CHAPITRE 3. MATERIELS ET METHODES
3.1. Présentation de la zone
d'étude
3.1.1. Localisation géographique
Le PNK fut créé par Décret
présidentiel No 86/1283 du 30 octobre 1986. Il couvre 1260
km2 et s'étend entre 4053'-5028'N et
8042'-9016'E. Sa plus grande surface s'étale sur
le département du Ndian (arrondissement de Mundemba) tandis que le reste
de sa surface se trouve dans le département de la Manyu (arrondissement
d'Eyumojock). Sa plus grande largeur est de 46 km dans le sens Est - Ouest
tandis que sa plus grande longueur est de 66 km. Sa ZP est une bande de 3 km
autour du parc et couvre une surface de 612 km2 (MINFOF, 2008). Le
PNK est limité au Nord par la Reserve de forestier d'Ejagham, au
Nord--Est par les Monts Nkwende, à l'Est par la ville de Toko, au Sud
par la ville de Mundemba, et partage 28 km de sa bordure Sud-ouest avec le Parc
National de Cross river situé au Nigeria.
La zone d'étude se situe dans la région du
Sud-ouest, département de la Manyu, arrondissement d'Eyumedjock et plus
précisément dans la périphérie Nord-Est du PNK
où elle englobe sept villages (Bajoh, Abat, Mgbegati, Osselle, Bakut,
Bayib-ossing et Basu) comme l'indique la Figure 1.
Figure : Carte du cameroun montrant le PNK et les
villlages étudiés Source : Adama (2010)
3.1.2 Climat
Le climat de la zone de Korup est du type équatorial
du Nord de la zone côtière, caractérisé par deux
saisons une saison sèche de quatre mois (novembre à
février) et une saison pluvieuse de huit mois (mars à octobre).
La pluviométrie moyenne est de 4000 mm et les mois les plus pluvieux
sont juillet, août et septembre. La température moyenne annuelle
varie entre 23,70C et 30,20C. Les températures les
plus élevées s'enregistrent en février
(28,40C) et les plus basses en août
(25,40C). L'humidité relative moyenne annuelle est de 83%,
les extrêmes étant respectivement de 98% et 66% (MINFOF, 2008).
3.1.3. Relief et topographie
PNK repose sur une surface plane à ondulée du
refuge africain (roche mère précambrienne) et sur des hautes
terres fortement disséquées, caractérisées par de
longues pentes raides et irrégulières, des ruisseaux et
rivières fortement incisées. Le terrain est
caractérisé par des affleurements de granites, des tas de roches
granitiques et des arrêtes. Il a été estimé que 17%
du parc se situe entre le niveau de la mer et 120 m d'altitude (MINFOF,
2008).
3.1.4. Géologie et sol
> Géologie
La géologie du PNK est favorable aux objectifs de
conservation car le sous-sol ne contient aucune ressource minérale. On
n'y trouve ni charbon ni pétrole et la zone n'est pas susceptible de
fournir de l'or ou du diamant (Geze, 1943). D'après Gartlan (1986),
quatre types de roche géologique coexistent dans la zone de Korup.
· Basalte et Andésite dans
l'extrême nord-est du parc ;
· Des grés sédimentaires du
crétacé dans l'extrême sud du parc ;
· Une roche mère précambrienne:
la majorité du parc (113.000 ha) est fait de deux types proches
de roche mère précambrienne assez semblable. Ectinites,
quartzites et gneiss prédominant à l'Est; gneiss, embrechites et
une aire de granite syntectonique à l'Ouest ;
· Le basalte tertiaire constitue la plus
ancienne roche mère dans les zones de plus grande
élévation.
> Sol
D'après le MINFOF (2008) les résultats d'une
prospection pédologique menée dans le but d'évaluer la
compatibilité du sol de la région de Korup à une culture
de palmier à huile ont révélé la présence
dans cette région de quatre types de sol :
· D'anciens sols sédimentaires issus des grés
du crétacé et des plaines côtières non volcaniques,
couvrent 6.000 ha (4% du Parc) dans la partie sud du parc ;
· Le long de la bordure Nord-Est du parc se trouve une
autre zone d'ancien sol sédimentaire qui couvre environ 9.000 ha soit 7%
du parc.
