Introduction
Après plus de dix ans d'atermoiements et de
tergiversations1, l'organisation des élections communales et
municipales en décembre 2002 et en janvier 2003 marque le début
de la mise en oeuvre du processus de décentralisation au Bénin.
L'installation, courant février et mars 2003, de la plupart des Conseils
Communaux, constitue une étape décisive de ce processus qui vise
à assurer la prise en charge, par les populations elles-mêmes, de
la gestion de leurs propres affaires, conformément aux prescriptions de
la Constitution du 11 décembre 1990 qui dispose en son article 153 que
« les collectivités locales s'administrent librement par des
conseils élus ».
Mais à peine commencé l'exercice des rôles
et missions à eux dévolus par les textes de lois de
décentralisation que les nouveaux conseils communaux se voient
confrontés à de profondes crises qui, hélas,
débouchent sur la destitution des maires élus. La commune de
Covè est celle qui a donné le ton en destituant son tout premier
maire, Pierre FANOU, sept mois à peine après son investiture
(octobre 2003). La commune de Natitingou, une des communes des
départements de l'Atacora et de la Donga, lui a emboîté le
pas en février 2005. Comme un effet boule de neige, s'en est suivie une
valse de destitutions des maires, après à peine deux ans
d'exercice de la mandature à travers tout le pays2.
Le phénomène a pris tellement d'ampleur, qu'il a
fini par inquiéter le gouvernement du Général Mathieu
KEREKOU. Pour freiner cette « destitution mania » qui
s'était emparée de la plupart des conseils communaux, celui-ci a
dû prendre un décret, le 23 juin 2005, qui, d'une part,
reprécise les conditions de destitution d'un maire, mais
également introduit une étape intermédiaire obligatoire
faite de la médiation de l'autorité de tutelle qu'est le
préfet3.
Les motifs souvent invoqués pour justifier la
destitution des maires sont, entre autres : (i) gestion solitaire et opaque des
affaires communales, (ii) gestion non transparente des ressources de la
commune, (iii) détournement de deniers publics, (iv) faux et usage de
faux en écriture publique....
1 La décentralisation est une des
recommandations fortes de la conférence des forces vives de la nation,
tenue en février 1990 ; et une disposition de la constitution
béninoise du 11 décembre 1990.
2 A titre d'exemples, ici, les processus de
destitution ayant abouti (beaucoup d'autres ayant échoué pour
diverses raisons) : Pierre Fanou, maire de Covè (31/10/2003) ; Antoine
N'dah, maire de Natitingou (09/02/2005), Allassane Olagbada, maire de
Bantè (19/02/2005) ; Daniel Azoga, maire de Zakpota (04/03/2005) ; Orou
Sé Guéné, maire de Kalalé (03/05/2005) ; Sanni Orou
Séko, maire de Sinendé (20/06/2005) ; Rachidi Gbadamassi, maire
de Parakou (22/06/2006)... Source : Le Municipal, numéro
spécial, 2006 : « Décentralisation au Bénin : le
bilan de trois ans de vie des communes » ; P 20.
3 Décret N°2005-376, du 23 juin 2005,
portant modalités de destitution du maire.
Outre les destitutions, certains maires et autres élus
locaux (notamment des chefs d'arrondissement) se sont vu derrières les
barreaux pour cause de malversations financières avérées.
Sous le titre : « arrestation et incarcération des élus
locaux : les maires doivent être plus rigoureux dans leur gestion »,
Bernard HOUEHOUNDE du journal Le Municipal4, tire sur la sonnette
d'alarme. Dans son article, le journaliste déplore le
phénomène et met en garde les maires : « Félix ADIMI,
maire de la commune de Savè a été arrêté et
incarcéré, le mercredi 17 mars dernier [2010]. Avant lui, pour
cette deuxième mandature, c'était le maire de Dangbo,
Clément GNONLONFOUN. Tous accusés de mauvaise gestion, les
gestionnaires des communes béninoises, devront désormais faire
attention dans leur gestion pour éviter d'allonger la liste des maires
prisonniers de notre pays »
De façon générale, les crises qui ont
traversé les conseils communaux de la première mandature et qui
continuent de secouer ceux de la deuxième mandature, sont des crises de
« mal » ou de « mauvaise » gouvernance locale ; des crises
de confiance au sein des conseils, mais bien souvent au-delà ; des
crises de confiance entre les élus (maires ou chefs d'arrondissement) et
leurs mandants, que sont les populations.
Par ailleurs, avec la mise en oeuvre du Fonds d'appui au
développement des communes (FADeC) dont les ressources s'accroissent de
façon substantielle chaque année, les communes sont
appelées à gérer plus de ressources financières que
par le passé. De fait une grande responsabilité pèse de
plus en plus sur les maires et les conseils communaux quant à
l'amélioration de la gouvernance financière de leur commune, de
manière à garantir une gestion transparente et efficiente de ces
importantes ressources financières. Conscientes de ces enjeux, des
organisations de la société civile aussi bien au niveau national
que local, donnent de la voix et prennent des initiatives visant à
exercer leur droit de contrôle citoyen de l'utilisation des ressources de
la commune et à exiger des élus locaux qu'ils rendent compte de
leur gestion à leurs mandants.
