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Evolution et incidences de la Technologie sur les pratiques de communication en France des années 1960 à nos jours

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par Quinchy RIYA
Université Paris-Est Marne-La-Vallée - M1 2011
  

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2.B) Les réseaux sociaux en définition : Des nouveaux modes de communication en pleine croissance et nouvelle forme de marketing politique.

L'émergence des réseaux sociaux dans le web politique constitue une nouveauté importante tant au niveau des pratiques qu'au niveau de la conception sociale qu'on peut se faire des modes de médiation. En effet, les réseaux sociaux se trouvent dans la continuité du web 2.0 qui se met en place autour des années 2003-2004. Il y a avec les réseaux sociaux, l'apparition de nouveaux outils faisant encore évoluer les modes de communication et donne, dans le même temps, à voir une reconsidération du marketing politique. Sur le web, les réseaux sociaux sont assez récents. Depuis environ sept ans ils se sont très largement développés sur la toile et on voit, encore aujourd'hui, l'émergence de nouveaux entrants, comme les très récents Foursquare et Diaspora106(*). Le dynamisme du développement des réseaux sociaux et leur utilisation en France et dans le monde, soulignent qu'il s'agit bien d'un véritable phénomène de masse, avec lequel on peut établir un parallèle avec la diffusion et l'utilisation de la télévision au cours des années 1950-1970. Selon, un sondage de l'IFOP, datant du mois de Janvier 2010, 25% des internautes sont membres d'un seul réseau social, 34% de deux à trois réseaux sociaux et 18% de quatre et plus. L'étude souligne également que la progression la plus spectaculaire de l'utilisation de ces réseaux, se situe entre l'année 2004 et l'année 2009.107(*)

Un réseau social est constitué d'organisations ou d'individus reliés entre eux par des liens qui sont crées à l'occasion d'interactions sociales108(*). L'ensemble de ces réseaux sociaux se base sur l'idée de valeurs partagées et de cooptation. L'identité de l'internaute avec son carnet d'adresse constitue le pivot du réseau social avec les fonctions de messagerie et de forum de discussion. Chaque réseau social ajoute une série de fonctionnalités comme les «  news feed » (le fil d'actualités) sur les actions des membres de son réseau.

La typologie de ces réseaux sociaux est relativement simple à établir, on peut en décliner globalement de six genres différents109(*). Il y a les réseaux spécialisés dans les retrouvailles (Classmates, Copainsdavant), pour le travail (Viadeo, LinkedIn), pour le partage de photos (Flickr), pour les ados (Habbo, Skyrock), pour le partage des goûts et des loisirs (Facebook) et enfin pour l'échange en temps réel (Twitter). Ces nouveaux espaces, fonctionnent sur le principe simple de l'invitation mais peuvent être rejoins sans invitation préalable. Ces sites permettent d'entretenir des liens avec des personnes que l'on connait déjà ou éventuellement d'en rencontrer d'autres et possèdent chacun des fonctions très différentes. Le réseau social permet également d'entretenir des relations par informations communiquées et d'accroître son « pouvoir » sur le réseau par le biais de la création de groupe de discussions composés du plus grand nombre d'adhérents, enfin, les personnes inscrites peuvent adopter des stratégies différentes en fonction des buts recherchés sur ces réseaux. On ajoutera également que sur ces réseaux, on observe, comme l'a justement souligné Benoît Thieulin, à des comportements déclinés de la vie réelle, ceux-ci sont appliqués aux réseaux et selon David Fayon, « ils donnent du sens à la notion d'intelligence collective »110(*). L'intelligence collective est ce que l'on pourrait définir comme l'essence de la logique du réseau, c'est-à-dire, qu'il s'agit de la possibilité d'agir, grâce à la puissance du groupe, coercitivement sur la société.

La sphère politique a progressivement investi ces réseaux sociaux et les ont par la suite progressivement intégré à leur stratégie de communication lors d'échéances électorales dans un premier temps, puis de façon régulière par la suite. La principale raison de cette introduction en masse des personnalités politiques sur le net, ce sont les élections qui ont très largement contribué à faire de ces nouveaux espaces, de nouveaux outils puis de nouveaux modes de communication.