· Dans le secteur extrême nord-est du parc, de
vieux sols volcaniques couvrent environ 7.000 ha soit 5% du parc.
· Le reste du parc (104.000 ha soit 84% du parc) est
couvert par des sols issus de la dégradation in situ des roches
mères précambriennes: granites, gneiss, schistes, embrechites et
ectinites.
Les sols issus de ces roches mères sont grossiers,
rugueux, fortement acides et ont un faible statut nutritionnel. De façon
générale, les sols rencontrés dans la région de
Korup tendent à être extrêmement sableux, pauvres en
éléments nutritifs et possèdent une faible capacité
de rétention en eau. Ils sont généralement très
acides et infertiles avec une faible concentration en éléments
nutritifs et en matière organique.
3.1.5. Hydrologie
Il y a trois principaux réseaux de drainage dans le
PNK. Le secteur Nord (40% du parc) est drainé par trois principaux
ruisseaux qui se jettent dans la rivière Bake-Munaya. Ce dernier coule
vers le Nord et se jette dans la Cross river. La zone centrale (41% du parc)
forme un basin drainé par la rivière Ndian qui coule vers le Sud.
Le secteur Ouest et le secteur Sud-Ouest (19% du parc) sont drainés par
les rivières Akpasang et Korup qui coulent vers le Sud (MINFOF,
2008).
3.1.6. Flore
La végétation du PNK est comprise dans la vaste
forét d'Afrique Centrale et de l'Ouest qui originellement
s'étendait de l'Est au delta du Niger, à travers Cameroun,
jusqu'en Guinée Equatoriale et au Gabon dans le Sud. Localisé au
centre de la forêt refuge guinéocongolaise (Maley et Brenac,
1998), le PNK est réputé être, en plus du meilleure exemple
encore existant de ce type de forêt, la forêt africaine la plus
riche de toutes celles dont les données sont disponibles (Richards, 1952
cité par MINFOF, 2008). Il n'y existe aucune évidence d'une
influence humaine majeure à travers les temps historiques et au moins
dans la partie Sud du parc, la forét est presque primaire. En
dépit du stress sur l'écosystème, la forêt dans ce
secteur du parc a une biomasse et une production équivalente à
celles des autres forêts africaines (Newbery et al., 1997). La
région regroupe quatre différentes associations
forestières qui ont été décrites par Letouzey
(1985) puis partiellement prospectées par Duncan (1995)
· La forêt atlantique biafréenne
: Elle se trouve dans la zone côtière humide avec une
saison humide très prolongée, caractérisée par une
dominance des espèces de césalpiniacée
large et grégaire. Cette forêt est très
importante pour la conservation dans la mesure où elle renferme des
espèces de plantes très peu connues, rares et
endémiques.
? La forêt marécageuse : Elle
apparaît sur des sols ayant une nappe phréatique
superficielle. La canopée est haute de 25-30 m et la
diversité spécifique est pauvre. Les herbes et les arbustes sont
rares et disséminés. Les espèces caractéristiques
de cette végétation incluent : Crateranthus talbotti,
Mitragyna stipulosa, Protomegabaria stapfiana, Diospyros preussi, Spondianthus
preussi, Symphonia globulifera, Amanoa strobilacea, Raphia sp.,
Liparis sp., Affrofittonia silvestris et Renealmia sp.
? La forêt de piedmont : D'après
Letouzey (1985), la forét de piedmont est semi
décidue. Elle est située entre 500 m et 800 m
d'altitude et non dominée par les Césalpiniacées. Cette
forêt sert de transition entre la forêt sempervirente de basse
altitude et la forêt submontagnarde. La forêt semi décidue
réfère à la zone de forêt secondaire
résultant certainement des pratiques culturales. La forêt de
piedmont est importante pour la conservation, car elle renferme une grande
richesse spécifique avec un grand nombre d'espèces peu connues,
rares et endémiques (Duncan, 1995).