Toujours dans le même sillage, les mécanismes de
péréquation des dotations FADeC, la principale source de
financement des communes béninoises, incluent des indicateurs de
performance auxquels les communes sont astreintes. Ces indicateurs ne peuvent
être atteints sans une amélioration des différents aspects
de la gouvernance locale (politique, administrative, économique,
financière et budgétaire). Dans ces conditions, une commune
qui
4 HOUEHOUNDE (Bernard), 2010, « arrestation et
incarcération des élus locaux : les maires doivent être
plus rigoureux dans leur gestion », Le Municipal, N°385 du
22 au 28 mars 2010, P4.
s'illustrerait par des contre performances dans sa
gouvernance, se condamnerait à perdre d'importantes ressources
financières qui pouvaient utilement servir au financement de projets de
développement. Il en est de même pour l'accès au
financement de certains partenaires techniques et financiers des communes dont
les mêmes critères de performance constituent une des conditions
clés d'éligibilité.
Un autre événement majeur qui aura un impact
décisif sur la gouvernance locale en République du Bénin,
est l'avènement de la Politique Nationale de Décentralisation et
de Déconcentration (PONADEC) adoptée, le 19 octobre 2009 en
conseil des ministres. Elle marque un signal fort de la part de l'Etat central
sur sa volonté politique ferme d'assurer désormais, sept ans
après l'installation des premiers conseils communaux élus, le
pilotage, la coordination et le suivi efficace du processus de
décentralisation et de déconcentration au Bénin. Le ton
est donné au niveau des stratégies et principes devant en guider
la mise en oeuvre. En effet, il est souligné avec force que la mise en
oeuvre de la PONADEC repose sur les valeurs cardinales suivantes soutenues par
une volonté politique forte, auxquelles les communes n'échappent
guère : « La transparence, la reddition des comptes, la culture de
la performance et la mesure des résultats, l'éthique, le
professionnalisme, le respect des règles et des normes, le suivi et
l'évaluation et la stricte application de la Loi par tous les acteurs
concernés »5. L'orientation stratégique N°3
de la PONADEC intitulée « Le rôle et les compétences
des communes sont reconnus et respectés. La gouvernance locale est
renforcée et conforte la démocratie locale » recommande
fortement que « les autorités communales instaurent des modes de
gouvernance locale qui permettent de renforcer leur articulation avec les
différents groupes socioprofessionnels de leur territoire, favoriser
leur expression et leur implication dans le développement communal,
faciliter et accompagner leur prise d'initiatives qui concourent au
développement local. »6
La loi 97-029 du 15 janvier 1999 portant organisation des
communes en République du Bénin, a assigné un double
objectif à la décentralisation : (i) le renforcement de la
démocratie à la base, (ii) la promotion du développement
local. C'est dans cette logique que s'inscrivent KACOU (Albéric) et
GREGOIRE (Luc-Joël) à travers un article signé « La
dimension centrale de la gouvernance et les priorités pour l'atteinte
des Objectifs du Millénaire pour le Développement »,
lorsqu'ils soulignent que « La décentralisation doit s'inscrire
à la fois dans
5 MDGLAAT, juin 2009, PONADEC, Politique National de
Décentralisation et de Déconcentration ; document cadre de
politique, (version numérique), P37
6 MDGLAAT, op. cit., P40
une volonté de participation et d'intégration et
une perspective de développement. Elle représente un moyen de
promouvoir les initiatives de développement local en mobilisant les
potentialités humaines et les moyens financiers au service des
élus et des décideurs locaux afin de gérer au mieux et au
plus près les besoins des populations »7
Il est évident que la gouvernance joue un rôle
primordial dans l'atteinte de ce double objectif assigné à la
décentralisation au Bénin par les textes de lois qui la
consacrent. C'est ce qui justifie notre intérêt particulier
à la thématique de la gouvernance locale, en l'occurrence la
bonne gouvernance au niveau local.
Le présent mémoire ambitionne (en s'appuyant sur
des données empiriques et sur certaines théories des
organisations) d'établir un lien, sinon de démontrer comment la
mise en oeuvre efficace d'une politique de communication locale améliore
sensiblement la gouvernance locale et participe à la promotion de la
bonne gouvernance locale.
Le plan de ce mémoire se veut assez créatif,
voire, original. En tant que tel il ne respecte pas la présentation
classique de mémoire de recherche ou de mémoire professionnel. Ce
choix délibéré répond à ma stratégie
d'argumentation et de démonstration. Ce faisant, dans un premier
chapitre, je procéderai au « périmétrage » de
mon sujet en abordant la problématique de la gouvernance locale dans les
communes des départements de l'Atacora et de la Donga, sous l'angle de
la communication locale. Dans le deuxième chapitre, je
démontrerai comment l'approche « appui à la communication
locale », développée dans les communes des deux
départements, constitue un modèle organisationnel de la
qualité et qui, en tant que tel, introduit une logique
managériale de qualité dans la gestion communale. Dans le
troisième chapitre, je démontrerai comment la mise en oeuvre de
la communication locale contribue à l'amélioration sensible des
différents aspects de la gouvernance locale et à la promotion
d'une bonne gouvernance locale.
Somme toute, mon mémoire ne fait qu'explorer un vaste
champ encore « en friche » au Bénin : celui qui consiste
à explorer, analyser, comprendre et proposer des solutions
opératoires dans le domaine de la décentralisation et du
développement des territoires avec des outils et paradigmes des sciences
de l'organisation. Mon espoir est que d'autres contributions viennent
ensemencer ce vaste champ assez fertile !
7 KACOU (Albéric) et GREGOIRE
(Luc-Joël), 2008, « La dimension centrale de la gouvernance et les
priorités pour l'atteinte des Objectifs du Millénaire pour le
Développement », in, GREGOIRE (Luc-Joël) et
al., L'Afrique et les défis de la Gouvernance, Maisonneuve
& Larose, Paris, P 49
I- Problématique de la gouvernance locale et
« périmétrage » de notre sujet
A. Problématique, postulats et
hypothèses
a) Postulats
· Le double objectif de l'enracinement de la
démocratie à la base et de promotion du développement
local, assigné à la décentralisation par la loi 97-029 du
15 janvier 1999 portant organisation des communes en République du
Bénin, ne peut être atteint sans une amélioration de la
gouvernance au niveau local, notamment la promotion de la bonne gouvernance
locale.
