CHAPITRE II DESCRIPTION DE L'ICTERE NEONATAL
II.1. DEFINITIONS
L'ictère est la coloration jaune des téguments,
qui apparaît à partir d'un taux de bilirubinémie
supérieures à 50-70 ìmol/l (3-4,2 mg/dl).
L'ictère précoce du nouveau-né est celui
qui apparait avant 24 heures de vie
L'ictère prolongé du nouveau-né : c'est
l'ictère persistant à plus de 10-15 jours de vie. Chez
un nouveau-né à terme, eutrophique et persistant au-delà
de trois semaines pour le nouveau-né prématuré ou de petit
poids [6].
Contrairement à l'adulte, l'ictère du
nouveau-né est, dans l'immense majorité des cas, à
bilirubine (BR) indirecte (attention à ne pas reproduire la confusion,
hélas fréquente et désastreuse de sens, entre les termes
« BR indirecte » et « BR libre »).
II.2. EPIDEMIOLOGIE
L'ictère est de très loin le plus
fréquent des symptômes observés à la période
néonatale. Souvent « physiologique », l'ictère est un
symptôme dont la signification clinique reste en règle difficile
à appréhender.
Il est délicat d'évaluer l'incidence vraie de
l'ictère du nouveau-né en raison des difficultés de
définition.
L'OMS a estimé, en 2007 que plus de 80% des
prématurés et 50% des nouveaux nés à terme
présentent l'ictère néonatal [10].
En France l'incidence n'est pas connue
précisément. Elle est estimée à 60% chez les
nouveau-nés à terme (90% chez le prématuré).
Environs 6-10% des nouveau-nés à terme ont une
bilirubinémie > 220 ìmol/l. Au Royaume Uni, en 2001,
l'incidence est de 5,5/1000 naissances d'ictère sévère
(Bilirubinémie supérieure à 350ìmol/l). 174 cas
d'ictères nucléaires ont été recensés aux
USA (1/100 000 naissances) et le même chiffre d'incidence est
avancé en Europe. L'incidence des cholestases néonatales est
estimée à 1/2500 naissances.
Au Bénin, des taux de 32% d'ictère
néonatal ont été trouvé dans une population des
nouveaux nés hospitalisés [11].
Au Maroc, les mêmes valeurs qu'en France avec 60% chez
les nouveaux nés à terme et 90% chez les prématurés
[12].
L'expérience du CHU Mohammed VI de Marrakech en 2009 a
trouvé une incidence de 25% d'ictère néonatal dans une
population des nouveaux nés hospitalisés [5].
6 | P a g e
Aux cliniques Universitaires de Lubumbashi (RDC) en 2010 des
taux de 17.7% de l'ictère néonatal ont été
trouvé dans une population des nouveaux nés hospitalisés
[13].
II.3. ETIOPHYSIOPATHOGENIE
On distingue deux catégories d'ictères
néonatales, selon la prédominance de l'augmentation sur la
bilirubine non conjuguée ou sur la bilirubine conjuguée
[9,14].
II.3.1. LES ICTERES A BILIRUBINE NON CONJUGUEE :
HYPERBILIRUBINEMIE A PREDOMINANCE INDIRECTE (BILIRUBINE CONJUGUEE < 34
uMOL/L OU 20 MG/L)
C'est la forme la plus fréquente d'ictère
néonatal ; par définition, la bilirubine directe ou
conjuguée ne dépasse pas 34 umol/L (20 mg/L).
Les principales étiologies de l'hyper bilirubinémie indirecte
figurent dans le tableau 1. Les principales entités causant un
ictère indirect sont les suivantes:
1) ICTERE SIMPLE DU NOUVEAU-NE
II est si fréquent qu'il est qualifié de
"physiologique". II résulte de la seule "immaturité" des
processus hépatiques d'épuration de la bilirubine produite en
grande quantité, sans facteur pathologique associé.
II est caractérisé par :
? Sa survenue au 2ème -
3ème jour de vie, et son pic maximal vers le
4ème - 5ème jour ;
? Son caractère isolé cliniquement, "nu" ;
? La nette prédominance de la BNC, et la
négativité du test de Coombs ;
? Sa régression à la fin de la première
semaine, parallèlement à la coloration progressive des urines.
? L'hyper bilirubinémie ne dépasse pas 250
umol/L (146 mg/L) chez l'enfant allaité ou 200 umol/L (117 mg/L) chez
l'enfant nourri artificiellement, quel que soit son âge; elle augmente
à un rythme inférieur à 86 umol/L / 24 heures (50 mg/L/24
heures).
Ces caractères rassurants chez le nouveau-né
à terme sans anomalie viennent à manquer quand s'ajoutent des
facteurs de surproduction de la bilirubine ou des obstacles à son
épuration (on parle alors d'ictère simple « aggravé
»). Au total, l'ictère simple comprend l'excès de production
de bilirubine et le défaut de captation hépatique et de
conjugaison de cette bilirubine. La présence des facteurs favorisants
peut majorer cet ictère simple.
La plupart du temps, aucun traitement n'est nécessaire,
sauf si la bilirubine augmente à un niveau trop élevé, ce
qui est rare (on parle alors d'hyper bilirubinémie néonatale).
Les indications de la photothérapie et de l'exsanguino-transfusion sont
les mêmes que dans le cas d'une maladie hémolytique du
nouveau-né (voir plus loin).
Tableau I Principales causes
d'ictère indirect chez le nouveau-né
Cause d'hyper bilirubinémie non
conjuguée
Ictère physiologique et hyper
bilirubinémie néonatale (très
fréquents)
Ictère au lait maternel (assez
fréquent)
Maladie hémolytique du nouveau-né (assez
fréquente) :
> incompatibilité Rhésus
> incompatibilité ABO
Ecchymoses, hématomes (assez
fréquents)
Polycythémie (assez
fréquente)
Anémies hémolytiques congénitales
(rares) :
> sphérocytose
> déficience en glucose-6-phosphate
déshydrogénase
> déficience en pyruvate-kinase
> thalassémie
Hypothyroïdie (rare)
Sténose du pylore (rare)
Hyperbilirubinémie néonatale transitoire
et familiale (très rare)
Maladie de Gilbert (rare)
Syndrome de Crigler-Najjar (très rare)
LES FACTEURES FAVORISANT ET AGGRAVANT
L'HYPERBILIRUBINE
En cas d'hyper bilirubinémie néonatale à
prédominance non conjuguée, plusieurs facteurs favorisants
peuvent soit majorer un ictère physiologique soit entrainer son
évolution vers un ictère nucléaire [15-16].Ce sont :
> Le jeûne
V' Jl entraine l'hypoglycémie qui
stimule la sécrétion abondante de Glucagon et
d'Epinéphrine augmentant ainsi l'activité de
l'hème-oxygénase.
V' Le manque de glucose pendant le
jeûne entraine le recours aux lipides pour la production de
l'énergie. L'augmentation des acides gras libres circulants qui agissent
comme inhibiteurs compétitifs de la bilirubine au niveau de la
glucuronyl transférase par l'intermédiaire de la Pregnane-3
alpha-20 bêta-diol participe à l'hyper bilirubinémie.