Analysons les contenus des deux principaux réseaux sociaux utilisés par les partis et les personnalités politiques, Facebook et Twitter. En France, Facebook, plus que les autres réseaux sociaux, joue un rôle très important dans l'échange entre gouvernants et gouvernés. L'étendue du réseau Facebook et son importance dans le monde du web aujourd'hui expliquent aussi en partie cette utilisation politique du réseau111(*). Par ailleurs, on notera qu'il est intéressant de percevoir comment des outils, tels que Facebook ou Twitter, qui ne sont au départ absolument pas politiques parviennent à être exploités par les formations et les personnalités politiques, comme des outils de médiation efficaces, avec l'idée d'une construction d'une image positive.

Le premier constat est que depuis l'année 2007, Facebook est utilisé comme moyen de diffusion de messages politiques par les partis et les personnalités politiques. Il est également, et de plus en plus, un moyen de découverte des domaines d'intérêts et de besoin des électeurs. Enfin, le réseau social est depuis cette date un outil de mobilisation des militants et de constitution de fonds112(*). Le contenu du «  Facebook politique » sert autant à informer le citoyen, c'en est d'ailleurs la fonction principale. A l'inverse, Twitter qui est un réseau social de Micro-Blogging permet un tout autre mode d'interactivité avec les politiques mais celle-ci, reste tout de même basé sur l'idée de l'importance fondamentale du conversationnel, de la participation et de la proximité113(*). On ajoutera que la particularité de Twitter, bien moins développé que Facebook mais qui connaît tout de même une croissance exponentielle, est en France, majoritairement utilisé par les personnalités et partis politiques puisqu'il permet de publier facilement et très rapidement, de plus, il offre la possibilité de discuter bien plus aisément que sur Facebook dans la mesure où les réponses aux tweets se font d'une façon individuelle.

Cependant, une précision nécessite d'être apportée : l'utilisation politique des réseaux sociaux est beaucoup plus importante en période électorale qu'en période normale. Pour autant, certaines personnalités politiques utilisent de façon régulière ces plateformes pour tisser des liens.

En réalité, ce que les réseaux sociaux ont fait évoluer dans la médiation entre personnalités politiques et électorat, c'est l'exacerbation des notions de personnalisation, de proximité par la participation à la conversation politique avec les internautes. À cet égard, regardons plusieurs exemples pour tenter de comprendre comment évoluent toutes ces formes. Le premier exemple est la campagne présidentielle de 2007, qui a très largement insisté sur cette idée d'une proximité avec l'internaute. Cette campagne à très clairement marqué un tournant important dans la communication politique moderne puisque pour la première fois, Internet et les réseaux sociaux ont été de façon régulière mis au centre de la stratégie de campagne des candidats dans la production du discours, c'est-à-dire que le discours sur l'internet 2.0 a été très largement été valorisé par les candidats et a été très relayé. De plus, les candidats ont très largement mis en avant l'échange avec les internautes et la création conjointe du contenu114(*).

Prenons un autre exemple pour souligner l'idée qu'il existe une forme de proximité par le conversationnel. Regardons les comptes Twitter de Benoît Hamon, Nathalie Kosciusko-Morizet, très actifs sur Twitter et dans un second temps, regardons les pages-Fan Facebook de Ségolène Royal et Dominique De Villepin.

Commençons par les « posts » (les échanges) que Benoît Hamon a réalisé au cours du mois d'Avril 2011 avec ses abonnés sur son compte Twitter appelé « @benoîthamon ». Pour une clarté optimale de l'analyse, nous présenterons d'abord ce que la personnalité politique a dit puis nous examinerons ensuite les réactions des internautes115(*).

