INTRODUCTION GENERALE
A la fin des années 1980, le Bénin a
traversé une crise économique provoquée par une mauvaise
allocation des ressources, un développement démesuré du
secteur public, une atrophie du secteur privé, un
déséquilibre du budget de fonctionnement et une banqueroute
générale du système bancaire. Face à cet
état de chose, le pays s'est engagé à partir de 1989, dans
une série de réformes, notamment les Programmes d'Ajustement
Structurel (PAS) soutenues par les institutions de Bretton Woods. La mise en
oeuvre de ces réformes a permis au Bénin d'obtenir des
progrès considérables. Le taux de croissance s'est établi
en moyenne à 5,1% au cours de la période 1996*2000 contre 4,1%
entre 1990 et 1995. Mais, les résultats considérables ainsi
obtenus n'ont pas suffi à améliorer les conditions de vie de la
population.
Face à cette situation d'extrême
pauvreté et de vulnérabilité de la population, le
Bénin s'est engagé dans la mise en oeuvre d'une stratégie
nationale de réduction de la pauvreté pour un
développement économique et durable. Après
l'ébauche d'une Stratégie Intérimaire de Réduction
de la Pauvreté (SRP, 2000), une stratégie triennale (2003*2005) a
été définie et a servi depuis lors comme cadre
stratégique de référence, de programmation et de
budgétisation des actions du Gouvernement, ainsi que pour le dialogue
avec les Partenaires Techniques et Financiers. Dans cette première
stratégie, le Gouvernement du Bénin a judicieusement mis l'accent
sur l'accélération de la croissance et le développement
des infrastructures économiques notamment routières afin de
renforcer le capital public et l'efficacité des actions pour asseoir les
bases d'un développement économique durable. Cela s'explique par
le fait que l'état béninois a très tôt compris le
rôle moteur des infrastructures routières dans le processus de
croissance et de développement d'une nation. Ceci est d'autant plus vrai
dans les pays développés qui sont caractérisés par
un immense réseau d'infrastructures performant alors que les pays sous
développés possèdent un réseau d'infrastructures
embryonnaires. Malgré une timidité de croissance
économique observée au Bénin depuis un certain temps, le
niveau des infrastructures routières reste encore faible.
Par ailleurs, la Banque Mondiale dans son rapport de
1994 consacré à la problématique des infrastructures dans
le monde, relevait l'insuffisance d'infrastructures comme l'un des handicaps
majeurs au développement économique et social des pays en
développement. Cette étude montre que le développement
d'infrastructures non seulement accroît les opportunités de
croissance, mais aide aussi à assurer que cette croissance soit plus
diffusée et équitable.
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Face à cet état de chose, il urge de
trouver les moyens nécessaires pour améliorer la contribution des
infrastructures routières à la croissance
économique.
De plus, les dépenses publiques
d'investissement ont, en principe, pour rôle de mettre en place des
capacités de production afin d'accroitre l'investissement total.
L'investissement est au coeur de toute activité économique et du
développement. En conséquence, il est important de mesurer
l'impact des dépenses publiques d'investissement sur l'activité
économique ; c'est pourquoi notre étude porte sur le thème
« Analyse de l'investissement en infrastructure routière sur la
croissance économique au Benin »
Pour y parvenir, cette étude est
organisée en deux parties. Tout d'abord, nous allons décrire le
cadre théorique de l'étude ; ensuite, nous proposerons un
modèle d'analyse dont l'estimation nous permet de déduire des
implications de politiques économiques.
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3
PREMIERE PARTIE : Cadre théorique de
l'étude
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Le cadre théorique de l'étude consiste
à décrire la problématique, à présenter les
objectifs de l'étude et un point des connaissances sur le sujet en
étude sera présenté à travers la revue de la
littérature.
Chapitre 1 : Problématique, Objectifs,
Hypothèses et Intérêt l'Etude Paragraphe 1 :
Problématique
Le développement économique durable
auquel aspirent les pays en voie de développement notamment le
Bénin nécessite un niveau de croissance économique
satisfaisant et une répartition équitable de la richesse qui
garantit la justice sociale.
