La protection du droit de manifester dans l'espace publicpar Charles ODIKO LOKANGAKA Université de Kinshasa - Doctorat 2020 |
§4. Les acteurs paraétatiques et interétatiquesCes garanties sont liées à la capacité de réaction de la société elle-même et à l'apparition des autorités administratives indépendantes. A l'origine du pacte social que les individus concluent avec le pouvoir, se trouve en général l'obligation pour l'État de respecter les droits et libertés. Conformément à ce que Locke a avancé, toute attitude contraire ouvre à la société un droit de résistance. Ce principe essentiel qui donne une grande partie de sa valeur au contrat social a été repris, non sans débat, dans la Déclaration des droits de l'homme531(*). Bien que dépourvu de portée en droit positif, cet article et surtout la conscience qu'en ont les populations font que la société est la première à pouvoir se prémunir des atteintes à ses libertés. En effet, la résistance à l'oppression n'implique pas nécessairement l'action violente ; elle passe aussi par des réactions individuelles ou collectives. La résistance a pris ces dernières années la forme des « lanceurs d'alerte » capables de transgresser des obligations de secret ou de discrétion professionnelle afin de faire cesser des agissements faisant peser un risque pour autrui. Comme le corps humain, la société a la faculté de produire ses propres anticorps lorsqu'elle considère que ses libertés sont menacées ou violées. Il s'agit alors de s'opposer aux ingérences du pouvoir en recourant à des ressources qui ont prouvé leur efficacité. Ainsi, la presse est traditionnellement présentée comme un contre-pouvoir capable de faire fléchir des gouvernements. La liberté de manifestation joue, elle aussi, un rôle majeur, comme en témoignent les résultats obtenus, notamment, à la suite des événements du 04 janviers 1959 à Léopoldville et les émeutes de Stanley Ville, à la suite desquelles, le droit de manifester fut consacrée au profit des populations congolaises. De même l'opposition à la remise en cause de l'école libre France, la grève n'est pas non plus dépourvue d'intérêt. En outre et depuis Tocqueville, on sait que la vitalité du tissu associatif est un élément essentiel, favorisant le regroupement des énergies et agissant au quotidien sur le terrain. A ce titre, la commission nationale consultative des droits de l'homme (loi 2007-292 du 5 mars 2007) permet aux associations de bénéficier d'un relais significatif auprès des pouvoirs publics. Elle éclaire, au moins en théorie, le Premier Ministre et les Ministres concernés sur les questions de portée générale intéressant les droits de l'homme et l'action humanitaire. Poussé à son extrémité, le droit de résistance atteint parfois le seuil de la violence. Toute la difficulté est alors de savoir quand se termine l'action légitime et où commence l'action terroriste. La distinction entre la résistance et le terrorisme est sans doute l'une des plus subjectives à opérer, comme la France en a fait la cruelle expérience avec l'apparition de l'OAS durant la guerre d'Algérie. Enfin, la société dispose de la possibilité (formelle ou informelle) d'exprimer son mécontentement par l'intermédiaire de pétitions adressées au pouvoir532(*). Longtemps craint par les autorités qui assimilaient la pétition à un dangereux moyen de pression, ce droit a recouvré une relative vigueur avec la révision constitutionnelle du 28 mars 2003 et plus encore avec celle de 2008 en France. * 531Article 2 de la Déclaration française des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789. * 532 Article 27 de la Constitution du 18 février 2006, Op. cit. |
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