Conclusion partielle
L'approche appui à la communication locale en
démontrant sa capacité à répondre parfaitement aux
exigences de la roue PDCA-S de l'amélioration continue de Deming, aux
principes fondateurs et à certaines modalités du New Public
Management, se positionne clairement comme un modèle organisationnel de
la qualité. Elle vise à développer la performance
générale de l'institution communale et à promouvoir la
figure du maire comme « entrepreneur politique ou institutionnel
».
Au nom de l'institutionnalisation d'une « administration
de développement », elle marque l'intrusion d'un volontarisme
managérial dans la gestion communale visant à en
améliorer, de façon continue, la performance ; et par
conséquent, la qualité du service offert au citoyen. Mais cette
logique managériale du point de vue de l'approche communication locale
se veut un « managérialisme modéré » dans la
gestion communale, lequel reste attaché aux valeurs traditionnelles du
service public (continuité, égalité, mutabilité) et
prône la primauté de l' « efficacité »/ «
fiabilité » sur l' « efficience ».
Vu sous cet angle, je pourrai conclure que, l'intrusion du
« managérialisme » dans la gestion communale, vue au travers
de l'approche communication locale, serait, en définitive, une intrusion
« salvatrice » qui met les jeunes institutions communales
béninoises (les communes béninoises ont à peine 8 ans
d'existence en 2010 !) à l'abri d'une «
désinstitutionnalisation dubétienne » (au sens de prise de
distance des individus par rapport aux institutions) précoce et
assurément fatale ! Cette forme de «
désinstitutionnalisation » pourrait survenir si la jeune
22 PESQUEUX (Yvon), avril 2007, Gouvernance et
privatisation, PUF, Paris, Collection La politique éclatée,
P95
institution communale se montre incapable de satisfaire les
attentes légitimes des populations en termes d'amélioration de
l'accès aux services de base de qualité, de satisfaction de leurs
besoins fondamentaux et d'amélioration de leur bien-être
socioéconomique et sanitaire, attentes suscitées par
l'avènement de la décentralisation au Bénin, après
le constat d'échec patent de l'Etat central sur ce terrain-là.
Ce défi majeur lancé aux jeunes institutions
communales béninoises ne peut être véritablement
relevé qu'à travers une amélioration de la gouvernance au
niveau local, notamment à travers la mise en oeuvre d'une bonne
gouvernance locale.
Ce sera l'objet de la troisième partie de ce
mémoire. A l'aide de données et exemples précis (provenant
de différentes sources : rapports d'études, rapports
d'auto-évaluation, rapports d'activités, résultats de
questionnaire et d'interviews, observations directes...), je démontrerai
le lien entre communication locale et bonne gouvernance et surtout l'impact de
la communication locale dans l'amélioration des différentes
formes de gouvernance locale.
III- Communication locale : un outil
d'amélioration de la gouvernance locale
A. Liens entre les champs de la communication locale et
les principes clés de la bonne gouvernance locale
Avant de questionner la pratique communale de la
communication locale au regard des principes clés de la bonne
gouvernance, il nous a paru opportun de voir, tout d'abord, ce qu'en pensent
les acteurs eux-mêmes (les membres de cellules de communication et les
maires) ; autrement dit leur perception du lien possible entre communication
locale et bonne gouvernance. J'utiliserai pour ce faire les résultats du
questionnaire que je leur ai adressé. A la question « Pensez-vous
qu'il y a un lien entre communication locale et bonne gouvernance ? Si oui,
comment ? (illustrez vos propos, si possible, par des exemples précis)
»
· 100% des cellules de communication qui ont
répondu, soit 10/10, sont convaincues du lien « très
étroit » entre communication locale et bonne gouvernance
Comment ? Ils justifient leurs réponses par les raisons
suivantes, entre autres :
· La communication locale est un catalyseur à
l'exercice du contrôle citoyen de l'action publique
· La communication permanente conduit à une gestion
transparente
· En créant des occasions ou opportunités
d'échanges entre élus locaux et populations, la communication
locale permet aux premiers de prendre en compte les aspirations des seconds et
de revenir leur rendre compte de leur gestion.
En guise d'illustrations, ils donnent les exemples suivants :
· Exemple 1 : séances d'information des populations
sur les prévisions du budget et les réalisations du conseil
communal ;
· Exemple 2 : avant de construire un puits, un centre de
santé ou un WC public, les élus
locaux écoutent les groupes cibles pour savoir si ce
sont réellement leurs besoins et oüils veulent que
soient implantées ces infrastructures. Sinon, si ces infrastructures
sont
construites sans communication avec les
intéressés, elles risquent de ne pas être utilisées
ou d'être sous-utilisées.
· Exemple 3 : l'implication des différentes
associations de base et des membres de la société civile en
général dans la définition des politiques et la mise en
oeuvre des actions de développement de la commune.