· La mise en oeuvre d'une politique de communication locale
peut contribuer à la promotion de la bonne gouvernance locale ; et
donc à l'atteinte des objectifs de la décentralisation.
b) Problématique
En quoi la mise en oeuvre d'une politique de communication
locale peut-elle être facteur d'amélioration des différents
aspects de la gouvernance locale et de promotion de la bonne gouvernance locale
?
c) Les hypothèses
· L'approche « appui à la communication
locale » constitue un outil d'amélioration de la qualité de
la gestion communale (intrusion du « managérialisme » dans la
gestion communale)
· Autant la mise en oeuvre de la communication locale
améliore la perception des populations sur les prestations de
l'administration communale
· Autant elle induit un changement positif de
comportement des élus locaux et du personnel communal, notamment dans
l'exercice par eux des différents types de gouvernance au niveau local
(en occurrence : gouvernance politique, gouvernance administrative, gouvernance
économique, gouvernance financière et budgétaire)
· Les champs de la communication locale ont un impact sur
les principes clés de la bonne gouvernance locale
· L'instauration d'une culture de communication au
sein des collectivités locales (appropriation de l'approche par les
communicants locaux) passe par l'institutionnalisation de la fonction «
information et communication » dans l'administration communale.
B. Terrain de recherche et objectifs du mémoire
a) Terrain de recherche
Les départements de l'Atacora et de la Donga sont
situés au Nord-ouest du Bénin. Ils couvrent une superficie totale
de 31.625km2 (25,8% du territoire national) pour une population de
899.479 habitants, dont 453.626 femmes (soit 50, 43%), d'après le
troisième Recensement Général de la Population et de
l'Habitation (RGPH3, 2002). Les deux départements comptent treize
communes que sont : Bassila, Boukombé, Cobly, Copargo, Djougou,
Kérou, Kouandé, Matéri, Natitingou, Péhounco,
Ouaké, Tanguiéta et Toucountouna.
A l'issue des négociations intergouvernementales de
novembre 2002, entre la République Fédérale d'Allemagne et
la République du Bénin, les départements de l'Atacora et
de la Donga ont été choisis comme zone prioritaire d'intervention
de la coopération allemande au Bénin. C'est à ce titre que
le Programme d'appui à la Décentralisation et au
Développement Communal (PDDC), un des programmes de la
coopération allemande au Bénin, intervient depuis janvier 2004
dans les treize communes des départements de l'Atacora et de la
Donga.
C'est dans le cadre de ce programme que l'approche «
appui à la communication locale » est expérimentée
depuis 2005 dans ces treize communes. En tant que tel nous disposons au niveau
du Programme, d'une base de données importante et suffisante sur
l'ensemble des treize communes. Mieux, dans le cadre de mes activités
professionnelles quotidiennes, j'ai accès aux acteurs communaux, ainsi
qu'aux données relatives à la communication locale de l'ensemble
des treize communes. De ce point de vue, porter mon terrain de recherche sur
l'ensemble des treize communes ne me posait aucune difficulté
particulière ; au contraire il me donne l'avantage d'avoir un
échantillon plus ou moins représentatif de l'ensemble des 77
communes que compte le Bénin (13/77, soit un terrain de recherche qui
couvre environ 17% des communes du Bénin). En outre, il me donne
suffisamment de marge de manoeuvre pour des comparaisons et la triangulation
des données recueillies dont les situations socioculturelles,
politiques, économiques... sont très
hétérogènes.
En définitive le choix du thème et du terrain de
recherche a un lien fort avec mes activités professionnelles.
b) Objectifs du mémoire
Ma démarche s'inscrit dans une logique centrale qui
vise à faire des collectivités locales des entités «
objectives » pour en améliorer la gouvernance (c'est dans cette
direction que je voudrais inscrire mon projet de thèse doctorale).
Spécifiquement mon mémoire de Master se
construit dans une perspective généraliste (dépassement
des contingences de lieu) ou plus précisément dans une logique de
généricité (passage du singulier au général
par extension). Il s'agit d'y démontrer en quoi la mise en oeuvre d'une
politique de communication des collectivités locales peut-elle
être facteur de promotion de la bonne gouvernance locale dans les
communes ciblées (communes des départements de l'Atacora et de la
Donga); et donc extrapolable sur les autres communes du Bénin.
Ce mémoire se veut comme une recherche-action dans le
domaine de la décentralisation au Bénin, dont les
résultats constitueront des « outils de fécondation
croisée entre l'université et la société
»8. Elle ambitionne d'aboutir à une «
modélisation opératoire » ; autrement dit à la
construction de modèles correspondant à des attentes pratiques en
matière de gouvernance locale dans les communes du Nord-Ouest du
Bénin, mais avec une visée de transférabilité
desdits modèles aux autres communes du pays et pourquoi pas à
d'autres communes africaines.
C. Posture et paradigmes
épistémologiques
Mon travail se positionne dans une posture constructiviste, mais
un constructivisme modéré. Constructiviste (au niveau
démarche)
Ma posture est constructiviste sur le plan de la
démarche. Un constructivisme modéré qui reconnaît
l'interaction « observateur-faits » comme fondement de
l'interprétation. Autrement dit, il s'agit d'une logique qui
reconnaît que le réel n'est pas extérieur au chercheur,
mais bel et bien une invention personnelle et collective. Pour paraphraser S.