? La forêt submontagnarde : Située
au-dessus de 800 m d'altitude sur les sommets du
PNK, des réserves forestières de Nta-Ali et
Ejagham, la forêt submontagnarde a une canopée haute de 15-20 m et
les arbres caractéristiques de cette forêt sont: Anonidium
mannii, Camptostylus sp., Zenkerella citrina, Chionanthus sp., Syzygium
staudtii, Anthocleista scandens et Garcinia sp. La forêt
sub-montagnarde est connue comme étant le hotspot de la diversité
botanique. Elle supporte des espèces de plantes d'un
intérét botanique particulier en raison de leur
répartition limitée ou discontinue.
3.1.7. Faune
La faune de Korup est très riche et diversifiée.
Elle compte 33 familles de mammifères regroupant 161 espèces
différentes. Parmi les grands mammifères, elle incluse
également le quart de tous les primates africains d'où
l'importance du site pour la conservation des primates menacés tels que
le drill et le colobe bai de Preuss. La zone renferme un grand nombre
d'espèces courantes dans la forêt guinéo-congolaise parmi
lesquelles l'éléphant de forét Loxodonta africana
cyclotis, le buffle de forêt Syncerus caffer nanus et des
espèces à distribution plus réduite incluant des
espèces endémiques donc l'angwantibo de Calabar Arctocebus
calabarensis, drill Mandrillus leucophaeus et le colobe bai de
Preuss Piliocolobus preussi (MINFOF, 2008). La présence des
hippopotames Hippopotamus amphibius a été
signalée dans la rivière Munaya
(Reid, 1989). La zone renferme également 55
espèces de chauves-souris (MINFOF, 2008), 47 espèces de rongeurs
(MINFOF, 2008), 410 espèces d'oiseaux regroupées dans 53 familles
(MINFOF, 2008) dont au moins 40 notamment le perroquet gris Psittacus
erithacus (chassé pour l'exportation) sont
considérées comme étant menacées (MINFOF, 2008). Il
a été estimé que la zone renferme 950 espèces de
papillons, dont seules 480 ont été répertoriées
à ce jour (MINFOF, 2008). Certaines espèces parmi lesquelles
Euriphene schultzei et Thermoniphans bibundana sont
considérées comme étant endémiques à la
région située entre la Cross river et la rivière Sanaga
(MINFOF, 2008). On y rencontre également 82 espèces de reptiles,
92 espèces d'amphibiens (taux d'endémisme élevé),
89 espèces de grenouilles et crâpeaux (huit ne sont pas encore
décrites), deux espèces de tortues terrestres, trois
espèces de crocodiles et 55 espèces de serpents, sans oublier les
130 espèces de poissons (MINFOF, 2008).
3.1.8. Milieu humain
La population de la zone se répartit en 28 villages,
soit 5 villages dans le parc et 23 villages dans la ZP. Linder (2008)
cité par MINFOF (2008) estime à 2700 âmes l'ensemble de la
population des 28 villages du parc et de sa zone périphérique,
avec 900 personnes pour les cinq villages situés dans le parc. Mundemba
et le camp des travailleurs de PAMOL regroupent les plus grandes concentrations
humaines près de la ZP et sont reconnues comme étant des menaces
dans la partie Sud du parc. Les cinq villages à l'intérieur du
parc sont difficiles d'accès et tendent à être moins
peuplés (moins de 200 âmes par villages) à cause notamment
des difficultés d'accès au marché (MINFOF, 2008).
D'après Vabi (1999), il existe huit groupes ethniques dans la zone
(Korup, Bakoko, Batanga, Ngolo, Ejagham, Balondo, Badiko et Balong) et une
importante population Nigériane. L'ethnie Ejagham est celle qui domine
dans la zone Nord du parc où se situe la zone d'étude.
3.1.8.1. Institutions locales
Chaque village est dirigé par un chef assisté
d'un adjoint. Le chef, dans la plupart des cas est le plus instruit et ne
réside pas souvent dans le village. La langue commune dans la
localité est le pidgin. Parmi les institutions qui influencent la prise
de décision dans les villages, on peut citer le Chef adjoint, le conseil
traditionnel, le chef de quartier, les diverses associations de
développement. Pour avoir accès aux services des institutions
gouvernementales, les populations doivent se rendre dans l'un des centres
urbains les plus proches à savoir Mamfé, Nguti, Mundemba, Ekondo
Titi ou Kumba.