· Exemple 4 : quand la cellule de communication invite
les agents du service financier de la mairie à dire aux populations les
différentes étapes de l'élaboration du budget, de son vote
et de son exécution, cela participe à la bonne gouvernance
Les exemples ci-dessus donnent un avant goût de la
pratique communale dans le domaine de la communication locale au niveau des
départements de l'Atacora et de la Donga. Sur la base des rapports
d'activités annuels des cellules de communication et des observations
directes sur le terrain, j'ai réuni par champ de communication quelques
actions clés et fait le lien avec le ou les principes clés de
bonne gouvernance locale sur lesquels elles ont un impact. C'est l'objet du
tableau ci-dessous.
Figure 9 : Tableau comparatif des
champs et activités de la communication locale avec les principes
clés de bonne gouvernance locale
Champs de communication
|
Eléments d'illustration des pratiques
communales (sur la base d'observations directes et des rapports
d'activités des cellules de communication)
|
Principes de bonne gouvernance
impactés
|
Communication exécutive
|
Activités du conseil communal
|
|
|
|
Publication/affichage délibérations du conseil
communal; informations diverses dans les bulletins communaux
|
-* transparence
|
|
Conformité des décisions du conseil communal aux
textes en vigueur (autoévaluation gouvernance locale
|
-*primauté du droit
|
|
2010)
|
|
|
Activités du Maire
|
|
|
Respect des procédures dans les recrutements et la
passation des marchés (autoévaluation gouvernance locale 2010)
|
-* transparence
|
|
Animation des émissions interactives« la mairie
à
|
-* participation
|
|
l'écoute du citoyen; reportages sur les activités
du
maire ; séances d'écoute du citoyen et
boîtes à suggestion dans les arrondissements ;
|
citoyenne
|
|
Communication financière : vulgarisation du budget
communal, des réalisations et leurs coûts;
|
-* transparence, obligation de rendre compte aux citoyens
|
|
Planification locale : élaboration et mise en oeuvre
|
-* participation
|
|
stratégie de communication en vue participation des
populations à l'élaboration PDC et SDAC
|
citoyenne
|
|
Champs de communication
|
Eléments d'illustration des pratiques
communales (sur la base d'observations directes et des rapports
d'activités des cellules de communication)
|
Principes de bonne gouvernance
impactés
|
|
|
|
Communication interne
|
Formations internes : déontologie administrative,
élaboration et suivi des cahiers de
charge, organigramme, circuits de courrier interne
|
-* « efficience » et efficacité de
l'administration locale
|
Communication de service
|
Emissions sur les différents services de la mairie, les
coûts et délais de fourniture de leurs prestations
Réalisation des panneaux d'orientation des usagers,
dépliants et guides d'usagers sur les services de la mairie,
journées portes ouvertes sur les services de la mairie
|
-* transparence
-* « efficience » et efficacité de
l'administration locale
|
Communication civique
|
Droits et devoirs des citoyens : journée du
contribuable, sensibilisation sur les taxes et
leur utilisation
Santé, éducation, environnement : campagnes
d'information, sensibilisations, émissions radio
|
-* participation citoyenne, primauté du droit
|
Communication relationnelle
|
Cadres de concertation des acteurs communaux Le maire en
tournée dans les arrondissements et quartiers de villes
|
-* participation citoyenne
|
Marketing territorial
|
Mobilisation des ressources pour le financement des actions de
développement
Mobilisation des citoyens autour de l'image de leur commune
|
-* participation citoyenne
|
|
Source : auteur
A la lecture de ce tableau, il est aisé de remarquer
que des six principes de bonne gouvernance contenus dans la définition
de Modibo SIDIBE (participation, transparence, responsabilisation,
primauté du droit, efficacité et équité) et que
j'ai choisis de tester dans le cadre de ce mémoire, le principe de
l'équité/genre, n'apparaît clairement nulle part dans la
pratique communale de la communication locale des conseils communaux de la
2ème mandature des communes des départements de l'Atacora et de
la Donga. Ce constat se trouve confirmé dans le Rapport 2010 de
l'auto-évaluation de la gouvernance locale. La plupart des communes des
deux départements se sont illustrées, contrairement à
2007, par une contre performance dans le domaine III : information,
participation et genre (voir graphique cidessous). Cela s'expliquerait, entre
autres, par :
· la faible ou la non implication des organisations
et associations féminines dans le cadre des activités des
commissions techniques et des activités de développement de la
commune, en général ;
· l'inexistence, dans de nombreuses communes,
d'actions spécifiques en faveur des femmes ;
Figure 10 : Evolution des scores des
communes de l'Atacora-Donga de 2007 à 2009 dans le domaine III:
information, participation et genre (autoévaluation gouvernance
locale)
0,5
2,5
1,5
0
3
2
1
Evolution des scores des communes de l'Atacora-Donga
de 2007 à 2009 dans le domaine III: information , participation et
genre (autoévaluation gouvernance locale)
2007
2009
Source : auteur
Le Rapport 2007 de l'auto-évaluation de la gouvernance
locale au Bénin qui prenait en compte le bilan en fin de mandat des tout
premiers conseils communaux de l'ère de la décentralisation au
Bénin avait salué la très bonne performance des communes
des départements de l'Atacora et de la Donga dans le domaine III et
l'expliquait, entre autres par : « ...la formation et l'accompagnement des
Responsables des Services de la Planification et du Développement Local
des communes de l'Atacora sur les outils genre et développement et leur
intégration dans la planification communale, [qui] ont contribué
à améliorer leurs performances communales [dans le domaine III].