Moscovici9, je dirais que
8 MICHEL (Jean Luc), septembre 2006, Le
mémoire de recherche en Information-Communication, Ellipses
éditions marketing, collection « Infocom », 150p.
9 S. Moscovici, Essai sur l'histoire humaine de
la nature, Flammarion, Paris, 1977
ma démarche vise à produire des «
certitudes explicatives » (résultat de démarches
hypothétiques, maîtrisées avec volonté et
méthode, grâce à des raisonnements codifiés et
appliqués avec rigueur pour obtenir une vérité construite)
dans l'axe de recherche N°8 relative au développement des
collectivités locales béninoises.
En effet, en toile de fonds de ma problématique, se
trouve ce questionnement essentiel : comment jouer sur la dimension «
organisation » de la collectivité locale pour en faire une
entité « objective » sans toutefois perdre de vue sa dimension
« institution » ? En d'autres termes, comment tenir compte de la
double dimension « institutionnelle » et « organisationnelle
» de la collectivité locale pour en faire une entité «
objective » dans le domaine spécifique de la communication locale
et ses liens possibles avec la bonne gouvernance ?
La réponse à cette question m'amène
à faire un effort de modélisation de la collectivité
locale comme organisation. La modélisation étant entendue comme
un processus de construction d'une théorie des organisations de
manière partielle et partiale, elle implique de ce fait une interaction
entre l'objet (ici la collectivité locale) et l'observateur que je suis.
La partialité joue ici à un double niveau :
· D'abord au niveau du « partiel »,
c'est-à-dire du choix de la portion ou de l'aspect de l'objet à
étudier ; le focus. Ce choix implique nécessairement un parti
pris, un peu comme deux photographes qui photographieraient le même objet
sous des angles différents. Le choix de tel angle plutôt que tel
autre, traduit de façon implicite ou explicite l'objectif visé
par chaque photographe. Mon mémoire veut certes, traiter de la
thématique de la gouvernance locale, mais dans l'optique de la bonne
gouvernance locale (premier focus) en lien avec la communication locale
(2ème focus).
· Ensuite au niveau du choix du corpus10 et
la façon plus ou moins originale de le traiter (de construire la
démarche de manière pertinente et convaincante) pour faire
émerger de la connaissance dans le domaine du développement des
collectivités locales.
Ma posture constructiviste s'explique aussi par le fait qu'en
appui à ma démonstration, je ferai recours à plusieurs
paradigmes ou théories constructivistes ; en occurrence :
10 « Le corpus est un ensemble d'objets que l'on va
étudier en détail et qui sont considérés comme
étant liés les uns aux autres par des causes
présupposées par la problématique et les hypothèses
», Jean Luc MICHEL, op. cit.
· la théorie de la
désinstitutionnalisation des institutions et l'institutionnalisation des
organisations du professeur Yvon PESQUEUX. Il s'agit de démontrer ici,
dans un premier temps, en quoi l'approche « appui à la
communication locale », vise une « désinstitutionalisation
» de l'institution communale et une « institutionnalisation » de
l'organisation communale. Dans un second temps, il s'agira de mettre en relief
comment la théorie de la « désinstitutionnalisation »
appliquée aux collectivités locales aboutit à une
logique paradoxale : l'appui à la
communication locale, une « désinstitutionalisation » de
l'institution communale débouche in fine sur le renforcement de
l'institution communale (au lieu de l'affaiblir !)
· la théorie de l'amélioration continue de
W. E. DEMING à travers sa métaphore de la « roue » (
PDCA : Plan : je dis ce que je veux faire ; Do : je fais ce j'ai dis ;
Check : je démontre que j'ai bien fait ce que j'ai dit ; Act : je
démontre que j'ai progressé par rapport au moment où j'ai
dit ce que je veux faire). Il s'agira ici de présenter l'approche
« appui à la communication locale » comme un modèle
organisationnel de la qualité en l'appliquant au cycle PDCA.
· le concept du « New public management
». L'approche communication locale dans ses objectifs et ses
méthodes s'oriente vers toute la philosophie qui fonde la théorie
du New Public Management et lui emprunte certains de ses outils. Au
besoin donc, je mettrai en relief les points de convergence ; et sûrement
les limites de ladite approche par rapport aux exigences du New Public
Management.
· d'autres concepts « secondaires » ou «
nouveaux » qui « émergeront » tout au long de la trame du
raisonnement et de la démonstration de ce mémoire.
Une perspective fonctionnaliste (au niveau des
résultats)
Si ma démarche est constructiviste, par contre, les
résultats auxquels je veux aboutir se veulent prescriptifs, en
s'inscrivant dans une perspective pragmatico-utilitariste, parce que se
positionnant dans l'optique du « problem solving ». Il
s'agit en effet, au terme de mes réflexions, de proposer (comme je
l'avais souligné plus haut) des modèles/outils pour
améliorer la gouvernance locale à travers la mise en oeuvre de la
communication locale, afin de faire des communes béninoises, des
communes « efficaces », c'est-à-dire des communes proches des
besoins et aspirations des citoyens ; des communes proactives et innovantes.
Bref, je veux créer du savoir utilitaire ; ou encore du « savoir
actionnable » (PESQUEUX, notes de cours).
La perspective généraliste de ce mémoire
se dessine à travers le passage du singulier (les communes de
l'Atacora/Donga) au général (toutes les communes du Bénin)
par extension (généricité). Le postulat fondateur de cette
perspective empreint d'un brin de positivisme étant que le croisement
des données empiriques avec un raisonnement
épistémologique rigoureux permettrait de découvrir
certaines « lois naturelles » qui gouverneraient la gestion
communale, tout au moins au Bénin.
Pour conclure, je dirais que ma posture, dans ce mémoire,
est essentiellement constructiviste, avec une perspective plutôt
fonctionnaliste (pragmatico-utilitariste).
