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Les droits de l'homme et les difficultes de leur application en Haiti

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par Clement Noel
Faculte de Droit et des Sciences Economiques de Port-au-Prince, Haiti - Licence 2013
  

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CHAPITRE 2

LES MECANISMES DE PROTECTION DES DROITS DE L'HOMME

L'idée de la reconnaissance de manière absolue des Droits de l'Homme serait tout à fait utopique si on n'avait pas pensé à mettre en place tout un ensemble de mécanismes en vue d'assurer la protection de ces derniers. Ces mécanismes de protection se retrouvent tant sur le plan international que national. Dans ce chapitre, nous aborderons donc dans un premier temps, les assises juridiques de protection internationale des Droits de l'Homme et, dans un second temps, seront mis en évidence les instruments juridiques de protection nationale des Droits de l'Homme.

SECTION 1 : LES ASSISES JURIDIQUES DES SYSTEMES DE PROTECTION INTERNATIONALE DES DROITS DE L'HOMME

Il y a tout un ensemble de systèmes de protection internationale des Droits de l'Homme qui sont placés pour assurer la surveillance des prescrits relatifs à ces droits. Pour ce faire, ils sont dotés de certaines assises juridiques dont l'importance mérite d'être considérée. Ces assises juridiques présentent une grande valeur qui se manifeste à travers les textes internationaux adoptés dans le domaine des Droits de l'Homme. Et ces textes nous amènent à considérer les mécanismes de protection internationale des Droits de l'Homme.

A- La valeur juridique des textes internationaux adoptés dans le domaine des Droits de l'Homme

Sur le plan international, il y a tout un ensemble de textes qui fondent le corpus juridiques des Droits de l'Homme. Ils se classent en deux catégories : les textes à portée universelle, et les textes à portée régionale.

1- Les textes à portée universelle

Les textes à portée universelle : le Déclaration Universelle des Droits de l'Homme de 1948 (DUDH), le Pacte relatif aux Droits Economiques, Sociaux et Culturels (PIDESC) et le Pacte International relatif aux Droits civils et Politiques.

Déclaration Universelle des Droits de l'Homme du 10 décembre 1948

Il est évident que l'année 1945 est date indélébile dans l'histoire de l'humanité. Et elle est aussi la date marquant le moment far en matière de l'internationalisation et de l'universalisation des Droits de l'Homme, car elle dénote à la fois, en s'inscrivant dans une double dialectique, un moment de négation des Droits de l'Homme, vu qu'il s'agit d'une année à partir de laquelle a su connaitre bon nombre d'atrocités, et un moment où la conscience mondiale allait être interpelée sur un ensemble de questions se rapportant au devenir de l'humanité par rapport à sa dignité. Cette année a vu naître l'ONU : institution internationale de haut prestige tenant compte de sa mission de pacification du monde. Trois ans plus tard, après la création de cette institution, l'idée d'une déclaration universelle allait poser ses tentacules dans toutes les fibres des débats internationaux. Cette idée s'est imposée comme une réponse qu'il faut articuler rationnellement pour résoudre une série de conflits à l'échelle de la planète, surtout dans le domaine des libertés, de la démocratie et des Droits de l'Homme. De là est amenée l'idée d'une Déclaration Universelle des Droits de l'Homme le 10 décembre 1948. Cette déclaration, considérée comme le premier acte de reconnaissance universelle des droits et des libertés inhérents à la dignité de la personne humaine, constitue le véritable socle juridique international de l'édifice des Droits de l'Homme. Autrement dit, cette Déclaration forme un système juridiquement contraignant pour assurer la promotion, la protection et la garantie de ces derniers.

La valeur juridique de la Déclaration Universelle peut se reposer sur un fondement autre que conventionnel. Ce qu'il convient de noter, c'est que certaines règles de la déclaration universelle font partie du « jus cogens », c'est-à-dire des normes impératives en droit international public. Ainsi, M. Zotiades, dans la classification qu'il établit des règles du jus cogens figure les règles relatives aux Droits de l'Homme. Celles-ci sont intégrées dans l'ordre international au point que tout traité ou convention contraire aux règles de jus cogens peut être frappé de nullité. Elle s'inscrit dans le prolongement de la Déclaration française de 1789, puisque l'on y retrouve les grands principes mis en exergue dans cette dernière. Ainsi, l'article premier complète l'article 2 de la Déclaration Universelle en prohibant toute forme de discrimination.

Pacte International relatif aux Droits Economiques, Sociaux et Culturels et Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques

La déclaration est une proclamation de la foi en l'homme, en la dignité de la personne humaine. Elle n'a pas pour autant la force contraignante, c'est-à-dire la force juridique, sinon une valeur morale qui n'est pas susceptible de permettre la prise de sanction contre un Etat qui l'aurait violée. Il était donc nécessaire de reprendre, sous une forme juridiquement obligatoire, les droits énoncés dans la déclaration. De là, l'Assemblée générale des Nations Unies a adopté à l'unanimité deux pactes, soit le 16 décembre 1966 : le Pacte International relatif aux Droits Economiques, Sociaux et Culturels et le Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques. Ces deux pactes sont considérés comme deux pactes jumeaux. Le premier traite du droit au travail, à la sécurité, à un niveau de vie suffisante, à la santé et à l'éducation, et le deuxième concerne particulièrement le droit à la sureté, la protection contre les arrestations arbitraires, les libertés de pensée, de conscience, de religion, d'association.

2- Les textes à portée régionale

Les textes à portée régionale regroupent, entre autres, les textes européens (La Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789, la Convention de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 et la Charte sociale européenne), les textes interaméricains (la Convention Américaine des Droits de l'Homme et la Déclaration Américaine des Droits et Devoirs de l'Homme) et les textes africains. On a, entre autres, la Charte Africaine de 1981.

La Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen du 26 aout 1789

La Déclaration des Droits de l'Homme et du citoyen du 26 août 1789 dont la signification philosophico-politique résulte du XVIIIe siècle particulièrement en Europe n'est, en réalité, pas le premier texte que l'on pourrait considérer comme texte qui fonde juridiquement les Droits de l'Homme, puisque cette idée de juridisation de ces derniers se retrouvait dans bon nombre de déclarations dont la déclaration en Angleterre en 1215. Toutefois, les textes de déclarations anciennes sont perçus comme des procédures juridiques susceptibles de préserver les droits et les libertés. En ce sens, la déclaration de 1789, une déclaration dont la majesté éveille même les esprits les plus somnolents, est interprétée de diverses façons. Ainsi, pour l'éminent juriste allemand Jellinek, cette déclaration serait essentiellement germanique. Car c'est la seule civilisation qui a su préserver et amorcer les principes relatifs à la liberté individuelle, ce qui allait être repris par la France. La déclaration française de 1789 n'est qu'une copie des textes précédents, et ne présente absolument aucune originalité ni sur le fond, ni sous la forme. Pour Boutmy, juriste français, par contre, les principes émis par cette déclaration sont à l'origine de l'instauration d'un monde nouveau et d'une cité nouvelle où les dirigeants doivent cesser de hisser sur l'étendard de la logique irrationnelle des choses pour sacrifier l'humanité dans sa dignité. La genèse de ces derniers se serait réalisée au sein d'un peuple prédestiné par l'histoire. D'ailleurs, la France, à cette époque du XVIIIe siècle, était non seulement un objet de fascination par sa grande culture, mais surtout la première puissance politique occidentale.

