Analyse de l'impact des activités de l'association nationale pour le bien etre de la population (ANBEP) dans la dynamique du développement local au Sénégalpar Aliou WANE Université de Franche Comté (France) - Master 2 Aménagement et Gouvernance dans les Pays des Suds 2012 |
CHAPITRE I : LE SYSTEME D'ACTEURS ET DE GOUVERNANCE LOCALESe trouvant presque dans une situation d'abandon social, hors du soutien des institutions et de la reconnaissance de l'Etat, les populations de Yeumbeul ont pris connaissance de cette faiblesse et ont entreprit une dynamique spatiale qui part de l'existence de forces sociales organisées. Ce projet de territoire s'est effectué sur la base des réseaux de solidarité locale (familiaux, traditionnel et ou de voisinage) et constitue le principal rempart des habitants face aux aléas de l'existence. ANBEP demeure un point de départ dans la génération d'une dynamique de promotion de la culture démocratique et d'amélioration des conditions de vie. Dans ce rôle, elle est appuyée par un système d'acteurs ayant des rapports divers. Une gouvernance locale spécifique découle de ce jeu des acteurs.
Plusieurs acteurs interviennent dans les actions de développement local de Yeumbeul à différentes échelles. En fonction de leurs missions et de leurs spécificités, ils jouent divers rôles qui revêtent un caractère stratégique créant des interférences (doubles emplois et conflits). Il est nécessaire de distinguer ces différents acteurs appuyant l'ANBEP dans la dynamique spatiale afin de distinguer leurs prérogatives. A chaque type d'activité, des acteurs spécifiques interviennent dans sa réalisation. D'une manière explicite, on peut les regrouper en trois catégories (ANBEP au niveau local ou micro, l'Etat et les bailleurs de fonds au niveau macro) en fonction de trois échelles : quartier, commune d'arrondissement et projet. - Echelle quartier : ANBEP et les délégués de quartiers Les acteurs que nous retrouvons à l'échelle du quartier sont d'abord l'association de développement locale ANBEP et les délégués de quartier. ANBEP joue un rôle de maitre d'oeuvre, elle a identifié les contraintes et les besoins de son territoire d'action. Elle met en place plusieurs projets tels que : ramassage des ordures, alimentation en eau, installation de puisards, formation en santé - hygiène, implication dans les actions de développement et d'amélioration des conditions de vie. Elle capte l'aide, mobilise et organise les habitants devant les institutions internationales au point d'ailleurs de vouloir s'assurer le monopole de la représentation locale. ANBEP coiffe les quartiers de sa zone d'intervention où l'on retrouve les délégués de quartier. Les fonctions de délégués de quartier sont régies par le décret n°86 - 761 du 30 juin 1986 relatif à l'organisation des communes en quartier et fixant leurs statuts. Les délégués de quartier sont mobilisés par les autorités administratives et municipales aux affaires relatives à l'hygiène et la salubrité publique ainsi que la sensibilisation et la mobilisation de la population pour combattre les calamités graves. Leurs pouvoirs se résument aux signatures des certificats de domicile, signatures des actes de vente, le recouvrement des impôts et le recensement des ménages. ANBEP et délégués de quartier ont comme principale cible la population notamment l'amélioration de leurs conditions de vie et la mise en place d'un dispositif organisationnel pour une prise en compte spécifique à chaque sous groupe de la population (jeunes, vieux, femmes et hommes). - Echelle communale : Sous préfet, Maire et services techniques A ce niveau, les acteurs qui interviennent directement dans les quartiers sont les organes déconcentrés en l'occurrence le sous préfet et les services techniques de même que le maire (organe décentralisé). L'année 1996 marque une étape décisive à l'échelle nationale par la subdivision des départements en arrondissement accompagnant la division de la Ville de Pikine en communes d'arrondissement pour un affinement de la maille administrative. A travers le sous préfet cette déconcentration vise à instituer des relais dans la zone périurbaine échappant à l'emprise de l'appareil administratif assez lointain parce que limité au niveau préfectoral (décret n°96 - 1117 du 27 Décembre 1996). Son rôle est le contrôle de légalité à postériori des actes municipaux. Les délégués de quartiers sont également nommés par arrêté du sous préfet. Né à la suite de gestion liée à la grande étendue des territoires communaux et à la croissance démographique, la Ville de Pikine est subdivisée en 16 communes d'arrondissement dont celle de Yeumbeul Nord et de Yeumbeul Sud érigées au sein même des quartiers non réglementaires. Le maire d'arrondissement assure la gouvernance locale à travers la gestion des marchés de quartier, les petits travaux d'assainissement et d'hygiènes, la participation à la collecte des ordures ménagères, l'entretien des équipements scolaires, sanitaires... Les maires et les délégués de quartiers constituent les premiers interlocuteurs institutionnels des citadins ordinaires, ce qui est primordial dans les quartiers mal lotis où les équipements comptent parmi les premières revendications des habitants. - Echelle projet : les partenaires au développement A ce stade, on retrouve les bailleurs de fonds (UNESCO, PNUD, Solidarité SIDA...) et les organisations non gouvernementales dont principalement ENDA ECOPOP et AJED. En gros, ces différents bailleurs de fonds ont la même approche fondée sur l'auto développement (appui sur les acteurs locaux, la gouvernance locale comme la solidarité locale). Ils encouragent la mobilisation locale, s'appuient sur les ressources réelles et la recherche - action. Ils mobilisent les actions concertées des administratives locales et des agents de développement. Figure 2: Cadre général d'intervention des acteursANBEP Représentant l'organisation des quartiers Echelle quartier
AJED, Enda Ecopop ONG locale de développement ETAT Commune d'Arrondissement Sous préfet, Services techniques
Echelle communale Echelle projet
Partenaires au développement Organisations Internationales - UNESCO - PNUD
Légende Lien intense Relation moins intense Cette figure (figure 2) illustre les principaux acteurs intervenant dans l'aire d'intervention d'ANBEP, de même que les liens entre les structures. Les institutions ont un rôle de régulation de la vie sociale que ne peuvent accomplir ni les associations de quartier, ni les ONG de développement. De même, les bailleurs de fonds et les ONG favorisent la recherche-action, élaborent, promeuvent des cadres et des modèles d'action pour le développement et la promotion d'une culture démocratique en milieu urbain. Ils coordonnent et financent les différents projets. Les ONG ENDA Ecopop et AJED jouent un rôle d'opérateur technique. La typologie des acteurs, les positions qu'ils occupent et les liens les mettant en relation sont divers. ANBEP est à l'origine de la dynamique territoriale de Yeumbeul autour des projets en particulier le projet PADAEC de l'UNESCO. Elle présente des potentialités que tous les bailleurs de fonds ont besoin pour entamer des actions : le diagnostic socio-économique de Yeumbeul et la mise en place d'un plan d'actions pour le développement de la banlieue. Elle joue un rôle d'animateur des projets par la sensibilisation des populations cibles. Elle est ainsi un intermédiaire entre les ONG chargé de la maitrise d'oeuvre et la population bénéficiaire. Même si la commune d'arrondissement est au-dessus de cette association officiellement (élus locaux), les rapports ne sont pas des meilleurs car la zone d'intervention de l'association constitue également l'aire d'influence de la municipalité. D'intenses liens unissent les chefs de quartiers et les maires en fonction des alliances politiques (figure 3). La confrontation entre ANBEP et les élus locaux est donc patente19(*) : d'un coté ANBEP s'approprie volontier des quartiers de sa zone d'influence, de l'autre les élus se présentent comme les dirigeants de la population au sein de la commune d'arrondissement qu'ils assimilent de la sorte à leur « territoire ».
* 19 Le Maire aurait à l'occasion de la délimitation des zones, tenté de scinder le territoire d'action de ANBEP c'est-à-dire les quatre quartiers : Néma, Gandiol, Ouest 3 et Houdalaye, en les rattachant à des conseils de zone installés dans d'autres quartiers. Mais cette tentative a visiblement échoué. En effet, les quatre sous quartiers ont été intégrés à une même zone, dirigés par le président de l'ANBEP de surcroit. |
|