Ainsi les femmes ont pu pleinement participer aux processus de prise de
décisions et ont inscrit dans le plan d'actions communales des actions
concrètes financées par le budget communal : « appui
financier aux jeunes filles du lycée à Natitingou, l'octroi de
parcelles aux groupements de femmes, le contrat avec une ONG de lutte contre
l'excision, le don de matériel à certains groupements, etc.
»23
Nonobstant cette bonne performance générale, le
Rapport 2007 mettait déjà en garde les acteurs communaux des deux
départements : « s'il est vrai que les acteurs communaux de
l'Atacora sont suffisamment sensibilisés et outillés en
matière de genre et développement, il
23 ANCB, décembre 2007,
Auto-évaluation de la gouvernance locale au Bénin (Rapport
général), JC Press Inter, Cotonou, P68
demeure que de gros efforts doivent être consentis pour
une meilleure implication des femmes dans les activités communales
(indicateur 3.3) et pour une multiplication des actions spécifiques en
faveur des femmes (3.4), surtout dans les communes de Matéri,
Toucountouna et Kérou »24
Le constat qui se dégage est que les conseils
communaux de la 2ème mandature n'ont visiblement pas tenu
compte de cette mise en garde et ont eu une pratique communicationnelle locale
qui n'a pas été « genre sensible » ! La leçon
qu'il convient d'en tirer est que la communication locale au service de la
démocratie à la base et du développement local durable, se
doit d'être suffisamment attentive aux aspects genre et
équité, pour ne pas laisser sur le quai de la
décentralisation une frange importante de la population béninoise
; les femmes (qui représentent 50,43% de la population des deux
départements, selon le RGP de 2002). Nous reviendrons, une fois encore,
plus loin, sur les conséquences de cette « lacune »
communicationnelle dans la section C : « impacts de la communication
locale sur la connaissance et la perception par les populations des prestations
communales ».
B. Impacts de la mise en oeuvre de la communication
locale sur le comportement des communicants locaux (élus locaux et
personnel communal)
L'analyse de ces impacts se fera sous le prisme des
différentes sortes de gouvernance au niveau local et à travers
les résultats du questionnaire adressé aux cellules de
communication. La question assez ouverte, était ainsi formulée :
« Pensez-vous que l'élaboration et la mise en oeuvre des plans de
communication locale a eu des impacts sur vous membres de la cellule de
communication, sur le maire et ses adjoints (voir les autres élus
locaux), sur le personnel de la mairie ? Si oui, lesquels ? (illustrez vos
propos, si possible, par des exemples précis) ».
Au niveau de la gouvernance
politique
Prise de conscience par les gouvernants et communicants locaux
de l'importance de la communication locale dans la mise en oeuvre de l'action
communale :
· Prise de conscience par le maire, ses adjoints et
les membres de la cellule de communication de l'importance de la communication
locale, notamment par rapport aux actions menées par la commune
24 ANCB, Op. Cit., P69
· Prise de conscience que la cellule de communication
est au coeur du développement local et de son rôle de
médiateur entre élus et populations
· Les élus savent qu'ils sont suivis et doivent
rendre compte de leur gestion
· L'élaboration et la mise en oeuvre du plan de
communication ont développé chez le Maire et les autres acteurs
de l'administration communale, le réflexe de communiquer. L'instauration
d'un climat de confiance entre les élus locaux et les populations :
· Parce que les citoyens sont mieux informés,
cela crée un climat de confiance entre le maire et les populations : par
exemple, l'organisation de la journée du contribuable qui fait
comprendre que l'argent de la commune est géré par un comptable
nommé par l'Etat et non directement par le Maire ; dans ce cas le Maire
se sent plus à l'aise en demandant de payer les taxes.
Au niveau de la gouvernance
administrative
Amélioration de la communication interne et des relations
de travail entre élus et personnel communal :
· Consolidation des relations personnelles et de travail
entre le personnel, les élus, le maire et les adjoints
· Personnel communal mieux informé sur les projets
communaux ainsi que les activités et les décisions du conseil
communal
· Le personnel de la mairie connaissant mieux sa mission
travaille maintenant dans
l'optique d'une administration de développement et est
plus disposé à rendre compte. Amélioration de
l'efficacité de l'administration communale par l'introduction de
nouvelles méthodes de travail et de nouvelles routines
organisationnelles :
· L'administration communale est mieux organisée
pour faire de la mairie une entreprise de développement par un
changement de méthode de travail
· Les réunions hebdomadaires du personnel avec le
Secrétaire Général et/ou le maire sont devenues une
habitude
· Les comptes rendus des missions et des formations
auxquelles les agents communaux ont pris part sont devenus une habitude
· Mise sur pied d'un cadre d'échanges entre le maire
et le personnel communal qui se tient tous les deux mois.