A part ces considérations, bien entendu importantes, un fait est certain, c'est que la déclaration de 1789, point d'ancrage idéologique de la révolution française, constitue la germination d'une nouvelle vision des choses, c'est -à-dire la question de la dignité de la personne est devenue une priorité pour la philosophie du XVIIIe siècle en favorisant la relance d'un processus de juridicisation des droits et des libertés fondamentales. Ce texte de dix-sept (17) articles est la consécration de l'idée d'universalité des Droits de l'Homme d'autant que les droits proclamés sont ceux de l'homme et du citoyen, et non ceux des seuls citoyens français de 1789. Ils valent pour tout être humain. C'est ce qui fait, par rapport aux autres, la particularité de cette déclaration : elle promet la liberté à tous les hommes. La déclaration de 1789, en effet, dans son article premier, énonce que « les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune37(*) ». Dans cet article, deux droits fondamentaux sont pris en considération : liberté et égalité. Cet article, cependant, précise les limites et les garanties de cette liberté dans la mesure où aux termes de l'article 4, il est dit : «La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l'exercice des droits naturels de chaque homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la société la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la loi38(*) ». Cela équivaut à dire que la liberté ne traduit l'absence de contraintes établies par la loi. Car la liberté est le droit de faire tout ce que les lois permettent, disait Montesquieu.

La Convention de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950

L'année 1949 marque la naissance du Conseil de l'Europe. Celui-ci est à l'origine du mouvement de la protection des Droits de l'Homme dans la sphère européenne. Selon les statuts de ce conseil (3 aout 1949), plus particulièrement dans l'article 3 : « Tout Etat membre du Conseil de l'Europe reconnait le principe de la prédominance du droit et le principe en vertu duquel toute personne doit jouir des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales ». Le conseil a pour but, dans le cadre de la promotion des Droits de l'Homme, de réaliser une union plus étroite entre ses membres. Il est aussi précisé dans l'art. 1 du statut du conseil que « la sauvegarde et le développement des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales » constituent l'un des puissants moyens pour pouvoir réaliser cette idée. A ce titre, l'Assemblée Consultative du Conseil s'est engagée dans cette voie, en tant haut lieu du débat européen relatif aux droits de l'homme. D'où est venue l'idée géniale de créer la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales(CESDH), qui est son texte fondamental. Le Conseil de l'Europe joue un rôle de gendarme en ce qui concerne le respect des droits de l'homme. Outre de préserver ces derniers, il a mission sacro-sainte consistant à promouvoir l'éducation, l'autorité de la loi et la démocratie.

En effet, cette Convention, signée le 4 novembre 1950 et entrée en vigueur le 3 septembre 1953, et source juridique européenne en matière des Droits de l'Homme, est la suite logique de la déclaration universelle des Droits de l'Homme de 1948. D'ailleurs, elle ne fait que la reprendre, sinon la renforcer. Le préambule de la Convention est une preuve éloquente de l'importance accordée aux droits et aux libertés fondamentaux. De plus, il est clairement énoncé dans l'article 1 de la Convention : «  obligation de respecter les droits de l'homme. Les hautes parties contractantes reconnaissent à toute personne relevant de leur juridiction les droits et libertés définis au titre I de la présente convention39(*) ». Toutefois, la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme présente une certaine particularité par rapport à ses novations.

La Charte Sociale Européenne de 1961

La Charte sociale européenne a été signée à Turin le 18 octobre 1961 et est entrée en vigueur le 25 février 1965. Elle a été adoptée dans le but de compléter la Convention Européenne des Droits de l'Homme qui a déjà consacré principalement des droits civils, politiques et sociaux. Parmi ceux-ci se trouve, pour l'essentiel, le droit au travail, le droit syndical, etc. La Charte Sociale Européenne a mis en valeur, elle aussi, les principaux droits économiques et sociaux : droit au travail, liberté syndicale et droit de grève, protection du travail des enfants et des femmes, droit à la formation professionnelle, droit à la sécurité sociale. Elle n'a pas pour effet de conférer directement des droits aux ressortissants des Etats parties, mais elle contient un intéressant mécanisme d'engagement de la part des Etats.

La Convention Américaine aux Droits de l'Homme

La Convention Américaine relative aux Droits de l'Homme, dont les origines remontent à la Conférence interaméricaine de 1945 tenue à Mexico, portant sur les problèmes relatifs à la guerre et la paix, a été adoptée le 21 novembre 1969 à San José de Costa-Rica. Elle a été entrée en vigueur le 18 juillet 1978. En effet, cette Convention a posé, dans son premier paragraphe, les bases de la consolidation sur le continent américain, dans le cadre des institutions démocratiques, un régime de liberté individuelle et de justice sociale, fondé sur le respect des droits fondamentaux de l'homme. Elle met à la charge des Etats l'obligation de respecter les droits et libertés qu'elle consacre, et elle leur impose le devoir d'adopter dans leur législation interne les dispositions nécessaires pour assurer la jouissance effective de ces droits.

On peut tout aussi bien considérer comme texte interaméricain important en matière des Droits de l'Homme, la Déclaration Américaine des Droits et Devoirs de l'Homme. Cette Déclaration a été adoptée à la Neuvième Conférence Internationale Américaine, Bogota, Colombie en 1948. En effet, elle a le mérite d'être le premier texte instrument international de son genre qui a été adoptée plusieurs mois avant la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme des Nations Unies du 10 décembre 1948.

En un mot, tous ces instruments se concrétisent à travers des structures et des mécanismes définis dans le cadre des systèmes de protection des Droits de l'Homme.

B- Les mécanismes de protection internationale des Droits de l'Homme

Sur le plan international, à part les textes assurant la juridicité des Droits de l'Homme, il y a tout un ensemble de systèmes de protection mis en place répondant à un besoin de matérialisation des voeux exprimés dans les textes internationaux. Parmi ces systèmes se trouvent quatre qui sont considérés comme plus importants: le système onusien de protection des Droits de l'Homme, le système interaméricain de protection des Droits de l'Homme, le système européen de protection des Droits de l'Homme et le système africain de protection des Droits de l'Homme.

1- Le système onusien de protection des Droits de l'Homme

Le système onusien de protection des Droits de l'Homme est fondé sur la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme le 10 décembre 1948. Il est le seul système à avoir un caractère universel dans la mesure où ses décisions en matière des violations des Droits de l'Homme ont une valeur universelle, c'est-à-dire s'imposent à tous les pays, bien entendu, ceux qui font partie de l'ONU. En effet, assurer la promotion et la protection des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales est, comme il est prévu dans la Charte des Nations Unies, une de ses principales missions. Et ceci depuis l'adoption de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, les Nations Unies mettent en oeuvre de nombreuses normes en matière de protection des Droits de l'Homme, ainsi que des mécanismes pour la promotion et la protection de ces derniers. On sait que la question des Droits de l'Homme est très préoccupante pour l'ONU, à cotés, bien sûr, d'autres questions : la démocratie réelle, la paix durable, la sécurité internationale, le développement durable. Etant une des questions préoccupantes pour l'ONU, celle-ci y intervient suivant trois axes : la prévention, la protection et la promotion des Droits de l'Homme.

Il est mis en exergue, par l'ONU, un ensemble d'organes pour assurer l'efficacité de travail de garantie, de promotion et protection des Droits de l'Homme. Ces mécanismes sont : le Conseil des Droits de l'Homme, le Haut Commissariat aux Droits de l'Homme et la Cour Pénale Internationale.