De plus les analyses faites par la banque mondiale en
1994 et celles en 2009 s'accordent à dire qu'il ne sera
véritablement possible de réduire la pauvreté en Afrique,
qu'avec un taux de croissance potentiel à deux chiffres et à
effort de développement constant. Ceci a d'ailleurs permis à
divers pays africains notamment le Bénin d'élaborer des
programmes nationaux de lutte contre la pauvreté dans la perspective de
réduire l'ampleur du phénomène. Mais, malgré les
différentes réformes économiques nationales et
communautaires appliquées au cours des dix dernières
années, la croissance économique enregistrée ne suffit pas
pour asseoir les bases d'un développement durable capable de soutenir la
concurrence régionale induite par les réformes communautaires et
de réduire sensiblement la pauvreté.
L'économie béninoise demeure encore
fragile et sa croissance semble avoir atteint un pallier qu'elle ne parvient
plus à franchir, tandis que la richesse créée ces
dernières années semble être mal répartie engendrant
des inégalités de plus en plus grandes entre les
différents acteurs économiques. Ainsi, près de 33% de la
population continue de vivre en dessous du seuil de pauvreté globale et
l'indicateur de développement humain pour le Bénin est de 0,411
en 1998, le classant à la 151ème place sur 174 pays
évalués.
Dans un tel contexte, il importe de connaître
les leviers du développement, autrement dit, les sources de la
croissance économique afin de savoir comment agir sur elles pour
optimiser cette dernière. Le développement des infrastructures
économiques apparait à cet effet indispensable en termes
d'objectif opérationnel. Ceci est d'autant plus vrai dans les nouvelles
théories de la croissance qui mettent l'accent sur les
externalités positives engendrées par certains
aménagements publics d'infrastructures sur la productivité des
entreprises. Les infrastructures routières représentent donc un
levier important pour promouvoir la croissance économique et le
développement.
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Mais, force est de constater que de nos jours, elles
ne jouent pas pleinement leur rôle pour le pays et le secteur des
transports y est pour beaucoup. Ainsi, malgré les différents
efforts fournis par le gouvernement béninois, tant dans la construction
que dans l'entretien des routes, la densité routière brute
(estimée à 0,72 km pour 1000 habitants et à 0,05
km/km2) demeure encore faible. Ce taux est plus faible lorsqu'on le
calcule par type de revêtement et montre que le pays est
sous-équipé en infrastructure routière comparativement
à d'autres pays de la sous-région.
En effet, le Bénin ne dispose que de 0,23 km de
route bitumée pour 1000 habitants (soit 0,012 km/km2), contre
0,62 km pour 1000 habitants au Ghana. Le Bénin est donc confronté
à un sous-développement des infrastructures routières qui
explique en partie le niveau très élevé des coûts de
: transport des biens et personnes, transaction et des facteurs de production ;
la faible productivité du travail ainsi que la faiblesse du
marché intérieur.
Par ailleurs, il faut noter que le faible niveau
d'investissement dans le secteur routier ainsi que la mauvaise orientation des
dépenses publiques d'investissement et d'entretien de nos routes
représentent les principales raisons de l'inefficacité du
réseau routier national et de la faible contribution de ce dernier
à la croissance économique.
Ainsi, les dépenses du ministère des
Travaux publics et des Transports qui, en 1997, représentaient 1,7% du
PIB et 10% des dépenses totales sont tombées à 1,5% du PIB
et à 9% en 2003 des dépenses totales puis à 0,8% du PIB en
2006. Les crédits alloués à ce secteur attestent certes de
l'engagement du gouvernement en faveur de l'amélioration des
infrastructures de transport nationales, mais les chiffres réels sont
encore en deçà des niveaux souhaitables.
Dans le contexte actuel de promotion des
investissements dans les secteurs clés du développement, et dans
le prolongement des réflexions relatives aux facteurs de la croissance
au sein des économies en développement, cette étude vise
à répondre à la question fondamentale suivante :
L'investissement en infrastructure routière assure t-il
réellement la croissance économique ? L'insuffisance des
investissements explique en grande partie l'état embryonnaire du
réseau routier national et aussi sa dégradation précoce.
Car construire la route est une nécessité toutefois la maintenir
en bon état est très délicate et onéreuse mais
indispensable pour la durabilité et la pérennisation des
monétaires acquis
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Paragraphe 2 : Objectif, Hypothèse,
Intérêt, et cadre de l'étude A-Objectif et
Hypothèse de l'étude
1-L'objectif de l'étude
L'objectif général de cette étude
est de mesurer l'impact des dépenses d'infrastructures routières
sur la croissance économique. De manière spécifique, il
s'agira de :
Identifier les déterminants de l'investissement en
infrastructure routière.
Analyser la causalité au sens de GRANGER entre
l'Investissement et la croissance.