Twitter, comme les autres réseaux sociaux du même type, met en avant l'idée d'une personnalisation de l'individu (photo, statut personnel, biographie rapide) et d'une sorte de mise en scène, une mise en scène illustrée par le discours et l'apparence du compte. Sur le compte Twitter de Benoît Hamon, on voit une photo de l'homme politique, lors d'un meeting du parti socialiste116(*). La photo a pour but d'illustrer le profil, elle est également accompagnée d'une petite biographie et d'une petite présentation de son activité. Quand on analyse la tonalité du discours, on voit que de façon générale celui-ci use d'un ton relativement familier souvent très humoristique, nous verrons plus loin, qu'il s'agit d'une déclinaison nouvelle du marketing politique, pas forcément calculée, mais que le web 2.0 a contribué à mettre en place. Dans ses tweets, Benoît Hamon évoque régulièrement l'actualité politique nationale et internationale, parle également de ce qu'il aime faire, critique avec récurrence la politique gouvernementale et présente très souvent à ses abonnés son agenda. Par exemple, lors d'un tweet datant du 10 Avril 2011, il dit :

« Ce midi dans #dimanche+bit.ly/9Ansp2 » ou encore lors d'un tweet datant du 7 Avril 2011, il dit «  Dans l'émission Generation Bondy lcp.fr//emission/gen... » Ou enfin lors d'un tweet datant 8 Avril 2011, il dit « Hier soir chez Arlette Chabot#Europe1 dai.ly/gvtC3L ».

Ce type de tweets permet d'une certaine façon de remplacer les déplacements et les rapports physiques, cette attitude vise à instaurer une autre forme de dialogue. L'humour joue également un rôle important. Par exemple, il évoque dans un tweet datant du 1er Avril 2011, le fait de s'être fait piégé par une blague réalisée par le journal l'Equipe. Il dit «  il m'a fallu une bonne heure pour percuter sur le poisson d'avril de l'Equipe »117(*). On le voit donc, ce qui se joue ici, c'est la création d'une forme de proximité avec l'internaute afin de lui montrer qu'il est un égal et qu'il partage avec lui les mêmes centres d'intérêts.

Analysons désormais la page Twitter de Nathalie Kosciusco-Morizet118(*).

En parcourant les messages postés par la Ministre de l'Ecologie, on peut dégager deux choses. La première, c'est que, comme Benoît Hamon, elle évoque très largement ses déplacements liés à sa fonction de ministre, la seconde, c'est qu'elle relaie énormément d'informations liées à l'environnement et aux décisions politiques liées à l'environnement. Par exemple, lors d'un tweet datant 18/04/2011, la Ministre dit :

« Dans l'avion pour Kiev. Déplacement avec le PM pour les 25 ans de Tchernobyl: financement du 2nd sarcophage, sûreté nucléaire. Il y a environ 6 heures via TweetDeck », ou encore lors d'un tweet datant du 14/04/2011, « A Lyon pour le comite de pilotage du bassin Rhône. Et un détour par la DREAL et l'ENTPE a Vaulx en Velin. Jeudi 14 avril 2011 12:22:43 via TweetDeck ».

Quand on regarde les messages, on voit que la Ministre a réalisé pas moins de six déplacements, en France ou à l'étranger, entre le 1er et le 19 Avril. L'insistance sur les déplacements et l'agenda est une constante sur les réseaux sociaux de la part de la classe politique. Il est intéressant de noter que le ton qu'utilise la Ministre dans ses messages, est, contrairement aux messages de Benoît Hamon, bien moins rédigé de façon humoristique, mais ils ne sont pas également trop solennels.

On remarque que les deux personnalités politiques s'adressent directement aux internautes et parlent à la première personne. L'usage de la première personne est loin d'être anodin puisque c'est une manière très «  2.0 » d'obtenir une forme d'adhésion. Ainsi, on est très loin d'un mode de communication à la de Gaulle ou Giscard d'Estaing qui privilégiaient très largement la solennité119(*).

On observe également qu'au sein des comptes Twitter de ces deux personnalités politiques, que la conversation avec les internautes joue un rôle clé. En effet, les deux débattent très facilement avec les internautes et répondent aux questions qui leurs sont posés. Par exemple, Benoît Hamon le 7 Avril 2011 répond directement à une question posée par un internaute sur les élections présidentielles de 2012. Il dit :

 « Pas vraiment. Je crois que le nombre des électeurs de droite qui viendront voter dans ce but sera marginal 8:54 PM Apr 7th via web ».

Autre exemple, Nathalie Kosciusko-Morizet, répond à un internaute le 9 Avril 2011 sur les débats concernant les gaz à effets de serre, elle dit :

« C'est tout l'enjeu des discussions actuelles que de l'arrêter. samedi 9 avril 2011 11:04:12 via TweetDeck ».

