2. Les conséquences de cette
intermédiation
Qu'il s'agisse d'un financement direct sur les marchés
financiers ou d'une intermédiation financière par le biais des
banques, le système financier de l'espace UEMOA est basé sur le
recours au crédit assorti d'intérêt. Ce dernier a certes
des avantages : il permet au prêteur de fructifier son capital sans
prendre de risque ni même fournir un quelconque effort. Mais il n'est
pas, de manière générale, exempt d'inconvénients
relativement à la distribution, à la production et à la
consommation comme nous allons le voir dans les parties qui vont suivre.
2.1. Conséquences sur la production
Comment produire? Voici là l'une des questions
fondamentales dont traite le système économique. En effet, cette
production fait intervenir principalement quatre (4) facteurs : la terre, le
travail, l'entreprenariat et le capital. Concrètement, pour produire,
l'entrepreneur a besoin du capital afin d'assurer les dépenses
nécessaires au travail de la terre. Or dans un système où
le transfert du capital est essentiellement basé sur le prêt
à intérêt, et sans prise de risque (l'essentiel des
crédits étant accordé par les banques), il va de soi que
ce dernier souffrira d'une inefficience dans l'allocation des ressources
destinées à la production. En effet, entre plusieurs projets, le
choix sera vraisemblablement porté sur le projet dont le
propriétaire a la possibilité de donner des garanties même
si la rentabilité économique est questionnable. Quant aux autres,
quelle que soit la pertinence de leur projet, ils n'y auront pas accès.
Le financement est ainsi orienté vers la sécurité
plutôt que vers la croissance. Ce système tend à favoriser
ainsi les grands business (grandes entreprises), au détriment des PME
qui présentent pourtant un taux
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La finance islamique : Réglementation et financement des
PME dans l'espace UEMOA
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de croissance plus élevé et qui sont porteuses
d'innovation. Ainsi, la problématique du financement des PME se pose
avec acuité. Il est évident qu'un tel système aura
inexorablement des conséquences sur la distribution et la
consommation.
2.2. Conséquences sur la consommation
Le financement basé sur l'intérêt
encourage l'endettement d'une part, et le consumérisme de l'autre. Ce
système encourage en effet, la surconsommation de produits de luxe au
détriment de produits de base essentiels au bon fonctionnement de toute
société. La compréhension de ce fait, passe
inévitablement par celle de la réponse à la question de
savoir : « d'où vient l'argent ?». Cette question
évoque pour la plus part des gens la fabrication des billets ou des
pièces de monnaie. On croit que c'est le gouvernement qui crée
l'argent que nous dépensons. C'est vrai en partie, car ces symboles
(billets et pièces métalliques) que l'on appelle l'argent, sont
fabriqués par des agences fédérales. Mais la plus grande
partie (85%) 3 de l'argent en circulation (la masse
monétaire) est créée par des entreprises privées :
les banques. En effet, les banques créent de l'argent directement
à partir des promesses de remboursement faites par les emprunteurs.
Concrètement, à chaque fois qu'une personne emprunte
auprès des banques, de l'argent est créé. Le montant total
d'argent qu'il est ainsi possible de créer n'a qu'une seule limite : le
montant total de la dette. Les banques peuvent donc prêter autant
d'argent qu'on est capable d'emprunter même si ce dernier n'existe nulle
part. Cela est rendu possible par le système de réserves
fractionnaires qui est un ratio de réserve minimale permettant aux
banques de prêter un montant fictif d'argent garanti par un moindre
montant d'argent réel (exemple 10 francs fictifs pour 1 franc existant).
Les réserves d'une banque sont ainsi faites de deux choses: Le montant
en devises réelles qu'elle a déposé au niveau de la banque
centrale, et le total de son argent dette (argent crée à partir
des emprunts). En résumé, les banques prêtent de l'argent
qu'elles n'ont pas ! L'on est donc confronté à un problème
de taille. Les banquiers ne créent uniquement que l'argent du principal
lors d'un prêt. Ils ne créent pas l'argent servant à
rembourser les intérêts. Or, le seul endroit où les
emprunteurs peuvent trouver de l'argent pour rembourser le principal et les
intérêts est la réserve totale d'argent constituée
uniquement du principal. Il est donc tout à fait impossible pour tout le
monde de trouver l'argent du principal et des intérêts car
l'argent des intérêts n'existe pas. A moins que de plus en plus de
nouvelles dettes soient contractées pour créer l'argent servant
à payer les intérêts, car, sans dette, il n'y a pas
d'argent. Cela cause donc une escalade perpétuelle de l'endettement
total.
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Les ménages, les entreprises et surtout les
États sont condamnés à s'endetter de façon
incessante sous peine de voir tout le système monétaire
s'effondrer comme lors de la grande dépression de 1929-1933. Les banques
encouragent donc les consommateurs à s'endetter de plus en plus car
comme le mentionne Bill Bowner4, « toute notre
économie mondiale dépend du consommateur ; s'il cesse de
dépenser de l'argent qu'il n'a pas pour des choses dont il n'a pas
besoin, nous courons à notre perte ».
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