ABSTRACT
A study on diurnal primates was conducted between May and
September 2010 in seven villages in the North-East periphery of Korup National
Park (KNP). The objective was to contribute to a better management of diurnal
primate populations through an updated database. This study was specifically
aimed at estimating the abundance of diurnal primates, except for drills, to
determine the factors influencing the spatial distribution of primates, to map
the spatial distribution of different species of diurnal primates and to
identify threats and the village perception on primates in the study area.
Thus, a survey was conducted on 16 transects and 16 recces paths distributed in
the study area and in KNP, for a total effort of 225.232 km. A questionnaire
was also administered to 38 hunters of the seven villages prospected. It
appears that the abundance of diurnal primates continues to decline compared to
data collected from previous surveys in the area. Cercopithecus nictitans
(0,209 #177; 0,221), Cercopithecus mona (0,221#177;0,213) and
Cercopithecus erythrotis (0,131 #177; 0,179) are the most abundant
primates. The distribution of primates is influenced by the availability of
fruits and human activities. To date, species such as Cercocebus torquatus
(0,014#177;0,062), Pan troglodytes (0,009 #177; 0,053) and
Piliocolobus preussi (0,005 #177; 0,029) have found refuge in some remote
areas where they continue to be hunted. The abundance of diurnal primates
decreases from inside to the periphery of KNP. In addition, seen as easy game
to hunt and as a source of income, primates are not really protected by taboos.
Indeed, although certain species of diurnal primates are perceived as "animal
totems», customs and traditions which are losing their values have no real
effect on their conservation because the few existing restrictions on hunting
and consumption of these animals are scorned by almost all the villagers.
Primates in the study area are threatened by factors among which the
destruction of habitat through agriculture and logging, excessive hunting,
bushmeat and young primate trade. The control of hunting weapons and the fight
against poaching are strongly recommended, as well as a community-based
wildlife management sheme to counteract the disappearance of diurnal primate
species through the creation of a community hunting area in the zone.
Keywords: Spatial distribution; Inventory;
Threats; Diurnal primates. ; Korup National Park
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
1.1. Contexte
En 2007 l'UICN, dans sa liste des 25 espèces de
primates les plus menacées au monde, avait retiré certaines
espèces, à l'instar du gorille des plaines orientales, qui y
figuraient pourtant en 2005. En effet, une certaine attention avait
été portée à leur détresse et diverses
études portant sur, la détermination de la distribution spatiale
et du statut de conservation, l'évaluation des menaces sur les
éspéces sans oublier la sensibilisation environnementale avaient
été menées. Ces études, qui par ailleurs
s'inscrivent dans le cadre de la conservation de la biodiversité, ont
souvent été menées dans la zone de Korup et ont largement
contribué à la connaissance de l'immense biodiversité de
ladite zone qui a acquis de ce fait une renommée internationale. Cela
justifie le nombre élevé de recherches effectuées dans la
zone. En effet, le Parc National de Korup (PNK) et sa Zone
Périphérique (ZP) renferment un nombre impressionnant de
formations végétales, d'espèces végétales et
animales dont le quart de toutes les espèces de primates d'Afrique
(Waltert, 2000).
Concernant les primates diurnes, on en dénombre huit
espèces dont plusieurs sont menacées et soumises à une
pression de chasse si forte que certaines de ces espèces sont devenues
rares dans certaines zones. Ainsi, Edwards (1992) et Usongo (1997) observent
sept espèces de primates diurnes dans le PNK. En référence
à la liste rouge des espèces menacées de l'UICN, 75% des
primates diurnes du PNK sont menacés (Astaras, 2009). Le statut des
primates diurnes dans la zone de Korup tel que determiné par Usongo en
1997, est comme suit :
> espèces menacées : chimpanzé Pan
troglodytes et colobe bai de preuss
Piliocolobus preussi;
> espèces rares : moustac à oreilles rousses
Cercopithecus erythrotis et cercocèbe à collier blanc
cercocebus torquatus ;
> espèces non menacées : hocheur
Cercopithecus nictitans, Mone Cercopithecus mona et
Cercopithèque pogonias cercopithecus pogonias.