Le registre est personnel, de fait, il singularise la personne et le met sur le même plan que l'internaute et crée une forme de proximité par la conversation. Pour autant, les discussions peuvent ne pas uniquement porter sur des questions d'actualités ou politiques, et c'est en cela que l'analyse des conversions est intéressante puisque cela permet de voir qu'aujourd'hui, avec le web, on peut discuter avec des responsables politiques de façon tout à fait normale. On assiste ainsi à un rapprochement tel qu'on pourrait le faire avec des amis. On assiste donc à un rapprochement grâce au numérique, qui a aussi ses effets sur le débat politique dans l'espace social.

Regardons désormais, les pages Facebook de Ségolène Royal et Dominique de Villepin.

On observant les pages Facebook des deux personnalités, on peut faire trois remarques : La première, c'est qu'elles ne semblent pas être animées par S. Royal et D. de Villepin, en personne. La seconde, c'est qu'il y a la volonté de se construire une image positive vis-à-vis des internautes (photos, messages d'accueil, voeux, évocation de sentiments de compassion, messages de mobilisation...) et la troisième, c'est qu'il y a la volonté d'informer les internautes et d'obtenir des soutiens sur l'action menée. Ces trois tendances sont visibles sur les pages Facebook des deux personnalités politiques mais se manifestent de façon très différente chez l'une et l'autre. On notera également que les deux dernières tendances évoquées constituent une logique communicationnelle déclinée du réel et appliquée au web.

A l'étude de la page de Ségolène Royal ce qui saute aux yeux, c'est qu'on y distingue plusieurs tons et niveaux de langage employés par la Présidente de la région Poitou-Charentes dans ses messages adressés aux Internautes120(*). Par exemple, on peut noter que Ségolène Royal use très largement d'un ton militant, émotif et expressif, comme lors d'un message datant du 17 Avril 2011, où elle dit :

« Les entreprises du CAC40 ont fait 40 milliards de bénéfices en plus. Le gouvernement envisage une prime de mille euros pour les salariés de ces entreprises 'à condition que les dividendes augmentent aussi' ! Et les salariés des PME sous traitantes dont le travail a permis à celles du CAC40 de faire des profits? C'est d'une vraie conférence salariale dont la France a besoin » ou encore lors d'un message datant du 18 Mars 2011, elle dit :

« Yoplait vendu par un fond de pension pour 1,6 milliard ! Et nos éleveurs se meurent. Plus de deux cents suicides chez les producteurs de lait. La misère et l'angoisse. Cherchez l'erreur. Une autre répartition des richesses est possible »121(*).

La réaction des internautes sur Facebook à ces messages est intéressante puisqu'ils semblent la suivre et les réactions vont toutes dans le sens d'une remise en question du libéralisme et des dérives qu'il peut engendrer. On sent avec les réactions qu'il y a un soutien de la part des internautes concernant les sujets évoqués.

Même constat lorsqu'on regarde la page Facebook de Dominique de Villepin, on s'aperçoit que comme Ségolène Royal, il y a la même volonté de construction d'une image positive par l'évocation de sentiments personnalisés, de critiques à l'égard du gouvernement ou de rendre solennellement hommage, comme ce fût le cas pour Aimé Césaire122(*). Par exemple, lors d'un message datant du 18 Avril 2011, il dit :

« Je ne veux pas participer à une aventure qui décevrait les Français. Ca implique d'être ambitieux, d'être capable de refonder notre vie politique, refonder notre vie économique et sociale (...). C'est aux citoyens de prendre le pouvoir, c'est au peuple français de prendre le pouvoir, et ça veut dire ne pas laisser les hommes politiques s'arranger entre eux." en déplacement aujourd'hui à Lille ».

