La location-gérance de l'entreprise en difficulté en droit des procédures collectives OHADA( Télécharger le fichier original )par Emmanuel TSAGMO TAMEKO Université de Dschang - Master 2011 |
Conclusion de la deuxième partieLe droit OHADA des procédures collectives d'apurement du passif est marqué par le souci, non seulement d'empêcher la défaillance de l'entreprise, vecteur du développement socio-économique, mais aussi de donner, tant que cela est encore possible, une chance de redressement à l'entreprise qui connaît des difficultés économiques de nature à engendrer sa mort tout en protégeant les créanciers et en assurant leur désintéressement dans les meilleures conditions possibles. Le désintéressement des créanciers est garanti directement par le paiement de leurs créances et indirectement par la possibilité pour eux d'exercer des recours contre ceux qui mettraient en mal leurs droits. Le paiement des créances s'effectue principalement au moyen des redevances versées par le locataire-gérant et accessoirement à travers la possibilité de mise en oeuvre du mécanisme de la compensation. En ce qui concerne l'ordre de distribution de ces deniers, en l'absence d'un ordre de distribution des deniers de l'entreprise en redressement judiciaire, un ordre approximatif permettant de prendre en compte tous les créanciers a été envisagé. En ce qui concerne les recours des créanciers, ils peuvent être exercés soit contre les débiteurs de la redevance, que sont le locataire-gérant et la caution, soit contre les organes de la procédure à savoir d'une part, le syndic et le contrôleur et d'autre part, le Juge-commissaire et le Ministère Public. CONCLUSION GÉNÉRALELes États africains, particulièrement ceux membres de l'OHADA, ont plus que besoin dans un environnement économique de plus en plus concurrentiel, d'exploiter toutes les mesures idoines permettant de sauvegarder et d'assurer le développement de leurs entreprises. Il est, une réalité indéniable que l'entreprise joue un rôle majeur et crucial dans la vie économique et sociale d'un pays, d'une région ou d'un continent. L'employeur y tire des bénéfices, les employés des revenus, les bailleurs de fonds des intérêts sur des prêts consentis, les usagers et les clients des biens et des services, l'État des impôts et la création d'emplois. Sa disparition ne peut qu'avoir des conséquences économiques et sociales désastreuses pour les pays africains membres de l'OHADA. Pour stopper l'hémorragie, le recours à la location-gérance serait intéressant car elle permettrait d'assurer le sauvetage de tout ou partie de l'entreprise en difficulté, d'en pérenniser l'exploitation et de maintenir les emplois qui y sont attachés, mais aussi de désintéresser dans la mesure du possible les créanciers. La pérennisation de l'exploitation de l'entreprise en difficulté au moyen de la location-gérance requiert l'existence des contrats en cours. La manipulation des contrats à l'intérieur du droit des procédures collectives est délicate. En effet, le législateur OHADA a marqué sa faveur pour les contrats dont le maintien permettra de sauver l'entreprise en difficulté, notamment le bail commercial, dont l'une des particularités tient à ce qu'il ne s'agit pas d'un contrat comme les autres. En outre, l'on peut également préconiser le maintien des contrats de louage d'objets et de fourniture tels les contrats de commission, de franchise et de concession exclusive. Pour ce qui est des contrats de travail en cours au moment de l'ouverture des procédures collectives d'apurement du passif, leur exécution doit se poursuivre quel que soit le mode de continuation de l'exploitation de l'entreprise. Malheureusement, l'on se rend compte que pour parvenir au redressement harmonieux de l'entreprise en état de cessation des paiements, il faille licencier pour motif économique quelques employés lorsque le recours aux mesures alternatives s'est avéré infructueux. En ce qui concerne l'analyse de la location-gérance comme moyen d'apurement du passif, le mécanisme contribue, semble-t-il, au désintéressement des créanciers de l'entreprise en difficulté. Les redevances versées par le locataire-gérant devant être directement distribuées aux créanciers. Toutefois, il peut arriver que le mécanisme de la compensation soit mis en oeuvre, lorsque le locataire-gérant est par exemple créancier dans la masse ou l'est devenu par la force des choses. Malheureusement, il a été constaté que le législateur communautaire n'a pas prévu un ordre de distribution, entre les créanciers, des deniers issus de la location-gérance de l'entreprise en difficulté. Face à ce triste constat, un ordre relatif de répartition a été préconisé. Par ailleurs, il faut noter que le désintéressement des créanciers de l'entreprise en difficulté mise en location-gérance est également garanti par la possibilité pour eux d'engager la responsabilité de ceux qui porteraient atteinte à leurs droits. Il s'agit de la possibilité d'exercer des recours respectivement contre le locataire-gérant véreux et la caution, le syndic, le contrôleur, le Juge-commissaire et le représentant du Ministère Public. Au demeurant, il apparaît que la faillite des entreprises n'est pas une fatalité car des voies et moyens ont été identifiés comme susceptibles d'en assurer leur redressement. C'est ce que s'efforce juridiquement de faire le législateur OHADA des procédures collectives qui envisage le sauvetage de tout ou partie de l'entreprise en difficulté par la location-gérance. Cette étude aura permis d'apprécier, en cette période de morosité économique où il existe pourtant un marché de l'entreprise en difficulté, le rôle majeur que peut jouer la location-gérance dans le redressement et la restructuration des économies des pays africains membres de l'OHADA. Á condition toutefois, que les pouvoirs publics africains reconnaissent les fondements d'une législation des entreprises en difficulté et d'une pratique incitative au sauvetage de l'entreprise africaine. Les pouvoirs publics et les partenaires socio-économiques doivent prendre conscience que la vitalité et le dynamisme économique ne passent pas seulement par la création d'entreprises nouvelles, mais aussi par la sauvegarde d'entreprises plus anciennes et défaillantes. Celle-ci nécessite comme le souhaitait un auteur265(*), la réunion d'un ensemble de mesures homogènes spécifiques, intégrant plusieurs disciplines aussi bien juridique, financière, économique que commerciale. Ainsi, nul doute qu'en faisant recours à temps à la location-gérance, il n'y aura plus lieu de toujours chercher sans trouver, en Afrique, des entreprises en difficulté qui se redressent. * 265 Cf. ALILI (S. M.), op. cit., p. 20. |
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