1.2. Problématique
La chasse et les autres activités humaines continuent
de modifier l'habitat des primates dans la zone de Korup (Edwards, 1992).
Très peu d'études ont porté sur le statut des primates
diurnes dans la zone. Ainsi, à l'exception du drill Mandrillus
loeucophaeus étudié par Astaras (2009), il existe
très peu de données récentes sur l`abondance et le statut
de conservation des espèces de primates diurnes dans la zone. La
question mise en relief par ces observations est
celle de savoir si la situation (abondance, distribution
spatiale) des différentes espèces de primates dans la zone de
Korup est telle que ces espèces puissent continuer à faire face
à l'énorme et grandissante pression humaine qui sévit dans
la zone. Ainsi, conscient du fait qu'il est nécessaire dans le cadre
d'une gestion rationnelle de bien connaître la situation actuelle et les
tendances évolutives de la ressource (primates diurnes), il est surtout
question pour la présente étude de savoir :
> Quelle est l'abondance des primates diurnes à la
périphérie Nord-Est du PNK ?
> Quelle est la distribution spatiale des primates diurnes
à la périphérie Nord-Est du PNK ?
> Quels sont les facteurs qui influencent la distribution
spatiale des primates diurnes à la périphérie Nord-Est du
PNK ?
> Quelle est la perception villageoise sur les
différentes espèces de primates diurnes de la zone d'étude
?
1.3. Objectifs
1.3.1. Objectif global
L'objectif global de l'étude est de contribuer à
une meilleure gestion des populations de primates diurnes dans la zone de Korup
à travers la determination de leur statut de conservation.
1.3.2. Objectifs spécifiques
Spécifiquement, Il s'est agit de :
> Estimer l'abondance des primates diurnes, à
l'exception du drill, en périphérie Nord-est du PNK ;
> Cartographier la distribution spatiale des
différentes espèces de primates diurnes dans la zone
d'étude ;
> Identifier les facteurs qui influencent la distribution
spatiale des primates, ainsi que les menaces, dans la zone d'étude ;
> Documenter la perception villageoise sur les primates dans
la zone d'étude.
1.4. Importance de l'étude
La présente étude fournit de nouvelles
informations sur les populations de primates diurnes dans la
périphérie Nord-Est du PNK, notamment sur les effectifs et des
tendances. Elle permettra une meilleure gestion des ressources (primates
diurnes) à travers une meilleure orientation des priorités et des
activités de gestion. Elle constitue aussi une des études
initiées par
le projet Volkswagen devant contribuer à la mise en place
d'une zone de chasse communautaire pour enclencher une gestion durable de la
faune sauvage dans la zone.
1.5. Limites de l'étude
L'étude s'est entièrement déroulée
en saison pluvieuse. Il est impératif de poursuivre la même
étude en saison sèche pour avoir des données annueleles
celles-ci n'étant fiable qu'en saison de pluies.
Il n'était pas possible de collecter les
échantillons de lianes sur la cime des arbres, vu la hauteur de la
canopée; cela aurait pourtant permis d'avoir une identification
précise de certaines espèces consommées par les primates
dans la zone.
CHAPITRE 2. REVUE DE LA LITTERATURE 2.1.
Définition de quelques concepts
2.1.1. Aire protégée
Une aire protégée est une zone
géographiquement délimitée et gérée en vue
d'atteindre des objectifs spécifiques de conservation et de
développement durable d'une ou de plusieurs ressources données
(MINEF, 1994).
2.1.2. Zone tampon
La zone tampon est une aire protégée
située à la périphérie de chaque parc national,
réserve naturelle ou réserve de faune destinée à
marquer une transition entre ces aires et les zones où les
activités cynégétiques, agricoles et autres sont librement
pratiquées (MINEF, 1994).