D. Revue de la littérature
Elle consistera ici à expliciter certains concepts et
paradigmes épistémologiques qui seront utilisés tout au
long de ce mémoire. Elle vise aussi (et surtout) à clarifier
l'acception dans laquelle tel concept ou paradigme est utilisé dans le
cadre de ce mémoire. Il s'agit, entre autres des concepts et paradigmes
suivants :
· Communication locale
· Gouvernance locale et bonne gouvernance locale
· Institution et organisation (en extrapolation à
institution communale et organisation communale)
· Théorie de la désinstitutionnalisation de
l'institution et de l'institutionnalisation de l'organisation
· Modèles organisationnels de la qualité
(théories de l'amélioration continue, du New Public
Management)
· Etc. a) Communication locale :
La communication locale, se définit comme «
l'ensemble des décisions et des actions des élus locaux qui
visent à définir et à diffuser des codes, à en
assurer la reconnaissance et à favoriser l'adhésion de ceux qui
vivent et/ou circulent dans l'espace de proximité11 »
qu'est la commune. Elle a pour objectif de mobiliser et d'impliquer l'ensemble
des acteurs locaux (décideurs et citoyens) qui constituent le corps
social agissant sur un territoire collectif ; ici, la
11 SOUCHARD (Maryse) et WAHNICH (Stéphane),
octobre 1995, La communication politique locale ; Presse Universitaire
de France, Paris, Collection « Que sais-je ? » ; P7
commune. En ce sens, la communication locale « est bien
davantage qu'un simple outil, une technique au service des élus, elle
est une façon de penser le politique et de le mettre en action
»12
Dans le contexte de l'intervention du Programme d'appui
à la Décentralisation et au Développement Communal (PDDC),
la communication locale a été circonscrite à six champs
:
1. la communication exécutive,
pour donner plus de lisibilité aux choix stratégiques et à
l'action communale ;
2. la communication interne, pour
assurer une circulation efficace de l'information au sein de l'équipe
communale (élus locaux, agents communaux) ;
3. la communication de service, pour
faire mieux connaître aux populations les services communaux et leurs
prestations ;
4. la communication relationnelle,
pour mobiliser les populations et autres acteurs de développement ;
5. la communication civique, pour
le renforcement de la citoyenneté (faire passer les populations de la
commune de leur statut de simples habitants au statut de citoyens de la
commune) ;
6. et le marketing territorial,
pour promouvoir le territoire communal.
b) Gouvernance locale :
Le concept de « gouvernance », né en France
au XIIe siècle, a été promu dans les années 90 par
les institutions de Bretton Woods, notamment dans les discours sur le
développement international et est aujourd'hui adopté par la
quasi-totalité des milieux institutionnels nationaux et internationaux,
gouvernementaux et non-gouvernementaux. Chacun y va de sa définition.
Toutefois de manière constante, on retrouve dans chacune des
définitions, trois éléments importants :
i. « la gouvernance est définie comme l'exercice du
pouvoir ou de l'autorité dans un pays ;
12 SOUCHARD Maryse et WAHNICH Stéphane, op.
cit., P81
ii. l'exercice du pouvoir ou de l'autorité
sous-entend, l'ensemble des règles, procédures, institutions et
mécanismes mis en place pour réglementer la manière dont
ce pouvoir ou cette autorité est exercée ;
iii. et enfin, la possibilité offerte ou non par
l'ensemble de ces règles, procédures, institutions et
mécanismes aux citoyens d'exprimer leurs intérêts,
d'exercer leurs droits et de participer au processus de prise de
décisions et à l'exercice du pouvoir. »13
L'acception de la gouvernance locale telle qu'employée
à travers le présent mémoire, est celle qu'on retrouve
à travers la définition qu'en donne le PNUD : « La
gouvernance locale comprend un ensemble d'institutions, de mécanismes et
de processus par lesquels, les citoyens et leurs groupes peuvent exprimer leurs
intérêts et leurs besoins, négocier leurs
différences et exercer leurs droits et leurs obligations au niveau local
»14
On distingue plusieurs types de gouvernance. Mais au niveau
local, j'en retiens les quatre principales, en lien avec les domaines de
compétences transférés aux communes béninoises par
la loi 97-029 du 15 janvier 1999 :
· la gouvernance politique locale :
ensemble des processus et mécanismes de prise de
décision dans l'exercice d'une gestion démocratique
locale.
· la gouvernance administrative locale
: ensemble des processus et mécanismes relatifs à la
gestion des services publics locaux, de l'état civil, des ressources
humaines de l'administration communale.
· la gouvernance économique
locale : ensemble des démarches et stratégies de
mobilisation des ressources internes et externes au niveau local et de gestion
du patrimoine foncier communal.
· la gouvernance financière et
budgétaire locale : ensemble des politiques
et procédures d'élaboration, de vote, d'exécution et de
contrôle du budget communal.
c) Bonne gouvernance
J'utiliserai dans ce mémoire, l'acception qu'en donne le
premier ministre malien, Modibo SIDIBE, « La notion de bonne
gouvernance renvoie à l'habileté des dirigeants à allouer
des
13 OSIWA et CIRD, avril 2004, Guide d'exercice
d'une bonne gouvernance locale, Presses de l'imprimerie CACI-Bénin,
Cotonou, P16
14 AYENA (Elie S.), Novembre 2007, Rapport de
stage sur la Gouvernance locale, MDGLAAT, Cotonou, 57p
ressources et à les gérer en vue de
résoudre des problèmes de développement de toutes natures,
de tous ordres et à toutes les échelles géographiques d'un
pays. Elle se caractérise par la participation, la transparence, la
responsabilisation, la primauté du droit, l'efficacité et
l'équité » 15
d) Institution et organisation (en extrapolation
à institution communale et organisation communale)
U. Beck définit l'institution comme « les
règles de base ou implicites qui président à l'exercice du
pouvoir et de la domination ».16 L'institution se
caractérise par la place accordée à la souveraineté
(c'est-à-dire son évidence indiscutable). L'institution vise
à réaliser un service public avec un caractère juridique
et symbolique. Il s'agit, en particulier, de la mission qui lui est propre et
de la manière de la réaliser dans une perspective où les
caractéristiques économiques restent au deuxième plan, par
exemple comme pour l'hôpital (PESQUEUX, notes de cours). Il y a de
l'obstination dans l'institution. C'est en cela que l'institution est
considérée comme créant de la certitude.