Le Conseil des Droits de l'Homme

L'Organisation des Nations Unies (ONU) comprend six (6) organes : Le Conseil de sécurité, le Conseil économique et social, la Cour pénale internationale, le Conseil de tutelle, le Secrétariat et l'Assemblée générale. Cette dernière est l'organe principal qui intervient dans la question des droits de l'homme par l'entremise du Conseil économique et social. Ce dernier adresse des recommandations à l'Assemblée générale au sujet des questions relatives aux Droits de l'Homme. Dans le cadre de ses travaux, le Conseil économique et social a créé la Commission des Droits de l'Homme qui allait être remplacée en 2006 par le Conseil des Droits de l'Homme. Celui-ci est le principal organe des Nations Unies qui est responsable de la question des Droits de l'Homme. Le Conseil a une principale mission consistant à analyser l'évolution de la situation des droits de l'Homme dans les Etats membres de l'ONU. Il assure ce rôle en mettant en place un mécanisme assez intéressant : Examen périodique universel (EPU). Il s'agit d'un nouveau mécanisme créé par la Résolution 60/251 de l'Assemblée générale. La résolution dispose que le Conseil aura pour vocation de :

« procéder à un examen périodique universel, sur la foi d'informations objectives et fiables, du respect par chaque État de ses obligations et engagements en matière de droits de l'homme de façon à garantir l'universalité de son action et l'égalité de traitement de tous les États ; se voulant une entreprise de coopération fondée sur un dialogue auquel le pays concerné est pleinement associé et qui tient compte des besoins de ce dernier en termes de renforcement de ses capacités, cet examen viendra compléter l'oeuvre des organes conventionnels sans faire double emploi ».

En d'autres termes, par la mise en place de l'Examen périodique universel, chaque pays membre des Nations Unies doit préparer un rapport sur la situation des Droits de l'Homme. La préparation de ce rapport est présentée par le gouvernement du pays. Mais le gouvernement du pays en question peut refuser de collaborer en vue de la réalisation d'un examen périodique relatif aux Droits de l'Homme. C'est pourquoi on tient compte d'autres rapports comme ceux de la société civile et des organisations nationales de défense de ces droits. Il y a, de surcroit, la procédure de 1503 qui permet à tout individu victime des violations des Droits de l'Homme de présenter des plaintes et des pétitions devant le conseil des Droits de l'Homme après avoir, bien entendu, épuisé toutes les voies de recours internes.

Le Haut Commissariat aux Droits de l'Homme

Le Haut Commissariat des Nations Unies aux Droits de l'Homme (HCDH), créé en 1993, est une structure mise en place par l'ONU dont le but est d'examiner, de promouvoir et de renseigner sur le respect du droit international des Droits de l'Homme et du droit international humanitaire dans le monde, selon l'adoption de la Déclaration et du Programme d'Action de Vienne. Cette structure est l'élément moteur de toutes les activités des Nations Unies dans le domaine des Droits de l'Homme. En effet, le Haut Commissariat des Nations Unies aux Droits de l'Homme, pour pouvoir exécuter ses tâches, produit des rapports et mène des enquêtes à la demande de l'Assemblée Générale de l'ONU. Il établit également une coopération avec les gouvernements et les organisations internationales, régionales et non gouvernementales pour assurer une meilleure protection des Droits de l'Homme. Pour l'organisation des réunions par les organismes des Nations Unies s'occupant des questions relatives à ces derniers, il se sert du secrétariat.

Le Haut Commissariat aux Droits de l'Homme est une structure technique, composée non d'Etat, mais de techniciens de nationalités différentes qui sont des hauts fonctionnaires internationaux spécialisés dans la question des Droits de l'Homme. Il a à sa tête une personnalité qui planifie surtout les réunions dont le litre est « Haut Commissaire aux Droits de l'Homme ».

La Cour Pénale Internationale

La Cour Pénale Internationale est un tribunal international qui a été créée à Rome le 17 juillet 1998 et devenue effective en 2002. Ce tribunal est l'une des structures importantes du système des Nations Unies de protection des Droits de l'Homme qui intervient aussi dans les questions relatives aux Droits de l'Homme. Cela se remarque d'ailleurs dans le préambule même de cette Cour : « Conscients que tous les peuples sont unis par des liens étroits et que leurs cultures forment un patrimoine commun, et soucieux du fait que cette mosaïque délicate puisse être brisée à tout moment. Ayant à l'esprit qu'au cours de ce siècle des millions d'enfants, de femmes et d'hommes ont été victimes d'atrocités qui défient l'imagination et heurte profondément la conscience humaine. Reconnaissant que des crimes d'une telle gravité menacent la paix, la sécurité et le bien-être du monde...Résolus à garantir durablement le respect de la mise en oeuvre de la justice international...e40(*) ». Ce préambule est une illustration des efforts déployés par le système des Nations Unies de protection des Droits de l'Homme. Ces efforts d'assurer la protection des Droits de l'Homme se trouvent aussi dans l'article premier du Statut de la Cour : « Il est créé une Cour pénale internationale en tant qu'institution permanente, qui peut exercer sa compétence à l'égard des personnes pour les crimes les plus graves ayant une portée internationale, au sens du présent Statut. Elle est complémentaire des juridictions criminelles nationales...41(*)». Comme il est mentionné dans cet article, cette juridiction internationale juge les individus commettant des crimes qui réprouvent la conscience internationale, d'où sa compétence. Celle-ci est clairement énoncée dans l'art. 5.1 du présent Statut : « La compétence de la cour est limitée aux crimes les plus graves qui touchent l'ensemble de la communauté internationale : le crime de génocide, les crimes contre l'humanité, les crimes de guerre, le crime d'agression 42(*)». La notion de crime contre l'humanité, très récurrente d'ailleurs dans les discours en faveur des Droits de l'Homme, est définie comme crime qui défie l'imagination humaine. Pour le dire autrement, il s'agit d'un crime qui révolte la conscience humaine. L'article 7 du Statut de la cour précise que : 

« Le crime contre l'humanité est le crime commis dans le cadre d'une attaque généralisée ou systématique lancée contre une population civile et en reconnaissant de cette attaque : Meurtre, Extermination, Réduction en esclavage, Déportation ou transfert forcé de population, Emprisonnement ou autre forme de privation grave de liberté physique en violation des dispositions fondamentales du droit international, Torture, Viol, Esclavage sexuel, Prostitution forcée...43(*) ».

Cette disposition est une contribution internationale susceptible d'amener les Etats à prendre conscience de l'importance dont est revêtue la question des Droits de l'Homme.

2- Le système interaméricain de protection des Droits de l'Homme

Les pays des continents américains en 1948 ont éprouvé la grande nécessité de créer une institution régionale répondant au nom de l'Organisation des Etats Américains (OEA). Cette dernière contient des structures destinées à protéger et promouvoir la question des Droits de l'Homme. Elle est régie par la Convention Américaine relative aux Droits de l'Homme. Ce document a été adopté à San José, Costa Rica, le 22 novembre 1969, à la Conférence spécialisée interaméricaine sur les Droits de l'Homme. Cet instrument international régional se situe dans le prolongement des principes défendus par la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme de 1948. Il est fait obligation de respecter ces droits. A telle enseigne que dans l'article premier de la dite convention il est énoncé ce qui suit :

« Les Etats parties s'engagent à respecter les droits et libertés reconnus dans la présente convention et à en garantir le libre et plein exercice à toute personne relevant de leur compétence, sans aucune distinction fondée sur la race, la couleur, le sexe, la langue, la religion, les opinions politiques ou autres, l'origine nationale ou sociale, la situation économique, la naissance ou toute autre condition sociale ».

