d'obtenir et de gérer un certain nombre
d'informations qui ne sont pas connus du marché, ou soit qui font
l'objet de sélection adverse.
L'illiquidité de certains actifs s'explique alors par
le fait que leur transmission fait supporter à l'acheteur tous les
coûts de surveillance déjà mis en place par le vendeur.
On retrouve ici deux idées développées par
AKERLOF, à savoir :
n . tous les actifs sur le marché ne sont pas liquides
du fait d'un manque d'information;
n . une structure centralisée est parfois plus
efficace qu'une structure décentralisée.
L'article de DIAMOND présente une
qualité supplémentaire. Il montre clairement que l'avantage
comparatif des banques vis à vis du marché ne peut exister que
grâce à une politique jointe d'évaluation (de
création d'information ) et de diversification.
La surliquidité des banques primaires au
Sénégal pose fondamentalement la problématique du
financement bancaire de l'investissement. Une réelle politique de
résolution de ce problème passe par l'identification des
déterminants de la surliquidité permettant un meilleur
éclairage de la politique d'action des autorités
monétaires afin de prendre les décisions idoines. Elle sera
complétée par le passage en revue des critères d'octroi
des crédits par les banques ainsi que par l'analyse de la structure
financières des PME/PMI sénégalaises.
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