2.1.3. Ecosystème
L'écosystème est un complexe dynamique
formé de communautés de plantes, d'animaux et de micro-organismes
et de leur environnement non vivant qui par leur interaction forment une
unité fonctionnelle (MINEF, 1994).
2.1.4. Habitat
D'après Ramade (1993), l'habitat est le lieu où vit
une espèce donnée dans son environnement immédiat à
la fois biotique et abiotique.
2.1.5. Diversité biologique
Au sommet de Rio de Janeiro en 1992, la diversité
biologique a été définie comme étant la
variabilité des organismes vivants de toute origine y compris les
écosystèmes terrestres, marins, aquatiques et les complexes
écologiques dont ils font partie. La notion de diversité est
liée à ce que les naturalistes appellent subjectivement la
richesse d'un peuplement (Ramade, 1993). La diversité peut être
divisée en trois catégories hiérarchiques : gène,
espèce et écosystème.
2.1.6. Primates
Le terme primates désigne un ordre de mammifères
placentaires euthériens. Ils se caractérisent par un
neurocrâne considérablement développé par rapport
à leur massif facial, des orbites en position facial et entourer d'un
anneau osseux complet. Le pouce de la main (pollex) est toujours opposable
tandis que celui du pied (hallux), excepté celui de l'homme
présente une pseudo-opposabilité. La main est capable d'ample
mouvement de supination et de pronation caractéristique d'une adaptation
primordiale à l'arboricolisme, l'extrémité des membres est
pentadactyle avec des ongles plats au lieu des griffes chez la plupart des
primates (Betrand, 1998).
2.1.7. Primates diurnes
L'expression «primates diurnes» est utilisée
pour désigner tous les primates actifs pendant le jour.
2.1.8. Chasse
La chasse est toute action qui consiste à
(République du Cameroun, 1995):
> Poursuivre, tuer, capturer un animal sauvage ou mener des
expéditions à cet effet ; > Photographier et filmer des
animaux sauvages à des fins commerciales.
2.1.9. Braconnage
Le braconnage est toute action de chasse sans permis, en
période de fermeture, en des endroits réservés ou avec des
engins ou des armes prohibées (MINEF, 1995).
2.1.10. Gestion durable
La gestion durable consiste à utiliser les
foréts d'une manière et à une intensité telles
qu'elles maintiennent leur diversité, leur productivité, leur
capacité de régénération et leur vitalité.
Cette gestion durable des forêts doit également permettre de
maintenir leur capacité de satisfaire actuellement et pour le futur des
fonctions écologiques économiques et sociales pertinentes au
niveau local, national et mondial (FAQ, 1994).
2.1.11. Statut d'une espèce
Le statut d'une espèce peut être défini comme
la situation particulière de cette espèce à un moment
donné.
2.2. Classification des primates
D'après Bertrand (2001), l'ordre des primates
appartient à l'embranchement des vertébrés, à la
classe des mammifères. Il se divise en deux sous-ordres : les Prosimii
ou prosimiens et les Anthroponidae.
Les prosimiens se divisent en deux infra-ordres les loriformes
qui regroupent quatre familles : lemuridae, indriidae, megalopidae et
daubentoniidae, et les losiriformes qui regroupent trois familles :
cheirogaleidae, galagidae et losiridae.
Les anthroponidae quant à eux se divisent en deux
infra-ordres les platyrrhinii ou platyrhiniens ou singes du nouveau monde
(Amérique du sud et du centre) et les catarrhinii ou catarrhiniens ou
singes de l'ancien monde (Afrique, Asie).
Les platyrrhinii se divisent en trois familles
(cébidés, Callithricidés, Atelidés) :
Les cébidés regroupent quatre genres, le genre
Cebus (singe de taille moyenne à queue préhensible); et
trois autres genres de singes à petite taille : Saïmiri
(singes écureuils) ; Aotus (douroucouli), le seul primate
supérieur nocturne ; et le Callicebus (titis).