En effet, cette convention est un signe de respect de la dignité humaine, et aussi un instrument qui participe à l'épanouissement, pour ainsi dire, à l'émancipation des droits et des libertés fondamentaux. La charte de cette organisation régionale porte sur plusieurs domaines : démocratie, droits économiques, droit à l'éducation et à l'égalité, etc. La Charte établit également deux structures principales désignées particulièrement pour la protection et la promotion des Droits de l'Homme : la Commission Interaméricaine des Droits de l'Homme (CIDH), la structure la plus importante du système interaméricain de protection des Droits de l'Homme, et la Cour Interaméricaine des Droits de l'Homme. L'organisation protège les droits par la création de normes substantives et maintient ces normes par un processus de pétition.

La Commission Interaméricaine des Droits de l'Homme

La Commission interaméricaine des Droits de l'Homme n'est pas composée d'Etats, mais de personnalités, qui sont au nombre de sept (7). Ces personnalités sont désignées suivant deux critères spécifiques, aux termes de l'article 34 de la Convention Américaine relative aux Droits de l'Homme où il est énoncé : « La Commission Interaméricaine des Droits de l'Homme comprend sept membres, lesquels doivent être des personnes jouissant d'une haute moralité et possédant une compétence reconnue en matière de droits de l'homme ». Ce qui signifie que n'importe qui ne peut pas être membre de cette Commission.

Les membres de cette Commission ne représentent pas, selon l'article 36.1 de la convention relative aux Droits de l'Homme, leur pays d'origine, mais en font partie à titre personnel. La mission de cette Commission se retrouve dans l'article 41 de la Convention. Cette Commission a une double tâche à accomplir. D'abord, observer la situation des Droits de l'Homme dans le continent américain, ensuite assurer la défense des droits de l'homme à travers ce dernier. Pour pouvoir remplir ces rôles, la Commission Interaméricaine des Droits de l'Homme effectue des visites de terrain. Ces dernières peuvent se faire de deux manières : le gouvernement du pays peut l'inviter à venir évaluer la situation des droits de l'homme, ou la Commission peut elle-même décider de venir sans l'invitation du gouvernement. Toutefois, dans le second cas, celui-ci doit être au courant de la visite de la Commission. Il y a également une grande possibilité qu'offre cette dernière, en recevant des pétitions ou requêtes, à tous ceux qui sont victimes des violations des droits de l'homme (art. 44) de la Convention. Pour le dire autrement, tout individu victime de violations des Droits de l'Homme peut porter plainte par devant cette Commission dont le siège est à Washington. Il y a des conditions dont il faut tenir compte pour présenter une pétition. Ces conditions sont listées dans l'art 45.1 de la Convention :

« La Commission ne retient ou communication présentées conformément aux articles 44 ou 45 que les conditions suivantes, à savoir :

a. que toutes les voies de recours internes aient été dument utilisées et épuisées conforment aux principes du Droit international généralement reconnus ;

b. que la pétition ou communication soit introduite dans les six mois à compter de la date à laquelle l'individu présumé lésé dans ses droits a pris connaissance définitive ;

c. que l'objet de la pétition ou communication ne soit pas en cours d'examen devant une autre instance internationale, et

d. que dans le cas prévu à l'article 44, la pétition indique le nom, la nationalité, la profession, le domicile, et porte la signature de la personne ou des personnes, ou du représentant légal de l'entité dont émane la pétition...  ». 

Cela est évident que la Commission Interaméricaine de la Protection des Droits de l'Homme ne dispose pas de moyens de coercition susceptibles de réprimer un Etat qui serait coupable de violations graves des Droits de l'Homme. La sanction, d'habitude, que l'on administre à cet Etat, elle est d'ordre moral, ce qui ne l'empêche pas de continuer à violer les Droits de l'Homme. C'est ce qui constitue, en quelque sorte, un blocage à l'efficacité de ce système.

La Cour Interaméricaine des Droits l'HOMME

La Cour Interaméricaine des Droits de l'Homme est une institution judiciaire autonome basée à San José, Costa Rica. Cette cour, une des grandes structures du système de protection des droits de l'homme de l'Organisation des Etats Américains (OEA), en collaboration avec la commission des Droits de l'Homme, défend, promeut et assure la protection des droits fondamentaux ainsi que des libertés individuelles dans le continent américain.

La Cour a été établie en 1979 dans le but de faire appliquer et interpréter les dispositions de la Convention américaine relative aux Droits de l'Homme. Elle a deux fonctions principales : arbitrage et conseiller. Dans le premier cas, elle entend et règle des cas spécifiques de violations des Droits Humains qui lui sont soumis. Dans le second cas, elle émet des avis sur des questions d'interprétation juridique qui ont été portées à son attention par d'autres organes de l'OEA ou les États membres.

La Cour, saisie d'une affaire relative à un cas de violation des droits de l'homme par un Etat, et après avoir entendu les plaignants, si elle arrive à établir sa culpabilité, peut rendre son jugement de condamnation de cet Etat pour réparer les dommages faits aux victimes. La réparation fixée par la cour peut être à la fois en espèce et en nature. La forme la plus directe de réparation est obtenue par des paiements en espèces accordés aux victimes ou à leurs proches. Toutefois, l'État peut également être contraint à accorder des prestations en nature, afin d'offrir une reconnaissance publique de sa responsabilité vis-à-vis de ce cas de violation de ces droits, à prendre des mesures pour empêcher que des violations analogues se reproduisent à l'avenir, et d'autres formes de compensation non monétaires. C'est le cas, par exemple, du Pérou qui a été accusé en novembre 2001 dans l'affaire du massacre de Barrios Altos. Il s'agit d'une affaire concernant un massacre de 15 personnes par l'escadron de la mort à l'Etat-parrainé par le groupe Colina en novembre 1991 à Lima (Pérou). La Cour, dans son jugement, a ordonné le paiement de $ 175 000 pour les quatre survivants et pour les proches des victimes assassinées et un paiement de $ 250 000 dollars pour la famille de l'une des victimes. Par la suite, l'État du Pérou a été aussi contraint :

1) à accorder aux familles des victimes des soins de santé gratuits et diverses formes de soutien éducatif, y compris des bourses et des fournitures d'uniformes scolaires, du matériel et des livres;

2) à abroger deux lois d'amnistie controversés;

3) à reconnaitre le crime d'exécution extrajudiciaire dans son droit interne;

4) à ratifier la Convention internationale sur la non applicabilité de la prescription pour les crimes de guerre et crimes contre l'Humanité;

5) à publier le jugement de la Cour dans les médias nationaux;

6) à faire des excuses publiques pour l'incident et à s'engager pour que des événements similaires ne se reproduisent pas à l'avenir;

7) à ériger un monument à la mémoire des victimes du massacre.

3- Le système européen de protection des Droits de l'Homme

On se souvient que l'Europe, après la deuxième guerre mondiale en 1945, a été dévastée totalement. Il fallait faire feu de tout bois, c'est-à-dire tout mettre en place pour renouveler la paix et la coopération internationale. A l'orée des grands conflits qu'on a enregistrés pendant cette période tumultueuse, les dirigeants de toutes les régions ont pu créer trois organisations : le Conseil de l'Europe, l'Union Européenne (anciennement Communauté Européenne du charbon et de l'acier), et ensuite l'Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (anciennement Conférence sur la Sécurité et la Coopération en Europe). Ces organisations ont survécu à la guerre froide et à la fin du communisme, et continuent jusqu'à ce jour à servir d'assemblées pour le dialogue et l'échange sur le continent européen.