3.1.8.2. Activités humaines
Les activités humaines recensées dans la zone sont
l'agriculture, la péche, le ramassage des produits forestiers non
ligneux, l'élevage, la chasse et le commerce.
La forme d'agriculture prédominante est l'agriculture
itinérante sur brülis les cultures de rentes (cacao, café,
palmier à huile) y sont cultivées tout comme les cultures
vivrières (manioc, macabo, plantain, banane). Une famille moyenne
possède 5-8 ha de terrain, Mais de façon générale,
seuls deux hectares sont cultivés et reste des terres étant mis
en jachère. La main d'oeuvre utilisée est familiale et parfois
étrangère (nigériane). Le manioc produit ici est
abondamment transformé en gari pour ravitailler les marchés
environnants. Les arbres fruitiers à l'instar des oranges sont
également cultivés dans la région.
Les poissons capturés dans les activités de
pêche sont largement consommés et représentent la plus
importante source de protéines pour les femmes et les enfants (Malleson,
2000). La péche a pris de l'importance comme activité lucrative
pour les hommes (Vabi, 1999). Mais, la pêche reste une activité de
subsistance même si le surplus de poisson est vendu (Infield, 1988). La
péche ici est une activité saisonnière avec une baisse
d'activités pendant les mois pluvieux (juillet, août, septembre).
Les techniques utilisées pour la pêche sont variables et
regroupent : la pêche à la ligne, la pêche au filet, la
pêche à la nasse et l'empoisonnement des ruisseaux et des
rivières par des toxines végétales issues de la
macération de fruits de Strychnos aculeata, Blya
supida et Massularia acuminata (Reid, 1989) et par des produits
chimique tel que le Gamaline.
La collecte des produits forestiers non ligneux
représente traditionnellement une source majeure de revenus pour les
femmes et progressivement pour les hommes et les enfants. Les produits
collectés englobent les noix de kola Cola et Garcinia spp.,
l'oignon traditionnel Afrostyrax lepidophyllus, le moabi
Baillonella toxisperma, la mangue sauvage Irvingia
gabonensis, l'eru Gnetum spp., les noisettes Poga
oleosa, le njansang Ricinodendron heudelotti, les «chewing
sticks» Garcinia mannii et Massularia acuminate, les
vins prélevés à partir du raphia Raphia
hookeriana et du palmier à huile Elaeis guineensis et
plusieurs autres plantes médicinales. La mangue sauvage, l'eru et le
njansang ont une grande valeur économique et leur collecte dans la
forêt, les champs et la jachère attire de plus en plus les hommes
et les enfants en raison de la baisse des prises et des nombreux risques
liés à la chasse (MINFOF, 2008).
La chasse ici est une activité à plein temps,
bien qu'elle connaisse un ralentissement des activités pendant les
périodes d'intenses travaux champêtres. La viande de brousse reste
la source de protéine la plus importante dans les villages situés
à l'intérieur et autour du parc. Les instruments de chasse les
plus utilisés sont les armes à feu (fabriquées localement
et très
rependues dans la zone) et les pièges. La chasse se
fait de jour et de nuit avec l'usage des lampes frontales. L'important commerce
qui s'est développé autour de cette activité assure
l'approvisionnement en viande des marchés de Mundemba, Tombe, Mufako
Batanga, Abat, Manyemen, Ajayuk Ndip au Cameroun et Ekongnaku au Nigeria (Vabi,
1999). La chasse procure une quantité de viande égale à
120 kg/an à chaque individu dans les villages situés à
l'intérieur du PNK (Infield, 1988). Toutefois, la chasse reste une
activité génératrice de revenues plutôt qu'une
activité de subsistance. Dans les villages situés à
l'intérieur du PNK, la quantité d'animaux prélevés
par les chasseurs est estimée à 270.000 kg / an (soit plus de
29.000 individus) (MINFOF, 2008). Les animaux les plus prélevés
sont le céphalophe bai Cephalophus dorsalis,
le céphalophe bleu Cephalophus monticola et le porc-épic
Atherurus africanus. Le colobe bai de Preuss Piliocolobus
preussi, le drill Mandrillus leucophaeus, le léopard de
forêt Panthera pardus et pangolin géant Smutsia
gigantea sont vulnérables à la chasse et dans certaines
zones, ils sont localement éteints (Infield, 1988).