· Au niveau du personnel on note que la mise en
oeuvre des activités du champ de la communication interne, induit une
amélioration du fonctionnement des services de la mairie et de l'accueil
des usagers
Création de nouvelles compétences :
· Les membres de la cellule de communication ont
accumulé des compétences dans le domaine de la communication
locale
Affinement des outils et supports de communication :
· Grâce à cette mise en oeuvre, les techniques
et les outils de communication se sont améliorés.
Au niveau de la gouvernance
économique
Les acteurs communaux sont unanimes pour reconnaître
qu'un des impacts visibles de la communication locale se traduit dans la
gouvernance économique, notamment à travers l'amélioration
sensible des recettes communales, du fait du recul de l'incivisme fiscal (voir
réponses et exemples suite à la question sur les impacts de la
communication locale au niveau des population ; section C : « impacts de
la communication locale sur la connaissance et la perception par les
populations des prestations communales » ).
|
Au niveau de la gouvernance financière et
budgétaire
|
|
Ce qui se dégage sous cette forme de gouvernance, est
l'aptitude et l'aisance développées par les élus locaux et
le personnel du service financier de mairie à communiquer aux
populations tous les mécanismes liés à
l'élaboration et à l'exécution du budget (voir exemples 1
et 4 de la section A : « liens entre les champs de la communication locale
et principes de bonne gouvernance »). Ceci n'était pas
évident au démarrage de l'approche communication locale :
c'était presque un scandale que de demander aux maires de
développer une communication financière en direction des
populations ! Et c'est à juste titre qu'aujourd'hui le chef service
affaires générales de la mairie de Bassila peut affirmer, sans
ambages : « Le budget n'est plus un tabou ! »25
25 Déclaration faite lors des entretiens que
des journalistes-communicateurs ont réalisés avec les acteurs
communaux dans le cadre de la capitalisation des expériences
réussies du PDDC, courant première quinzaine de juin 2010.
C. Impacts de la communication locale sur les
populations
J'analyserai les impacts de la communication locale sur les
populations sous trois différents angles : (i) les résultats du
questionnaire et des entretiens des journalistes-communicateurs avec les
acteurs sur le terrain ; (ii) les résultats du sondage sur la
connaissance et la satisfaction des populations par rapport aux prestations
communales ; (iii) les résultats de l'autoévaluation de la
gouvernance locale. Comme à la section précédente, les
différentes formes de gouvernance locale me serviront de balises.
|
Au niveau de la gouvernance
économique
|
|
Le recul de l'incivisme fiscal avec l'amélioration des
recettes propres de la commune qui en est le corollaire et le changement
qualitatif d'attitude des opérateurs économiques du secteur
informel, sont les impacts unanimement cités par toutes les dix cellules
de communication. A titre d'illustration, les exemples suivants ont
été donnés :
· Exemple 1 : Les populations ont compris la
nécessité du paiement des taxes dans le contexte de la
décentralisation ; ce sont elles-mêmes qui proposent des
stratégies de recouvrement au conseil communal,
· Exemple 2 : Le recouvrement des droits de place sur le
marché est devenu plus aisé
· Exemple 3 : La décision de certains
opérateurs économiques à prendre volontairement leurs
registres de commerce et à payer leurs impôts et taxes
après des émissions radiophoniques
Ce constat des communicants locaux est bien conforté
par Richard HOUESSOU (juin 2010) dans son article scientifique intitulé
: « décentralisation, confiance interpersonnelle et civisme fiscal
au Bénin ».26Partant des résultats des travaux de
Tabellini (2008), Knack et Keefer (1997), Fafchamps (2006), Roubaud et
al.(2008), qui ressortent le lien entre la confiance aux institutions et le
développement économique, ainsi que ceux de ses propres travaux,
l'auteur de l'article a fait observer que « la gouvernance publique, la
confiance aux institutions, affectent la mobilisation fiscale ». Il a
conclu son article sur le fait que les résultats de ses travaux «
permettent de dire que la confiance interpersonnelle, la participation
26 HOUESSOU (Richard), (30 juin 2010), «
décentralisation, confiance interpersonnelle et civisme fiscal au
Bénin », Institute for Empirical Research in Political Economy
(IERPE),
http://www.ireep.org, 23P
communautaire, la présence d'infrastructures
(accessibilité) favorisent la paye des patentes aux autorités
locales ».
Au niveau de la gouvernance financière et
budgétaire
Même si elle n'apparaît pas très
explicitement dans les réponses à la question sur les impacts, il
n'en demeure pas moins qu'elle est sous-entendue. C'est en fait elle qui a
conditionné les succès apparents obtenus au niveau de la
gouvernance économique. Si les populations et les opérateurs
économiques ne sont pas bien informés et convaincus de la
politique budgétaire de la commune, ils restent assez réticents
dans le paiement des impôts et taxes. Dans les réponses à
la question sur le lien entre communication locale et bonne gouvernance, cet
aspect fondamental est ressorti, de même que la relation de confiance qui
se crée entre l'institution communale et le contribuable : « Quand
l'administration s'explique sur les rubriques du budget et revient
également s'expliquer sur comment les ressources ont servi à
faire des réalisations, le citoyen est mis en confiance et prêt
à participer au développement »27, conclut Bio
Orou Nikki, directeur de la radio locale de la commune de Péhunco.