Les Callithricidés qui regroupent : Les tamarins
(Saguinus et Leontopithecus), les marmosets (Ouistitis,
Callithrix et Cebuella) et le genre Callimico.
Les Atelidés qui incluent les Atelinés :
singes-araignés (Ateles), miriquis (Brachyteles),
singes-laineux (Lagothrix) et les hurleurs (Alouatta) ; et
les pithécinés qui incluent les Saquis (Pithecia et
Chiropotes) et les ouakaris (Cacajao).
Les catarrhinii se divisent en deux supers familles les
Cercopithecoidae et les Hominoidae. Les cercopithecidae se divisent en
Cercopithecinés et Colobinés.
Les Cercopithecinés se regroupent en deux tribus : les
cercopithecini et les papionini. Les
premiers englobent les singes forestiers, excepté le
Patas (Erythrocebus patas) et le vervet (Cercopithecus
aethiops). Elle a un seul genre qui donne le rang de sous-genres au
talapoin (Miopithecus talapoin), au singe gris-vert des marrais
(Allenopithecus nigroviridis) et au singe rouge (Erythrocebus
patas). La tribu des papionini regroupe cinq genres : Papio
(babouins), Theropithecus (geledas), Cercocebus (comprend
deux espèces : torquatus et albigena),
Lophocebus, et Macaca.
Les colobinés se divisent en quatre genres :
Colobus (strictement Africain) et trois genres asiatiques
Presbytis, Pygathrix et Nasalis.
Les hominoidae ou anthropomorphes se repartissent en quatre
familles : Hylobatidés (genres Hylobates et Nomascus
qui comprennent tous les gibbons concolor), pongidés qui comprennent le
genre Pongo, panidés (ensemble formé par les genres
Pan et Gorilla) et hominidés qui referment les genres
Homo.
2.3. Synthèse de quelques
études
2.3.1. Espèces de primates diurnes
présentes dans la zone d'étude
Le PNK a une très grande richesse spécifique,
reflétée ici par la présence en son sein de quatorze
espèces de primates parmi lesquelles neuf espèces diurnes dont le
Cercocèbe à collier blanc Cercocebus torquatus, Moustac
à oreilles rousses Cercopithecus erythrotis, Mone
Cercopithecus m. mona, Hocheur Cercopithecus n. nictitans,
Cercopithèque pogonias Cercopithecus. p. pogonias, Guenon de
Preuss Cercopithecus lhoestis preussi (présent uniquement dans
la réserve forestière de Nta-ali), Drill Mandrillus
leucophaeus, Colobe bai du Cameroun Piliocolobus preussi,
Chimpanzé Pan troglodytes (MINFOF, 2008). Toutefois, seules les
cercocébe torquatus, moustac à oreilles rousses, mone, hocheur,
cercopithèque pogonias, drill et colobe bai du Cameroun, soit sept des
neuf espèces préalablement citées ont pu être
recensées dans le secteur Nord du PNK (Edwards, 1992; Waltert et
al., 2002). Un inventaire zoologique mené dans le PNK par Usongo
(1997) a également identifié la présence de sept
espèces dont Cercocébe torquatus, moustac à oreille
rousse, mone, hocheur, cercopithèque pogonias, colobe bai du Cameroun et
chimpanzé.
En majorité, les primates diurnes sont omnivores
à tendance frugivores, avec des variations saisonnières qui les
obligent parfois à consommer plus de feuilles et de bourgeons que de
fruits lorsque ces derniers se font rares : tel est le cas du chimpanzé
(Kingdon, 1997). Toutefois, le colobe bai du Cameroun reste essentiellement
frugivore (Usongo, 1992).
2.3.2. Abondance des primates diurnes dans la zone de
Korup
Des études sur l'abondance des primates diurnes ont
été menées dans la zone de Korup et les résultats
obtenus sont consignés dans le Tableau 1.