2-Hypothèses de l'étude
Pour aborder la problématique ci-dessus
définie, nous formulons les hypothèses de recherche suivantes qui
seront validées ou non par la suite de l'analyse des résultats
obtenus :
> Les dépenses gouvernementales
améliorent l'investissement en infrastructure routière.
> L'investissement en infrastructures routières
cause la croissance économique au Benin.
B-Intérêt et cadre de l'étude
1- Intérêt
De manière générale, cette
étude contribuera à la littérature existante. Elle
permettra de faire progresser la réflexion sur la politique
d'investissement en infrastructure routière et sur le renforcement des
capacités productives du Benin qui est une question
d'actualité.
Depuis les dernières réformes de
politique budgétaire menées par le gouvernement béninois,
l'on assiste à une réduction considérable des
dépenses dans le secteur routier. Or, le constat qui est fait
aujourd'hui est que les dépenses d'investissement en infrastructures
routières sont sources de croissance économique. Cet avis est
partagé par beaucoup d'auteurs notamment les théoriciens de la
croissance endogène qui mettent l'accent sur les externalités
positives qu'engendrent certains aménagements d'infrastructures
publiques.
Par ailleurs, l'étude présente un
intérêt particulier en raison du fait qu'elle porte sur un
phénomène économique important au quel, il a fallu
attribuer un rôle d'acteur principal dans le développement
économique et social. L'analyse et l'approfondissement d'un
paramètre de
l'investissement sont plus que jamais impérieux
surtout dans un pays en développement comme le Bénin.
Ce modèle, dans une certaine mesure ou sous
certaines conditions compatibles avec nos réalités
économiques peut servir d'instrument de politique
budgétaire.
2 5 cadre de l'étude Présentation de
l'ensemble du réseau
Le réseau routier du Bénin est
caractérisé sur le plan administratif et sur le plan technique.
La classification administrative caractérise les routes en Routes
Nationales Inter Etats (RNIE) et Routes Nationales (RN) tandis que celle issue
des standards techniques les regroupe en Route Bitumée (RB) et Route en
Terre (RT).
La politique sectorielle mise en oeuvre à
partir de 1997 a véritablement permis une amélioration du
réseau routier national dans son ensemble. Le réseau routier
classé du bénin est passé de 3425 km en 2001 à 6076
km en 2002 soit un accroissement de 2651 km avec une augmentation du
linéaire de routes revêtues et une amélioration de
l'état des routes. Depuis 2002 il est demeuré le même
jusqu'à ce jour (6076 Km). Mais, certains travaux de bornage sur le
terrain ont fait que le linéaire du réseau routier classé
est passé de 6076 Km à 5944 Km pour les années 2007, 2008
et 2009.Toutefois, à ce réseau routier classé s'ajoutent
certaines voies urbaines d'une longueur de 55km (dans les villes de Cotonou et
de Porto-Novo) et certaines pistes de dessertes rurales couramment
entretenues.
De 2007 à 2009, l'état des routes a
régressé. Ainsi, la proportion de routes praticables en toute
saison est passée de 78,5% en 2007 à 75,2% en 2009 soit en
moyenne 96 km de routes qui passent à l'état non praticable
chaque année. Quant aux routes en mauvais état, leur
linéaire est passé de 802,76 km en 2007 à 1191,743 km en
2009 soit en moyenne 194,5 km de routes qui passent à l'état non
praticable chaque année.
Parallèlement, le linéaire de routes
bitumées est passé de 1822,96 km en 2007 à 2078,068 km en
2009 tandis que celui des routes en terre est passé de 4121,62 km
à 3866,503 km. Le tableau suivant donne l'évolution des routes
par type de routes entre 2007 et 2009 :
Tableau1 : Evolution de l'état du
réseau classé par type de routes (km)
Etat
|
2007
|
|
|
2009
|
|
Bon
Passable Mauvais En
chantier Total
|
RB
|
RT
|
Total
|
RB
|
RT
|
Total
|
1085,3
|
370,2
|
1455,5
|
1109,743
|
156,685
|
1266,428
|
662,7
|
2546,12
|
3208,82
|
755,335
|
2450,08
|
3205,418
|
74,96
|
727,8
|
802,76
|
212,99
|
978,753
|
1191,743
|
0
|
477,5
|
490,5
|
0
|
280,982
|
280,982
|
1822,96
|
4121,62
|
5944,58
|
2078,068
|
3866,503
|
5944,571
|
Source : DGTP/DPSE
Bon : Praticable en toute saison avec un niveau de
confort élevé
Passable : Praticable en toute saison avec un niveau de
confort moindre
Mauvais : non praticable en saison pluvieuse et souvent
en saison sèche
La situation du réseau routier classé par
classe administrative en 2009 se présente ainsi qu'il suit :
> 3766,7 km de RN dont 10,4% à l'état
bon, 62,9% à l'état passable, 22% en mauvais état et 4,7%
en chantier.