Il est vrai que ces organisations ont été créées dans une perspective de paix et de stabilité de l'Europe, mais elles ont été établies chacune en fonction des objectifs différents. Ainsi, le Conseil de l'Europe promeut l'autorité de la loi, les Droits de l'Homme, et la démocratie. L'Union Européenne, quand à elle, a été conçue comme institution de promotion du commerce et de la stabilité économique pour ses membres. Enfin, on a l'Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE) qui a été fondée pour maintenir la paix et la sécurité militaire en Europe.

En effet, la sensibilité manifestée à l'égard du respect des Droits de l'Homme qui se cristallise dans les créations de ces organisations est à la base de la légitimation du système européen de protection des Droits de l'Homme. Ce système de protection est régional. Mais le Conseil de l'Europe (CE) est le plus impliqué dans la question de la promotion des Droits de l'Homme, vu que les bases sur lesquelles il repose sont la démocratie pluraliste, les Droits de l'Homme et l'autorité de la loi. Ce Conseil, créé en mai 1949 par le Traité de Londres, est composé de 47 Etats membres.

La Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales, plus connue généralement sous le nom de Convention Européenne des Droits de l'Homme (CEDH) est considérée comme le texte fondamental du système européen de protection des Droits de l'Homme. Elle a été adoptée en 1950 et entrée en vigueur en 1953 après la ratification de plusieurs Etats. La principale structure chargée d'examiner les questions relatives aux Droits de l'Homme, c'est la Cour Européenne des Droits de l'Homme dont le siège est à Strasbourg en France. Elle reçoit les plaintes relatives aux violations des Droits de l'Homme et est aussi compétente pour connaitre des plaintes depuis la fusion de la Commission et de la Cour Européenne en une seule structure. Mais sa compétence de cette dernière n'est valable que pour les Etats européens l'ayant ratifié.

Par ailleurs, il convient de signaler, au passage, que les pays de l'Asie n'ont vraiment pas un système de Droits de l'Homme codifié, c'est-à-dire qu'ils n'ont pas un système de protection des Droits de l'Homme à proprement parler, compte tenu de leur grande diversité culturelle, mais ils s'inspirent du système européen de protection des Droits de l'Homme. Car la promotion pour la diversité culturelle est une des priorités du Conseil de l'Europe. Certains pays d'Asie centrale font partie de l'Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe(OSCE). Cette Organisation s'occupe des domaines de l'alerte précoce, de la prévention des conflits, de la prévention des crises, etc. En fait, ses taches sont axées principalement sur la diplomatie préventive, la démocratisation et la promotion des Droits de l'Homme.

4- Le système africain de protection des Droits de l'Homme

L'Afrique, à l'instar de ses devancières (Europe et Amérique), s'est dotée d'un système de protection des Droits de l'Homme, dont la caractéristique essentielle est qu'il allie tradition et modernité. Cette alliance apparait notamment dans les variétés des droits garantis, à cotés des droits individuels. De ce point de vue, la Charte africaine, qui a été adoptée le 27 juin 1981 à Nairobi (Kenya) lors de la 18ème conférence de l'Organisation de l'Unité Africaine (OUA), constitue un élément essentiel qui fonde le système africain de protection des Droits de l'Homme. Elle est entrée en vigueur le 21 octobre 1986, après sa ratification par 25 Etats, et ratifiée par la suite par 53 Etats membres de l'ex-OUA. Tout en tenant compte des vertus des traditions historiques africaines et des valeurs de civilisation africaine qui doivent inspirer et caractériser leurs réflexions sur la conception des Droits de l'Homme et des Peuples, la Charte Africaine s'appuie sur la Charte des Nations Unies ainsi que sur la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme. Elle a consacré les droits collectifs autrefois appelés droits des peuples, et des mécanismes très particuliers de règlements des conflits résultant de leurs éventuelles violations par les autorités étatiques. Plus concrètement, sans tomber dans une analyse détaillée de la Charte, c'est sa deuxième partie qui a prévu la création des mesures de sauvegarde, c'est-a-dire les mécanismes de règlements de conflits. Parmi les mécanismes se trouve la Commission Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples dont la mission principale est de promouvoir les Droits de l'Homme et des peuples et assurer leur protection en Afrique : art. 30 de la Charte. Est entrée aussi dans le cadre de sa mission, l'interprétation de la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples. Il convient de souligner, au passage, que cet organe n'est pas doté d'un pouvoir juridictionnel, mais elle peut recevoir des communications émanant des Etas partie à la Charte, ainsi des personnes individuelles ou de groupes de personnes.

Malgré l'adoption de la Charte Africaine en 1981 et la création de la Commission Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples, la question de protection des Droits de l'Homme en Afrique accusait encore certaines lacunes résultant des difficultés d'ordre et matériel qui compromettent le bon fonctionnement de la Commission. En effet, il fallait attendre le 25 janvier 2004, date marquant une étape déterminante dans l'histoire des Droits de l'Homme en Afrique, pour assister à l'entrée en vigueur du protocole relatif à la Charte des Droits de l'Homme et des Peuples portant la création d'une Cour Africaine des Droits de l'Homme. Cette juridiction continentale est non seulement considérée comme une étape historique cruciale dans la lutte contre l'impunité en Afrique, mais également comme un véritable renforcement du système africain de protection des Droits de l'Homme et des Peuples. D'ailleurs, l'Association pour la Prévention de la Torture (APT) estime que l'adoption du protocole relatif à la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples portant création de la Cour Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples constitue une avancée importante vers la consolidation de la démocratie et de l'Etat de Droit. La Cour doit se montrer indépendante pour assurer sa mission. La création et la mise en place effective de la Cour Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples constituent un pas décisif vers une meilleure protection des libertés et des droits fondamentaux de la personne humaine, et s'inscrit, en outre, dans la droite logique d'institutionnalisation des Droits de l'Homme.

Il convient, dans l'ensemble, de préciser que notre pays est Etat partie aux instruments juridiques adoptés dans le cadre du système onusien et du système américain de protection des Droits de l'Homme, ainsi a-t-il adopté des textes nationaux qui constituent les instruments juridiques de protection nationale des Droits de l'Homme.

SECTION 2 : LES INSTRUMENTS JURIDIQUES DE PROTECTION NATIONALE DES DROITS DE L'HOMME

La simple mention des instruments juridiques de protection nationale des Droits de l'Homme peut se révéler vaine si on ne met pas en évidence leur fondement à travers un certain nombre de textes. A ces textes, s'ajoutent les instruments juridictionnels susceptibles d'assurer la protection et la garantie des Droits de l'Homme.

A- Le fondement juridique de protection nationale des Droits de l'Homme

Le fondement juridique de protection des Droits de l'Homme en Haïti se retrouve d'abord, dans les constitutions hattiennes, en particulier celle qui est en vigueur, qui se révèle comme véritable garante des droits et des libertés fondamentales du citoyen haïtien. Ensuite, ce fondement juridique se manifeste aussi dans les Traités et Conventions signés et ratifiés par la République d'Haïti en matière du respect et de la protection des droits et de la dignité des haïtiens.