V' Le jeûne aggrave aussi le cycle entero
hépatique.
> Tout facteur de stress (anoxo ischémie,
infection maternofoetale...)
Le stress stimule la sécrétion abondante de
Glucagon et d'Epinéphrine.
> L'asphyxie périnatale qui
entraine le stress et l'acidose (persistance de la perméabilité
du canal d'Arantius, synthèse retardée des enzymes)
> L'hypo-albuminémie, par un
défaut de protéines de transport de bilirubine entrainant
un excès de bilirubine libre qui ne sera pas par
conséquent conjuguée et éliminée. >
L'hyper osmolarité,
7 | P a g e
8 | P a g e
> Le refroidissement (hypothermie),
par l'hypoglycémie et la baisse du métabolisme
de base qu'il entraine avec comme conséquence la baisse
des fonctions de synthèse.
> La prématurité, par
immaturité hépatique
> Le jeune âge (exemple : le
nouveau-né de moins de 24 heures de vie est plus
vulnérable que celui de quelques jours),
> L'acidose, par diminution
affinité de la bilirubine vis-à-vis de l'albumine
sérique.
> Les hématomes ; ecchymose ou bosse
sero-sanguine, par augmentation de la charge
en hémoglobine dégradée. La
résorption entraine un catabolisme accru de l'hème et
donc une augmentation de la bilirubine.
> L'administration de
médicaments qui déplacent la bilirubine de
l'albumine
(exemple : sulfamides, ocytociques...).
> L'antécédent de mère
diabétique : le diabète maternel expose le
nouveau-né à un
risque accru d'hypoglycémie néonatal.
> Nouveau-né avec antécédent
de photothérapie
> Polyglobulie, incompatibilité avec Coombs
positif ou maladie hémolytique
2) ICTERE NEONATAL "AU LAIT DE MERE"
II apparaît vers le 5ème jour de vie
seulement (mais il peut prolonger un ictère simple). II est
isolé. L'hyper bilirubinémie porte sur la fraction non
conjuguée. Elle peut persister plusieurs semaines.
Cet ictère est provoqué par le pouvoir
inhibiteur du lait de certaines femmes sur les mécanismes
d'épuration hépatique de la bilirubine. (Une lipase contenue dans
certains laits maternels, hydrolyse les triglycérides ; les acides gras
libérés agissent comme inhibiteurs compétitifs de la
bilirubine au niveau de la glucuronyl transférase par
l'intermédiaire de la « Pregnane-3 alpha-20
bêta-diol »). Le Lait maternel (surtout le colostrum), contient
beaucoup de bêta-glycuronidase.
Ce pouvoir ne semble s'exercer que sur le foie immature; il
disparait par chauffage du lait à 56°C pendant 15 minutes.
En pratique, si la jaunisse est mal tolérée
psychologiquement par l'entourage ou si l'hyperbilirubinémie est
élevée, on conseille de suspendre l'allaitement pendant 48 heures
; lors de la reprise de l'allaitement au sein, l'hyperbilirubinémie se
stabilise à un palier inférieur, mieux toléré et
moins inquiétant.
3) ICTERE HEMOLYTIQUE PRECOCE
Il est le plus souvent d'origine immunologique
(incompatibilité Rhésus ou ABO). Si ce n'est pas le cas, il faut
rechercher une anémie hémolytique congénitale comme une
sphérocytose :
a) 9 | P a g e
Incompatibilité Rhésus ou
érythroblastose foetale
Son incidence a fortement diminué depuis que les
femmes à risque reçoivent la prophylaxie anti-D. La mère
est Rhésus négative et le foetus Rhésus positif. Le
premier enfant ne peut pas être atteint, sauf si la mère a
été sensibilisée antérieurement, par exemple lors
de l'avortement d'un foetus Rhésus positif, si elle n'a pas reçu
la prophylaxie anti-D. Les formes graves peuvent s'accompagner d'anasarque
Foeto-placentaire, d'hépatomégalie, de
splénomégalie et d'insuffisance cardiaque. L'hémolyse est
plus active que dans le cas de l'incompatibilité ABO. L'ictère
apparaît pendant les premières heures de vie et le taux de
bilirubine augmente rapidement. Une anémie très profonde peut
être présente. Le taux de réticulocytes est
élevé. Le test de Coombs direct est positif, ce qui indique la
présence d'anticorps érythrocytaires. Une hypoglycémie
peut survenir ;
b) Incompatibilité ABO
Elle cause une hémolyse moins active que
l'incompatibilité Rhésus. Habituellement, le groupe sanguin de la
mère est O et celui du foetus A ou B. Le premier enfant peut être
atteint. En général, l'ictère apparaît plus
tardivement et il est moins intense qu'en cas d'érythroblastose foetale.
L'hémoglobine peut baisser et le taux de réticulocytes peut
être élevé. Le test de Coombs indirect est positif, ce qui
indique la présence d'anticorps plasmatiques. Le test de Coombs direct
est négatif ;
c) Anémies hémolytiques
congénitales
Plusieurs de ces anémies peuvent se manifester
dès la période néonatale ; il s'agit surtout de la
sphérocytose, de la thalassémie, de la déficience en
glucose-6-phosphate déshydrogénase et de la déficience en
pyruvate-kinase.
4) LES ENDOCRINOPATHIES :
a) Ictère de l'hypothyroïdie
L'ictère à bilirubine non conjuguée est
l'un des signes classiques de l'hypothyroïdie congénitale ; les
hormones thyroïdiennes sont en effet nécessaires à la
synthèse de l'enzyme glycuronyl transférase.
b) Insuffisance surrénalienne
L'insuffisance surrénalienne entraine
l'hypoglycémie [6].
5) ICTERE DE LA MALADIE DE GILBERT
Il est lié à un déficit partiel de la
glycuronyl transférase ; il s'agit d'une maladie autosomique dominante ;
l'ictère reste modéré en période
néonatale.
6) 10 | P a g e
ICTERE DE LA MALADIE DE CRIGLER NAJJAR :
Il s'agit d'un déficit complet de la
glucuronyltransferase dans la forme du type I, la maladie est
généralement fatale au cours des 15 premiers mois de la vie. Le
déficit est partiel dans la forme du type II, seul viable.
7) LES INFECTIONS GRAVES NOTAMMENT LE SEPSIS ; LES
INFECTIONS URINAIRES... L'infection entraine une hyper
bilirubinémie par deux mécanismes :
? hémolyse par la toxine infectieuse et les radicaux
libres, responsables de la production accrue de bilirubine
? l'acidose métabolique
8) CERTAINES ANOMALIES DU TUBE DIGESTIF (ATRESIE
DUODENALE, STENOSE DUODENALE...)
La Sténose du pylore s'associe rarement à un
ictère non conjugué. Le mécanisme physiopathologique de
cet ictère demeure imprécis. Le jeûne pourrait jouer un
certain rôle. On a rapporté quelques cas de maladie de Gilbert se
manifestant de cette façon.
