II-2. Expériences vécues dans les pays
nouvellement développés
Les pays de l'Asie de l'Est tiennent une place spéciale
dans l'économie mondiale en matière de développement
économique dans la mesure où leurs économies se sont
rapidement développées et qu'ils ont pu soutenir à long
terme un très fort taux de croissance économique avec une
distribution plus égalitaire de revenu. Une situation inhabituelle que
la Banque Mondiale n'hésite pas de qualifier de « miracle asiatique
». Nous prendrons ici le cas de la Corée.
II-2-1. Politiques de lutte contre la pauvreté au
Corée
Pour réduire la pauvreté, l'Etat coréen
avait axé sa politique sur une distribution initiale de revenu plus
équitable.
Graphique n°6. La distribution du revenu par
niveau de développement et par région en 1976
1976
![](Rle-de-letat-dans-la-reduction-de-la-pauvrete--Madagascar13.png)
44
Comme bon nombre d'observateurs l'assurent, et aussi comme le
graphique ci-dessous le montre, la Corée avait exceptionnellement un
faible niveau d'inégalité pour un pays à bas revenu avant
son décollage économique ou « take off1 ».
Cette situation a été le résultat des réformes de
l'après-guerre notamment des réformes agraires.
En effet, à la libération, 75,5 % de la
population active vivait dans le monde rural où un petit nombre de
propriétaires possédait la majorité des terrains
agricoles, rendant plus de 80 % des ménages ruraux liés au
système de métayage dont les taux de rente variaient entre 50 %
et 90 % de la récolte annuelle (Looney, 1975). A cause de cette
situation d'inégalité sociale très marquée des
troubles politiques graves étaient à craindre.
Le premier gouvernement indépendant de 1945, par l'acte
d'amendement des réformes agraires, procédait à la seconde
étape des réformes (Jeon and Kim, 2000). En
référence à cette loi, le gouvernement achète
toutes les surfaces cultivées au-delà de 3 ha à leurs
propriétaires, avec des bons de trésor où sont
indiqués la période des compensations (souvent cinq ans) et les
prix de la terre en pourcentage de la récolte annuelle. Puis, la terre
est vendue aux paysans au prix équivalent à 1,5 fois de sa
récolte annuelle, payable au bout de quatre ans.
En plus, diverses politiques accompagnatives ont
été instaurées, telles que les programmes de soutien aux
prix des produits agricoles, les programmes de marketing, le contrôle de
la distribution des engrais, l'accessibilité au crédit par
l'intermédiaire des coopératives rurales, le règlement des
prêts à taux usuraire dans le milieu rural ont aussi exercé
un effet égalisateur (LOONEY, 1975). C'est la quatrième voie de
redistribution du revenu.
Enfin, l'appropriation par les gouvernements des
activées industrielles abandonnées par le japonais (soit 90 % du
total) pendant plus de 10 ans, la guerre de Corée causant des
dégâts et des pertes énormes qui ont touché surtout
le plus riche. L'important processus de formation entreprit après la
libération, avec une opportunité d'éducation ouverte
à tous, ont eu aussi à différents degrés des
impacts positifs sur la distribution du revenu (Choo, 1980).
1 Walt Whitman Rostow, dans son ouvrage "Les
étapes de la croissance économique", publié en 1960,
a tenté de "dégager les caractéristiques uniformes de la
modernisation des sociétés". Selon cet auteur, les
sociétés parcourent au cours de leur développement cinq
différentes étapes : la société traditionnelle, les
conditions préalables au décollage, le décollage (take
off), le progrès vers la maturité et l'ère de la
consommation de masse.
45
Tableau n°VIII. Total de recettes et la
distribution (unité=1000suk)
Recettes en riz
|
Recettes en liquide
|
Recettes en garantie foncière
|
Total
|
Compensation des propriétaires
|
Investissement agricoles administratifs
|
Reste
|
9022
(77,9%)
|
2291
(19,8%)
|
165
(1,4%)
|
11578
|
3048
(26,3%)
|
1680
(14,5%)
|
6850
(59,2%)
|
Source : A partir des statistiques de Jeon et Kim
(2000) /Suk=180,4 won.
Lors de paiement en liquide, l'Etat a appliqué des prix
réglementés beaucoup plus bas que les prix du marché. Avec
les investissements agricoles réalisés pour la mise en valeur des
terres arables, ceux-là constituent la troisième voie de
redistribution du revenu. Il est à remarquer qu'une telle situation a
laissé aux anciens propriétaires et aux métayers une marge
de manoeuvre certaine leur permettant de conclure des contrats de vente dont
les termes ont été plus avantageux pour les deux parties. Ainsi,
les cessions volontiers de terre ont représenté à peu
près la moitié du total des terres redistribuées (Mason et
al., 1980).
|