Autre exemple, datant également du 18 Avril 2011, il affirme « Je ne fais pas de politique pour la classe politique, mais pour servir les Français". Lille, 18 avril 2011 »123(*). Ce qu'il y a de visible, c'est il y a de la part de Dominique de Villepin, tout comme de celle de Ségolène Royal, la démarche de minimiser l'écart entre l'homme politique et l'internaute. Cette réduction des écarts entre élite politique et citoyen banal se fait par l'emploi systématique du «  je », qui dénote d'une personnalisation et d'une personnalisation du discours, contribue dans le même temps à mettre en valeur la personnalité du locuteur. Il est également intéressant de souligner le fait que cette réduction des écarts change aussi la perception que nous pouvons avoir des hommes politiques.

Autre élément qui fait de Facebook et Twitter des outils très important, c'est qu'ils sont des nouveaux outils de mesure de popularité des personnalités politiques. Cette mesure s'effectue d'une façon simple, les réactions des internautes par le biais de messages permettent de prendre la température de l'opinion. D'ailleurs, comme les sondages, les réactions des internautes sur les réseaux sociaux sont de plus en plus relayées dans les médias traditionnels.

Pour autant, Twitter et Facebook possèdent quelques différences qu'il est un important de relever ici. Par exemple, on pourra dire que Twitter est beaucoup plus un vecteur d'information en temps réel que Facebook, et qu'il se prête également beaucoup plus à la conversation en un à un. En revanche, Facebook est quant à lui, beaucoup plus un outil de mobilisation et de discussion par groupe et communautés. D'ailleurs, il est beaucoup plus courant qu'une personnalité politique tienne personnellement son compte Twitter que sa page Facebook. Autre élément intéressant, la récurrence des messages sur le réseau social Facebook est beaucoup plus forte que sur Twitter, cela peut s'expliquer par le fait que Facebook est un outil beaucoup plus familier des internautes que Twitter. On notera également qu'il existe des différences entre personnalités politiques dans l'utilisation des réseaux sociaux. Par exemple, il semblerait que Ségolène Royal et Dominique de Villepin ont clairement fait le choix de séparer leur vie privée de leur vie public sur ces réseaux.

En revanche, à l'inverse, le Président Nicolas Sarkozy lui fait le choix de l'exposer bien plus. Par exemple, sur la page Facebook du Président de la République, on peut voir qu'il choisit de s'exposer avec sa femme lors de différents évènements (Photos lors de dîners privés ou de voyages). L'exposition de la vie privée va encore plus loin que la simple illustration lorsque dans ses informations personnelles, il indique explicitement être marié à Carla Bruni-Sarkozy124(*).

A l'analyse de ces réseaux sociaux, intégrés dans un dispositif de communication politique, on peut dégager trois faits importants. Le premier, c'est l'importance de la présence d'une personnalité politique sur le web, le second, c'est de faire fructifier sa présence par le dialogue direct avec les citoyens sur ces réseaux tout en y intégrant une dimension de collaboration collective et participative. Enfin, le troisième, c'est d'inciter par sa présence et le dialogue, le citoyen à s'engager. On le voit, ces trois axes sont tous liés et intégrés dans un dispositif de communication, ils s'avèrent tous complémentaires.

L'émergence de l'Internet 2.0 et l'explosion des réseaux sociaux ont également permis l'évolution du modèle du marketing politique et de voir apparaître de nouveaux enjeux. En effet, encore plus qu'avant, le web et les réseaux sociaux ont modifié le rôle de l'image et du discours politique. Cette modification est provoquée par le fait que les personnalités politiques ne peuvent pas contrôler tous les contenus produits sur le web125(*).

La communication du XXIe siècle insiste, encore plus qu'auparavant, sur les notions de symbolisme de l'image. Par le passé, la télévision constituait quasiment le seul outil de diffusion de l'image et du discours, le contrôle de ce qu'elle produisait, était beaucoup plus aisé. Aujourd'hui, avec le foisonnement d'images, de vidéos, de photos que le net diffuse et conserve, le contrôle devient de plus en plus difficile, voir impossible.