Au niveau de la gouvernance
politique
Les acteurs locaux estiment que la communication locale a
surtout permis d'élever de niveau civique et de conscience citoyenne des
populations :
· Participation des populations aux sessions du conseil
communal
· Forte mobilisation des populations autour des projets de
développement
· Prise de conscience par les populations de leur statut de
citoyens et de leurs obligations en tant que tels
· La possibilité des citoyens de s'exprimer sur
des sujets qui engagent le développement de la commune par des canaux
existants (radios, journaux, boîtes à suggestion,
correspondances...)
· Amélioration du niveau de connaissance des
populations sur les compétences de la commune et le rôle du
citoyen dans la promotion du développement local Quelques exemples ont
été donnés en appoint :
· Exemple2 : constitution spontanée de groupes
organisés pour conduire les campagnes de salubrité, pour
faciliter la mobilisation des contreparties des populations en vue de la
réalisation de projets communaux ou communautaires.
· Exemple3 : l'inscription massive sur les fiches de
naissances dans les maternités et le retrait des actes de naissance
à la mairie et dans les arrondissements
· Exemple4 : l'accroissement du taux de
fréquentation des centres de santé
27 Déclaration faite lors des entretiens que
des journalistes-communicateurs ont réalisés avec les acteurs
communaux dans le cadre de la capitalisation des expériences
réussies du PDDC, courant première quinzaine de juin 2010.
· Exemple 5 : engouement dans la participation des
populations aux émissions radiophoniques interactives, ce qui
n'était pas le cas par le passé
L'autre impact mis en exergue par les communicants locaux
dans ce champ de gouvernance est la prise de conscience des élus locaux
de l'obligation inévitable de reddition de compte :
· L'obligation des élus de rendre compte aux
citoyens
|
Au niveau de la gouvernance
administrative
|
|
La seule réponse qui a été donnée
sur cette forme de gouvernance est l'amélioration des prestations de
l'administration communale à l'endroit des populations. Unique, la
réponse n'en est pas moins représentative. En effet, l'impact de
la communication locale sur la gouvernance administrative apparaît plus
clairement à travers les résultats des sondages (2007 et 2009)
relatifs au niveau de connaissance et de satisfaction des citoyens par rapport
aux prestations communales dans les communes cibles du PDDC. Grâce aux
efforts de communications dans les communes cibles, la proportion des
populations ayant une connaissance (très bonne, bonne ou moyenne) des
prestations communales est passée de 41,9% en 2007 à 65,3% en
2009, comme nous pouvons le constater de façon plus
détaillée à travers le graphique ci-dessous.
Figure 11 : Variation du niveau de
connaissance des prestations communales selon l'année
d'enquête.
70,0
60,0
50,0
Proportion en %
40,0
30,0
20,0
10,0
0,0
65,3
57,2
33,5
0,9
1,2
41,9
58,1
2007
2009
34,7
Très bon Bon Moyen Faible Aucun Acceptable Faible ou
nulle
Niveau de connaissance
13,5
32,6
10,0
19,5
18,5
13,2
Source : Rapport CERTI28
Ces résultats nets bien qu'encourageant, mettent
toutefois en exergue la nécessité de rendre la communication
locale sensible au genre (comme je l'avais souligné
précédemment dans la section A : « liens entre les champs de
la communication locale et les principes de bonne gouvernance »). En
effet, une analyse plus détaillée des résultats bruts
ci-dessus ressort des disparités notoires selon le sexe ou le niveau
d'instruction.
Très bonne connaissance
La proportion de personnes enquêtées qui ont une
" très bonne connaissance " des prestations communales a
presque triplé de 2007 à 2009, passant de 13,5% à 32,6%.
Pour les deux années, la variation du niveau de cet indicateur est
significative selon le sexe, le niveau d'instruction et
l'alphabétisation. Le niveau d'instruction et le fait d'être
alphabétisé sont des facteurs qui contribuent à
améliorer de façon significative la " très bonne
connaissance" des prestations communales.
Bonne connaissance
28 Cabinet CERTI, octobre 2009, Evaluation du
niveau de connaissance et de satisfaction des populations
bénéficiaires des prestations communales dans les zones
d'intervention du PDDC ; rapport final de l'évaluation à
mi-parcours, (fichier électronique) PP 14 à 20
La proportion d'enquêtés ayant une " bonne
connaissance " a doublé sur la période, avec une valeur
initiale de 10,0% en 2007, elle est de 19,5% en 2009. De façon
générale, la variation du niveau de cet indicateur n'est pas
influencée par les différentes variables
sociodémographiques mises en exergue.
Connaissance moyenne
Un peu plus d'une personne sur dix (13,2%) a une "
Connaissance moyenne " des prestations communales en 2009 contre 18,5%
en 2007. Cette proportion varie selon le niveau d'instruction,
l'alphabétisation d'une manière générale et
l'alphabétisation en Français.