En plus des activités sus citées, les
populations de Korup pratiquent du commerce à petite échelle et
l'exploitation frauduleuse du bois. Beaucoup de jeunes se sont lancés
dans la production, l'achat et la vente de l'huile de palme en raison de sa
forte consommation et de l'augmentation de son prix dans les marchés
locaux.
3.1.9. Exploitation forestière dans la
zone
Deux compagnies forestières, TRC et WIJMA, exploitent
respectivement les UFA 11- 001 (TRC) et 11-005(WIJMA) situées en
périphérie Nord-est du PNK. En plus du payement des taxes, ces
exploitants forestiers s'engagent dans leurs cahiers de charge à assurer
la
maintenance des routes, à construire des centres de
santé et des points d'eau potable.
L'administration du parc a signé avec ces
sociétés forestières des accords lui permettant de
bénéficier du soutien de ces dernieres dans la construction et la
maintenance des postes de contrôle forestier et de chasse, dans les
patrouilles anti-braconnages et d'aider les exploitants à assurer une
exploitation à faible impact (MINFOF, 2008).
3.2. Méthodologie
3.2.1. Choix du site
Le choix de ce site a été motivé par
diverses raisons:
> il abrite un Parc National ; pour les populations
riveraines;
> les sources alternatives de revenus sont insufisantes et la
faune sauvage constitue la principale source de protéines animales;
> la ZP est dotée d'une grande richesse floristique et
faunique, avec un taux d'endémisme élevé;
> ce site est convoité par de nombreuses
sociétés d'exploitation forestière qui exploitent de
nombreuses UFA;
> la chasse n'est pas contrôlée d'où le
besoin d'envisager des moyens de gestion durable de la faune.
3.2.2. Données secondaires
Les données secondaires ont été
tirées des documents relatifs à la zone d'étude et au
thème. Pour ce faire, la bibliothèque du Département de
Foresterie, la bibliothèque centrale de l'Université de Dschang
et internet ont été mis à contribution.
3.2.3. Données primaires
La collecte des données primaires s'est
focalisée sur des informations relatives à l'abondance, la
distribution spatiale, la perception et les menaces des primates diurnes dans
la zone d'étude.
3.2.3.1. Préparation du site
Le site a été divisé en trois zones en
fonction de l'éloignement du parc : le site 1 est celle comprise dans le
PNK, le site 2 regroupe les villages les plus proches du parc (Basu, Bajoh,
Bakut) et le site 3 regroupe les villages les plus éloignés du
PNK (Osselle, Mgbegati, Abat, Bayip-ossing) (voir Figure 2). Cette division du
site a permis d'observer l'évolution de l'abondance des primates et des
activités anthropiques du parc vers la zone périphérique.
Dans le but d'inventorier les primates, des activités anthropiques et
des plantes portant des fruits, deux méthodes ont été
utilisées celles de transects linéaires et celles de recces.
Seize transects permanents ont été utilisés. Ces transects
sont répartis dans les différents villages que sont Mgbegati
(site 3), de Bajoh (site 2) et dans le PNK (site 1) (voir Figure 2) et mesurent
2 km de long chacun, à l'exception de deux d'entre eux qui, à
cause des obstacles que constituaient les rivières, ne mesuraient que
1,8 et 1,95 km. Chacun de ces transects a été parcouru quatre
fois en cinq mois pour un effort de 127 km. Seize pistes préexistantes
(pistes de chasses, pistes villageoises et anciens transects), en raison de
deux pistes par village, ont également été parcourues deux
fois chacune pour un effort de 98,232 km. Pour la réalisation de ces
travaux d'inventaire, un total de 225,232 km a été parcouru.