> 2177,9 km de RNIE dont 40,2% à l'état
bon, 38,3% à l'état passable, 16,8% en mauvais état et
4,7% en chantier ;
Le graphique suivant illustre la situation du
réseau routier classé par classe administrative en 2009
:
Graphique1 : Présentation du réseau
routier par classe administrative en 2009
Source : DGTP/DPSE
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Présentation du réseau routier par
région
La répartition des routes par région montre
une certaine disparité des investissements tant en terme de volume qu'en
terme de type et de qualité de routes.
En effet, on remarque que la région de
l'Alibori-Borgou est celle qui possède la plus grande partie du
réseau routier (28%), suivi de la région de l'Atacora-Donga (26%)
et du ZouCollines (22%). La région qui enregistre le plus faible
linéaire est l'Ouémé-plateau avec seulement 7% du
réseau (voir graphique ci-dessous).
Graphique2 : Longueur du réseau en km par
région en 2009
Source : DGTP/DPSE
Mais, ces statistiques à elles seules ne
suffisent pas pour bien mesurer d'une part la couverture du réseau
routier sur le territoire national ainsi que dans les différentes
régions et d'autre part l'accessibilité des personnes aux routes
dans les différentes régions et sur le territoire
national.
En présence d'une telle situation, certains
auteurs utilisent deux indicateurs pour déterminer d'une part les
régions les mieux pourvues de routes ainsi que la couverture du
réseau sur tout le territoire et d'autre part l'accessibilité des
personnes aux routes dans les différentes régions et sur le
territoire national : Il s'agit de la densité routière et de la
distribution routière.
La densité routière mesure la couverture
routière c'est-à-dire le linéaire de routes qu'on trouve
sur une superficie de 100km2. Elle est exprimée en
Km/100km2. La distribution routière par contre mesure
l'accessibilité des personnes aux routes c'est-à-dire le nombre
de km de routes pour 10.000hbts. Elle est exprimée en
km/10.000hbts.
Ces indicateurs sont utilisés par les pouvoirs
publics et les institutions internationales ; ceci dans la mesure où
ils rendent compte de la situation du pays en matière
d'infrastructures routières. Il ressort donc du tableau ci-dessous
que c'est la région de l'Atlantique-Littoral qui
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est la plus couverte de routes suivi du Mono-Couffo et
de l'Ouémé-Plateau ; ce qui n'est pas le cas au niveau de la
distribution routière. En effet, sur une population de 10000hbts,
environ 14 personnes ont accès à la route dans la région
de l'Atacora-Donga ; 11 dans celle de l'Alibori-Borgou et 10 dans celle du
Zou-Collines ; l'accessibilité dans les autres régions
étant faible.
Tableau 2 : Densité et distribution
routière au Benin en 2009 /DGTP/DPSE
Régions Distribution routière (Km pour
Densité routière
10000 hbts) (Km pour
100km2)
10,94 3,19
Alibori-Borgou
14,18 4,90
Atacora-Donga
2,97 15,98
Atlantique-Littoral
4,38 11,72
Mono-Couffo
Ouémé-Plateau
3,09 9,41
Zou-Collines 9,51 6,78
Ces différentes données
témoignent de l'insuffisance du réseau dans les régions.
Ceci est d'autant plus vrai lorsqu'on considère le Bénin en
général. En effet, sur une superficie de 100km2 au
Bénin, l'on y retrouve que 5km de routes ; de même sur une
population de 10000hbts au Bénin, seulement 7 personnes ont accès
à la route.
Au total, cette présentation du réseau
routier nous a permis non seulement de faire le point sur la situation du
réseau dans les différentes régions et sur le territoire
mais aussi de comprendre les disparités qui existent entre les
différentes régions. Elle nous a également permis de
connaitre non seulement la couverture des régions par le réseau
mais aussi l'accessibilité de nos concitoyens aux routes tant au niveau
régional qu'au niveau national. Il ressort de cette chapitre que le
Bénin accuse un grand retard en ce qui concerne ces infrastructures
routières.
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