1- La Constitution haïtienne de 1987 et celles d'avant 1987

Le processus de constitutionnalisation des droits et des libertés fondamentales est fort ancien dans les constitutions haïtiennes. La garantie des libertés s'impose, même sans le contrôle de la loi. D'ailleurs, cette idée se révèle comme l'un des principes directeurs du droit constitutionnel républicain. C'est en ce sens que Esmein avance : 

« C'est une des idées les plus mieux établies et les plus fécondes des temps modernes que l'individu a des droits antérieurs et supérieurs à ceux de l'Etat, qui s'imposent par conséquent au respect de l'Etat(...) ce principe(...) forme(...) un objet essentiel du droit constitutionnel. En effet, il détermine, plus étroitement que toute autre loi, l'exercice de la souveraineté, car il interdit au souverain de faire des lois qui entament les droits individuels, et lui commande d'en promulguer qui assurent efficacement la jouissance des ces droits 44(*) ».

Toute constitution, en vérité, symbole d'organisation du pouvoir, se doit d'être articulée autour des principes concourant à la garantie des droits et des libertés fondamentales des individus. En ce sens, la Constitution de 1987, dans le but de promouvoir le respect des droits de l'Homme, dès son préambule, se réfère à la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme de 1948. Ainsi, il est énoncé dans le paragraphe 1 de son préambule : « Le peuple haïtien proclame la présente constitution pour garantir ses droits inaliénables et imprescriptibles à la vie, à la liberté et à la poursuite du bonheur, conformément à son acte d'indépendance de 1804 et à la déclaration universelle des droits de l'homme de 194845(*) ». Ces valeurs proclamées dans la constitution de 1987 reflètent aussi celles retrouvées dans la Convention américaine.

Il faut dire, toutefois, qu'il n'y a pas que la constitution de 1987 faisant référence au respect des droits et des libertés fondamentales dans la mesure où la quasi-totalité des constitutions d'avant 1987 ont mis l'emphase sur le respect de ces derniers, et surtout ont condamné l'esclavage, entendu comme véritable négation de la dignité humaine, en témoignent les deux premières constitutions, après notre indépendance le 1er Janvier 1804, date fatidique dans l'histoire du peuple haïtien tout entier. Ainsi, dans l'article premier de la Constitution de 1806 on y lit : « il ne peut exister d'esclaves sur le territoire de la république ; l'esclave y est à jamais aboli46(*) ». Plus concrètement, dans l'article 3 de cette même Constitution, il est précisé que : « Les droits de l'homme en société sont : la liberté, l'égalité, la sureté, la propriété ». On peut tout aussi bien considérer d'autres moments historiques revendiquant les Droits de l'Homme, par exemple la révolution de 1843. Cette révolution a surgit après le long règne de Jean P. Boyer, celui qui a giflé la dignité nationale en acceptant de payer notre indépendance à la France. Elle a préconisé une autre vision d'organisation du pouvoir qui doit prendre en considération la dignité et l'humanité dont le peuple haïtien est porteur. Elle voulait, en fait, saper la base du régime despotique présidentiel et la domination de la caste militaire en vue d'instaurer un pouvoir civil, libéral, représentatif et décentralisateur. C'est cette nouvelle vision humaniste du pouvoir qui donne lieu à la Constitution de 1843. Laquelle Constitution a pu permettre au peuple haïtien d'incorporer ses revendications dans un corps de principes d'ordre légal. Dès son préambule, on y lit : « Le peuple haïtien proclame, en présence de l'Etre suprême, la présente constitution, pour consacrer à jamais ses droits, ses garanties civiles et politiques, et son indépendance nationale47(*) ». En outre, le principe de la séparation des pouvoirs, important pour l'établissement de l'Etat de droit, de la démocratie, et important aussi pour la garantie et la protection des Droits de l'Homme, était figuré dans la colonne de cette constitution issue de la révolution de 1843. A cet effet, dans l'article 43, il est écrit : « L'exercice de cette souveraineté est délégué à trois pouvoirs électifs et temporaires. Ces trois pouvoirs sont : le pouvoir législatif, le pouvoir exécutif, le pouvoir judiciaire48(*) ». Toutefois, l'adoption de cette Constitution n'a pu mettre fin aux différentes revendications, aux différentes souffrances des haïtiens dans la mesure où d'autres constitutions allaient être adoptées. C'est le cas de la Constitution de 1946. Cette dernière a vu le jour durant la chute du gouvernement d'Elie Lescot ayant permis aux forces sociales et politiques de revendiquer la liberté pour tous et le partage du pouvoir. La Charte, votée le 22 novembre 1946, prend toutes les dispositions pour contrer les velléités despotiques du Président. On y remarque des innovations importantes comme l'introduction de l'Habeas corpus, l'interdiction de l'extradition en matière politique (art. 31), le respect du droit syndical des travailleurs, l'obligation du congé annuel payé. Pour la première fois, la Police et l'Armée sont découplées. Il y a aussi la Constitution de 1957 qui élargit le contenu démocratique et reconnaît de nouveaux droits comme la protection sociale des démunis ou les Droits de la Femme. Elle consacre un chapitre au régime économique, à l'obligation de l'Etat de protéger la santé publique et de procurer une assistance médicale aux malades.

2- Les traités internationaux relatifs aux Droits de l'Homme

Il y a tout un ensemble de traités internationaux qui sont ratifiés par la République d'Haïti dans le domaine de la protection de Droits de l'Homme. C'est le cas, par exemple, de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme de 1948. Cette déclaration, ratifiée par Haïti, fait corps à la législation du pays. D'ailleurs, les constituants y font référence dans le préambule de la constitution de 1987: «  Le Peuple Haïtien proclame la présente Constitution : pour garantir ses droits inaliénables et imprescriptibles à la vie, à la liberté et à la poursuite du bonheur conformément à son Acte d'Indépendance de 1804 et à la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme de 1948 ».

Il y a d'autres traités qu'Haïti a ratifiés dans le but de protéger les droits de l'homme. On a entre autres :

- Le Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques " de 1966, entré en vigueur le 23 mars 1976.

- Le Pacte International relatif aux Droits Economiques, Sociaux et Culturels (PIDESC), ratifié le 31 janvier 2012.

- Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale de 1965 des Nations Unies. Entrée en vigueur le 4 janvier 1969.

- Convention internationale sur l'élimination et la répression du crime d'apartheid de 1973 des Nations Unies. Entrée en vigueur le 18 juillet 1976.

- Convention de l'OIT concernant la discrimination en matière d'emploi et de profession de 1958 des Nations Unies. Entrée en vigueur le 15 juin 19610.

- Convention pour la prévention de la répression du crime de génocide de 1948 des Nations Unies. Entrée en vigueur le 12 janvier 1951.

- Convention supplémentaire relative à l'abolition de l'esclavage, de la traite des esclaves et des institutions et pratiques analogues à l'esclavage de 1956 des Nations Unies. Entrée en vigueur le 30 avril 1957.

- Convention pour la répression de la traite des êtres humains et de l'exploitation de la prostitution d'autrui de 1949 des Nations Unies. Entrée en vigueur le 25 juillet 1951.

- Convention de l'OIT concernant le travail forcé de 1930 de la Société des Nations. Entrée en vigueur le 1er mai 1932.

- Convention de l'OIT concernant l'abolition du travail forcé de 1957 des Nations Unies. Entrée en vigueur le 17 janvier 1959.

- Convention relative au statut des réfugiés de 1951 des Nations Unies. Entrée en vigueur le 22 avril 1954.

- Protocole relatif au statut des réfugiés de 1967 des Nations Unies. Entrée en vigueur le 4 octobre 1967.

- Convention de l'OIT concernant la liberté syndicale et la protection du droit syndical de 1948 des Nations Unies. Entrée en vigueur le 4 juillet 1950.

- Convention de l'OIT concernant l'application des principes du droit d'organisation et de négociation collective de 1949 des Nations Unies. Entrée en vigueur le 18 juillet 1951.