Les deux méthodes d'inventaire ont été
combinées dans le but de maximiser leurs avantages respectifs. La
méthode de transect linéaire est celle qui fournit les
résultats les plus fiables, mais nécessite beaucoup d'efforts
pour la mise en place et l'entretien des transects tandis que les recces
permettent la collecte des données sur des pistes préexistantes
(pistes de chasse, pistes d'éléphants, pistes villageoises) ; ils
donnent de ce fait des résultats biaisés mais permettent de
collecter des données sur une grande surface en un temps réduit.
De plus, les recces ont une influence moins destructrice sur la forêt
comparée aux transects linéaires (White et Edwards, 2000).
Pour ne pas perturber les animaux et biaiser les
résultats pendant la collecte des données, une équipe,
composée d'un boussolier et de deux machetteurs, a nettoyé les
transects plusieurs jours avant la collecte des données. Les
coordonnées des points de départ et d'arrivée des
transects ont été relevées à l'aide d'un GPS.
Réserve forestiére
Zone 1
Zone 2 Zone 3
Figure : Présentation des transect et recces dans
la zone d'étude
3.2.3.2. Collecte des données
La collecte des données sur les transects s'est faite
de façon presque identique à celle sur les pistes, la seule
différence étant que les recces ne nécessitent pas le
relevé des distances perpendiculaires. Les données ont
été collectées par une équipe composée d'un
pisteur et d'un releveur. Les personnes recrutées dans les villages
étaient celles qui ont été formées et qui ont
participé au programme de »Suivi de la faune
sauvage» mené par le projet Korup de 1999 à
2003. Les recensements des animaux proprement dits commençaient entre
6h30 et 9h00 (car
l'inventaire commençait parfois après les pluies
du matin qui s'achevaient généralement après 8h) et se
terminaient vers 18h. La vitesse de progression moyenne pendant les inventaires
était d'environ 1 km/h. Lorsque le point de départ du transect
était repéré sur le terrain, les membres de
l'équipe se déplaçaient dans la direction indiquée,
parcourant le transect ou la piste (dans le cas des recces) le plus
silencieusement possible, regardant et écoutant de tous les
côtés pour détecter d'éventuels animaux. Des
arrêts étaient faits toutes les 10 minutes pour écouter les
cris des primates. Seuls les petits primates, suffisamment bruyants et
détectables permettent un suivi des populations par observations diurnes
directes (UICN, 2008). En ce qui concerne les grands singes, les techniques
basées sur les comptages directs sont difficilement applicables en
forêt dense, vu le faible taux de contact consécutif à une
faible visibilité et à la difficulté d'approcher
suffisamment la plupart des espèces (Buckland et al., 1993;
White et Edwards, 2000). Au vu des raisons sus évoquées, le
comptage des chimpanzés devait se faire via le comptage des nids et la
densité des nids devait ensuite être convertie en densité
animale (White et Edwards, 2000). Toutefois, les chimpanzés
détectés l'ont été par vocalisation. Quand un
animal, un groupe d'animaux, une activité anthropique ou un arbre
portant des fruits était vu, les informations suivantes étaient
notées sur des fiches de collecte de données
préétablies (Annexe 1) : l'heure d'observation, le signe
indicateur, l'age de l'indice, l'espèce, le nombre d'individus, la
hauteur au-dessus du sol, la distance perpendiculaire entre l'axe du transect
et l'axe passant par la position de l'animal (ou le lieu où l'animal a
été vu avant tout mouvement), la distance le long du transect ou
de la piste, le type d'habitat, la position GPS du point de rencontre avec
l'espèce, l'activité de l'animal au moment de la rencontre, les
noms ou les codes des arbres en fructification et leur position GPS.
Ont été considérées comme appartenant
à un même groupe, les formations dont les individus étaient
spatialement distants de moins de 50 m.
3.2.3.3. Distribution spatiale des primates
La distribution spatiale des primates a été
déterminée à partir des coordonnées GPS, des points
de rencontre avec les différents groupes pendant les inventaires. Ces
coordonnées ont permis de constituer une carte de distribution spatiale
de toutes les espèces de primates diurnes rencontrées pendant
l'étude.