Tableau : Abondance des primates dans le PNK
(Waltert et
al., 2002) (Usongo, 1997) (Edwards,
1992)
individus/km groupes/km groupes/km2
individus/km2
Transect Transect
|
Transect (e t)
|
Cadrat (e t)
|
Transect (e t)
|
Cadrat (e t)
|
Taille moyenne du groupe
|
Espèces
|
|
Vues
|
Entendues
|
|
|
|
|
|
Cercopithecus
|
|
|
|
|
|
|
|
|
nictitans
|
75
|
0.07
|
0.19
|
0,01 (1,91)
|
1,52 (0,79
|
16,2
|
18,5
|
16
|
C. pogonias
|
42
|
0.04
|
0.11
|
0,50 (1,11)
|
0,84 (0,50)
|
8,0
|
13,4
|
16
|
C. erythrotis
|
16
|
0.01
|
--
|
0,29 (0,88)
|
0,33 (0,49)
|
4,6
|
4,8
|
16
|
C. mona
|
47
|
--
|
0.03
|
0,86 (1,49)
|
0,96 -0,61)
|
13,8
|
14,2
|
16
|
Cercocebus torquatus
|
2
|
--
|
0.01
|
--
|
0,04 (0,18)
|
--
|
0,8
|
21
|
Piliocolobus preussi
|
26
|
0.03
|
0.04
|
0,56 (0,01)
|
0,52 (0,40)
|
28,0
|
26,0
|
50
|
Mandrillus
|
|
|
|
|
|
|
|
|
leucophaeus
|
8
|
--
|
--
|
--
|
0,16 (0,33)
|
--
|
9,6
|
60
|
Pan troglodytes
|
--
|
--
|
--
|
--
|
--
|
--
|
--
|
|
Note : e t : écart type
Waltert et al. (2002) ont montré que bien que
la plupart des primates de la communauté de primates originelle de Korup
reste présent dans la zone d'étude; le colobe bai du Cameroun, le
drill et le cercopithèque pogonias ont connu une remarquable diminution
des effectifs entre 1990 et 2000 comme le confirme les données du
Tableau 1. Ils sont allés plus loin en disant que le drill et le colobe
bai du Cameroun font probablement face à une extinction locale.
2.3.3. Répartition des primates
diurnes
Le tableau 2 résume quelques aspects de la distribution
des primates diurnes présents dans la zone d'étude.
Tableau : Répartition des primates diurnes
rencontrés à Korup
Espèces Aire de distribution à Aire de
distribution en Afrique2
Korup (ha) 1
Cercopithecus nictitans 55-80 Rivière cross
à la rivière Sanaga
Cercopithecus mona -- Rivière volta à la
rivière Sanaga
Cercopithecus pogonias 55-100 Rivière cross
à la rivière Sanaga
Cercopithecus erythrotis 30-90 Rivière cross
à la rivière Sanaga
Colobus badius 16-53 Zone de Korup
Cercocebus torquatus 247 Ouest Nigeria au Gabon
Mandrillus leucophaeus 10 km2-20
km2 Rivière cross à la rivière Sanaga
Pan troglodytes -- Est-Nigeria à
Ouest-Cameroun
Source : 1(Edwards, 1992) ; 2(Waltert
et al., 2002)
2.3.4. Prélèvement des primates
diurnes
Usongo (1996) a estimé les prélèvements
de primates diurnes en fonction du mode de chasse dans la réserve
forestière d'Ejagham près du PNK. Ses résultats ont
montré que les prélèvements des primates se font
principalement au cours de la chasse diurne avec usage des armes à feu
(97% des prises). Le tableau 3 présente les taux de
prélèvements (Infield, 1988) et les taux de productions (Edwards,
1992) des primates diurnes dans le PNK.