Connaissance faible ou nulle
La proportion d'enquêtés ayant une "
Connaissance faible ou nulle " des prestations communales a
sensiblement diminué de 2007 à 2009 passant de 58,1% à
34,7%. Il existe une différence significative entre le pourcentage de
femmes et d'hommes qui ont une " Connaissance faible ou nulle " des
prestations de la commune. En 2009, le pourcentage de femmes (38,5%) ayant une
" Connaissance faible ou nulle " des prestations est relativement plus
élevé que celui des hommes (30,8%). Le niveau d'instruction et
l'alphabétisation (en Français comme en langue locale)
influencent de façon très significative la connaissance faible ou
nulle des enquêtés sur les prestations communales. Ainsi, la
proportion des personnes ayant une " Connaissance faible ou nulle "
est faible chez les instruits (supérieurs : 12,0%, secondaire II :
13,6%, secondaire I : 20,1%, primaire 23,6%) et très
élevée chez les non-instruits (43,9%). Il en est de même
pour les personnes alphabétisées et
nonalphabétisées. Les personnes alphabétisées
(21,9%) sont moins nombreuses à avoir une " Connaissance faible ou
nulle " des prestations communales que les personnes
nonalphabétisées (42,3%).
Figure 12 : Variation du niveau de
connaissance acceptable (Très bonne, bonne et moyenne) des prestations
communales selon le niveau d'instruction des enquêtés en 2007 et
en 2009
Primaire Secondaire I Secondaire II Superieur Sans Ensemble
instruction
Niveau d'instruction
Proportion en %
100,0
40,0
90,0
80,0
60,0
50,0
20,0
70,0
30,0
10,0
0,0
2009 2007
7
76,4 9,9
85,7
65,3
41,9
53,9
53,3
56,1
33,7
71,2
86,4 88,0
Figure 13 : Répartition des
communes touchées selon le niveau de connaissance (connaissance moyenne,
bonne, très bonne versus faible ou connaissance nulle) des
populations
Communes
Proportion en %
100,0
90,0
80,0
40,0
70,0
60,0
50,0
30,0
20,0
10,0
0,0
|
Connaissance moyenne, bonne ou très bonne Connaissance
faible ou nulle
|
|
Source figures 12 et 13 : Rapport
CERTI29
Au regard de ce qui précède, on peut retenir
que les personnes instruites ou alphabétisées sont peu nombreuses
à avoir une " Connaissance faible ou nulle " des prestations
communales contrairement aux personnes non-instruites ou
non-alphabétisées. Or dans le contexte béninois en
général et dans celui des départements de l'Atacora et de
la Donga en particulier, il ya
29 Cabinet CERTI, Op. Cit., PP 14 à
20
presque une synonymie entre « les femmes » et les
vocables de « non-instruites », « nonalphabétisés
». C'est en effet, une fois encore, les femmes et les filles qui
constituent le plus gros contingent de la population non instruite et
analphabète du Bénin (au Bénin, 2/3 de la population est
analphabète; le taux d'alphabétisation en 2002 est de 37,8%,
selon le RGP 2002). Les départements de l'Atacora et de la Donga,
comptent parmi les plus faibles taux d'alphabétisation du pays : Atacora
: 17,8% avec un écart de 13,6% en défaveur des femmes ; Donga :
25,4% avec un écart de 14,9% en défaveur des femmes.
Ainsi les Communes de Kouandé, Kérou et
Boukombé (dans l'Atacora) et celles de Copargo, Ouaké et Djougou
(dans la Donga), doivent fournir plus d'efforts dans la segmentation «
genre sensible » de leur stratégie de communication afin
d'atteindre avec plus d'impacts la grande frange de leur population
non-instruite et analphabètes, ainsi tenue à l'écart des
efforts de développement local. Dans cette optique il serait
intéressant pour les membres des cellules de communication de se
référer, entre autres au tableau d'exposition aux
activités de vulgarisation des prestations communales (que j'ai
tiré du rapport du Cabinet CERTI et mis en annexe 3) qui donne des
informations assez intéressantes sur les canaux par lesquels les
populations accèdent aux informations sur les prestations communales et
la fréquence d'exposition aux messages. Il est, par exemple, fort
heureux de constater que la radio locale et le marché/place publique
viennent largement en tête des sources d'exposition avec respectivement
74,1% et 45,9%. Ces deux canaux s'adaptant bien aux populations
analphabètes et particulièrement aux femmes, il serait judicieux
de les utiliser plus pour diffuser des messages et informations bien
ciblés sur cette couche de population.
En ce qui concerne le niveau général de
satisfaction des populations par rapport aux prestations communales, les
résultats de l'étude révèlent que, environ quatre
enquêtés sur dix (39,5%) en 2009 déclarent être "
satisfaites ou très satisfaites " des prestations offertes par leur
commune contre seulement 27,4% en 2007. On note cependant, qu'un peu plus de la
moitié d'entre eux (51,1%) disent ne pas être "satisfaites" ou
"moins satisfaites" des prestations communales. Il faut noter que près
d'un dixième (9,4%) n'a pas d'opinion sur la question (voir graphique
ci-dessous).