II.3.2. LES ICTERES A BILIRUBINE CONJUGUEE OU MIXTE
AVEC
PREDOMINANCE DE BILIRUBINE DIRECTE
Ces types d'ictères sont plus rares puisqu'ils
représentent moins de 1% des ictères du nouveau-né.
Néanmoins ils sont toujours pathologiques et doivent faire l'objet d'une
exploration spécialisée en hépatologie pédiatrique.
Leur pronostic dépend de la précocité du diagnostic
étiologique et la sanction est soit chirurgicale soit
métabolique.
La présence d'une hyperbilirubinémie directe
chez un nouveau-né ou un nourrisson indique la possibilité d'une
maladie grave; l'enfant doit donc être dirigé immédiatement
vers un centre spécialisé. Le nourrisson a souvent une coloration
jaune verdâtre. La démarche diagnostique tient compte de
l'ensemble du tableau clinique et des principales causes possibles (tableau
2).
1) INFECTION BACTERIENNE
Elle peut être la cause d'un ictère direct chez
un nouveau-né. Cette étiologie doit surtout être
suspectée si l'enfant présente de la fièvre ou de
l'hypothermie, de la léthargie, de l'anorexie ou une altération
de l'état général. Dans ces circonstances, il est
recommandé de faire des cultures du sang, du liquide
céphalorachidien et de l'urine, puis de traiter l'enfant empiriquement
à l'ampicilline et à la gentamicine pendant 48 heures, jusqu'au
moment où les cultures se révèlent négatives.
Même si aucun des signes et symptômes mentionnés ci-dessus
n'est présent, il est prudent de faire au moins une culture d'urine.
Tableau II : Principales causes
d'ictère direct chez le nouveau-né et le nourrisson
Causes d'ictère à bilirubine
conjuguée
Infections :
V' Infections bactériennes (infection urinaire (E.
coli,...), sepsis)
V' Infections virales et parasitaires
congénitales (cytomégalovirus, Herpès virus, virus de la
rubéole, entérovirus, Toxoplasma gondii et autres)
syphilis
Atrésie des voies biliaires extra
hépatiques
Hypoplasie des canalicules biliaires
intrahépatiques :
V' syndrome d'Alagille (dysplasie
artério-hépatique)
V' syndrome de Zellweger (syndrome
cérébro-hépato-rénal)
V' maladie de Byler
Cholangite sclérosante
Kyste du cholédoque
Syndrome de la bile épaisse (chez le
nouveau-né qui a présenté une anémie
hémolytique)
Hépatite néonatale idiopathique
(hépatite à cellules géantes)
Cholestase du nouveau-né qui a reçu une
alimentation parentérale
Maladies métaboliques; exemples :
V' Galactosémie congénitale
V' Intolérance héréditaire au
fructose
V' Tyrosinémie congénitale
V' Déficience en alpha-1-antitrypsine
V' Fibrose kystique (Mucoviscidose) Maladie de Dubin
Johnson
Maladie de Rotor
2) INFECTIONS CONGENITALES
Il s'agit surtout des infections causées par les
agents suivants : cytomégalovirus, virus de la rubéole,
entérovirus (exemple : Coxsackie), Herpès virus, virus de
l'hépatite B, Toxoplasma gondii, spirochète de la
syphilis. On suspecte ces infections chez tout nouveau-né qui
présente un ictère direct, particulièrement s'il est
associé à une hépatosplénomégalie, à
un purpura thrombopénique, à un retard de croissance
intra-utérine, à une microcéphalie, à des
calcifications intracrâniennes, à des cataractes, à une
cardiopathie congénitale, ou à une atteinte rétinienne. Le
diagnostic repose sur les recherches virales et les épreuves
sérologiques.
3) ATRESIE DES VOIES BILIAIRES EXTRA
HEPATIQUES
Elle doit être à l'avant-plan des
préoccupations chez tout nouveau-né qui présente un
ictère cholestatique, parce qu'une porto-entérostomie
(opération de Kasaï) doit être effectuée le plus
tôt possible (avant l'âge de deux à trois mois) si l'on veut
que les chances de succès soient optimales. Le taux de réussite
de cette intervention est de l'ordre de 90 % lorsqu'elle est effectuée
aux environs de l'âge d'un mois. L'atrésie des voies biliaires est
difficile à différencier de l'hépatite néonatale.
Sur le plan clinique, des selles décolorées suggèrent le
diagnostic d'atrésie des voies biliaires. Il peut y avoir une
hépatomégalie et la consistance du
11 | P a g e
12 | P a g e
foie peut être plus ferme que la normale.
L'échographie du foie est utile, notamment pour exclure un kyste du
cholédoque et pour déterminer si la vésicule biliaire est
présente ou absente. La scintigraphie hépatobiliaire permet de
mettre en évidence l'absence de passage de la bile dans l'intestin. La
biopsie hépatique à l'aiguille complète le bilan. Le
diagnostic de certitude repose sur l'exploration chirurgicale et la
cholangiographie peropératoire. La porto-entérostomie peut se
compliquer d'échecs précoces, d'échecs tardifs ou de
cholangite ascendante ; il peut y avoir une évolution vers la cirrhose
et l'hypertension portale. Lorsque cette intervention se solde par un
échec, le dernier recours est la transplantation hépatique.
4) HEPATITE NEONATALE
Elle peut être due à l'un des agents infectieux
mentionnés plus haut, mais, dans un certain nombre de cas, on ne trouve
aucune étiologie et on parle alors d'hépatite néonatale
idiopathique. Cette entité peut ressembler cliniquement à une
atrésie des voies biliaires et le diagnostic différentiel peut
être difficile (voir plus haut).
5) CHOLANGITE SCLEROSANTE
Elle est caractérisée par une atteinte à
la fois extra- et intrahépatique des voies biliaires donnant une image
en chapelet à la cholangiographie percutanée ou
rétrograde. Elle peut se retrouver de façon isolée au
cours de la période néonatale (cholangite sclérosante
primitive congénitale), en association avec une histiocytose chez le
jeune enfant, ou avec une maladie inflammatoire de l'intestin chez le grand
enfant ou l'adolescent.
6) KYSTE DU CHOLEDOQUE
Il peut se manifester par un ictère obstructif chez le
nouveau-né et le nourrisson, mais aussi chez l'enfant plus
âgé ; ce dernier peut également présenter des
douleurs abdominales. Une masse est parfois palpable dans l'hypochondre droit.
La fonction hépatique peut se détériorer rapidement.
L'échographie met facilement en évidence une dilatation kystique
du cholédoque. Le traitement est chirurgical.
7) HYPOPLASIE DES CANALICULES BILIAIRES
INTRAHEPATIQUES
a) Syndrome d'Alagille ou dysplasie
artério-hépatique
Il se caractérise par un ictère obstructif, un
faciès anormal, une anomalie oculaire « embryotoxon »
postérieur, qui est mise en évidence par l'examen à la
lampe à fente, des anomalies vertébrales, «vertèbres
en papillon » et des malformations cardiovasculaires (exemple :
sténose pulmonaire périphérique). Il y a une hypoplasie
des voies biliaires intrahépatiques et/ou extra hépatiques.
b) 13 | P a g e
Syndrome de Zellweger, syndrome
cérébro-hépatorénal (autosomique récessif)
Mis à part l'ictère, il est
caractérisé par un ensemble de signes dysmorphiques : front haut,
épicanthus et hypoplasie des arcades sourcilières. Les enfants
atteints présentent également une atteinte neurologique grave
(hypotonie, convulsions), des kystes rénaux et des anomalies oculaires
(nystagmus, atrophie optique, opacités cornéennes, glaucome,
cataractes, rétinite pigmentaire et taches de Brushfield). Ce syndrome
est fatal à court terme.
c) Maladie de Byler
Cette affection rare associe un ictère cholestatique,
un retard de croissance staturopondérale, un rachitisme, du prurit et
une stéatorrhée. Le cholestérol sérique est normal,
de même que la gamma-glutamyl-transpeptidase, ce qui est exceptionnel en
cas de cholestase. Une certaine proportion des enfants atteints
présentent une anomalie du métabolisme des acides biliaires
primaires.
8) SYNDROME DE LA BILE EPAISSE
Il doit surtout être suspecté chez le
nouveau-né qui a présenté une anémie
hémolytique grave.
9) CHOLESTASE DU NOUVEAU-NE AYANT REÇU UNE
ALIMENTATION PARENTERALE Il s'agit d'un diagnostic d'exclusion.
10) MALADIES METABOLIQUES
Un grand nombre d'anomalies du métabolisme
intermédiaire peuvent être responsables d'une atteinte
hépatique avec ou sans ictère. En cas d'ictère à
composante directe, les entités suivantes doivent surtout être
prises en considération :
a) Galactosémie congénitale
(autosomique récessive)
Elle peut se manifester peu de temps après que le
nouveau-né commence à boire du lait. Outre l'ictère, les
principales manifestations cliniques possibles sont les suivantes :
altération inexpliquée de l'état général,
vomissements, difficultés alimentaires, irritabilité,
léthargie, convulsions, hépatomégalie,
splénomégalie, hypoglycémie, acidose métabolique,
cataractes, infections, particulièrement causées par des
bactéries à Gram négatif. Les transaminases sont
élevées. Le test de dépistage consiste à rechercher
dans l'urine, au moyen du Clinitest, la présence de sucres
réducteurs autres que le glucose. Le diagnostic de certitude repose sur
le dosage de l'enzyme déficiente dans les globules rouges. En cas de
doute, il faut recourir immédiatement à une alimentation sans
lactose, en attendant le résultat du dosage enzymatique.
L'intolérance Héréditaire au fructose peut se manifester
de façon assez similaire après l'introduction du fructose dans
l'alimentation ;
b) 14 | P a g e
Fructosemie congénitale
C'est une maladie
congénitale/héréditaire interdisant l'absorption de
fructose et des sucres en contenant sous formes polymères (saccharose,
de sorbitol). Elle est liée à un déficit en aldolase B,
enzyme de clivage dans le foie, l'intestin grêle et les reins, du
fructose-1-phosphate en DHAP et en glycéraldéhyde afin de
permettre la suite de la glycolyse en vue de la production d'ATP par la
cellule. L'intoxication arrive habituellement quand l'alimentation est
transférée du lait maternel à l'alimentation
diversifiée [17].
c) Tyrosinémie congénitale (autosomique
récessive)
Sa forme précoce se manifeste au cours des six
premiers mois de vie par un retard de croissance et de développement, de
l'irritabilité, des vomissements, un ictère, une
hépatomégalie, de l'hypoglycémie une atteinte
rénale et une diathèse hémorragique. Des crises
neurologiques peuvent survenir. Les transaminases et
l'alpha-foeto-protéine sont élevées. On note une
augmentation de la succinylacétone dans le plasma et l'urine. Le
traitement consiste en une alimentation pauvre en phénylalanine et en
tyrosine. Malgré ce traitement, l'évolution peut être
défavorable et une transplantation hépatique peut se
révéler nécessaire.
d) Déficience en alpha-1-antitrypsine
(autosomique récessive)
Les homozygotes peuvent présenter un ictère
cholestatique en bas âge, pouvant évoluer ensuite vers la
cirrhose. Le diagnostic repose sur le dosage sérique de
l'alpha-1-antitrypsine et sur la biopsie hépatique. Si le dosage de
l'alpha-1-antitrypsine s'avère bas, le typage de l'inhibiteur de la
protéase est nécessaire. Lorsque l'évolution est
défavorable, une transplantation hépatique peut devenir
nécessaire.
e) Mucoviscidose
Maladie génétique autosomique récessive
qui résulterait du défaut d'expression de la protéine CFTR
au niveau des cellules hépatiques. Elle peut se révéler
par un ictère cholestatique associé parfois à une
décoloration des selles [18]. Elle est éliminée par un
test de la sueur. Des faux négatifs sont fréquents au cours de la
période néonatale, et il n'est pas toujours facile d'obtenir
suffisamment de sueur.
11) MALADIE DE DUBIN JOHNSON
Cette maladie autosomique récessive est
caractérisée par une hyper bilirubinémie conjuguée
observée chez l'enfant et chez l'adulte. L'hyper bilirubinémie
serait due à un défaut de la sécrétion biliaire de
la bilirubine conjuguée. La déficience de la
sécrétion des composés n'est pas limitée à
la seule bilirubine mais implique aussi les oestrogènes
15 | P a g e
conjuguées et les colorants tels la brome-sulfone
phtaléine utilisée comme teste d'exploration
chez les patients atteints de cette maladie [15].
12) MALADIE DE ROTOR
C'est une affection rare avec défaut d'excrétion
de la bilirubine au niveau de la bile
comme dans la maladie de Dubin Johnson,
caractérisée par une hyper bilirubinémie chronique
sans anomalie histologique du foie. Sa cause n'est pas encore
connue mais elle pourrait
résulter d'un défaut de transport y compris de la
bilirubine par les hépatocytes [19].
II.4. DIAGNOSTIC
II.4.1. CLINIQUE
L'interrogatoire porte sur cinq éléments principaux
:
> la date d'apparition de l'ictère
> les antécédents :
Recherche d'une sensibilisation maternelle par contact accidentel
ou médical avec des
produits sanguins (au cours d'avortements ou par des transfusions
sanguines), présence d'un
ictère chez les enfants précédents de la
fratrie ;
> la recherche d'un contexte d'infection materno-foetale ;
> le retentissement de l'ictère sur l'état
général de l'enfant : courbe pondérale, troubles
digestifs
> le mode d'alimentation du nouveau-né.
L'examen clinique analyse surtout trois éléments
:
> l'intensité de l'ictère cutané :
Cette évaluation est dépendante des conditions
d'éclairage (accentuation habituelle par
l'éclairage électrique par incandescence).
L'ictère n'est cliniquement perceptible que si la
bilirubinémie dépasse 70 ìmol/l ; au niveau
des téguments, il progresse de façon centrifuge et
céphalo-caudale. Suivant son intensité, on
distingue :
y' L'ictère discret ou subictère qui doit
être recherché à la lumière du jour au niveau
des muqueuses : conjonctives et muqueuse de la face
inférieure de la langue, qui
correspond à un taux de bilirubine totale compris entre 15
et 30 mg/1.
y' L'ictère franc : quand il touche les mains et les
jambes ; c'est couleur jaune safran,
qui est généralisé aux téguments et
aux muqueuses, qui correspond à un taux de
bilirubine totale supérieur à 30 mg/1.
y' L'ictère très intense : couleur brun
verdâtre au maximum « bronze florentin » qui
s'accompagne d'un taux de bilirubine totale entre 300 et 400
mg/1.
16 | P a g e
Il faut connaître la possibilité d'un
décalage entre l'hyper bilirubinémie et l'ictère, l'hyper
bilirubinémie précède et survit à l'ictère
[20].
> L'aspect des selles (décolorées ou non) et des
urines (claires ou foncées) et
> Le caractère isolé ou accompagné de
l'ictère : hépatomégalie et/ou
splénomégalie, pâleur et/ou hémorragies,
symptômes neurologiques ; un nouveau-né jaune est volontiers
hypotonique.
Trois éléments doivent toujours être tenus
pour pathologiques :
> l'apparition précoce de l'ictère : avant la
12ème heure de vie chez le prématuré et la
24ème heure chez 1'enfant à terme, ou sa prolongation
anormale au-delà de la première semaine de vie chez le
nouveau-né à terme et de la deuxième semaine de vie chez
l'enfant prématuré ;
> la constatation clinique de signes d'accompagnement :
l'ictère n'est pas "nu" ;
> la décoloration partielle ou totale des selles, qui
signe une rétention biliaire.
a. Ictère à bilirubine indirecte
> Ictère survenant pendant les 24 ou 48 heures
après la naissance
> Ictère de conjonctives bulbaires, face et thorax
parfois,
> Pâleur cutanéomuqueuse ;
> Splénomégalie
> Urines claires ; Selles normales
> Fièvre ou non
b. Ictère à bilirubine directe
> Ictère survenant avant 24 heures chez le
nouveau-né à terme et avant 12 heures chez
le prématuré ou soit tardivement ;
> Ictère franc de la tête jusqu'aux pieds ;
> Hépatomégalie ; Splénomégalie
;
> Selles décolorées : selles mastiques; Urines
foncées ;
> Fièvre ou non
c. Ictère à bilirubine mixte
> Englobe tous les signes ci hauts cités.
d. Diagnostic différentiel :
L'ictère doit être différencié des
faux ictères :
> Pâleur jaunâtre de certaines anémies.
> Hypercarotinémie.
Dans ces deux cas, les conjonctives sont de coloration
normale.
17 | P a g e
? Pseudo-ictère picrique apparaissant après
l'absorption d'acide picrique.
II.4.2. PARA CLINIQUE
Seule la mesure du taux de bilirubine par une prise de sang ou
par un flash cutané permet d'en apprécier la gravité
[21-22].
Le bilirubinomètre transcutané
(biliflash)
Apparu dans les années 1980, le bilirubinomètre
transcutané ou BTC est un outil de dépistage non invasif de
l'ictère néonatal. Il ne constitue pas un substitut au
prélèvement sanguin mais permet de les réduire [22].
Le principe du BTC consiste en une spectrophotométrie
par réflexion : le BTC émet de la lumière blanche en
direction de la peau, une partie de celle-ci n'est pas absorbée et est
recaptée sous forme de longueurs d'onde par l'appareil. Plus la peau est
jaune et plus elle absorbe la composante bleue de la lumière blanche. La
différence entre le signal émis initialement et celui reçu
par l'appareil permet de mesurer l'intensité de l'ictère
néonatal. Le dosage sanguin de la bilirubinémie
Valeur de référence en termes de diagnostic et
thérapeutique, le dosage sanguin est le « gold standard » de
la mesure de l'intensité de l'ictère. Différentes
fractions de la bilirubine peuvent être dosées : la bilirubine
libre ou non conjuguée (BNC), la bilirubine
conjuguée (BC) et la bilirubine totale (BT). BT = BNC + BC
Le dosage de chaque fraction de bilirubine permet d'orienter
le diagnostic étiologique de l'ictère néonatal comme nous
l'avons vu précédemment. Un dosage sanguin de la bilirubine
s'interprète toujours en fonction de l'âge de l'enfant en heure
puisque les normes évoluent avec l'adaptation postnatale du
métabolisme de la bilirubine. Celui-ci est exprimé en
ìmol/l ou en mg/dl [7].
Tableau III : Les valeurs normales de
la bilirubinémie (1 ìmol = 0,6 mg), [23].
Age Taux normal de bilirubine totale
A la naissance 0.8 à 2.5 mg /
dl
A la 1ère semaine de vie 2.5
à 12 mg / dl
A la 2ème semaine 1 à
11 mg / dl
A la 3ème semaine 0.6 à
3 mg / dl
A la 4ème semaine 0.3 à
1.5 mg / dl
A partir d'un mois- adulte 0.3 à
1 mg / dl
D'autres examens complémentaires simples sont
indispensables :
? dosage des protides sanguins totaux et, si possible, de
l'albuminémie, ? groupes érythrocytaires de la mère et de
l'enfant,
18 | P a g e
> test de Coombs direct chez l'enfant, > test de Coombs
indirect chez la mère,
> hémogramme et numération des plaquettes et des
réticulocytes.
Les examens complémentaires à réaliser en
fonction du contexte [24]. :
En cas d'ictère à bilirubine indirect :
> Recherche d'anticorps irréguliers maternels
> Marqueurs d'infection (CRP, fibrinogène, pro
calcitonine) > ECBU
> TSH et T4
En cas d'ictère à bilirubine directe ou mixte,
le bilan sera alors complété par :
> Le dosage des enzymes hépatiques (ASAT, ALAT,
Phosphatases alcalines, gamma-GT)
> Echographie du foie et des voies biliaires
> Scintigraphie du foie
II.5. EVOLUTION ET COMPLICATIONS DE
L'ICTERE
L'ictère nucléaire constitue le risque majeur
des hyper bilirubinémies néonatales. En moyenne, 40 % de la
bilirubine dans le sang est liée à l'albumine. La fraction de
bilirubine qui est à la fois non conjuguée et non liée
à l'albumine (bilirubine indirecte) est toxique pour le cerveau :
lorsque son potentiel de liaison à l'albumine est dépassé,
la bilirubine peut se fixer sur les graisses tissulaires dont celle du
système nerveux central. En effet, liposoluble, elle traverse librement
la barrière hémato-encéphalique et se dépose sur
les noyaux gris centraux du cerveau induisant une nécrose cellulaire. Le
calcul de ce potentiel de liaison estime qu'il y a risque de fixation sur le
système nerveux central pour un taux de bilirubinémie totale >
320340 ìmol/l. Chez le nouveau-né prématuré,
hypoalbuminémique, les capacités de transport de la bilirubine
sont affaiblies. Certaines situations (anémie, hypoxie, acidose, faible
âge gestationnel, hypoglycémie, infection bactérienne)
entraînent une altération, fragilisation de la barrière
hématoencéphalique. Cette barrière fonctionnelle repose
sur plusieurs mécanismes cellulaires (diffusion passive, transports
facilités, transports énergétiques dépendants,
bilirubine oxydase intracellulaire...) qui permettent en situation
physiologique de maintenir des taux intracellulaires de bilirubine bas.
