La protection civile des actionnaires dans l'espace OHADA( Télécharger le fichier original )par Narcisse Ekwelle Ekane Université de Dschang-Cameroun - D.E.A. (Diplôme d'Etudes Approfondies) 2008 |
A- Les difficultés de représentation par le conjoint ou par tout autre actionnaireDes dispositions de l'art. 538 de l'AUSC, <<Tout actionnaire peut se faire représenter par un mandataire de son choix ». Il faut entendre cet article dans son sens large, car l'actionnaire peut aussi bien se faire représenter par un autre actionnaire, que par son conjoint ou toute autre personne étrangère153. Mais le droit OHADA est resté très prudent et presque hostile à l'égard de la représentation. Signalons d'emblée qu'il n'est pas prévu la faculté de joindre une formule de procuration aux documents envoyés aux actionnaires quelques jours avant 152 BISSARA (P.), << L'utilisation des moyens de télécommunication et les assemblées générales d'actionnaires », Rapport d'un groupe de travail de l'ANSA, www.ansa.asso.fr 153 A l'opposé de la législation française qui n'admet que le conjoint ou un autre actionnaire en excluant un tiers étranger à la société, l'assemblée n'ayant pas un caractère public. 49 l'assemblée. Certes, le vote expose la société à des charges financières supplémentaires, mais l'intérêt des actionnaires est rehaussé. Aussi, le législateur OHADA fait-il montre d'une sorte de défiance à l'égard du conjoint de l'actionnaire,(1) , et même en acceptant la représentation de l'actionnaire par un autre, celle-ci n'est pas à l'abri de difficultés(2). 1- La défiance à l'égard du conjoint D'après le droit commun des contrats, un conjoint peut valablement donner mandat à l'autre à l'effet de le représenter dans l'exercice des pouvoirs que lui accorde le régime matrimonial154. La possibilité est largement admise en droit des sociétés commerciales ; d'ailleurs, d'après la loi française de 1867, il est acquis que l'actionnaire puisse se faire représenter aux assemblées générales par son conjoint. L'objectif étant d'accroitre le degré de participation aux assemblées. Seulement, les actionnaires semblent très peu enclins à adopter ce mode de représentation. Le fait n'est pas surprenant si l'on fait une brève incursion dans le droit des régimes matrimoniaux au Cameroun, où le mari a tous les pouvoirs, et rechigne le plus souvent à en concéder une partie à son conjoint. La femme se trouve ainsi très éloignée de ses affaires. Le constat est que ce mode de représentation, marginalisé, pourrait pourtant contribuer à accroitre l'intérêt des actionnaires au sein de la société. 2- Les difficultés de représentation par un actionnaire Des dispositions de l'art. 538 précité, il ressort que tout actionnaire peut se faire représenter par un mandataire de son choix ; et que tout actionnaire peut recevoir les pouvoirs émis par d'autres actionnaires, en vue d'être représenté à une assemblée, sans autre limite que celle résultant des dispositions légales ou statutaires fixant le nombre de voix dont peut disposer une même personne, tant en son nom personnel que comme mandataire. C'est dire que l'actionnaire a le libre choix de son mandataire, et on leur applique le droit commun du contrat de mandat. Mais les choses se passent rarement ainsi, au moins dans les sociétés qui font appel public à l'épargne. Premièrement, les actionnaires qui ne se connaissent pas ne peuvent se mettre en rapport les uns avec les autres pour trouver celui qui assistera en personne à l'assemblée. Autrement dit, la réelle difficulté pour l'actionnaire réside dans le fait de trouver un autre qui accepte de le représenter à l'assemblée, la libre transmissibilité des actions permettant que celles-ci changent de propriétaire au gré des fluctuations du marché ou tout simplement de la volonté de l'actionnaire. En outre, l'actionnariat peut également être dispersé dans tout le pays, et il devient alors impossible, sinon très difficile de trouver un actionnaire ; même dans ce cas, encore faudrait-il que ce dernier accepte de voter dans le sens voulu par le mandant155, car on ne saurait exiger d'une personne qu'elle accepte de représenter une autre surtout lorsqu'elle entend voter différemment sur les questions de l'ordre du jour. Une autre difficulté résiderait dans l'inaptitude de l'actionnaire représentant à accéder en son nom propre à l'assemblée156. Et la doctrine n'est pas unanime à ce sujet157. Pourtant, l'on doit admettre qu'il serait opportun de reconnaître que la régularité des actes faits par un mandataire s'apprécie eu égard à la capacité du mandant et non du mandataire, ce selon l'esprit même du droit commun du contrat de mandat, car ce dernier ne fait pas valoir ses propres actions mais se limite à agir au nom et pour le compte du mandant. On signalera enfin le caractère vague et incertain des autres mandataires visés par l'Acte uniforme dans son art. 538. Même si cette position peut se comprendre dans la mesure où, en fait de représentation, il n'est pas question ni souhaitable de multiplier au sein du conseil des représentants de telle ou telle catégorie d'intérêts spécifiques : d'une part parce que le conseil risquerait d'être le champ clos d'affrontements d'intérêts particuliers au lieu de représenter collectivement l'ensemble des actionnaires et d'autre part parce que la présence d'administrateurs indépendants est un gage suffisant de ce que tous les intérêts susceptibles d'être pris en compte l'auront été. |
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