Dans cette première partie, nous commencerons par
présenter le marché de la musique enregistrée puis dans un
second temps, nous nous intéresserons à la crise qu'il subit
actuellement afin d'en connaitre les raisons et voir si les réactions de
l'industrie musicale face à cette dernière sont
cohérentes.
Ce premier chapitre, nous permettra de nous familiariser avec
le marché de la musique enregistrée, de connaitre ses chiffres et
ainsi voir les conséquences de l'actuelle crise.
Dans cette section, nous allons nous demander comment la
filière musicale s'articule ?
Et également repérer quelles sont les acteurs et
comment ils se répartissent entre eux la valeur
générée par la musique enregistrée ?
· La filière industrielle de la
musique
La filière musicale peut se décomposer
en 4 éléments qui sont la création artistique,
l'industrialisation (ou la transformation d'une oeuvre en un produit
reproductible), la promotion et enfin la commercialisation.
La création artistique se compose de
3 maillons : les auteurs de l'oeuvre musicale (compositeur de la musique et
auteur du texte), l'éditeur musicale qui a pour rôle d'administrer
l'exploitation de l'oeuvre (trouver une maison de disque par exemple) et
l'artiste-interprète. L'artiste et l'auteur pouvant dans de nombreux cas
être la même personne.
L'industrialisation se compose d'un
producteur et d'un éditeur phonographique. Le producteur finance
l'intégralité du master2 dont il détient la
propriété et prend en charge tous les
2 ou bande mère, il s'agit de la
version originale d'un enregistrement
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Master 1 Management - Parcours Marketing
frais d'enregistrement et de mixage ; tandis que
l'éditeur phonographique, lui s'assure de la reproduction de
l'enregistrement sur un support physique (disque compact, dvd ...) ou
numérique.
La promotion, troisième maillon de la
filière s'inscrit dans une double logique : par une promotion
centralisée directe qui s'opère par le biais de dépenses
publicitaires en télévision, en radio, en presse et avec le
référencement payant sur internet ; ou indirecte par la diffusion
de titres en télévision, radio ou autre. Une promotion
décentralisée se met également en place grâce aux
interactions entre consommateurs : bouche à oreille pour le cercle
amical et familial, réseaux communautaires sur internet pour le
reste.
Enfm la commercialisation se divise en 2 avec
: la distribution qui correspond à la mise à disposition de
l'oeuvre auprès de grossistes puis de détaillants, et la
commercialisation finale du produit, c'est à dire la vente de celui ci
au consommateur.
La filière musicale :
Création artistique industrialisation Promotion
Édition ~r+terpréta#io~~ Production
graphique (enregistrement
Édition lvtarke[Fng
pho nog raphigue Bouche
(fabrication) â oreiI1e
omcricrCilIrs 1.rrjrl
Source : Etude sur l'industrie du disque par Nicolas Curien
et François Moreau, septembre 2006
Les liens entre les différents chainons et
maillons de l'industrie musicale peuvent être marchands et sont
alors régis par des contrats ou bien hiérarchiques :
ainsi, le métier d'éditeur musical indépendant
disparait peu à peu pour laisser la place à celui
d'éditeur-producteur. De même, l'activité des majors3
inclut de plus en plus l'édition musicale et phonographique, la
production et la distribution.
Les modes de rémunération des différents
métiers de la filière musicale sont différents. Si
l'édition phonographique, la distribution et la commercialisation sont
habituellement rémunérées proportionnellement aux ventes ;
la rémunération de la création, elle, apparait plus
complexe et passe par le biais de nombreux droits (droit d'auteur, de
propriété intellectuelle ...).
3 société multinationale de
l'industrie du disque (Warner, Sony-BMG, Universal, EMI)
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· Les acteurs du marché
- Les auteurs et
artistes-interprètes
La distinction entre auteur et artiste étant souvent
trop arbitraire dans bon nombre de courants musicaux, on parlera dans cette
partie de créateur de musique, terme regroupant les auteurs
également artiste, ce qui représente plus de 3/4 de la
création artistique. Quel que soit leur statut, ils ne vivent pour
très peu d'entre eux uniquement que de la vente de leur musique, ces
derniers étant rémunérés en fonction de leurs
droits d'auteurs4. Il faut savoir qu'aujourd'hui, le spectacle
vivant constitue 75% de leurs revenus grâce aux cachets
générés par les concerts et par le statut d'intermittent
du spectacle qu'il est possible d'obtenir dès lors qu'un certain nombre
de spectacles est réalisé chaque année. Si cette
prédominance est criante pour les artistes touchant peu de royalties,
elle prévaut également chez les superstars qui vendent des albums
par millions.
- Les maisons de disques
Les maisons de disques « assurent
l'intégralité du cycle de distribution et de production d'un
phonogrammes ». Toutefois, il est admis dans la profession que
son rôle se limite à la production et à l'édition.