Selon U. Beck, les organisations, ce sont : « les
acteurs particuliers disposant d'un certain nombre de membres, de ressources
financières et de locaux, ainsi que d'un statut juridique »17
L'organisation se caractérise par l'importance majeure accordée
à l'efficience de son fonctionnement, d'où les notions
d'opportunisme au lieu de l'obstination et donc de l'incertitude et du risque.
(PESQUEUX, notes de cours).
La commune est à la fois institution, avec ses signes
distinctifs (les armoiries, l'hôtel de ville, les bureaux
d'arrondissement, le maire, le conseil communal, etc.) et organisation avec son
administration comprenant : le personnel, les services communaux et
infra-communaux, les infrastructures, les matériels et
équipements...
e) Théorie de la désinstitutionnalisation
de l'institution et de l'institutionnalisation de l'organisation
Cette théorie a été
développée par le professeur PESQUEUX (2007) dans son
ouvrage Gouvernance et privatisation. Elle repose sur le
présupposé d'une normativité qui ferait de
15 SIDIBE (Modibo), 2008, « L'expérience
malienne en matière de bonne gouvernance », in, GREGOIRE
(LucJoël) et al., L'Afrique et les défis de la
Gouvernance, Maisonneuve & Larose, Paris, P 419
16 Cité par PESQUEUX (Yvon), avril 2007,
Gouvernance et privatisation, PUF, Paris, Collection La politique
éclatée, P98
17 Cité par PESQUEUX (Yvon), avril 2007,
Gouvernance et privatisation, PUF, Paris, Collection La politique
éclatée, P98
l'organisation le lieu de l'efficience et de l'institution le
lieu de l'inefficacité, les catégories organisationnelles pouvant
être considérées comme salvatrices de cette
inefficacité (PESQUEUX, notes de cours). Au nom donc du «
managérialisme », on applique à l'institution les
catégories et principes de fonctionnement de l'organisation. Autrement
dit, on fait entrer l'institution dans le « moule » et le cadre
légal des organisations. De ce fait, celle-ci perd certains de ses
caractères juridiques, politiques et symboliques ; on parle alors de
« désinstitutionnalisation de l'institution » au regard d'une
« institutionnalisation de l'organisation »18
f) Modèles organisationnels de la qualité
(théories de l'amélioration continue et du New Public
Management)
La théorie de l'amélioration continue de
DEMING
Cette théorie a été
développée par W.E. DEMING à travers sa métaphore
de la « roue » PDCA-S ( Plan : préparer et planifier
l'action ; Do : développer et réaliser l'action ;
Check : vérifier et comprendre les résultats ; Act
: réagir pour améliorer les actions futures ;
Standardize : standardiser) ; la standardisation étant le
moment de l'intériorisation organisationnelle des progrès
incrémentaux codifiés dans une logique de concrétisation
du projet du « management scientifique » et de volontarisme
managérial construit sur les best practices19.
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La théorie du New Public
Management
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A. Bartoli (1997) définit le concept comme : «
l'ensemble des processus de finalisation, d'organisation, d'animation et de
contrôle des organisations publiques visant à développer
leurs performances générales et à piloter leur
évolution dans le respect de leur vocation »20. Il se
caractérise par la mise en oeuvre d'indicateurs d'activité,
d'outils de gestion budgétaire et comptable, d'outils de mesure des
coûts dans la perspective de répondre à trois logiques
d'action : celle de l'efficacité socio-économique, celle de la
qualité de service, celle de l'efficacité de gestion ou
d'efficience. Le New Public Management, au nom de la gouvernance qu'il
concrétise, vient constituer une conception normative de l'Etat
18 PESQUEUX (Yvon), op. cit., P95
19 PESQUEUX (Yvon), 2008, Qualité et
Management ; une analyse critique, Editions Economica, Paris, Collection
Gestion, P69
20 PESQUEUX (Yvon), avril 2007, Gouvernance et
privatisation, PUF, Paris, Collection La politique éclatée,
P134
administratif sur l'idée d'une superposition
réglementaire de deux logiques de nature différente : une logique
institutionnelle et une logique managériale.