Tableau : Productions et prélèvements
annuels des primates diurnes dans le PNK
Espèces
|
Productions max
|
Prélèvements soutenus
|
Prélèvements
|
|
(pmax)
|
(20 % pmax)
|
observés
|
|
(animaux/km/an)
|
|
(animaux/km/an)
|
Cercopithecus nictitans
|
1,75
|
0,35
|
0,90
|
Cercopithecus pogonias
|
1,08
|
0,22
|
0,04
|
Cercopithecus erythrotis
|
0,47
|
0,09
|
0,23
|
Cercopithecus mona
|
1,41
|
0,28
|
0,67
|
Cercocebus torquatus
|
0,08
|
0,02
|
0,08
|
Piliocolobus preussi
|
4,18
|
0,84
|
1,74
|
Mandrillus leucophaeus
|
1,54
|
0,31
|
1,36
|
Source : Edwards (1992)
|
|
|
|
A l'exception du cercopithèque pogonias, les taux de
prélèvement des différentes espèces de primates
diurnes sont supérieurs aux taux de prélèvement soutenus
qui représentent pourtant le niveau maximum pouvant être
prélevé dans l'optique d'une gestion durable. Notons que les taux
de production restent malheureusement inferieurs au taux de
prélèvements pour beaucoup d'espèces. La chasse
pratiquée par les populations vivant dans et autour du PNK
représente ainsi une menace d'extinction locale pour les primates dans
la zone (Edwards, 1992).
2.3.5. Statut de conservation des primates diurnes de la
zone de Korup
le statut de primates diurnes dans la région de Korup
n'est pas des plus envieux car l'étude d'Edwards (1992) a montré
que beaucoup de ces espèces font face à une forte pression de
chasse et risquent l'extinction si les conditions actuelles continuent de
prévaloir, Les espèces telles que le hocheur, le moustac à
oreilles rousses, le cercopithèque pogonias et le mone font face
à une destruction de l'habitat assez faible et une pression de chasse
forte tandis que, le cercocèbe torquatus , le chimpanzé et le
colobe bai du Cameroun font également face à une faible
destruction de l'habitat mais à une pression de chasse très forte
(Usongo, 1997).
L'UICN (2008) montre que six des huit espèces de
primates diurnes présentes dans la zone font face à une menace
d'extinction au niveau mondial notamment, le colobe bai de Preuss est en danger
critique, le chimpanzé et le drill sont en danger tandis que le
cercocèbe torquatus, le cercopithèque pogonias et le moustac
à oreilles rousses sont vulnérables.
La CITES (2009) classe le Cercopithecus m. mona, le
Cercopithecus p. pogonias, le Cercopithecus n. nictitans, le
Cercopithecus e. cameronensis, le Cercocebus t. torquatus, le
Piliocolobus preussi en annexe II tandis que le Mandrillus
leucophaeus, et le Pan troglodytes vellorusa sont classés
en annexe I.
Dans le but de contribuer à la protection de la faune
et de la biodiversité, le gouvernement camerounais à travers le
MINFOF a regroupé les espèces animales vivant à
l'intérieur de son territoire en trois classes de protection (A, B, C)
selon les modalités fixées par l'administration en charge de la
faune. Ainsi, le drill et le chimpanzé sont en classe A et
bénéficient d'une protection intégrale tandis que tous les
autres primates de la zone d'étude sont en classe C, leur chasse
étant ainsi réglementée par l'administration en charge de
la faune (Robinson, 2008).
Astaras (2009) estime la population de drill à 950-1450
drills dans le PNK et 2500-3000 dans la zone de Korup en général.
Toutefois, il souligne que l'habitat de ces animaux est de plus en plus
fragmenté et qu'ils sont soumis à une forte pression de
chasse.
2.3.6. Quelques paramètres écologiques
observés dans la zone Nord-Est du PNK
Le tableau 4 résume quelques paramètres
écologiques des primates diurnes observés dans la zone Nord-est
du PNK.
Tableau : Quelques paramètres écologiques
des primates diurnes observés dans la zone Nord-est du PNK
Espèces
|
Poids adulte (kg)
|
Taille du groupe
|
Aire de distribution (ha)
|
Déplacement journalier
(m)
|
Strate
|
Régime alimentaire
|
Male
|
Femelle
|
|
Cercopithecus
|
|
|
|
|
|
|
|
nictitans
|
6,6
|
4,2
|
7-20
|
55-80
|
1500
|
Arboricole
|
Omni/frug
|
C. mona
|
4,5
|
2,7
|
2-35
|
--
|
--
|
Arboricole
|
Omni/frug
|
C. pogonias
|
4,5
|
3,0
|
11-20
|
55-100
|
1600
|
Arboricole
|
Omni/frug
|
C. erythrotis
|
4,1
|
2,9
|
4-29
|
30-90
|
1200
|
Arboricole
|
Omni/frug
|
Piliocolobus
|
|
|
|
|
|
|
|
preussi
|
8,3
|
8,2
|
23-67
|
16-53
|
649
|
Arboricole
|
Folivore
|
Cercocebus
|
|
|
|
|
|
Semi-
|
|
torquatus
|
11,6
|
5.1
|
14-38
|
247
|
--
|
terrestre
|
Omni/frug
|
|
|
|
|
|
|
Terrestre
|
|
Mandrillus leucophaeus
|
40
|
--
|
25-77
|
10-20km2
|
2926
|
/semi- terrestre
|
Omni/frug
|
Source : (Edwards, 1992).
Notes : Omni/frug = omnivore/frugivore
2.3.7. Facteurs qui influencent la distribution des
primates
Les primates sont des animaux qui, comme toute entité
vivante, réagissent à des perturbations dans leur environnement
immédiat ce qui transparait clairement dans les variations de leur
répartition.
De Thoisy et Delcourt (2004) ont montré l'influence de
la chasse et de l'exploitation forestière sur la distribution des
primates suite à une observation des populations de primates dans la
forét de Coumani en Guyane, avant et après l'exploitation. Ils
ont constaté que les grands singes plus vulnérables à la
chasse étaient plus abondants dans les foréts exemptes
d'activités de chasse ; que les singes abandonnent les sites en cours
d'exploitation pour occuper les parcelles voisines et lorsque l'exploitation
forestière se déplace vers ces sites voisins, ils les quittent
pour revenir aux anciens sites déjà exploités ; que la
diversité spécifique et même la densité
intraspécifique diminuaient après exploitation ; que sous
l'action de la chasse, les espèces chassées continuaient à
décroître longtemps après l'exploitation tandis que celles
non chassées tendaient à retrouver leur équilibre. De
façon globale, les conclusions suivantes ont pu être tirées
:
> dans les forêts récemment exploitées,
les productions de fruits deviennent très irrégulières, du
fait de la modification des paramètres microclimatiques. Les
espèces frugivores, comme l'atèle, qui ne consomment pas les
fruits des espèces pionnières, sont quasiment absentes ;
> les espèces frugivores-folivores, comme les singes
hurleurs, peuvent persister, en modifiant la composition de leur régime,
grâce à une certaine plasticité alimentaire (De Thoisy et
Richard-Hansen, 1997) ;
> les espèces à régime
insectivore-frugivore, comme les tamarins, peuvent quantitativement se
maintenir ou même augmenter, avec une part d'insectivorie croissante dans
le régime alimentaire. Ce type de régime est aussi celui des
capucins, mais dans ce cas la pression de chasse indissociable de
l'exploitation forestière sur Counami fait que cette stabilisation
attendue des effectifs ne soit pas observée. Mais, lors d'autres
inventaires dans des forêts exploitées où la chasse
était moindre ou tout au moins focalisée sur les primates, des
densités assez fortes de capucins avaient été
relevées (De Thoisy, 2001).
La répartition des primates est aussi influencée
par le type d'habitat. En effet, l'habitat doit procurer une quantité
suffisante d'aliments à toute la population animale qu'il abrite. C'est
ainsi que les primates habitent différents types de forêt en
fonction de leur régime alimentaire. Certains, à l'instar du
babouin hamadryas, fréquentent les dépôts d'ordures et
d'autres sont attirés par les plantations agricoles ; ce qui leur vaut
la qualification de nuisible (De Thoisy et Delcourt, 2004).
