La famille, cellule de base de la société
représente le creuset au sein duquel se forme la personnalité de
l'enfant. Elle représente le cadre essentiel de son éducation
avant l'âge scolaire et même après. La famille doit jouer
envers les enfants un rôle de protection et de sécurisation, mais
également de préparation à la vie, à la vie en
société et pour être plus précis, à un
rôle de socialisation en vue de bien intégrer les enfants. Par ce
fait, elle s'inscrit dans la même logique que DURKHEIM (1992) qui
écrit que : « l'éducation est l'action exercée par
les générations adultes sur celles qui ne sont pas encore
mûres pour la vie sociale.
Elle a pour objet de susciter et de développer chez
l'enfant, un certain nombre d'états physiques, intellectuels et moraux
que réclament de lui, la société politique dans son
ensemble et le milieu spécial auquel il est particulièrement
destiné ».
L'apprentissage par l'enfant de la culture, des valeurs et
des règles de la société commence très tôt au
sein de sa communauté. Au cours de ce processus de socialisation,
l'enfant gagne en savoirs. Les enfants de Godomey ne font pas exception
à la règle. Les investigations menées montrent que ces
enfants viennent d'un peu partout du Bénin. Mais la
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Réalisé et présenté par KANHONOU H.
Judicaël
lleurs
nombre total d'enfants travai
graphique
préciser que
, il est utile de
Avant de procéder à l'analyse
du
dans diverses
activités.
tous les enfants interrogés ont
déjà des savoir-faire
filles. Il faut remarquer
que le nombre élevé de garçons par
rapport aux
grande majorité de ces enfants vient du Sud et du
Centre (Abomey, Allada
,
Zè, Toffo, Porto
Le graphique questionnés.
Graphique
Répartition des enfants travailleurs selon leur
sexe
-Novo)
N°I :
N°I, ci-dess
.
ous présente le
43,9%
56,1%
Gaçons
Filles
Source : Données de terrain
(2009)
En matière de savoir-faire, il
s'agit de toutes activités que les enfants
mènent au cours de leur processus de
socialisation. Au nombre de ces
activités, on peut
énumérer les petits travaux domestiques, l'aide
apportée à
leur père ou oncle dans les divers métiers
qu'ils exercent.
Ainsi, quand on fait une première lecture, on
remarque que sur les 73
enfants travailleurs interrogés 56,1% sont des
garçons et 43,9% sont des
filles vient du fait qu'il y a un nombre important de
garçons en
apprentissage que de filles. Le nombre
élevé de filles se trouve surtout au
Réalisé et présenté par
KANHONOU H. Judicaël
40
niveau des enfants qui sont utilisées comme des
domestiques ou comme vendeuses. (Cette partie sera abordée dans la suite
de l'analyse).
Toutefois, au niveau du graphique N°I, il est à
souligner que déjà très tôt, les enfants sont
initiés aux travaux de leurs parents. L'initiation des enfants telle
qu'elle se fait participe entièrement à leur éducation.
Selon les propos des parents auprès desquels l'enquête a
été menée, « l'éducation de l'enfant ne
pourrait être entière si celui-ci ne participait aux menus travaux
de la maison et cela dès le bas-âge » (parents
enquêtés, 2009). De même, l'enfant doit pouvoir au fur
et à mesure qu'il grandit participer aux activités
économiques de ses parents. Et c'est dans cet ordre d'idées que
ERNY(1987) définissait l'éducation comme : « le processus de
transmission de certaines pratiques, l'ensemble des moyens mis en oeuvre
collectivement et par lesquels une société initie sa jeune
génération aux valeurs et aux techniques qui caractérisent
la vie de sa civilisation ». De ce fait, on comprend aisément
pourquoi la totalité des garçons et des filles interrogés
ont une connaissance de base dans les travaux domestiques, champêtres et
autres. Pour certains parents interrogés, « les enfants
débordent d'énergie et la meilleure manière de les occuper
serait de leur confier quelques responsabilités qui font d'eux des
individus utiles à la communauté » (parents
enquêtés, 2009).
