L'intangibilté du capital social et la protection juridique des créanciers sociaux( Télécharger le fichier original )par Mahawa DIOP Université gaston berger de Saint Louis - Maitrise 2006 |
CHAPITRE I : La signification financière du capital socialLe capital est l'instrument de financement de la société. Une société ne peut fonctionner que sur la base de fonds d'emprunt. C'est pourquoi, à l'origine, les associés vont constituer les premiers fournisseurs, en dotant leur structure d'un capital (Section I). Pour autant, la substance qu'ils apportent à la société ne saurait jouer son rôle que si son existence est garantie (Section II). SECTION I : Le capital social, source de financement d'origine de laSociété
L'objet social correspond au programme que la société entend réaliser, et qu'elle doit financer. Pour reprendre l'expression des financiers ces fonds du « haut du bilan » sont constitués d'apports. Toute fois, tous les apports ne sont pas inclus dans le capital social. D'où l'importance de la distinction entre les apports constituant la substance du capital ou apports capitalisés (§. 1) et les apports non capitalisés (§.2).
§1 : La substance du capital social : les apports capitalisés
Au jour de la constitution de la société, le capital est égal au montant des apports. La substance du capital social est déterminée, en principe, par la réunion des apports en nature et des apports en numéraire, exclusivement. Sous cette importante réserve, le statut du capital social peut être envisagé à un double niveau ; d'une part les apports en nature (A), d'autre part, les apports en numéraire (B). A. Les apports en natureSont inclus dans le capital social les apports en nature. Chaque associé est débiteur envers la société de tout ce qu'il est obligé à lui apporter... en nature3(*). Il est mis à la charge de chaque associé l'obligation d'effectuer le transfert des droits portant sur les biens apportés en nature. Est désigné sous le terme d'apport en nature, tout apport de biens meubles ou immeubles, à l'exception des espèces monétaires. Qu'il s'agisse d'un bien apporté meuble corporel (matériels, machines...) ou incorporel (fonds de commerce, brevet etc....) ; l'importance est qu'il puisse rentrer dans le commerce juridique. Autrement dit, que le bien puisse, au regard du droit, faire l'objet d'un apport de la part de celui qui en est le propriétaire et possède le pouvoir d'effectuer une telle opération. Deux questions présentent l'intérêt particulier d'être envisagées lorsqu'il convient d'analyser l'apport en nature. La première est relative aux diverses formes de l'apport, la seconde, à son évaluation. En considération de la forme qu'il peut revêtir, l'apport en nature peut résulter d'une pleine propriété. Dans cette hypothèse, l'apporteur d'un bien entend transférer à la société la pleine propriété du bien apporté ; l'article l. 1843 du code civil rappelle, à cet effet, que cet apport se réalise par le transfert du bien en cause et sa mise à la disposition effective de la société. Ce transfert a pour vocation de rendre le bien opposable aux tiers par le biais de la publicité. Et l'article 1843-1 du code civil rappelle que l'apport d'un bien ou d'un droit dont la transmission est soumise à une formalité de publicité en vue de son opposabilité nécessite le respect de cette formalité. Dans la pratique, le cas le plus fréquent est celui des apports de fonds de commerce ou des biens ou droits immobiliers. En droit français, cette formalité peut s'accomplir même avant l'immatriculation de la société au Registre du Commerce et des Sociétés ; mais à condition que si cette immatriculation intervienne, les effets de cette formalité devrant rétroagir à la date de son accomplissement.