Figure 14 : Niveau
général de satisfaction par rapport aux prestations des
communes
Très satisfait Satisfait Moins satisfait Non satisfait
Pas d'opinion
Niveau de satisfaction
|
34,8
|
|
|
|
|
|
|
|
|
30,7
29,2
|
|
|
|
|
|
26
|
|
|
24,5
|
|
|
|
|
|
20,4
|
|
|
|
|
|
|
17,4
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
9,4
|
4,7
|
|
|
|
|
|
2,9
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Proportion en %
|
40 35 30 25 20 15 10 5 0
|
|
2007
2009
Figure 15 : Proportion (en %) des
répondants satisfaits ou très satisfaits selon la commune en 2007
et en 2009
Proportion en %
40,0
90,0
80,0
70,0
60,0
50,0
30,0
20,0
10,0
0,0
2009 2007
Communes
Source figures 14 et 15 : Rapport
CERTI30
Trois (03) grandes catégories de raisons expliquent le
degré de satisfaction des enquêtés
quidéclarent être "satisfaits ou très
satisfaits". Pour trois quarts des enquêtés (75,4%) des
30 Cabinet CERTI, Op. Cit., PP 20 à
24
"satisfaits ou très satisfaits", leur degré de
satisfaction est fondé sur une " amélioration des prestations de
la mairie par rapport au passé". En 2007, seulement 28,9% des personnes
satisfaites ont avancé cette raison. Environ sept personnes satisfaites
ou très satisfaites sur dix (67,1%) avancent la raison de "la
proximité et la célérité des prestations communales
: établissement de pièces d'état civil". Pour six
personnes sur dix (58,0%) des enquêtés qui sont "satisfaits ou
très satisfaits", leur degré de satisfaction est beaucoup plus
dû à "la proximité et la célérité des
prestations communales : légalisation ".
Quant aux enquêtés qui se disent "moins
satisfaits ou non satisfaits", quatre grandes catégories de raisons
expliquent leur faible niveau de satisfaction. En général, la
"non perception des prestations communales par les populations" est la raison
fondamentale avancée (70,1%). Les trois (03) autres raisons
avancées sont :
· Non entretien des infrastructures routières
(66,5%)
· Insatisfaction liée à la non-construction
d'infrastructures routières (65,9%) ;
· Insatisfaction liée à la non-construction
d'infrastructures sociocommunautaires (63,2%) ;
Ces résultats du sondage relatifs au niveau de
satisfaction des populations par rapport aux prestations communales concordent
globalement avec ceux de l'autoévaluation de la gouvernance locale dans
le domaine 4 : prestations communales. En effet c'est dans ce domaine que les
communes des départements de l'Atacora et de la Donga ont, presque
toutes, réalisé en 2009 des efforts louables ; 11 communes sur
les 13 ont engrangé 66 à 92% des points relatifs à ce
domaine, soit une moyenne collective de 2,25 sur 3. Les scores obtenus par
chaque commune sont toutes au dessus de la moyenne (sauf Kérou qui a
juste obtenu la moyenne, 1,50 sur 3). Ce qui voudrait signifier qu'en
matière de prestations au niveau de l'administration communale, les
communes des deux départements ont fait montre d'un dynamisme, que les
acteurs communaux ont unanimement salué. Les progrès
réalisés sont assez perceptibles dans la réduction
sensible du délai de délivrance des actes de l'état civil,
dans le domaine l'assistance sociale et la gestion de l'espace communal.
Figure 16 : Evolution des scores des
communes de l'Atacora-Donga de 2007 à 2009 dans le domaine III:
information, participation et genre (autoévaluation gouvernance
locale)
Evolution de la performance des communes de
l'Atacora-Donga de 2007 à 2009 dans le domaine IV: prestations de
l'administration communale (autoévaluation
gouvernance locale)
0,5
2,5
1,5
0
3
2
1
2007
2009
Source : auteur
Il est important de souligner, pour conclure cette section,
que si le niveau de connaissance par les populations des prestations
communales, relève de la responsabilité exclusive de la
communication locale, notamment à travers le déploiement de ses
stratégies et canaux, nous ne pouvons pas en dire autant en ce qui
concerne le niveau de satisfaction. D'autres facteurs entrent en ligne de
compte, tels que la réalisation des infrastructures sociocommunautaires
ou routières, l'approvisionnement en eau potable,
l'électrification des localités fortement
agglomérées...
Certes, on peut supposer qu'une bonne politique de
communication devrait permettre aux autorités communales de clarifier
aux populations, d'une part, ce qui relève des compétences de la
commune et de leur expliquer, d'autre part, les choix stratégiques et
priorités de la commune en matière de programmation et de
réalisation desdites infrastructures, conformément au plan de
développement communal validé par elles. Ceci devrait tout au
moins tempérer les attentes et impatiences des populations ; mieux, cela
pourrait renforcer leur confiance en l'institution communale.