E. Démarche méthodologique et
méthodique
Mon approche méthodologique sera multidimensionnelle et
consistera en la combinaison de plusieurs outils et techniques
complémentaires au service de ma stratégie d'argumentation et de
démonstration. Quant à la démarche méthodique, elle
empruntera les étapes suivantes à titre indicatif, en ce sens
qu'elle n'est pas nécessairement linéaire, mais plutôt
itérative :
a) Revue de la littérature
Bien qu'ayant fait l'objet de développement plus haut,
elle revient ici, parce qu'elle constitue un point essentiel : le point de
départ de tout l'échafaudage qui servira de socle au raisonnement
et à la démonstration qui seront menés dans ce
mémoire. Pour ce qui me concerne, cette étape me donnera
l'occasion de faire :
o Un état des lieux du sujet ;
o Une clarification conceptuelle : définition des
concepts et précision de leur acception dans le cadre du mémoire
;
o Une clarification de la posture épistémologique
et la convocation des
paradigmes épistémologiques en lien avec le sujet
du mémoire.
b) Revue et collecte des données
secondaires
L'expérience de l'approche d'appui à la
communication locale a été développée dans le cadre
de la mise en oeuvre du Programme d'appui à la Décentralisation
et au Développement Communal (PDDC), un programme fruit de la
coopération bénino-allemande. De ce point de vue, il existe
plusieurs données secondaires (rapport d'activités, rapports
d'études et de sondage, rapports d'autoévaluation, fiches de
capitalisation et autres documents) réalisées en lien direct avec
l'approche ou dans le cadre d'autres activités ou indicateurs qui sont
influencés par la communication locale. Ces documents regorgent de
données aussi bien quantitatives que qualitatives dans lesquels j'ai
puisé pour venir en renfort à mon
argumentation/démonstration. Dans cette « forêt » de
données secondaires, deux types de rapport ont retenu
particulièrement mon attention :
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Les rapports de sondages (2007 et 2009) sur le niveau de
connaissance et de satisfaction des populations des communes d'intervention
du PDDC sur les prestations communales.
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Ces sondages ont été réalisés avec
les méthodes et techniques de l'art afin de garantir une certaine
objectivité et scientificité aux résultats qui en sont
issus. L'étude a couvert l'ensemble des treize communes des
départements de l'Atacora et de la Donga, ainsi que trois autres
communes d'intervention du PDDC : les communes de Ouidah, Abomey et Bohicon.
L'enquête s'est déroulée dans quatre (04) quartiers
tirés au hasard dans les arrondissements chefs lieux des communes
couvertes. Les personnes interviewées sont des adultes des deux sexes
âgés de 18 ans au moins qui résident habituellement dans
les seize (16) communes ciblées. Un nombre de 1075 personnes ont
été interviewées. Ces personnes interviewées sont
reparties de façon proportionnelle selon le genre, le niveau
d'alphabétisation et les grands groupes d'âges. Trois groupes
d'âge ont été considérés pour la
sélection des cibles, il s'agit de la catégorie des jeunes (18-24
ans), celle des adultes (25-55 ans) et celle du 3ème
âge constituée de personnes de plus de 55 ans. Dans chaque zone
d'enquête les quotas ont été attribués de
manière à respecter une répartition proportionnelle
à l'effectif de chacune des catégories suivant les
résultats du Recensement Général de la Population de 2002.
Les résultats de ces sondages fournissent des informations très
judicieuses permettant de mesurer valablement les impacts des actions de
communications au sein des populations, sur les canaux les plus pertinents,
ainsi que sur les améliorations à apporter pour plus
d'efficacité dans le domaine de la communication locale.
Les rapports (2007 et 2009) d'autoévaluation de la
gouvernance locale au Bénin. Ces rapports fournissent, eux aussi des
informations qualitatives assez intéressantes sur la perception des
acteurs de terrain (élus locaux, personnel communal, services
déconcentrés de l'Etat, société civile et secteur
privé) sur les différents aspects de la gouvernance locale. Ces
informations sont recueillies lors d'ateliers de deux (02) jours au cours
desquels cinq (05) groupes d'acteurs communaux assez représentatifs font
une autoévaluation de la gouvernance de leur commune. Il s'agit de :
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v' le maire et ses adjoints ;
v' le conseil communal, sans le maire et les adjoints ; 1' le
personnel communal ;
v' la société civile ;
v' les services déconcentrés intervenant au niveau
communal. Les domaines suivants sont évalués par lesdits
acteurs:
v' Organisation interne de l'administration communale ;
v' Gestion administrative et financière
v' Information, participation et genre ;
v' Prestations de l'administration communale ;
v' Mobilisation des ressources
Chaque groupe d'acteurs fait, dans un premier temps, sa propre
évaluation des cinq domaines en attribuant des scores. Tous les acteurs
se retrouvent, dans un second instant en plénière pour faire la
mise en commun des score ; ce qui donne lieu à des débats et de
discussions très constructifs à l'issue desquels un score
consensuel est retenu sur la base des critères qui ont servi
d'instruments de mesure de la performance de la commune dans chaque domaine.
Outre ces deux rapports, j'ai pris en compte les
résultats des interviews réalisés par des journalistes
communicateurs dans certaines des communes aux fins de recueillir
l'appréciation que font les élus, le personnel communal et les
populations de l'expérience de mise en oeuvre de la communication locale
dans leur commune.
c) Collecte des données
primaires
En complément aux données secondaires (assez
riches et diversifiées), j'ai collecté des données
primaires, encore appelées « données de première main
» pour renseigner surtout sur la perception des communicants locaux
(maires et membres des cellules de communication locale) de l'impact que la
mise en oeuvre de la communication locale a eu sur eux, en occurrence dans leur
exercice des différents aspects de la gouvernance locale. Cette collecte
s'est faite au travers d'un questionnaire à réponse libre (des
questions d'orientation ouvertes auxquelles les enquêtés
répondront librement) en direction des membres des cellules de
communication (confère annexe 1). Cette étape comprend les
sous-étapes suivantes :
o Elaboration du questionnaire.
o Echantillonnage : les 13 cellules de communication des 13
communes des
départements de l'Atacora-Donga. Un questionnaire pour
chaque cellule, dont
les réponses ont été données en focus
group au niveau de chaque commune. o Réalisation des pré-tests et
ajustement.
o Administration du questionnaire.
Dix communes (ou plutôt dix cellules de communication) sur
les treize ont répondu au questionnaire, soit un taux d'environ 77%.