3.2.3.4. Détermination des facteurs qui
influencent la distribution des primates diurnes dans la zone d'étude et
les menaces
Les données collectées sur les transects ont permis
de calculer les Indices Kilométriques d'Abondance (IKA) des
activités humaines, des arbres portant des fruits et des primates dans
la
zone d'étude. Les corrélations entre l'abondance
de plantes porteuses de fruits et l'abondance des primates tout comme celles
entre l'abondance des différentes activités humaines et celle des
primates diurnes ont fourni une idée sur le type de relation entre les
variables de l'étude. Les données d'inventaire associées
à celles des questionnaires ont fourni des informations sur la pression
humaine et les autres facteurs qui menacent les primates diurnes dans la zone
d'étude.
3.2.3.5. Perception villageoise des primates diurnes dans
la zone d'étude
Les données de la perception villageoise sur les
différents primates diurnes ont été collectées
à partir d'un questionnaire et des observations dans la zone
d'étude. Un exemplaire de ce questionnaire est présenté en
Annexe 3. Ce questionnaire porte sur la chasse en général, la
chasse aux singes et la vision qu'ont les chasseurs par rapport aux primates
dans la zone.
38 chasseurs ont été interviewés parmi
les 69 présents dans l'ensemble des 7 villages. Seul les chasseurs au
fusil ont été considérés dans le cadre de cette
etude car se sont eux qui chassent effectivement les singes. Ils ont
été interviewés de façon individuelle pour
éviter que les réponses des uns n'influencent celles des
autres.
3.2.4. Analyse des données
3.2.4.1. Estimation de l'abondance et de la
densité des primates diurnes
N'ayant pas obtenu les 30 groupes nécessaires pour
utiliser le programme Distance 5.0 (Laake et al., 1994), les
différentes données collectées sur les transects et les
recces ont été analysées ensemble à l'aide du
logiciel Excel pour le calcul des Indices Kilométriques d'Abondance
(IKA) en utilisant la formule suivante:
IKA = N/D avec
N = nombre d'observations ; D = distance parcourue
Les densités quant à elles ont été
calculées par la méthode King en utilisant uniquement les
données collectées sur les transects. La formule suivante est
celle utilisée pour ce calcul :
D = Z/2XY avec
Z : Nombre d'individus de l'espèce observée ;
X : Longueur totale de tous les transects ;
Y : Distance moyenne à angle droit des lignes de marche de
tous les individus de l'espèce observée.
En utilisant le logiciel Statistica 8.5, les
différences entre les moyennes d'IKA ou de densités ont
été testées grace au test d'ANOVA auquel a
été associé le test de Duncan à un seuil dans le
but d'estimer les différences statistiques entre les différents
sites de la zone d'étude.
3.2.4.2. Cartographie de la répartition des
primates, des activités humaines et des plantes en
fructification
Afin de déterminer la distribution spatiale des
différentes espèces de primates recensées, l'ensemble des
données géo-référencées collectées
pendant les inventaires ont permis grâce au logiciel Mapinfos 8.5 de
générer une carte de distribution géo-spatiale permettant
la localisation les différents points de rencontre avec les
espèces de primates.
3.2.4.3. Détermination des facteurs qui
influencent la distribution des primates
Le logiciel Statistica 8.5 a permis de calculer et de tester
les corrélations entre l'abondance de chacune des espèces de
primates et celles des différentes activités humaines. La
relation entre la présence des activités anthropiques ou celle
des plantes porteuses de fruits et la distribution des primates s'est
évaluer par l'interprétation des coefficients de
corrélation calculés par la formule de Pearson :
r = [?XY-XY/n]
/[?X2-X2/n]1/2[?Y2-Y2/n]1/2
avec :
r: le coefficient de corrélation ;
X: la valeur moyenne d'IKA des primates ;
Y: la valeur moyenne d'IKA des activités anthropiques ou
des arbres portant des fruits ; n: le nombre de paires d'observations.
3.2.4.4. Perception villageoise sur les primates diurnes
dans la zone d'étude
Les données collectées à travers les
questionnaires ont été analysées en utilisant des
statistiques descriptives du logiciel Microsoft Excel 2007. Leurs
interprétations, associées à celle des données sur
l'abondance, ont donné un aperçu sur des menaces et de la
perception villageoise sur les différentes espèces de
primates.
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