Certaines drogues modifient la concentration cellulaire intra
cérébrale de bilirubine (Ceftriaxone, par exemple);
L'immaturité des jonctions cellulaires, de l'expression des
protéines de transport explique la vulnérabilité des
nouveau-nés, d'autant plus s'ils sont nés
prématurément. Il existerait une susceptibilité
individuelle à la bilirubine (variant des protéines de
transport).
19 | P a g e
On parle d'encéphalopathie bilirubinémique aigu
ou d'ictère nucléaire et au stade de séquelles
d'encéphalopathie bilirubinémique chronique [3].
Clinique de l'encéphalopathie
bilirubinémique
Il faut évaluer la conscience, le tonus et le cri.
L'ictère nucléaire se manifeste cliniquement en 3 phases :
1° phase : (lors des premiers jours)
elle est marquée par une stupeur, une hypotonie et une succion
faible.
2° phase : apparait une hypertonie (Avec
attitude en opistotonos) .Tous les enfants qui présentent ce signe
développeront plus tard une encéphalopathie chronique.
3° phase : (après une semaine)
Cette phase est marquée par une disparition de l'hypertonie, paralysie
du regard vers le haut, des crises oculogyres hypertoniques une respiration
périodique apparait à la phase terminal 4% des nouveaux
nés atteints meurent pendant la phase aigüe aux USA.
L'encéphalopathie bilirubinique chronique survient
à long terme vers la première année, en l'absence de
traitement ou lorsque celui-ci intervient trop tardivement, sous forme des
séquelles suivantes : déficits auditifs centraux, trouble du
langage, troubles de la coordination motrice avec paralysie
cérébrale athétosique, une dysplasie dentaire, des
troubles de l'oculomotricité (verticalité du regard), une
ataxie.
II.6. MODALITES DE PRISE EN CHARGE
II.6.1. PRISE EN CHARGE PREVENTIVE
L'AAP a établi en 2004 dix recommandations clés
pour prévenir l'ictère néonatal [25] :
1. La promotion d'un allaitement de bonne qualité
2. L'établissement dans toute unité
néonatale des « protocoles ictères » précisant
en particulier les situations où les puéricultrices peuvent
prélever un dosage de bilirubine sans avis du pédiatre
3. Le dosage plasmatique de bilirubine pour tout
ictère des 24 premières heures de vie
4. L'estimation visuelle de l'ictère est source
d'erreur surtout sur les peaux foncées
5. L'interprétation des taux de bilirubine en fonction
de l'âge post-natal en heures
6. Les enfants nés avant 38 SA en particulier en cas
d'allaitement maternel sont à haut risque d'ictère
sévère
7. La mise en place d'une évaluation rationnelle du
risque d'hyper bilirubinémie sévère avant la sortie
8. L'organisation d'un suivi adapté en fonction de
l'âge de sortie de la maternité et de l'évaluation du
risque d'ictère sévère
9. La délivrance d'une information orale et écrite
« ictère » aux parents
10. L'instauration d'un traitement adapté de
l'ictère dès l'indication posée
En pratique, la prévention de l'ictère à
bilirubine non conjugué passe par :
? Le bon suivis des CPN et dosage des anticorps
irréguliers chez les femmes à risque
pendant la grossesse
? L'administration du vaccin Anti D chez toutes femmes
rhésus négatives en situation de
risque (accouchement, avortement, amniosynthèse, ...) a
fait considérablement régresser la
fréquence de l'affection mettant ainsi en lumière
l'existence d'autres incompatibilités [26]
? In utero : la surveillance des signes d'anémie foetale
par l'échodoppler cardiaque foetale
[transfusion ou exsanguinotransfusion foetale], puis prise en
charge programmée en
post natal
? Eviter les drogues en compétition avec les sites de
fixation de la bilirubine
? Le Dépistage avec la BTC en maternité chez les
nouveau-nés à risques (voir facteurs
favorisants et aggravant l'hyper bilirubinémie)
II.6.2. PRISE EN CHARGE THERAPEUTIQUE
Le choix de la thérapeutique à utiliser est
fonction du taux de bilirubine atteint.
L'usage des courbes est nécessaire pour évaluer le
risque encouru par le nouveau-né.
Tableau IV : risque du
nouveau-né par rapport à l'âge gestationnel
Risque Age gestationnel (AG) Facteurs
aggravant
Faible >38 Non
Moyen 35 à 37 Non
>38 Oui
Elevé 35 à 37 Oui
II.6.2.1. TRAITEMENT DE L'ICTERE A BILIRUBINE
INDIRECTE
a. TRAITEMENT NON MEDICAMENTEUX
Il existe différentes modalités de traitement de
l'ictère selon l'étiologie de l'ictère
néonatal. En raison des progrès techniques, la
photothérapie constitue le traitement de 1ère
intention tandis que l'exsanguino-transfusion représente
celui de dernier recours [7-9].
1. La photothérapie
Elle a été décrite pour la première
fois comme traitement des ictères néonatale en 1958 par
Crémer et coll. [7].
a) principe
Le principe de la photothérapie consiste à exposer
la peau de l'enfant à une lumière de
spectre bleu (spectre 420-490nm) : la bilirubine non
conjuguée présente en sous-cutanée
20 | P a g e
21 | P a g e
absorbe alors l'énergie lumineuse dans cette partie du
spectre induisant sa conversion en photo-dérivés qui pourront
être excrétés directement sans conjugaison hépatique
dans les selles et les urines.
On distingue trois modes de photothérapie :
La photothérapie dite conventionnelle ou
classique, dispensant de l'énergie lumineuse d'intensité
modérée à forte sur une seule face du
nouveau-né,
La photothérapie intensive dispensant
une exposition complète, pluridirectionnelle du nouveau-né avec
un éclairement énergétique intense. La
photothérapie intensive permet une décroissance du taux de
bilirubine plus rapide que la photothérapie conventionnelle (6 à
20% sur 24h dans les ictères non hémolytiques versus 30 à
40%). Le choix du type de photothérapie se fera selon le taux de
bilirubinémie interprété en fonction de l'âge du
nouveau-né et de l'étiologie suspectée.
La Photothérapie maternisée :
dans laquelle il y a une application de la lumière directement sur la
peau grâce à fibres optiques (irradiation d'une surface
limitée de peau, s'adresse à prématurés). Pas de
séparation d'avec la maman ; l'enfant revêt une turbulette
spéciale sur un bilibed (NNAT en suite de couche) ; Pas d'irradiation de
la face (donc pas de protection des yeux) ; Pas de risque d'hypothermie car
nouveau-né habillé ; Pas d'éblouissement pour le personnel
et les parents.