Plus que jamais, avec l'Internet 2.0 on assiste à un nouvel intérêt pour le marketing politique. A cet égard, prenons un exemple illustratif, celui de la campagne du dernier président américain en 2008126(*). Celle-ci a montré à quel point la maîtrise de l'image et la notoriété, qu'elle peut engendrer, est aujourd'hui, très liée au web et revêt une importance décisive127(*). Lors de cette campagne électorale, Internet et les réseaux sociaux en ont été le noyau et ont joué un rôle clé. D'ailleurs, la publicité politique sur Internet (L'E-pub) a coûté plusieurs millions de dollars128(*). Cette campagne a parfaitement mis en valeur la puissance, en termes de notoriété, du nouveau médium. Maria Mercanti-Guérin le souligne dans son article :

« Les plateformes communautaires ont notamment permis le recrutement de partisans, mobiliser des supporters, contrer des rumeurs et décupler l'audience des médias traditionnels. Dans ce contexte, le réseau social prend une dimension nouvelle et le regard que l'on porte sur lui est neuf »129(*).

Benoît Thieulin, qui a contribué à un rapport sur le sujet nous le confirme également : «  La campagne d'Obama a su innover sur le plan organisationnel, il a su efficacement utiliser Internet. Il y a eu une campagne tout court mais qui s'est gérée à partir d'Internet »130(*) .

Nous le voyons, les réseaux sociaux ont donc très largement été utilisés pour le recrutement mais aussi pour la collecte de dons. Les réseaux sociaux sont donc devenus depuis 2006 un outil de campagne électorale tout autant qu'un outil de débat public. Cette nouvelle logique de médiation politique, ajoutée à l'élection du président américain, conforte les hommes politiques à faire des réseaux sociaux et d'Internet, un usage plus professionnel.

Ce que l'on remarque, c'est que le marketing politique traditionnel est devenu ce que l'on pourrait appeler une forme de « marketing relationnel », au sein duquel l'Internet 2.0 et les réseaux sociaux jouent un rôle déterminant. Le profil social et participatif du web 2.0 et notamment des réseaux sociaux, pousse les personnalités politiques et les partis à être dans l'échange constant sous peine d'assister à la perte progressive d'une partie du capital sympathie acquis vis-à-vis de l'opinion. En outre ce qu'on remarque, c'est que le web 2.0 a engendré une forme de désacralisation de l'image du politique. L'image de l'élu, proche, avec qui on peut discuter aisément a modifié le regard que l'on peut porter sur le politique131(*). En réalité, ce que le web apporte est visible tant du côté de l'opinion que de celui de la strate politique. Pour l'opinion, il constitue un outil d'expertise supplémentaire de l'information et de la parole politique, il offre également la possibilité de réfléchir en groupe sur des sujets dédiés. Pour la sphère politique, il offre notamment la possibilité d'aller beaucoup plus loin dans l'interactivité notamment par le dialogue direct, de mesurer sa popularité autrement que par les sondages ou encore celle d'intégrer des pratiques de collaboration collective via les réseaux sociaux.

Ce nouveau « marketing relationnel », s'il est bien mené et correctement appliqué, peut dans une certaine mesure, pousser les internautes au débat politique et dans une plus large mesure à la mobilisation. En effet, tout l'enjeu de ce « marketing relationnel » est de créer l'image d'un élu proche du peuple. Comme au cours des années 1960-1970, la maîtrise de l'outil est absolument décisive dans le processus de construction et de valorisation d'une image politique, mais aussi et surtout pour poser les conditions du débat politique. Un exemple de l'actualité internationale nous montre l'ampleur que les réseaux sociaux ont pris au sein de la médiation politique. Le président Barack Obama, a organisé le 20 Avril dernier dans le cadre de sa campagne de réélection pour l'élection américaine de 2012, au siège social de Facebook en Californie, un débat sur les thèmes de l'économie et de l'innovation. Il avait annoncé ce débat sur son compte Twitter, sa page Facebook et son site Internet quelques semaines précédent le débat132(*). Cet exemple souligne trois points, le premier, c'est de refaire des réseaux sociaux un outil central de campagne après la réussite de 2008. Le second, c'est l'utilisation professionnelle que le président Américain peut faire de Facebook. Enfin, le troisième pousse à s'interroger sur l'éventualité de l'émergence d'un nouvel âge de discussion politique.