Ces données confirment dans une certaine mesure celles
de MERAND(1977) qui affirme que : « l'enfant participe aux travaux des
champs sous forme de jeu. Après les semailles, par exemple on fait appel
à lui pour crier à tue-tête, facilité naturelle
qu'ont tous les enfants ».
Par ailleurs, dans son mémoire de maîtrise,
QUENUM (1992) clarifie sur le fait que les membres de la famille assurent
à l'enfant dès son bas-âge une intégration sociale
en lui donnant le sentiment d'appartenir au groupe, en le `'coulant» dans
un `'moule» de coutume et de tradition tout en lui inculquant le
goût du travail et l'effort physique. Concrètement, en
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Réalisé et présenté par KANHONOU H.
Judicaël
l'éduquant. Et c'est toujours lui qui l'a clairement
mentionné dans les propos suivants : « ... ainsi, le garçon
devait recevoir une éducation virile, être courageux et
travailleur. Il était initié aux travaux champêtres,
à la construction de case, à grimper aux palmiers et aux
cocotiers pour récolter les régimes mûrs ». La prise
en compte de tous ces aspects amène à dire que les enfants de
Godomey dès la tendre enfance ne sont pas prédestinés
à la paresse.
A juste titre, les données du tableau N°III
montrent les classes d'âge des enfants qui ont été
interrogés.
Tableau N° III : Classe d'âge
des enfants
Source : Données de terrain
(2009)
Les données de ce tableau corroborent de toute
évidence avec l'analyse du graphique N°I, qui a été
faite précédemment. En effet, déjà dans la classe
d'âge des [6-10[, représentant 41,4 % chez les garçons et
34,3% chez les filles, dès le jeune âge les enfants sont enclins
à travailler. Au niveau de la seconde classe des [10-14[, le pourcentage
est de 58,6 chez les garçons et de 65,7 chez les filles.
De ce point de vue, si tant est que ces enfants excellent
dans ces domaines, c'est compte tenu du fait que culturellement leur ardeur
précoce au travail est valorisée et encouragée par les
parents qui en tirent profit. Ce
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Réalisé et présenté par KANHONOU H.
Judicaël
faisant, ce travail entrant dans le cadre de la socialisation
s'est mué au fil du temps en une exploitation tacite des enfants.
En dehors de l'éducation que reçoivent les
enfants et qui déjà les prédispose à un travail
certain, plusieurs autres réalités ont été
notées lors de l'enquête de terrain et contribuent à mettre
les enfants au travail.
Toutefois, selon les parents interrogés et de l'avis
de certaines personnes ressources, « il n'y avait pas au départ
d'intention que les enfants aillent travailler, ou qu'ils soient
exploités » (parents et personnes ressources enquêtés,
2009). De même, un autre parent déclare : « Lorsque
tu es à la cuisine, et qu'à côté il y a ta petite
fille, elle peut t'être utile en t'aidant à verser de l'eau sale,
à prendre de l'oignon. Tu ne peux te lever chaque fois, alors qu'il y a
quelqu'un à tes côtés. Nul n'est inutile, même un
tout petit enfant » (propos d'une mère enquêtée,
2009). Ainsi, dans la pensée traditionnelle, l'enfant se doit
d'être utile à ses géniteurs et à son clan. Et pour
qu'il n'échappe pas à ce rôle, plusieurs dispositions
pragmatiques sont prises afin qu'au moment attendu, il puisse satisfaire
à cela. Savoir, savoir-faire et savoir-être lui sont
dispensé. Ce qui fait que toute habitude de paresse n'est pas
autorisée.
Il apparait à travers ces données que,
l'éducation reçue par les enfants dès le bas-âge
leur donne une certaine facilité à travailler. En outre, comme le
montre le paragraphe suivant, le niveau d'instruction des parents est parfois
aussi en défaveur des enfants. Ce qui expose des êtres
vulnérables à des pratiques peu recommandables.