Au besoin et en appui à ma démonstration, j'ai
fait recours à des données et informations issues de
l'observation directe : analyse de certains faits et actes des élus
locaux, décodage du discours des élus lors des
émissions radiophoniques et lors des tournées d'arrondissement,
etc.
d) Traitement, analyse des données primaires
et secondaires et leur utilisation comme support à ma
démonstration
J'en donne un aperçu à travers le tableau
synoptique ci-dessous.
Figure 1 : Méthode, outils et
stratégie de démonstration du mémoire
Hypothèses
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Méthodes/ outils/ stratégie de
démonstration
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Premier niveau de raisonnement : L'approche appui
à la communication locale comme modèle
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organisationnel de
qualité
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Hypothèse 1 :
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~ L'approche « appui à la communication locale
» comme un modèle organisationnel de la qualité, à
travers la théorie de l'amélioration continue de DEMING,
notamment en démontrant comment les étapes de ladite approche
correspondent à la logique de la roue de Deming (PDCA)
Plan : je dis ce que je veux faire
Do : je fais ce j'ai dis
Check : je démontre que j'ai bien fais ce que j'ai dis
Act : je démontre que j'ai progressé par rapport au
moment où j'ai dis ce que veux faire
~ Je mettrai en relief les points de convergences ; et
sûrement les limites de ladite approche par rapport aux exigences du New
public Management.
~ Utiliser les résultats comparatifs de
l'autoévaluation de la
gouvernance locale au Bénin (exercices 2007 et
2010) pour illustrer des évolutions qualitatives dans les domaines, par
exemple du fonctionnement de l'administration communale, etc.
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L'approche « appui à la
communication locale » constitue un outil
d'amélioration de la gestion communale (intrusion du «
managérialisme » dans la gestion communale)
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Hypothèse 5 :
|
~ Démontrer la double dimension de cette
étape :
· D'une part l'institutionnalisation (comme «
modalité instituante »)
de la fonction « information et communication », un
effort d'ancrage de cette fonction dans l'administration communale afin d'en
assurer la pérennité.
· D'autre part l'institutionnalisation de la fonction
« information et communication » à la fois comme mode
d'apprentissage interne de l'administration communale (théorie de
l'appropriation de Yvon PESQUEUX comme mode d'apprentissage individuel et
collectif), et comme l'ultime étape de la théorie de
l'amélioration continue de Deming, la « standardize »
(standardisation) ou l'intériorisation organisationnelle des
progrès incrémentaux.
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L'instauration d'une culture de
communication au sein des
collectivités locales passe par
l'institutionnalisation de la
fonction « information et
communication » dans l'administration communale
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Hypothèse 4 :
|
~ Etablir le lien entre les six champs de la communication
locale (communication exécutive, communication de service,
communication interne, communication relationnelle,
communication civique et le marketing territorial) et les principes clés
de la bonne gouvernance locale (transparence, participation citoyenne,
responsabilité/ « accountability », efficacité et
efficience
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Les champs de la communication locale ont un impact sur
les
principes clés de la bonne gouvernance locale
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Hypothèses
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Méthodes/ outils/ stratégie de
démonstration
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dans la gestion communale, primauté du droit et
équité...)
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Hypothèse 3 :
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~ Utilisations des données secondaires
· Analyse comparative des résultats du sondage
sur la connaissance et l'appréciation par les populations des
prestations communales (rapports sondages 2007 et 2009)
· Analyse des raisons de la satisfaction et de la non-
satisfaction des
populations par rapport aux prestations communes
(rapports sondages 2007 et 2009)
· Analyse d'une corrélation possible entre niveau
de satisfaction des populations et civisme fiscal (croisement des
données du sondage et des taux de recouvrement des recettes fiscales des
communes). Si l'hypothèse se vérifie, ce serait une façon
pour les populations de montrer leur attachement à l'institution
communale
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Autant la mise en oeuvre de la communication locale
améliore la perception et la satisfaction des populations par rapport
aux prestations de l'administration communale
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~ Décoder certains faits et actes des élus
locaux :
· L'émergence d'un savoir faire au sein des cellules
de communication en matière d'élaboration et de mise en oeuvre
des stratégies de communication, sans appui du PDDC ;
· La création des SICAD dans les communes où
il n'en existait pas ;
· Le recrutement par certains maires de cadres
compétents pour animer ce service ;
· La budgétisation des actions de communication ;
· L'essor de la communication relationnelle ;
· L'impact des émissions radios (communication de
service et émissions interactives) et assemblées
générales d'arrondissements. ~ Le décodage des
discours des élus
· Analyse de quelques discours (émissions radios,
lors des assemblées générales...)
~ Analyse de la perception des maires et des membres des
cellules de communication communale
· Analyse des résultats du questionnaire en
direction des membres de la cellule de communication communale et des
interviews réalisés.
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Autant elle induit un changement positif de comportement des
élus locaux et du personnel
communal, notamment dans l'exercice par eux des
différents types de gouvernance au niveau local (en occurrence :
gouvernance politique,
gouvernance administrative,
gouvernance économique,
gouvernance financière et budgétaire)
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~ En lien avec tout ce qui précède, montrer
que la collectivité locale qui offre des prestations de qualité
et promeut la bonne gouvernance est une collectivité proche de ses
citoyens et qui par conséquent se reconnaissent en elle. De ce fait,
elle renforce sa légitimité qui à son tour renforce la
légitimité de ses organes dirigeants ; en définitive, la
légitimité de l'institution communale (comme institution
instituée). D'où la désinstitutionalisation de
l'institution communale apparaît in fine comme moyen de renforcement de
l'institution communale
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Source : auteur
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