D. La communication locale, une «
désinstitutionalisation » de l'institution communale
débouchant paradoxalement sur le renforcement de l'institution
communale
Dans le contexte de la communication locale, la
théorie de la désinstitutionnalisation appliquée aux
collectivités locales aboutit à une logique paradoxale. Certes
nous le savons déjà par PESQUEUX que la
désinstitutionalisation ne débouche pas sur l'organisation. Elle
ne débouche pas non plus sur une désinstitutionnalisation au sens
de Dubet, qui se traduirait par une désaffection ou une prise de
distance des citoyens par rapport à l'institution communale
(confère la 2ème conclusion partielle). Dans le cas
des collectivités locales, la désinstitutionalisation de
l'institution communale non seulement ne débouche pas et ne
débouchera sûrement jamais sur l'organisation pure et simple de la
collectivité locale ; mais en plus l'institutionnalisation de
l'organisation au sein de la collectivité locale profite, en
définitive, à l'institution communale.
Nous le savons bien, l'objectif de l'intrusion de
l'organisation au sein de la collectivité locale est d'en assurer une
certaine qualité de management et d'en améliorer la gouvernance
(c'est ce que je viens de démontrer à travers les
développements qui ont précédé). Autrement dit plus
la commune développe ses capacités managériales et devient
donc une commune « efficace », c'est-à-dire, une commune plus
apte à répondre aux besoins et aspirations de ses citoyens, plus
l'institution communale renforce sa légitimité, « sa raison
d'être », son caractère d'« évidence indiscutable
» vis-à-vis de ceux-ci.
Pour simplifier, je dirais que plus la commune s'«
organise », et plus l'institution communale se consolide ! La
désinstitutionnalisation sert en définitive l'institution
communale ; comme si l'institution communale reprenait par la main gauche ce
qu'elle a donné, par la main droite, à l'organisation communale.
Pour employer un langage politiquement correct, je dirais qu'il y a comme une
sorte de contrat « gagnant-gagnant » entre l'institution communale et
l'organisation communale : l'institution se dépouille, volontiers, de
certains de ses attributs pour renforcer l'organisation ; et en retour
d'ascenseur, l'organisation met ses succès managériaux au service
de l'institution pour en conforter la position.
J'explique ce phénomène par le prisme d'une sorte
de « récupération politique » des succès de
l'organisation communale par l'institution communale.
Cette récupération politique des « gains
» du managérialisme par l'institution communale peut s'expliquer
par la dualité fonctionnelle des icônes de l'institution communale
au niveau
communal et infra communal : le maire, le chef
d'arrondissement et le chef de village ou de quartier. En effet, aux termes de
la loi 97-029, le maire est investi d'une double fonction politique (en tant
qu'élu local et président du conseil communal) et administratif
(en tant qu'exécutif communal et chef de l'administration communale). Il
en est de même du chef d'arrondissement, à la fois politique (en
tant qu'élu, membre du conseil communal) et administratif (en tant que
délégataire de certains pouvoirs administratifs du maire).
Le maire est l'incarnation de l'institution communale au
niveau communal. De la même façon, les chefs d'arrondissement et
de village le sont aussi respectivement aux niveaux arrondissement et village.
Mieux, la loi 97-029 portant organisation des communes en République du
Bénin, a prévu outre les compétences propres aux communes,
l'exercice par le Maire de deux autres types de compétences, dites
compétences « partagées » (la gestion de l'état
civil, la police administrative, la police judiciaire...) et compétences
« déléguées » (diffusion et exécution des
lois et règlements...). L'Etat en transférant aux communes, par
l'entremise du Maire, ces deux catégories de compétences leur a
aussi du coup transféré certains de ses attributs juridiques et
symboliques. Ce faisant, l'exercice par le maire, et dans une certaine mesure,
par les chefs des organes infra-communaux (chef d'arrondissement et chef de
village) des compétences « déléguées » et
« partagées », renforce davantage la dimension «
institutionnelle » de ceux-ci. Ils représentent de fait et de droit
l'Etat aux niveaux communal et infra-communal. Si l'administration communale
réussit, fait des prouesses, ce sont leurs réussites, leurs
prouesses.
Une autre explication qui renforce mon assertion se trouve du
côté de la culture béninoise, à travers la figure du
Chef ou du Roi. Chez nous, le Chef, comme le Roi, répond de ses sujets,
il est responsable de tout : quand ça va bien, nous le devons au Chef ou
au Roi ; quand ça va mal aussi. Cette conception du Chef, à
travers la figure du Roi se traduit dans des expressions assez imagées.
Par exemple, lorsqu'une mairie fonctionne bien, accueille bien les usagers,
fait des réalisations concrètes sur le terrain, pour le traduire,
nous disons : « ce maire travaille bien ! » ; lorsque c'est le
contraire, nous disons, « le maire ne fout rien ! ».
En lien avec tout ce qui précède, j'ai voulu
démontrer que la collectivité locale qui offre des prestations de
qualité et promeut la bonne gouvernance est une collectivité
proche de ses citoyens et qui par conséquent se reconnaissent en elle.
De ce fait, elle renforce sa légitimité qui à son tour
renforce la légitimité de ses organes dirigeants ; et, en
définitive, la légitimité de l'institution communale
(comme institution instituée). D'où la
désinstitutionalisation de
l'institution communale apparaît in fine comme moyen de
renforcement de l'institution communale.
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