- Convention sur les droits politiques de la femme de 1953 des Nations Unies. Entrée en vigueur le 7 juillet 1954.

- Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes de 1976 des Nations Unies. Entrée en vigueur le 3 septembre 1981.

- Convention relative aux droits de l'enfant de 1989 de l'UNICEF. Cette convention est entrée en vigueur le 2 septembre 1990.

Outre ces traités, il convient de signaler qu'Haïti est membre de l'Organisation des Etats Américains (OEA). Par conséquent, elle a ratifié huit des principales Conventions de cette Organisation en matière des Droits de l'Homme, qui constituent des instruments régionaux. Il s'agit de :

- Convention Américaine relative aux Droits de l'Homme de 1969. Entrée en vigueur le 18 juillet 1978.

- Convention sur l'asile de 1928. Entrée en vigueur le 21 ami 1929.

- Convention sur l'asile politique de 1933. Entrée en vigueur le 28 mars 1935.

- Convention sur l'asile diplomatique de 1954. Entrée en vigueur le 29 décembre 1954.

- Convention sur l'asile territorial de 1954. Entrée en vigueur le 29 décembre 1954.

- Convention sur le statut des étrangers de 1928. Entrée en vigueur le 29 août 1929.

- Convention interaméricaine sur la concession des droits politiques à la femme de 1948. Entrée en vigueur le 17 mars 1949.

- Convention interaméricaine pour la prévention et la répression de la tortue, signée le 13 juin 1986.

- Convention interaméricaine sur la prévention, la sanction et l'élimination de la violence contre la femme de 1994. Entrée en vigueur le 3 mars 1995.

- Convention interaméricaine pour la prévention, la sanction et l'élimination de la violence contre la femme (la Convention de « Belém do Pará »), ratifiée le 2 juin 1997.

B- Les instruments institutionnels de protection nationale des Droits de l'Homme

Les institutions qui contribuent à la protection des Droits de l'Homme ne sont pas du même ordre. Il y a des institutions étatiques de protection des Droits de l'Homme, et les institutions non étatiques ou non gouvernementales de protection des Droits de l'Homme. Cela se justifie par le fait que la bataille pour le respect des Droits de l'Homme n'est pas seulement une affaire de l'Etat, mais aussi celle des tous les acteurs, de tous les citoyens de la société. D'où la dimension d'opposabilité des Droits de l'Homme, comprise comme un des principes de cohérence éthique de ces derniers.

1- Les institutions étatiques de protection des Droits de l'Homme

A part les systèmes internationaux de protection des Droits de l'Homme, il y a aussi des mécanismes nationaux de protection de ces derniers. L'adoption des mécanismes de protection des Droits de l'Homme en Haïti résulte d'un effort entamé depuis en 1986 pour l'instauration d'un Etat de droit. L'instauration de ce dernier passe par la création d'un ensemble d'institutions. Parmi ces institutions étatiques, plusieurs ont apporté des contributions importantes à la protection des droits de l'homme telles que:

L'office de la Protection du Citoyen (OPC)

Il s'agit d'une institution créée par la Constitution de 1987 en son article 207 : « il est créé un office dénommé office de la protection du citoyen dont le but est de protéger tout individu contre toutes les formes d'abus de l'Administration Publique ». A ce titre, il est clair que sa création s'inscrit dans la logique consistant à assurer la garantie des droits octroyés par la charte fondamentale. Cet office jouit de l'autonomie administrative. Il est dirigé, selon l'article 207-1 : « par un citoyen qui porte le titre de protecteur du citoyen. Il est choisi par consensus entre le président de la république, le président du sénat et le président de la chambre des députés. Il est investi d'un mandat de sept(7) ans, non renouvelable 49(*)». L'intervention de cet office en faveur de tout plaignant se fait sans aucun frais, et cela est valable pour quelle que soit la juridiction, art. 207-2.

Il est vrai que cette institution a été prévue par la Constitution de 1987, mais ce n'est qu'en 1995 qu'un décret présidentiel a été pris pour instituer l'Office selon la procédure tracée par la constitution. Ses bureaux ont été véritablement ouverts le 4 Novembre 1997 avec la nomination du Docteur Louis E. Roys comme protecteur du citoyen.

L'Office de la protection du citoyen a deux missions principales. Comme il est énoncé dans l'art 207 de la constitution, sa mission première est de protéger les citoyens contre les abus de l'administration en facilitant leurs rapports avec celle-ci, et sa seconde mission concerne le respect des Droits de l'Homme. La compétence de l'Office, selon l'art 14 du décret du 12 Décembre 1995 créant l'OPC, s'étend à tous les ministères et à toutes les institutions sous tutelle d'un ministère, à toutes les institutions autonomes50(*). Le protecteur du citoyen, dans le cadre de ses attributions, reçoit non seulement des plaintes en ce qui concerne le fonctionnement des administrations de l'Etat, des collectivités territoriales et tout autre organisme chargé du service public, mais aussi il prend part à toutes les activités ayant rapport à la protection des droits de l'homme. Outre cela, aux termes de l'article de 22 du dit décret, le protecteur détient un pouvoir de recommandations et de propositions de réforme pour rendre plus effectifs les travaux de l'Office.

Il faut dire qu'à coté de l'Office de la Protection du Citoyen comme organisme indépendant de l'Etat appelé à garantir, améliorer, protéger les Droits de l'Homme, il y a d'autres institutions étatiques qui prennent en considération la question de la protection des Droits de l'Homme. Parmi lesquelles se retrouvent, entres autres : le Ministère à la condition Féminine et aux Droits de la Femmes, le Ministère de l'Environnement, la Secrétairerie d'Etat à l'Intégration des Personnes Handicapées, L'Office National d'Identification, la police nationale, l'Administration Pénitencière, etc.

Le Ministère à la Condition Féminine et aux Droits de la FEMME

Ce ministère a été créé par décret le 8 novembre 1994, qui est l'organe central chargé de concevoir, de définir et de faire appliquer les politiques de l'Etat dans le domaine de la Condition Féminine et des Droits de la Femme. Il a pour attributions principales d'oeuvrer à l'émergence d'une société égalitaire pour ses composantes des deux sexes, d'orienter la définition et l'exécution des politiques publiques équitables à l'échelle nationale.

Le Ministère de l'Environnement

Ce ministère a été créé en novembre 1994. En effet, sa création tend vers la promotion du développement durable et constitue aussi un encouragement certain pour la protection de l'environnement. Et on sait très bien que la protection de celui-ci rentre dans la politique du respect des Droits de l'Homme. D'ailleurs, la troisième génération des Droits de l'Homme est orientée vers l'établissement d'un environnement sein qui inspire un minimum de respect de la dignité humaine.

La Secrétairerie d'Etat à l'Intégration des Personnes Handicapées

Etre handicapé n'implique pas l'effacement de la personnalité, la dignité. Les personnes handicapées doivent être absolument considérées comme des personnes à part entière. C'est dans cette optique que l'Etat haïtien a procédé à la création de la secrétairerie d'Etat à l'Intégration des personnes handicapées. Cette Secrétairerie d'Etat a été créée par Arrêté présidentiel en mai 2007. Elle a pour principale mission d'intervenir en matière de prévention des invalidités et de travailler à l'intégration de cette catégorie de gens.

L'Office National d'Identification

Cet organe, créé par décret en 2005, a pour attribution de procéder à l'identification des haïtiens dès leur naissance et de tenir le Registre National d'Identification, dans la mesure où l'indication des citoyens est une marque de reconnaissance de leurs droits en fonction de leur dignité.