Figure 2 : images de photothérapie classique et
intensive [27].
b) Mode d'action
Le mécanisme d'action consiste en une
photo-isomérisation de la bilirubine non conjuguée en trois
isomères facilement éliminables sous l'action d'un rayonnement
lumineux. Ce processus irréversible transforme la bilirubine en un
isomère structural appelé lumirubine qui sera
excrétée dans la bile et les urines. La lumirubine est
hydrosoluble et possède un pic
22 | P a g e
d'absorption de 453 nm. La photothérapie agit sur la
bilirubine indirecte présente sous l'épiderme à une
profondeur de 2nm [28]. La longueur d'onde la plus efficace pour la
dégradation de la bilirubine au niveau cutané est comprise entre
400 et 520 nm avec un pic à 460 nm (avec une variation de plus ou moins
10 nm). [29] La lumière la plus efficace actuellement est une
lumière bleue. Il existe plusieurs types de lampes utilisées pour
la photothérapie : les tubes fluorescents, lampes halogènes,
système à fibre optique, les diodes électroluminescentes
mais aussi ici chez nous l'exposition au soleil reste d'actualité
[30].
c) Efficacité de la photothérapie
La rapidité d'élimination de la bilirubine non
conjuguée au cours de la photothérapie dépend de trois
grands processus : la rapidité d'altération de la bilirubine par
la photothérapie, le transport des photocomposés hydrosolubles de
la peau vers la circulation sanguine, et l'excrétion de ces
composés par le foie et par le rein. Cette élimination de la
bilirubine dépendra de plusieurs paramètres techniques [31].
> Des quantités spectrales de la lumière
délivrée (longueur d'onde) ;
> De l'intensité de la lumière
> De la surface corporelle exposée ;
> Du taux de bilirubine
> De la durée d'exposition
> De la course de l'hyper bilirubinémie
> De la distance entre l'enfant et la source lumineuse (20
à 30cm) [7].
Plus le taux initial de bilirubine totale plasmatique sera
élevé plus la diminution sera
rapide sous traitement par photothérapie. La cause de
l'ictère intervient également dans l'efficacité de la
photothérapie [32].
d) indications
Les indications de la photothérapie se font sur un
dosage sanguin de bilirubine interprété en heure de vie
post-natale et en fonction des facteurs de risques de toxicité
neurologique aggravé (âge gestationnel, hypo albuminémie,
infection, maladie hémolytique....). On définit ainsi trois
catégories d'indications :
> nouveau-né d'AG>38 SA et sans facteurs de
risque,
> nouveau-né d'AG>38SA avec facteurs de risques
ou si AG = 35-37SA sans facteurs de risques,
> enfin nouveau-né d'AG=35-38SA avec facteurs de
risques.
Les courbes d'indication de traitement de l'American Academy
of Pediatrics 2004 permettent de décider chez le nouveau-né de
plus de 35 SA de l'indication de la photothérapie intensive.
23 | P a g e
En cas de photothérapie conventionnelle, les valeurs
d'indication se situent 50ìmoles/l en-dessous de celles indiquées
sur les courbes.
Figure 3 : Courbes de référence de la
bilirubinémie pour les indications de la photothérapie
intensive
La photothérapie reste par sa facilité d'emploi
le traitement de choix de la majorité des ictères à
bilirubine non conjuguée ; elle a cependant ses impératifs et ses
inconvénients : danger de l'irradiation oculaire, risque d'apnée
....
e) Surveillance du traitement
La surveillance du traitement par photothérapie
consiste en un monitorage continu des fonctions vitales et de la
température. Une protection oculaire est indispensable lors des
séances de photothérapie. En effet, la photothérapie
comporte comme effets secondaires des troubles de la régulation
thermique (hyperthermie), une déshydratation et des atteintes oculaires.
Elle peut se compliquer de baby bleu syndrome (pour les enfants exposés
pendant longtemps à la photothérapie et ceux qui
présentent un ictère à bilirubine conjuguée mais
placées à la photothérapie). [3] Afin de contrôler
son efficacité un dosage à 6-8h ou 12h de la bilirubinémie
est recommandé. L'évaluation transcutanée du taux de
bilirubine est perturbée pendant 12 à 24h par les interactions
entre la lumière et la bilirubine présente dans la peau et ne
peut donc être utilisé. A noter que les ictères
hémolytiques et du prématuré sont fréquemment
à l'origine de rebonds.
2. L'exsanguino-transfusion
Elle se discute lorsque le taux de bilirubine est
supérieur à 350 mmol/l ; elle permet dans le même temps une
élimination de la bilirubine, des anticorps, une correction de
l'anémie ; cette technique expose cependant à des complications.
Son indication actuelle est réservée aux allo-iso-immunisations
sévères.
L'exsanguino-transfusion (EST) constitue le traitement de
dernier recours pour les hyper bilirubinémies sévères ou
associées à des signes neurologiques. C'est une technique qui
permet l'échange volume à volume de 1,5 à 2 masses
sanguines d'un individu par du sang d'un donneur exempt de bilirubine.
a) Mécanisme d'action
Son but est de soustraire des globules rouges recouverts
d'anticorps immuns, d'épurer la bilirubine libre et de corriger
l'anémie, cette technique remplace le sang du malade pour un sang
provenant d'un ou plusieurs donneurs, par soustraction et injections
successives de petits volumes de sang dans la veine ombilicale. Les
modalités de réalisation sont bien définies : le sang
total conservé moins de 3 à 5 jours et de plasma frais
congelé peut être utilisé [28]. Le volume d'échange
doit être égal à 2-2.5 fois le volume sanguin total de
l'enfant. La volémie du nouveau-né étant habituellement
considérée de 80ml/kg. O, effectue des cycles successifs avec des
échanges de 3 à 5ml/kg. Ces échanges doivent être
effectués lentement. Au cours de sa réalisation, il est
nécessaire d'injecter du gluconate de calcium
régulièrement afin d'éviter l'hypocalcémie. La
première soustraction permet de réaliser les examens biologiques.
L'exsanguino-transfusion se termine toujours par une injection du sang.
b) Efficacité
L'EST permettrait de faire baisser le taux de bilirubine
totale de 50% rapidement lors d'un échange de deux masses sanguines.
c) Indications
De moins à moins utilisé devant les
progrès de la photothérapie. Ce traitement est encore
utilisé dans certains cas d'hyper bilirubinémies
sévères avec signes neurologiques ou pour des taux de bilirubine
dépassant de 75 à 100ìmoles/l les indications de
photothérapie intensive pour l'âge. Pour exemple, le CNRHP a
réalisé 19 exsanguino-transfusions sur l'année 2011 (8 ET
concernaient des incompatibilités rhésus, 5 des
incompatibilités ABO et 5 des déficits en G6PD) [21].