Elles possèdent en général plusieurs labels,
des marques servant à commercialiser un certain nombre
d'oeuvres homogènes d'un point de vue artistique. On peut distinguer
des labels intégrés qui appartiennent à
une maison de disque, des labels en licence qui appartiennent
à un producteur indépendant ayant passé un accord de
licence, et des labels de distribution appartenant à
une maison de disque ayant conclu un accord de distribution. Le terme «
major » désigne une firme multinationale tel que Warner music,
Sony-BMG, Universal music ou encore EMI, présente sur l'ensemble du
cycle de production et de distribution. Une major détient plusieurs
labels intégrés, en licence et en distribution.
Dans l'industrie musicale, un acteur est dit «
indépendant » lorsqu'il ne possède aucune affiliation avec
une des 4 majors, on parle alors de label indépendant ;
le plus souvent, ces labels ne sont présents qu'au stade de la
production et éventuellement à celui de l'édition
phonographique. Certains, tels que Naïve ou Wagram, possèdent un
réseau de distribution.
4 C'est la Sacem (Société des
Auteurs, Compositeurs et Editeurs de Musique) qui s'occupe de les collecter
auprès des sociétés qui exploitent la musique.
5 Selon une décision du conseil de la
concurrence
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Il faut noter qu'entre ces indépendants et les majors,
il existe aussi des labels dans une situation intermédiaire avec un
fonctionnement indépendant mais contrôlé par une major ;
dans ce cas, l'indépendant s'occupe du côté «
recherche de nouveau talent » et la major du marketing et de la
distribution.
- Les prescripteurs
La radio et la télévision sont
d'importants prescripteurs de musique enregistrée : à travers la
publicité sur ces supports qui représente la grande
majorité des dépenses publicitaires de la filière mais
également grâce à la diffusion de titres ou des
vidéos-clips.
Il faut savoir que la musique représente la motivation
essentielle d'écoute d'une radio et les émissions musicales sont
celles qui connaissent les meilleures audiences. Depuis les années 1980,
le nombre de radios FM n'a de cesse d'augmenter et ce phénomène
se prolonge aujourd'hui avec les web-radios.
Le rôle de la télévision est lui plus
récent : autorisation des publicités pour les disques en 1987,
les premières chaines musicales arrivant fin des années 1980 en
France avec MCM (qui reprend le succès américain de MTV) puis
d'émissions de télé-réalité musicales dans
les années 2000.
Enfm, les consommateurs via le bouche
à oreille deviennent eux aussi des prescripteurs importants de musique
enregistrée. Le développement d'outils communautaires sur le web
(forums, blog, réseaux sociaux ...) accentue le phénomène
en faisant passer les interactions individuelles de la sphère des
proches à des réseaux virtuels beaucoup plus vastes.
- Les détaillants
En France, le commerce physique de la musique
enregistré est dominé par les grandes surfaces
spécialisées avec notamment la Fnac ou Virgin qui
représentent en 2009, 54,2%6 du marché de la vente de
disques dans un point de vente physique. Les hypermarchés sont
le second acteur important de la vente physique avec 27% de part de
marché.
La structure du marché de détaillants n'est pas
sans conséquence sur la diversité de l'offre phonographique : en
effet, les grandes surfaces spécialisées ne jouent pas les
mêmes cartes que les hypermarchés en terme de
compétitivité prix, en nombre de références ou
encore en qualité de services. Lorsqu'une Fnac est capable de proposer
jusqu'à 80 000 références différentes à ses
clients, un hypermarché se contentera de 10 000 références
; l'accroissement du poids des centrales d'achat dans les négociations
avec les distributeurs concourt donc à une uniformisation de l'offre.
6 Selon le rapport annuel (2009) de la Syndicat National
d'Edition Phonographique
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Dans le monde de la musique numérique, les
offreurs sont d'origines diverses : pour la musique sur mobile, ce
sont les opérateurs téléphoniques qui assurent le
rôle de détaillant ; sur les plateformes de
téléchargements en ligne tel que Itunes, c'est le constructeur
informatique Apple qui se charge de cela.
La chaîne de l'édition
musicale
Droits d'auteur versés par la Sacem
Auteur(s) de l'oeuvre
Compositeur,
parolier, arrangeur
Artiste interprète
Chanteur /
Groupe
Redevances
Contrat d'enregistrement (contrat de travail et cession)
Producteur phonographique
Prise en charge
de l'enregistrement
Propriété de la matérialisation de
l'oeuvre
Redevances
Contrat de licence
Editeur phonographique
Pressage des copies (fabrication), exploitation
et
promotion de l'oeuvre
Contrat de distribution Marges sur le prix de gros
Contrat de co-exploitation
Redevances
Distribution
Vente auprès des réseaux de commercialisation
Co-exploitant
Financement
d'opérations de
communication
Diffuseurs
Radios / TV
Points de vente
Public
Source : Etude du Conseil Supérieur de l'audiovisuel,
mai 2003