I- La crise ivoirienne de novembre 2010
La crise postélectorale de Côte-d'Ivoire a
été le théâtre de la manifestation des
stratégies des États face à l'action collective entreprise
par l'UA. En effet, lors de cette crise, plusieurs chefs d'État se sont
manifestement écartés de la position adoptée par le panel
des cinq chefs d'État désignés par l'UA191.
L'objectif de ce panel était de soumettre aux protagonistes ivoiriens
une solution contraignante de sortie de crise. Après examen de la
situation, le panel a reconnu Alassane OUATTARA comme seul président
légitime de Côte d'Ivoire. Cette position sera
entérinée par le Conseil de Paix et de Sécurité de
l'Union Africaine le 28 janvier 2011. Pourtant, au moins sept chefs
d'État africains192 étaient favorables au maintien de
Laurent GBAGBO et donc contre une intervention de l'UA en faveur de OUATARA.
L'Afrique du Sud qui, manifestement soutenait le maintien de GBAGBO et
était plutôt en faveur d'une solution diplomatique et non
militaire s'est comportée comme un acteur rationnel qui cherchait «
à faire en sorte que les échanges qui le lient aux autres
acteurs lui soient plus profitables possibles193 ».
Derrière le « double jeu » joué par l'Afrique
du Sud dans le conflit ivoirien, se cachait de multiples intérêts
pour ce pays dans sa relation avec Laurent GBAGBO, notamment la perspective des
contrats dans les domaines du pétrole et de la banque194.
Pretoria s'est écarté de la structure
d'autorité formelle et est entré en coalition avec GBAGBO sur la
base d'intérêts communs, affichant ainsi un comportement
stratégique au service de ses intérêts propres. Ce type de
comportement qui contribue à freiner l'action collective de l'UA et
partant du processus d'intégration régionale en Afrique a
été aussi perceptible lors du vote de la Résolution
1973.
191 Ce panel était constitué des
présidents sud-africain Jacob ZUMA, mauritanien Mohamed OULD ABDEL AZIZ,
tanzanien Jakaya KIKWETE, tchadien Idriss DEBI et burkinabé Blaise
COMPAORE. Il faut tout de même remarquer que Blaise COMPAORE n'a pas pu
effectuer le déplacement d'Abidjan à cause de l'hostilité
manifestée à son égard par les partisans de Laurent
GBAGBO.
192 Il s'agit des chefs d'État de : Angola, Gambie,
Guinée Équatoriale, Ghana, République Démocratique
du Congo, l'Afrique du Sud et l'Ouganda.
193 Stéphane DION, « Erhard FRIEDBERG et l'analyse
stratégique », Revue française de science
politique, 43è année, n°6, 1993, p. 995.
194 Guy MVELLE, Op. Cit. p. 25.
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