Tableau V : Indications de
photothérapie et d'exsanguino-transfusion selon le taux de
bilirubine et le poids de naissance
Poids de naissance Photothérapie
Exsanguino-transfusion
< 1 500 g 135 à 170 ìmol/L*
(80 à 100 mg/L)
1500 à 2500 g 170 à 200
ìmol/L*
(100 à 120 mg/L)
> 2500 g 255 à 300 ìmol/L*
(150 à 175 mg/L)
170 à 255 ìmol/L* (100 à 150
mg/L) 255 à 300 ìmol/L* (150 à 175 mg/L) 340
ìmol/L* (200 mg/L)
24 | P a g e
* Ces seuils doivent être réduits de 34
ìmol/L (20 mg/L) en présence de facteurs de risque telsqu'une
infection, une acidose, une hypoxie, une hyper osmolarité ou une
hypo-
25 | P a g e
albuminémie. Quel que soit le niveau de bilirubine, une
exsanguino-transfusion doit être effectuée si des signes
suggestifs d'ictère nucléaire apparaissent. Le risque diminue de
façon importante après l'âge de cinq jours.
Figure 4 : Courbes de référence de la
bilirubinémie d'exsanguinotransfusion
d) Complications de l'EST
Les risques de cette procédure sont difficiles à
quantifier. Aux USA, la mort occasionné par l'EST et estimé
à 3 cas sur 1000, une mortalité évaluée entre 15%
et 74% lors de la réalisation d'une EST, les risques infectieux vitaux
étant actuellement faibles pour un donneur unique. Les complications
attendues lors de sa réalisation sont :
> Une hypocalcémie > Des apnées
> Une thrombopénie > Des hyper kaliémies
> Des infections > Des cas d'entérocolites
ulcero-
> Une acidose métabolique necrosantes(ECUN)
Le traitement est spécifique dans 50% des cas [33].
b. LE TRAITEMENT MEDICAMENTEUX
Il semble être abandonné mais encore utilisé
dans notre milieu pour ses meilleurs résultats
1. les métallo porphyrines (zinc,
protoporphyrine)
Ils agissent en inhibant l'hème oxygénase donc
en limitant la production de biliverdine puis de bilirubine. Elles ne sont pas
utilisées en France et sont plutôt réservées au
traitement des ictères ABO.
2. le phénobarbital (Gardénal)
Le phénobarbital est un inducteur enzymatique de la
bilirubine glycuronyl transférase et des protéines Y et Z. Son
utilisation a été proposée dans les années 1970
mais son action thérapeutique limitée a conduit à son
abandon progressif. Il a par ailleurs un effet indésirable
26 | P a g e
potentiel de sédation et éventuellement de
dépression respiratoire chez le nouveau-né surtout
prématuré. [28] Habituellement administré en dose unique
de 50 mg (soit 0,25ml/kg, solution orale), le Gardénal est actuellement
réservé à l'ictère de la maladie de CriglerNajjar
type II.
3. le clofibrate (Lipavlon)
Il a été utilisé jadis en tant
qu'inducteur enzymatique de la glycuronyl transférase chez les
prématurés. Il n'est plus fabriqué et n'est donc plus
utilisé.
c. TRAITEMENT ADJUVANTS
4. L'albumine
Un gramme d'albumine fixe 17mg de bilirubine
(théoriquement), le rapport 1/1 et non 1/2. On donne 1g/kg dans le
sérum glucosé 5%, proportion 1/6 d'albumine et 5/6 sérum
glucosé 5%. Ce traitement consiste à perfuser de l'albumine
humaine afin d'augmenter la quantité d'albumine circulante et donc les
possibilités de fixation de la bilirubine libre toxique pour le
système nerveux central. On conçoit qu'une hypo
albuminémie ou l'utilisation des médicaments entrant en
compétition avec la liaison bilirubine-albumine (l'indométacine,
furosémide, cotrimoxazol...) [7] majorent la part de bilirubine non
liée avec risque d'ictère nucléaire [34]. Son indication
est posée lorsque l'enfant est particulièrement vulnérable
dans son métabolisme de la bilirubine, que l'on ne dispose pas avant
plusieurs heures d'une photothérapie optimale et au mieux si on dispose
d'un dosage de BNL ou bilirubine libre non liée à l'albumine
authentifiant cette fragilité. Elle est aussi utilisée en cas
d'hyper bilirubinémie sévère, persistant malgré le
traitement par photothérapie intensive. L'albumine est donc souvent
utilisée en perfusion lente pour augmenter l'albuminémie du
nouveau-né et ainsi essayer d'augmenter la liaison bilirubine-albumine.
Elle est aussi utilisée avant la réalisation d'une EST dans le
but d'attirer la BNC dans le secteur plasmatique par son pouvoir oncotique et
ainsi permettre son élimination par l'EST. [32]. En néonatologie,
seule la forme albumine à 20% est employée. La posologie est
variable, de l'ordre de 1 à 2g/kg de l'enfant, dilué de
moitié avec du glucosé à 5% à administrer en
perfusion lente de 2 heures. La perfusion peut être renouvelée 24
heures plutard si la bilirubinémie reste dans les zones dangereuses
[35].
5. L'injection d'immunoglobulines intraveineuse
Le mécanisme d'action des immunoglobulines consiste
à assurer le blocage de l'hémolyse. L'injection
d'immunoglobulines G (IgG) appauvri en anticorps anti-A et anti-B en
intraveineuse est préconisée dans les ictères
hémolytiques par incompatibilité foeto-maternelle (Rhésus
D et système ABO). Il n'existe aucune prophylaxie pour ce type
d'incompatibilité. Des études portant sur le traitement des
nouveau-nés atteints de la maladie
hémolytique à incompatibilité ABO et
rhésus ont montré que l'administration d'IgG IV réduisait
le nombre d'enfants ayant besoin d'exsanguino-transfusions, ainsi que la
durée du traitement par photothérapie. Il a également
été montré que cette thérapie réduisait
l'hémolyse, les taux de bilirubinémie et la
nécessité de pratiquer des exsanguino-transfusions.
6. Autres
> Traitement de l'anémie associée : une
anémie parfois s'avère peut être associée à
l'ictère ou être le seul témoin de l'hémolyse. [36]
Les seuils transfusionnels sont différents de ceux habituels et tiennent
comptent de différents facteurs : le taux d'hémoglobine et
d'hématocrite; l'existence des signes de
régénération médullaire, de la rapidité
d'installation de l'anémie, des signes de mauvaise tolérance, des
pathologies ou facteurs de risque associés (détresse
respiratoire, prématurité...)
> Post care : tout nouveau-né ayant fait
l'ictère sera suivi même après guérison en vue de
dépister les complications et séquelles passées
inaperçues. Il sera revu une fois le mois pendant le premier mois puis
une fois tous les trois mois, une fois tous les six mois enfin une fois l'an.
Les examens suivants sont réalisés : l'examen neurologique
complet, ophtalmique et l'audiométrie [32]
II.6.2.2. TRAITEMENT DE L'ICTERE A BILIRUBINE DIRECTE ET
MIXTE
a. TRAITEMENT MEDICAMENTEUX
> Pas de photothérapie,
> Apport hydrique [glucosé 10%],
> Supplémentation en vitamine
> Il dépend de l'étiologie. Exemple :
traitement antibiotique pour les infections ...
b. TRAITEMENT CHIRURGICAL
L'intervention de Kasaï (hépatoentérostomie)
qui consiste à réaliser un court-circuit des canaux biliaires
atrésiques ou fibrosés [24].
27 | P a g e
28 | P a g e
|