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Le concept de développement durable : le cas de l'Afrique subsaharienne

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par Vincent Thierry BOUANGUI
Université de Reims Champagne - Ardenne - Diplôme d'étude approndie 1995
  

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B-LES IMPLICATIONS THEORIQUES

La première implication est l'intégration des considérations de l'environnement dans les orientations économiques. Cette intégration doit se faire à tous les niveaux: international, régional, national et local. L'idée est de profiter de la symbiose des considérations économiques et sociales dans la prise de décisions afin de tirer les conclusions qui puissent être à la fois louables pour l'environnement et pour l'économie, car les deux considérations ne sont pas contradictoires.

A titre d'exemple, un projet hydraulique ne peut être uniquement envisagé sous le seul angle de la production de l'électricité, il faut également s'arrêter à ses effets sur l'environnement local et sur les moyens d'existence des populations concernées. Ainsi l'abandon d'un tel projet pourrait être une mesure de progrès et non de régression s'il consistait, notamment à perturber un système écologique rare. (23) Il y a aussi que certaines politiques visant à préserver les terres consacrées aux cultures et protéger les forêts, améliorent les perspectives du développement agricole à long terme. Mieux encore, la préservation des sites à vocations touristiques peut avoir à long terme des avantages économiques de par le commerce et les chaînes hôtelières qui s'y grefferont. Il convient donc de traiter les entreprises et les industries en tenant compte des liaisons intersectorielles et des politiques environnementales locales. Ceci permet d'éviter que certaines décisions de direction d'une entreprise ou d'un commerce international aient comme par le passé des incidences regrettables sur d'autres secteurs, par exemple sur la forêt.

(23) Christian COMELIAU, op cit, page 63

La croissance ne doit pas être aveuglée par des considérations purement économiques, elle doit tenir compte de certains aspects de l'environnement. C'est une manière de pallier à l'éclatement des responsabilités en matière de prise de décisions, car pour que le développement durable survienne, il faut donc mettre fin à la fragmentation des responsabilités(24).

Outre ce qui vient d'être dit, plusieurs autres changements institutionnels et juridiques doivent être apportés. Il s'agit de donner une base légale à ce que nous appelons l'approche participative, qui consiste à faire participer les populations aux processus décisionnels et de définition des politiques pour mieux mettre en oeuvre celles-ci, car le développement durable ne peut souffrir de la marginalisation d'une frange importante de la population, au contraire il exige que les populations aient le sentiment d'être un agent porteur de projets et non simple agent d'exécution(25). Cette garantie doit être assurée par l'adoption de différents textes de lois.

Mais avant tout, le processus de développement durable implique une véritable politique d'information et de formation des populations. La réussite d'une véritable implication de la société civile se fonde sur la nécessité de disposer d'une information environnementale techniquement fiable comme outil indispensable à toute définition de politique de réglementation, d'éducation et d'action. Pour ce faire, comme le propose Emilienne Anikpo N'TAME, la meilleure manière de former le citoyen au développement durable, c'est d'introduire l'environnement dans tous les programmes d'enseignement de tous les cycles mais aussi les programmes de formation multimédias pour l'ensemble de la population(26).

(24) CMED, op cit, page 73.

(25) Emilienne Anikpo N'TAME, op cit page 238.

(26) Op cit page 239

Seulement, la mise en oeuvre de tout ce que nous venons de voir paraîtra de prime à bord comme "suicidaire" pour la majorité d'Etats africains, parce qu'en dehors du fait que certaines mesures paraissent limiter le processus de développement auquel s'engage l'Afrique, la facture de leur mise en oeuvre nécessite d'énorme sacrifices. C'est ce qui a fait que, tout au départ, le développement durable a rencontré la résistance des pays du Sud et particulièrement l'Inde et la Malaisie, refusant de payer les factures du développement durable. L'Afrique subsaharienne quant à elle a manifesté une certaine froideur à l'idée du développement durable avant de l'accepter comme défi mondial, non en toute conscience mais surtout du fait de certaines pesanteurs politico-financières.

DEUXIEME CHAPITRE:

DU DESACCORD A L'ADHESION DE L'AFRIQUE
SUBSAHARIENNE

" Ecodéveloppement? oui. A condition qu'on y rencontre l'homme au début, au milieu et à la fin....Et que les arbres ne nous empêchent pas de voir l'immense forêt des humains"

Joseph Ki ZERBO *

Aussitôt après son lancement, le développement durable était perçu par le Sud et l'Afrique subsaharienne comme une préoccupation essentiellement occidentale. Comment ne pas le croire lorsqu'on sait que la crise de l'environnement est en grande partie l'autre revers du modèle macroéconomique des pays industrialisés. De ce fait, l'Afrique subsaharienne déjà plongée dans une entreprise visant à mettre en place une infrastructure industrielle à l'image du Nord n'entendra pas renoncer à ses ambitions pour se lancer dans une autre aventure, celle du développement durable. De cette attitude s'en est suivie une "guerre d'accusation" sur les responsabilités de la dégradation de la planète. Certains observateurs verront dans cette "guerre" le spectre d'une ingérence écologique de la part des Etats occidentaux.

Pour l'Afrique, telle a été sa position depuis la conférence de Stockholm de 1972, l'environnement n'est pas son problème, c'est un luxe onéreux que les pays riches s'emploient à lui imposer. En effet, il s'agit d'une vision étriquée de l'environnement. Selon elle, l'environnement se résumait simplement à la

conservation des écosystèmes nationaux et à la lutte contre la pollution industrielle, donc un problème du Nord mais dont l'impact étant encore bien limité dans la plupart des pays d'Afrique subsaharienne.

Quoiqu'il en soit, on ne pouvait attendre mieux de la part des Etats africains absorbés par les multiples soucis à court terme tels les problèmes budgétaires et ceux associés aux ajustements structurels. L'environnement ne pouvait qu'être perçu comme extérieur à leur développement économique en dépit de la reconnaissance internationale du lien désormais incontournable entre environnement et développement, comme l'a démontré la commission BRUNDTLAND.

Mais l'occident qui fait figure de proue en matière de défense de l'environnement, et fort de sa puissance financière et de sa mainmise politicoéconomique sur l'Afrique usera de tous les artifices pour amener celle-ci à suivre désormais ce qu'il conçoit après 3 siècles d'industrialisation intense, de pillage et de gaspillage comme un impératif mondial.

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand