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La MONUSCO dans le résolution des conflits: entre contestation locale et légitimation global


par Bernard POPO-E-POPO
Université Paris 8 Vincennes Saint Denis - Master 2 2020
  

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2. Processus de négociation et de légitimation de la Monusco

Si en 1999 le regard de la population sur la Mission de l'Organisation des Nations-Unies pour la stabilisation en République Démocratique du Congo a été bienveillant jusqu'en 2006 avec l'organisation des premières élections dites démocratiques dans le pays après une longue période de guerres et d'incertitude politique, il n'en est pas pour autant durant la dernière décennie. Confrontée généralement à des contestations manifestes au regard l'instabilité à l'Est de la République Démocratique du Congo, la Monusco a tenté à plusieurs reprises de réaliser sa mission par défit. Parfois imposé par le Conseil de sécurité contre la volonté de la population et parfois des responsables politiques du pays, la Monusco a chaque fois réussi à s'imposer comme acteur majeur dans la résolution des conflits et violences en République Démocratique du Congo.

Depuis 2010 jusqu'en 2020, toutes les résolutions votées par le Conseil de sécurité pour le prolongement du mandat de la Monusco, convergent vers un processus de légitimation de la mission malgré les contestations locales toujours grandissantes. À travers les négociations entre le Conseil de sécurité et l'État congolais, ces résolutions généralement votées à l'unanimité par les membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU et avec le consentement de l'État congolais, sont les premières sources de légitimation globale des opérations de l'ONU en République Démocratique du Congo.

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En effet, les dernières années du Président Joseph Kabila à la tête de la République démocratique du Congo ont été un moment de tension avec la Monusco. Ces années ont été un véritable moment de frustration pour la communauté internationale, y compris en particulier pour la Mission de l'Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo. A l'occasion du 20 anniversaire de la Monusco, le président Donald Trump cherchait à mettre en avant le coût d'une des plus grandes missions de maintien de la paix de l'ONU. Dans ce contexte particulier, marqué par les contestations locales et les manifestations parfois violentes contre la Monusco, la mission a vu sa présence se réduire au cours des dernières années. L'examen stratégique indépendant que j'ai souligné précédemment a pu montrer les modalités et les conditions de retrait des Casques bleus en République Démocratique du Congo. Le personnel local de l'ONU et la présence de la communauté internationale dans son ensemble s'est concentré sur cette examen. Ce qui a permis d'éclairer la réflexion du Secrétariat des Nations Unies à New York et constitué un facteur influent de la décision du Conseil de Sécurité avec le vote de la résolution 2502 (2019) qui avait prorogé pour neuf mois le mandat de la Monusco. Parallèlement, le président Tshisekedi, au lendemain de son élection à la tête du pays et sa prise de fonction les 24 janvier 2019, réclamait comme nous l'avons souligné, que la Monusco devrait rester en place en tant partenaire privilégié pour le rétablissement de la paix à l'est de la République démocratique du Congo. Cette position qui renforce la légitimité de la Monusco a été réitérée lors des grandes manifestations des mouvements citoyens comme la Lucha et les élèves qui se mobilisait pour les manifestions contre « l'inaction de la Monusco ». Ce soutien à la mission, venu du sommet de l'État est un signe incontestable de la légitimation de la Monusco.

Pourtant en 2016, la tension entre la Monusco et le président Joseph Kabila était saisissante. L'expiration du dernier mandat de celui-ci ne faisait que renforcer cette tension. Un diplomate souligne même que « Kabila craignait que les forces de la Monusco puissent être utilisées contre lui, comme celles de l'Onuci l'ont été contre l'Ivoirien Laurent Gbagbo »67. Ce climat de tension a été encore renforcée en 2017 avec la mort de deux experts de l'ONU, Zaida Catalan et Michael Sharp, puis l'attaque de la base de Samuliki à l'Est du pays. Au sein de la mission, comme écrit Pierre Boisselet, plusieurs cadres ont vu dans ces violences contre les acteurs de la Monusco, le spectre d'un avertissement adressé par le service de renseignements congolais68.

67 Jeune Afrique, RDC : faut-il finit avec la Monusco ? Op. Cit.

https://www.jeuneafrique.com/mag/806091/politique/rdc-faut-il-en-finir-avec-la-monusco/, consulté le 5 mai 2021.

68 Ibid.

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En outre, les autorités congolaises, en se basant sur l'argument de la souveraineté avait en tout cas refusé que la Monusco les aide dans l'organisation du scrutin de décembre de 2018.

Paradoxalement, le retrait de la Monusco du territoire congolais vivement souhaité par le président Joseph Kabila a été remise en question par son successeur, le président Félix-Antoine Tshisekedi. À son arrivée au pouvoir, on a vu à plusieurs reprise la représentante de l'ONU en République démocratique du Congo, rencontrer le nouveau président Tshisekedi. Pour celui-ci, la présence des Casques bleus est importante et même rassurante au regard de la situation sécuritaire dont la maitrise de l'armée ne semble pas évidente. Dans une interview à Jeune Afrique, un de ses conseiller affirmait : « Nous avons dit à la Monusco que nous avions encore besoin d'elle. Mais nous avons demandé que ses troupes soient relocalisées là où elles sont le plus utile, c'est-à-dire dans l'Est, et qu'elles soient renforcées pour être plus efficaces »69. Ces divergences des perceptions et même contradictoires sur le rôle de la Monusco par les responsables étatiques permettent à l'ONU de rejouer les cartes de la négociation sur la présence de la Monusco. Le changement de position entre Joseph Kabila et Felix Tshisekedi est éminemment stratégique et politique. Politiquement parlant, ayant été élu président de la République Démocratique du Congo dans un processus électoral entaché des multiples irrégularités et des plusieurs contestations aussi bien au plan local qu'au plan international, contestations qui ont fait soulever la question de sa légitimé à la tête pays, le rapprochement du président Felix Tshisekedi avec la Monusco ne peut paraître qu'un élément essentiel de la lutte pour la reconnaissance dans l'optique de construire (par tous les moyens - diplomatiques et politiques) sa légitimité sur la scène internationale. Stratégiquement parlant, le Président Tshisekedi ne pouvait que renégocier avec la Monusco car l'avenir de la majorité issue de la coalition qui s'est malheureusement effritée après plusieurs mois de cohabitation impossible ; les modalités d'organisation des prochaines élections en 2023 (étant donné que plusieurs parties qui forment le corps politique congolais ne parviennent pas à s'entendre sur l'organisation des prochaines élections), sont autant d'éléments sur éléments sur lesquels le nouveau régime ne pouvait que s'appuyer dans l'objectif d'avoir un soutien international. D'où l'enjeu de la négociation avec la Monusco. Cette négociation permanente sur le mandat et le rôle de la Monusco permet également à l'ONU d'adapter sa stratégie sur l'opérationnalisation de la mission. Il n'est pas étonnant de voir comment la Monusco a adapté sa stratégie à aux recommandations formulées depuis longtemps ainsi qu'au coupes budgétaires décidées à New York en fermant certaines des bases militaires pour mettre en place des détachement plus

69 https://www.jeuneafrique.com/mag/806091/politique/rdc-faut-il-en-finir-avec-la-monusco/

mobiles, de 50 à 100 hommes. Dans le rapport portant sur le budget de la Mission de l'Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (Monusco) pour l'exercice allant du 1er juillet 2019 au 30 juin 2020 (exercice 2019/20), le montant s'élève à 1 023 267 600 dollars américains70. Ceci étant, tout porte à penser qu'aussi longtemps que les violences demeurent et que les civils ne seront pas protégés, les contestations contre la mission risqueraient de s'intensifier.

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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard