Paragraphe 3 : L'engrenage de la violence
politique.
L'apathie des citoyens vis-à-vis de la chose
politique en général et des élections en particulier
s'explique dans une certaine mesure par la peur de la violence politique.
L'histoire politique du Mali de l'indépendance en 1960
à l'avènement de la IIIème République
s'est caractérisée par nombre de faits et
d'évènements politiques qui ont contribué à
créer chez nombre des citoyens une certaine méfiance à
l'égard de la politique.
Si au moment de la proclamation de l'indépendance du
Mali en 1960, les deux grands partis (l'US-RDA et le PSP) qui s'opposaient
à cette époque ont pu taire leur divergence pour proclamer
l'indépendance, les rivalités partisanes n'ont pas tardé
à se manifester de nouveau sur la scène politique jusqu'à
ce que le pays s'est retrouvé dans une situation de parti unique de
fait.
Pendant la première république, le pays a
été installé dans un cycle de règlement de compte
politique avec ses corollaires de persécutions d'opposants politiques et
de restriction des libertés fondamentales des citoyens.
La milice armée du régime de l'US-RDA au pouvoir
exerçait de véritables pressions psychologiques sur les
populations en vue de leur allégeance au régime.
A en croire à cette personne de troisième
âge interrogée qui nous a déclaré
que : « La politique a mal débuté au
Mali à cause de l'affrontement implacable entre l'US-ADA et le PSP et
les dérives autoritaires du parti au pouvoir... ».
Ces propos, nous montrent très clairement, combien la
répression politique caractérisait la vie politique malienne sous
la Ieme République.
En dépit de l'option économique de type
socialiste du Régime, le centralisme démocratique du Parti a
largement contribué à une sorte d'apathie politique et de
l'impopularité du pouvoir qui aboutit à son renversement le 19
Novembre 1968.
Au moment où le peuple se réjouissait de la
chute du régime socialiste du RDA, les putschistes de 1968 ont de leur
côté durci davantage la répression politique plus que leurs
prédécesseurs, en instaurant un régime militaire pur et
dur et un parti unique de droit (UDPM). Juste après le coup d'Etat, les
militaires du CMLN qui s'étaient engagés de rendre le pourvoir
aux civils au bout d'une brève transition de quelques mois, ont
finalement dirigé le pays pendant plus de deux décennies. Les
vingt années de règne de main de fer du Général
Moussa Traoré ont été caractérisés par une
gestion autoritaire du pouvoir avec ses corollaires d'arrestations, de
détentions arbitraires d'opposants voire d'assassinats sommaires des
personnes soupçonnées de tentatives de coup d'Etat.
On peut souligner ici que les très forts taux de
participation électorale observés sous la IIème
république s'expliquent surtout par le totalitarisme du parti unique
constitutionnel (UDPM).
Dans une telle situation politique, le citoyen n'a pas
beaucoup de marge de manoeuvre soit, il vote pour le parti unique soit, il
s'abstient avec tous les inconvénients que cela peut engendrer.
C'est dans ce contexte qu'ont eu lieu les
évènements de Mars 1991 où le peuple Malien a
décidé de passer à l'action en se révoltant contre
le régime en place.
Cette insurrection populaire fut donc réprimée
jusque dans le sang avec une centaine de mort et de blessés. C'est ainsi
qu'une partie de l'armée décide de déposer le
Régime de l'UDPM le 26 Mars 1991.
Dans ces évènements le peuple malien a
payé une lourde tribu pour l'avènement de la démocratie
pluraliste au Mali.
De là surgit naturellement la question de savoir
pourquoi une partie importante de l'électorat continue de s'abstenir
continuellement aux élections dans un contexte de libéralisme
politique garanties et après avoir tant revendiqué la
démocratie ?
Cette interrogation peut sous-entendre une autre : Est-ce
à dire que l'espace politique nationale n'est pas jusque là
à l'abri d'actes de violence à caractère
politique ?
Toutefois avec le passage à la démocratie
multipartite en 1992, il faut reconnaître que certaines formes de
violences à caractère politique ont connu une baisse
exponentielle.
Cependant, force est de constater que l'espace politique en
Africain, de façon générale, est caractérisé
par une extrême fragilité comme en témoignent les exemples
du Kenya et du Zimbabwe où les violences post-électorales avaient
occasionné des centaines de morts en fin 2007. C'est aussi, le cas du
Zimbabwe où les affrontements post-électoraux entre les
partisans de la majorité et ceux de l'opposition ont occasionné
d'importantes pertes en vie humaines en juin 2008. Ici, il faut souligner que
les liens entre violence politique et participation électorale restent
évidents et résident au fait que le citoyen perçoit
négativement la politique, en général, comme un champ de
violence où les hommes politiques sont susceptible de recourir à
n'importe quel moment pour le pouvoir ou pour régler des comptes
politiques. Il n'est pas rare de voir en Afrique des hommes politiques
appelés leurs militants à descendre dans les rues en dehors de
toute légalité.
L'observation de la politique en Afrique permet de voir qu'il
existe une certaine insuffisance de culture démocratique aussi bien
chez certaines élites dirigeantes que chez une partie
considérable de la population.
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