A la nécessité d'assurer l'opposabilité des apports aux tiers, vient s'ajouter l'impérieuse obligation garantie des droits des créanciers de l'apporteur. Il peut s'avérer que l'apporteur d'un bien soit déclaré en cessation des paiements, au moment où il affecte le bien à la société ; l'apport étant rémunéré de parts sociales. C'est pour cette raison précise que la loi française du 25 janvier 1985 permet, si la société a eu connaissance de l'état de l'apporteur qui est en cessation des paiements, au moment de l'apport ; le prononcé de la nullité de l'apport4(*). Dans la même perspective, la jurisprudence admet que les créanciers lésés par un apport en nature puissent exercer à son encontre une action dite paulienne5(*). Un bien peut également être affecté à une société sous la forme d'un apport en jouissance. Dans cette hypothèse, l'apporteur d'un bien se limite à en affecter, seulement, la jouissance à la société. Aucun transfert de propriété n'étant alors opéré, l'apporteur peut récupérer le bien à la dissolution de la société. Le maintien de la qualité de propriétaire sur la tête de l'apporteur s'explique que ce dernier supporte seul les risques. La perte pèse sur lui si le bien vient de périr et non pas sur la société ; comme dans le cas d'un apport en pleine propriété. L'intérêt de la distinction n'apparaît qu'en matière d'assurance : dans l'apport en pleine propriété, l'assurance doit être contracter par la société ; alors que pour l'apport en jouissance, l'assurance pèse sur l'apporteur. Encore faudrait-il rappeler que cette distinction ne vaut que pour les apports de corps certains. S'il s'agit de choses fongibles, la société est réputée propriétaire, et par conséquent a, à sa charge, l'obligation de restituer l'équivalent.
L'apport d'un bien peut également résulter d'un usufruit. La société usufruitière peut exploiter le bien. Cependant, elle a, à sa charge, l'obligation de le conserver et de ne pas en altérer la substance. Aucun droit de propriété n'étant transféré du propriétaire à la société, l'apporteur conserve la qualité du nu-propriétaire et la société ne peut disposer du bien apporté. Le plus souvent, ce type d'apport est effectué par le conjoint survivant en raison des dispositions successorales qui le font, dans la pratique, héritier du conjoint en usufruit. Aux termes de l'article 617 du code civil, cet usufruit a un caractère viager ; il en résulte donc, que l'apport devient caduc au décès du conjoint survivant apporteur. Ces formes d'apports faites en nue-propriété se multiplient car elles facilitent la transmission d'entreprises à moindre coût. L'apporteur reçoit des droits en pleine propriété à concurrence de la valeur de l'usufruit ou de la nue-propriété. L'étude de la nature des apports en société révèle trois composantes pour l'essentiel Ainsi, il y a les apports purs et simples ; les apporteurs en contrepartie de leur apport acquièrent la qualité d'associé et reçoivent des droits sociaux qui sont exposés à tous les risques de l'entreprise. On évoquera aussi les apports mixtes pour lesquels, l'apporteur transfert non seulement un bien6(*), mais également le passif d'exploitation attaché à celui-ci. Le transfert de la propriété s'accompagne d'un transfert de dette. Enfin, nous avons les apports à titre onéreux qui sont des apports rémunérés autrement que par des actions ou des parts sociales, mais, par exemple, par des versements d'espèces ou des prises en charge du passif etc. ... Afin de déterminer le nombre de parts ou actions auxquels ils donnent droit, les apports en nature doivent faire l'objet d'une évaluation. Il y a, en effet, un risque éventuel de surévaluation des apports. Aussi, certaines règles sont-ils destinées à protéger les intérêts des créanciers sociaux et des apporteurs en numéraire. Dans les S.A et les S.A.R.L, un commissaire aux apports est chargé de l'évaluation.
Outre l'existence d'apports en nature, les apports en numéraire sont également constitutifs de la substance du capital social.
* 3 Art.37 AUSC/ G.I.E. Traité O.H.A.D.A. * 4 M. Jeantin, Droit Com. Instruments de paiement et de crédit, Entreprises en difficultés, Dalloz, 1991, n°824. * 5 Cass. Civ., 1, 21 juillet 1987; bull. Jolly, 1987, note. Lesguillier ; Rev. Trim. Droit com. 1988, 78. * 6 Généralement un fonds de commerce |
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