Il faut noter que la répartition des primates est
influencée par les activités humaines (exploitation
forestière, chasse et activités agricoles) et par les
différents types d'habitats (Magdalena, 1995) qui sont eux-mêmes
liés à différents degrés de disponibilité en
nourriture.
2.3.8. Productions par espèce de
primates
La production des primates est fonction de quelques
paramètres dont la durée et la fréquence des cycles
d'oestrus qui sont fonction des facteurs environnementaux. Ce cycle est de 25
à 40 jours chez les primates d'Afrique et d'Asie (catarrhiniens), la
durée de la gestation est grande, relativement aux poids du corps. La
production des primates diurnes dans la zone de Korup est
présentée dans le tableau 3.
2.3.9. Menaces et perception villageoise des
primates
Dans la zone d'étude comme partout ailleurs dans le
monde, les populations de primates sont soumises à de nombreuses menaces
dont les plus récurrents sont la dégradation des habitats
(Edwards, 1992; Astaras, 2009) à travers l'exploitation
forestière, la création des voies de communication, la
transformation des terres forestières en terres agricoles. La chasse non
contrôlée reste une des menaces les plus importantes (Edwards,
1992; Astaras, 2009), accentuée par l'explosion démographique qui
s'accompagne d'une augmentation de la demande en viande de brousse près
des exploitations agricoles à proximité des zones de
conservation.
En dehors des travaux d'Astaras (2009), aucune étude ne
s'est attardée sur la perception locale en ce qui concerne les primates.
Parlant du drill et dans une certaine mesure d'autres espèces de
primates, il n'existe pas de tabou ou de croyances traditionnelles qui
protègent ces espèces. De plus les villageois pensent que ce sont
des bêtes faciles à chasser, dont la viande est de bonne
qualité et résout les problèmes d'anémies. Ces
gibiers sont ainsi très prisés dans les marchés (Astaras,
2009).
2.3. 10. Méthodes d'inventaire de primates
diurnes
La méthode des transects linéaires est la plus
utilisée en forêt pour estimer l'abondance de la faune mammalienne
qui inclut les primates diurnes. Dans cette méthode, une ligne droite
appelée transect est parcourue par une équipe qui note la
distance perpendiculaire (ri) entre l'objet observé et l'axe du
transect, la distance entre le point de départ du transect et le point
d'intersection entre l'axe du transect et la ligne qui lui est perpendiculaire
et qui passe par la position de l'indice observé. Dans son concept
théorique, la méthode des transects linéaires est un
modèle probabiliste et son application exige que les conditions
suivantes soient remplies (Gaillard et al., 1993):
· Tous les objets situés sur la ligne de marche
sont détectés;
· Les objets sont détectés à leur
position initiale avant tout mouvement éventuellement düà
une réponse à la présence de l'observateur;
· Les distances mesurées sont exactes;
· Les détections sont des évènements
indépendants;
· Aucun objet n'est compté plus d'une fois sur une
même ligne de marche.
Deux avantages sont associés à la méthode
des transects linéaires (Gaillard et al.,
1993):
· Aucune condition sur la répartition spatiale des
animaux n'est nécessaire. Le grégarisme des animaux augmente la
variance de l'estimation, mais ne biaise pas les observations;
· Un animal non compté n'introduit de sous
estimation systématique de la densité s'il se trouve en dehors de
l'axe de marche de l'observateur (Burnham et al., 1993). Ceci
confère à la méthode de transect linéaire une
meilleure efficacité et moins de biais.
La méthode des transects linéaires est souvent
associée à celle de recces ou marche de reconnaissances qui lui
est semblable. La différence entre les deux méthodes est que
pendant la collecte des données, les distances perpendiculaires ne sont
pas notées et les pistes de collecte de données ne sont pas
forcément droites dans le cas des recces.
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