Les réseaux sociaux se sont donc imposé peu à peu comme des modes de communication alternatifs. Il faut néanmoins préciser que ces réseaux sociaux s'ajoutent aux instruments de médiation politique déjà existants, plus qu'ils ne les remplacent. Ils permettent de créer une forme de proximité avec l'opinion, qui peut alors se sentir d'une certaine façon d'égal à égal. Pour autant, il faut être clair dans la mesure où ce qui est mis en place c'est beaucoup plus un « simulacre » de proximité qu'une proximité réelle. Cette place occupée par les réseaux sociaux est décisive dans les modes de communication, ils s'ajoutent aux sites des partis politiques, et vont beaucoup plus loin en offrant des possibilités de médiation bien plus importantes que par le passé.

* 106 « Foursquare » est un réseau social de jeu et de microblogging crée en 2009. Source : www.foursquare.com. « Diaspora » est un réseau social qui se veut être une alternative à Facebook, il fût crée en 2010. Source : https://joindiaspora.com.

* 107 Voir sondage de L'IFOP intitulé «  Observatoire des réseaux sociaux». Source : www.ifop.com/media/poll/1032-1-study_file.pdf.

* 108 Voir la théorie « du phénomène du petit monde » du sociologue Stanley Milgram publié en 1967 et l'entretien que nous avons réalisé en compagnie de Benoît Thieulin sur la question de des modifications des pratiques grâce au web 2.0. Consulter annexe N°3.

* 109 Cette typologie que nous établissons sert juste d'outil pour aiguiller et étayer notre propos, elle le constitue en rien, une typologie « officielle » et elle n'a pas vocation à être exhaustive. Elle est partiellement emprunté à l'ouvrage FAYON DAVID, KOSCIUSKO-MORIZET DAVID, PUJOLLE GUY, «Web 2.0 et au-delà : nouveaux internautes du surfeur à l'acteur », Paris, Economica, 2008, 226 pp.

* 110 FAYON DAVID, KOSCIUSKO-MORIZET DAVID, PUJOLLE GUY, «Web 2.0 et au-delà : nouveaux internautes du surfeur à l'acteur », Paris, Economica, 2008, 226 pp.

* 111 Selon le site webmarketing.com, en Août 2010, 31% des Français sont présents sur Facebook (environ 19.444.660 d'utilisateur sur tout le territoire national). Dans le monde, les Etats-Unis demeurent les premiers utilisateurs de Facebook, ils sont suivis du Royaume-Uni et de l'Indonésie. Source : http://www.webmarketing-com.com/2010/08/23/7654-statistiques-facebook-31-des-francais-presents-sur-le-reseau-social (Consulté le 17/04/2011).

* 112 Voir l'article et l'ouvrage de YANOSHEVSKY GALIA, « Les réseaux sociaux et l'échange entre l'homme politique et les internautes : le cas de Facebook après les élections présidentielles en France », Argumentation et Analyse du Discours, La lettre, laboratoire des valeurs ? 2010, N°5, 15pp ;

* 113 Twitter est un outil de microblogging qui permet d'envoyer des messages de 140 signes (ou "tweets") aux internautes qui suivent chaque compte: les "followers" ou abonnés. La France compte 1,8 million d'utilisateurs en février 2010 Source : Nielsen. Les fonctionnalités de Twitter demeurent néanmoins moins importantes que celles offertes par Facebook.

* 114 Voir MAAREK P.-J. (Sous la direction de), La communication politique de la présidentielle de 2007 : Participation ou représentation ?, Paris, L'Harmattan, Communication et Civilisation, 2008, 189 pp.

* 115 Je présente ici ma méthodologie d'analyse des échanges observés sur les réseaux sociaux, nous reprenons la méthode utilisée dans cet article ; YANOSHEVSKY GALIA, « Les réseaux sociaux et l'échange entre l'homme politique et les internautes : le cas de Facebook après les élections présidentielles en France », Argumentation et Analyse du Discours, La lettre, laboratoire des valeurs ? 2010, N°5, 15pp. Par ailleurs, il faut veiller à observer les comptes certifiés et officiels des personnalités politiques.

* 116 BENOIT HAMON est le porte-parole du Parti socialiste et conseiller régional d'Ile-de-France. L'adresse du compte Twitter de Benoit Hamon est « twitter.com/benoithamon. ». Il dispose de 50,087 abonnés (suiveurs) et 1,232 abonnements (suivis). (Consulté le 18/04/2011).