L'Office National de la Migration

L'office national de la migration, créé par décret en mars 1995, placé sous tutelle du Ministère des Affaires Sociales et Travail (MAST), a pour attribution principale d'encadrer les individus refoulés de l'étranger et rapatriés en Haïti pour des raisons économiques.

La Commission Nationale de Lutte contre la Drogue

La Commission Nationale de Lutte contre la Drogue (CONALD), l'Unité Centrale de Renseignements Financiers (UCREF) et l'Unité de Lutte Contre la Corruption (ULCC), sont des entités étatiques qui ont été créées, respectivement, en 2001, en 2004 et en 2005 pour faire face à des crimes entravant la libre jouissance de certains Droits de l'Homme, comme la corruption, le blanchiment d'argent et le trafic illicite des stupéfiants. Cette Commission revêt une grande importance, car en matière de trafic illicite de stupéfiants, il se trouve qu'on peut commettre des crimes financiers, et que ces derniers ne font pas bon ménage avec les Droits de l'Homme. Pour contrer ce phénomène, cette entité étatique mérite d'être absolument renforcée.

2- Les institutions non étatiques de protection des Droits de l'Homme

La défense des Droits de l'Homme n'implique pas seulement la responsabilité de l'Etat, mais également celle de tous les acteurs, de tous les citoyens de la société. En effet, depuis un certain temps, on constate beaucoup d'organisations relevant de la société qui se sont engagées dans la lutte pour la défense des Droits de l'Homme. Ces organisations ont une grande importance. Car elles servent, pour ainsi dire, un contre-pouvoir, en ce qui concerne le respect de ces droits. Dans la majeure partie des cas, leurs actions se situent au niveau de la dénonciation des actes portant atteinte au respect des Droits de l'Homme. C'est le cas de l'Organisation du réseau national de défense des droits humains (RNDDH). C'est une Organisation haïtienne des Droits de l'Homme non gouvernementale à but non-lucratif qui a été créée à New York en 1982 sous l'appellation de Nationale Coalition for Haitian Refugee (NCHR). Cette organisation a joué un rôle matriciel dans l'instauration de la démocratie haïtienne. Elle travaille de concert avec d'autres organisations telles : Plate-forme des Organisations haïtiennes des Droits Humains (POHDH), Centre de recherches sociales et de formation économique pour le développement (CRESFED). Ce dernier intervient surtout dans le domaine de la formation, en particulier auprès du monde étudiant, secteur avec lequel il est le plus en contact. Il est également lié à un certain nombre d'organisations populaires.

En clair, le Réseau National de Défense des Droits de l'Homme (RNDDH) est une organisation qui a contribué au respect des Droits de l'Homme en Haïti. Ainsi, récemment, elle s'est positionnée dans l'affaire de l'ancien dictateur haïtien, Jean C. Duvalier, et dans l'arrestation du député en fonction, Arnel Bélizaire, député de la 49eme législature. Elle qualifie cette arrestation comme un acte arbitraire et inconstitutionnel, et par voie de conséquence, il s'agit des actes relevant de la violation grave des Droits de l'Homme. Et elle qualifie aussi l'ordonnance du juge d'instruction dans l'affaire de J. Claude Duvalier, d'ordonnance de la honte. Elle réalise aussi ses travaux au niveau de la publication des rapports sur les cas de violation des Droits de l'Homme. Et certaines fois, elle fait des propositions pour changer la situation.

En outre, il y a d'autres organisations locales qui mènent aussi la lutte pour le respect des Droits de l'Homme, par exemple le Comité des avocats pour le respect des libertés individuelles (CARLI). Il s'agit d'une organisation non gouvernementale dont la sacro-sainte mission est la lutte pour le respect des droits de l'homme en Haïti. Il a critiqué énergiquement, dans une note rendue publique le 27 octobre 2011, l'arrestation du député en fonction Arnel Belizaire. Cette organisation a considéré cette arrestation comme un acte arbitraire et inconstitutionnel.

Toutefois, le dévouement des ces organisations nationales pour la défense des Droits de l'Homme, leur positionnement et les dénonciations des cas de violation de ces derniers sont beaucoup plus politiques, puisqu'il ne suffit pas de les dénoncer à corps et à cri, il faut, au moins, qu'elles soient en mesure de pouvoir accompagner juridiquement les personnes victimes. Ainsi, on ne retrouve pas vraiment des arrêts rendus soit par les tribunaux de première instance, soit par les cours d'appel ou la cour de cassation en faveur d'une personne dont les droits ont été violés à la faveur d'un support juridique de la part de ces organismes. De ce fait, ils doivent pouvoir accompagner juridiquement les victimes.

Dans l'ensemble, cette première partie de notre travail nous a permis de pouvoir situer le contexte historique de l'émergence des Droits de l'Homme, dans la mesure où ils ne sont pas le fruit d'un heureux hasard, mais de la réunion d'un ensemble de conditions historiques liées à la vie de l'homme en société. Elle nous a permis, en outre, d'asseoir les bases théoriques de ce travail de recherche. Car la question des Droits de l'Homme ne peut pas se réaliser en faisant l'économie des débats théoriques et idéologiques qui ont pu contribuer à leur apparition. Ce sont ces débats théoriques et idéologiques qui ont conduit à l'élaboration des textes internationaux et la mise en branle des systèmes de protection internationale des Droits de l'Homme dont la valeur a pu retentir et retentit encore dans toutes les fibres de la communauté internationale.

Toutefois, tenant compte de la situation critique de l'évolution des Droits de l'Homme, n'y a-t-il donc pas lieu de parler de l'inefficacité des mécanismes de protection et des difficultés d'application des Droits de l'Homme en Haïti ?

SECONDE PARTIE

L'INEFFICACITE DES MECANISMES DE PROTECTION ET LES DIFFICULTES D'APPLICATION DES DROITS DE L'HOMME EN HAITI

Malgré la mise en place de toute une panoplie de mécanismes de protection des Droits de l'Homme tant sur le plan international que national, les Droits de l'Homme ne se portent pas trop bien en Haïti. Nombreuses sont les difficultés qui font obstacle à l'application de ces droits. Et ces difficultés ont une incidence sur l'efficacité des instruments appelés à les préserver de manière effective. Ainsi, cette partie, se divisant en deux chapitres, s'attachera à mettre en évidence les difficultés dues à l'application des Droits de l'Homme en Haïti. Et un regard sera porté sur la situation d'évolution des Droits de l'Homme en Haïti.

* 37 - Henri Oberdorff et Jacques Robert, Op.cit. p. 7.

* 38 - Ibid.

* 39 - Henry Oberdorff et Jacques Robert. Op.cit, p. 27.

* 40 - H. Oberdorff, J. Robert, Op.cit. p. 343-344.

* 41 - Ibid.

* 42 - Ibid.

* 43 - Op.cit. p. 345

* 44 - Pierre-Henry Prélot, Droits des libertés fondamentales, Hachette livre, 2007, Paris, p. 55.

* 45 - Constitution de 1987 in Deux siècles de constitutions haïtiennes, Fardin, Port-au-Prince, 2010, p. 293.

* 46 - Constitution de 1806 in Deux siècles de constitutions haïtiennes, Op.cit. p. 23.

* 47 - Constitution de 1843 in Deux siècles de constitutions haïtiennes, Op.cit. p. 49.

* 48 - Op.cit. p. 51.

* 49 - Constitution de 1987 in Deux siècles de constitutions haïtiennes, Op.cit. p. 313.

* 50 - Ibid.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand