Section II : L'arbitrage entre performance sociale et
viabilité financière : le schisme de la microfinance
Le schisme de la microfinance fait apparaitre une
opposition marquée entre l'approche Institutionnaliste et l'approche
Welfariste. Une analyse précisant les principaux points de divergence
situe notre problématique au coeur du débat actuel se focalisant
essentiellement sur l'arbitrage entre portée sociale et viabilité
financière.
1 .Le débat entre Institutionnaliste et
Welfariste
Le terme microfinance regroupe un ensemble
d'institutions, d'approches et de philosophies souvent très
différentes. Il est cependant possible de distinguer deux courants
généraux départageant les différentes approches et
institutions selon leur allégeance à un certain nombre de
principes. Il s'agit selon Morduch (2000) de l'approche
Institutionnaliste et de l'approche Welfariste.
1.1. L'approche
Institutionnaliste
Elle vise la création d'institutions
financières vouées à servir des clients qui ne sont pas ou
qui le sont insuffisamment par le système financier formelle
(Woller et Al ; 1999).
La thèse Institutionnaliste repose sur l'idée
selon laquelle la microfinance, aussi efficace soit-elle, ne fera jamais de
véritable différence sur le niveau général de
pauvreté dans le monde si les opérations dépendent du
financement des bailleurs de fonds.
Dans ces conditions, les IMF se doivent d'aspirer au
moins à l'autosuffisance opérationnelle sous peine de ne jamais
réaliser les promesses que porte le mouvement de microfinance à
savoir une réduction drastique du niveau de la pauvreté.
Pour les Institutionnalistes, leur centre
d'intérêt se trouve être l'institution en tant que telle et
son efficacité se vérifie grâce à des indicateurs de
performance financière ou de performance sociale tel que le nombre de
clients servis ou le taux de remboursement. L'approche Institutionnelle
considère également qu'un des objectifs primaires de la
microfinance est l'approfondissement financier, la création d'un
système séparé et viable d'intermédiation
financière pour les pauvres. Leur approche de la microfinance en est un
des systèmes financiers dans laquelle le futur de la microfinance est
dominé par de nombreuses institutions oeuvrant à grand
échelle, à la recherche de profits, qui fournissent des services
financiers de grande qualité à un grand nombre de clients pauvres
(Ghatak et Guinanne, 1999). A côté de l'approche
Institutionnaliste, nous avons l'approche Welfariste.
1.2. L'approche
Welfariste
Les Welfaristes se fondent plutôt sur la
théorie de la responsabilité sociale vis-à-vis de la
clientèle afin de répondre à ses attentes. Cette
école de pensée évalue la performance de l'IMF du point de
vue du client à travers la portée sociale et l'analyse d'impact.
Elle cible donc les plus pauvres dont les revenus sont à 50%
inférieurs au seuil de pauvreté (1$ par jour) et vise à
améliorer leurs conditions de vie (Adair P., Berguiga I.,
2010).
Selon toujours cette approche du bien-être social,
non seulement les IMF peuvent être durables sans être
financièrement autosuffisantes mais elles ne doivent pas rechercher
l'autosuffisance à tout prix. Ce phénomène peut conduire
inévitablement à un effacement de leurs missions sociales. En
détournant la microfinance de ses fondements idéologiques, la
recherche de la performance financière constituerait un frein à
l'innovation et à la réduction de la pauvreté
(Servet, 2007).
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