* 117 Le quotidien Sportif évoquait que le judoka Teddy Riner, aurait abandonnerai le judo pour aller jouer au rugby dans le club du R.C Toulon. Source : http://www.lequipe.fr/Rugby/breves2011/20110401_085529_riner-signe-a-toulon.html.

* 118 N. Kosciusko-Morizet est ministre de l'Ecologie, du développement durable, des Transports et du Logement, elle est également maire de Longjumeau en Essonne. Elle possède 69,133 abonnés et 200 abonnements. Elle est membre de L'UMP. Source : http://twitter.com/nk_m. (Consulté le 19/04/2011).

* 119 Sur le sujet consulter l'ouvrage de YILDIZ HELENE, Internet : un nouvel outil de communication multidimensionnel, Strasbourg, éd. V Serfaty, Presses Universitaires de Strasbourg, 2002, 275-290 pp et l'article de BARBET DENIS, BONHOMME MARC, RINN MICHAEL, «  La politique mise au net », Mots. Les langages du politique, n°80, Mars 2006, 12-23pp.

* 120 Ségolène Royal est Présidente Région Poitou-Charentes (depuis 2004), Vice-présidente de l'Internationale socialiste, Présidente de l'Association Internationale des Régions Francophones. Elle est membre du Parti Socialiste et a été candidate à l'élection présidentielle de 2007. Source : l'adresse de la page de Ségolène Royal est https://www.facebook.com/segoleneroyal?sk=wall.

* 121 Voir Annexes : N°8 et N°9.

* 122 Dominique de Villepin est le président du parti «  République solidaire ». Il a été plusieurs fois membre du gouvernement en qualité de premier ministre, ministre de l'intérieur ou ministre des affaires étrangères entre 2002 et 2007.

* 123 Voir annexes : N°10 et N°11.

* 124 Voir Annexe : N° 12. Source : https://www.facebook.com/nicolassarkozy?sk=wall.

* 125 Sur cette question, consulter l'article de MERCANTI-GUERIN MARIA, « Facebook, un nouvel outil de campagne : Analyse des réseaux sociaux et marketing politique », La Revue des Sciences de gestion, n°242, Avril 2010, 15pp.

* 126 On a décidé de prendre en exemple la campagne de B. Obama parce qu'elle constitue aujourd'hui le meilleur exemple que les formations politiques françaises citent en exemple. De plus, cette campagne illustre au mieux notre propos.

* 127 Voir Annexe N°5. «  Rapport de la mission d'étude de Terra Nova sur les techniques de Campagnes américaines »

* 128 Selon F. Fauconnier, le budget pour l'e-pub a représenté près de 5 millions de $. Source : Journal du Net du 6/11/08.

* 129 Citation extraite de l'article de MERCANTI-GUERIN MARIA, « Facebook, un nouvel outil de campagne : Analyse des réseaux sociaux et marketing politique », La Revue des Sciences de gestion, n°242, Avril 2010, 15pp.

* 130 Citation extraite de l'entretien mené en compagnie de Benoît Thieulin, en date du 11/04/2011. Voir Annexes : N°3.

* 131 Sur ce point consulter les ouvrages de GREFFET FABIENNE (dir.), « Continuerlalutte.com, Les partis politiques sur le Web », Publications Sciences-Po (à paraître), 2011, 324pp et

YILDIZ HELENE, Internet : un nouvel outil de communication multidimensionnel, Strasbourg, ed. V Serfaty, Presses Universitaires de Strasbourg, 2002, 275-290 pp.

* 132 Le président B. Obama 19.329.068 de fans sur Facebook et 7,446, 474 Millions de suiveurs sur Twitter. Source : http://www.lepost.fr/article/2011/04/19/2470765_le-president-des-etats-unis-mr-barack-obama-are-you-in-etes-vous-de-la-partie.html. (Consulté le 19 Avril 2011). Source : https://www.facebook.com/barackobama ; http://twitter.com/BARACKOBAMA. Voir la vidéo de l'annonce : https://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=OxqQmt_F240; http://www.youtube.com/watch?v=k2otWXW7D6E.

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon