Dans ce chapitre, nous présentons les fondements
théorique et méthodologique qui ont guidé notre
démarche pendant l'étude.
II.1. CADRE THEORIQUE
Ce cadre théorique ou conceptuel nous donne les
éléments idéels qui ont aidé à rendre
intelligible et donc à problématiser ce qui fait l'objet de notre
étude. Pour arriver à ces éléments, nous avons fait
référence aux publications d'auteurs qui, par leurs recherches,
ont fourni les concepts explicatifs des rapports sociaux dans tout
environnement donné.
II.1.1 Revue de littérature
L'idée force qui transparaît à travers
notre thématique est celle du rôle que l'AGEFOP joue. Qui parle de
rôle, parle aussi d'acteur qui en est porteur et d'un espace où ce
rôle est joué. L'AGEFOP est donc mise dans un rôle d'acteur
social et le dispositif étatique ainsi que le secteur d'activité
auquel il appartient constituent les espaces où est
déroulée son action. Son rôle ne peut par conséquent
échapper à l'influence des atouts dont elle dispose et qui
fondent son pouvoir d'une part, et de celle des rapports qu'il entretient avec
les autres acteurs du secteur de la formation professionnelle d'autre part.
Cette étude nous situe ainsi dans la thématique
de la théorie des organisations, dont les principaux concepts sont le
pouvoir, les conflits, les rapports sociaux, l'analyse des configurations et la
communication dans les groupes, pour ne citer que ceux-là. Cette
thématique a inspiré de nombreux auteurs sociologues tout comme
des experts de la formation professionnelle. Nous pourrons citer entre autres
:
· TAYLOR W. F. (1856-1915) & FAYOL H
(1841-1925): Ces deux ingénieurs, le premier américain
et le deuxième français, sont considérés comme les
précurseurs de la théorie des organisations pour leurs
études portant respectivement sur l'organisation scientifique du travail
(l'OST) et l'organisation administrative du travail (l'OAT) dans la
période du développement industriel. Leurs travaux ont permis
d'éclairer les acteurs du monde du travail sur le rôle imparti
à chaque acteur dans l'espace et le temps mais aussi sur les relations
fonctionnelles qui existent entre les différents acteurs du même
espace.
9
· WEBER Max (1864-1920) :
Economie et Société, Paris, Plon, 1977. Sa
réflexion sur les formes d'administration, appelée la
bureaucratie, trace véritablement les sillons de plusieurs travaux
d'analyse sur les fonctionnements et dysfonctionnements des organisations.
Ainsi de M. Weber à Michel Crozier, en passant par d'autres chercheurs
tels Robert K. Merton, Philip Selznick et Peter Blau, la notion de bureaucratie
a connu une évolution sémantique et a fini par être
substituée par celle d'organisation. Les travaux de recherche de ces
différents chercheurs, notamment, M. Crozier ont fourni des concepts
tels, le système, le pouvoir, le désir, la stratégie qui
sont des ressources utiles dans l'analyse stratégique des
organisations.
· MERTON K. Robert, Bureaucratic
Structure and Personality, Social Forces, XVIII, 1940, pp.560-568. Issu du
courant structuro-fonctionnaliste de la sociologie américaine, R. Merton
s'est intéressé particulièrement aux dysfonctionnements
causés par la rigidité des règles bureaucratiques
(règles caractérisant l'idéal-type d'autorité
wébérien) dans le fonctionnement des administrations.
· CROZIER M. et FRIEDBERG E.,
l'Acteur et le Système, 1977 : C'est par Michel Crozier que la
réflexion sur la sociologie des organisations connaît un essor en
France. Dans le Centre de Sociologie des Organisations (CSO) qu'il crée
au début des années 1960, ses recherches faites avec son
équipe et en collaboration avec E. Friedberg lui permettent d'aboutir
pour la première fois à la formalisation théorique de
l'analyse stratégique des organisations. Dans le livre l'Acteur et
le Système, M. Crozier et E. Friedberg s'interrogent sur la marge
de liberté dont disposent les acteurs sociaux dans leurs rapports pour
une action collective, les contingences et contraintes auxquelles leur
coopération est soumise et enfin la stratégie adoptée pour
renforcer leur position ou leur pouvoir.
· Eugène ENRIQUEZ, Les jeux
du pouvoir et du désir dans l'entreprise, Paris, Declée de
Brouwer, 1997. Dans cet ouvrage constitué de trois parties, E. Enriquez
dans la première partie, met en relief l'influence des organisations sur
la vie des individus qui la composent, le degré d'identification de ces
personnes à leur organisation selon le pouvoir que leur octroie la
structure de l'organisation et qui les met en action. Dans la deuxième
partie, il ressort le rôle joué par la formation et la
psychosociologie dans la
10
transformation des organisations. Pour lui, « la
psychosociologie est une discipline qui favorise l'exploration du plus intime
de l'être, en l'étudiant concrètement dans ses actions
individuelles et collectives. Elle ne met pas de côté le champ
politique dans lequel s'inscrivent les décisions et les actes ».
Enfin dans la troisième et dernière partie, il met en
lumière le changement et la volonté d'émergence du sujet
humain. Le rôle de ce dernier dans la création et l'animation du
lien organisationnel et social constituent la question principale
développée.
· BERIOT Dominique, Manager par
l'approche systémique, 2006, dans cet ouvrage, l'auteur par
ailleurs grand spécialiste français des entreprises pour avoir
occupé pendant plusieurs années de hauts postes de direction,
comme DRH par exemple, dans différentes sociétés, puis
comme expert consultant dans des entreprises publiques et privées, se
sert des outils conceptuels entrant dans le cadre de l'analyse
stratégique des organisations pour proposer des pistes de
résolution de problèmes. Il se sert notamment de l'approche
systémique qui s'appuie sur la configuration des rapports entre les
éléments d'un système pour identifier la source du
dysfonctionnement au sein du système et le levier catalyseur du
changement.
Les travaux de ces différents auteurs sociologues et
spécialistes des organisations ont servi de repères pour la
canalisation de notre étude. Nous nous sommes surtout appuyé sur
l'approche systémique telle qu'inspirée par le dernier auteur
cité, à savoir, Dominique Bériot pour l'analyse du
rôle de l'AGEFOP. Mais en fait, qu'est-ce que la systémique ?
II.1.2. La systémique
Il est important et utile pour une bonne compréhension
de l'évolution de notre réflexion de s'accorder sur les concepts
et terminologies utilisés, aussi, nous paraît-il important de
présenter brièvement la systémique à travers sa
définition, son origine et son évolution dans le temps.
II.1.2.1. Définition du concept
La systémique peut être définie comme une
démarche scientifique dont le but est d'étudier des
phénomènes dans leur contexte environnemental. Pour certaines
sources, elle s'oppose à la démarche analytique qui isole
l'élément étudié de son ensemble pour le comprendre
tandis que la systémique s'intéresse plutôt à la
complexité de l'ensemble. Pour d'autres elle
11
« complète la méthode analytique classique
et met l'accent sur l'ensemble et les propriétés.1
». Quel que soit l'angle sous lequel ce concept est pris, les adeptes de
la systémique défendent deux hypothèses.
La première est que « un ensemble possède
des propriétés qui se révèlent beaucoup mieux par
l'étude des ensembles que par celle des parties qui le
composent.2 » La deuxième est que « la connaissance
de l'objet doit passer par l'étude des relations et des interactions
qu'a cet objet ou cet ensemble avec son environnement.3 ».
Ce sont ces hypothèses qui fondent notre choix de
l'approche systémique pour comprendre le rôle de l'AGEFOP dans le
développement de la formation professionnelle en Côte d'Ivoire.
L'agence ne gérant qu'un aspect de la politique globale de la formation
professionnelle initiée par l'Etat, notre réflexion sur ce sujet
paraîtrait partielle si les dimensions de financement et d'insertion des
populations cibles n'étaient pas intégrées. Et Watzlawick
et Al nous confortent dans notre choix quand ils reconnaissent « qu'un
phénomène demeure incompréhensible tant que le champ
d'observation n'est pas suffisamment large pour qu'y soit inclus le contexte
dans lequel ledit phénomène se produit.4 ». Pour
une meilleure compréhension du concept, il est bon de le reprendre
depuis son origine jusqu'à sa conception actuelle en passant par son
évolution.
II.1.2.2. Origine du concept
La systémique ou encore le concept de la
systémique tire son origine du mot « système ». Selon
le dictionnaire français Le Grand Larousse, le mot système, en
latin « systema » ou en grec « sustêma »,
désigne un « ensemble organisé de principes
coordonnés de façon à former un tout scientifique ou un
corps de doctrine.5 » Cette définition est enrichie par
l'apport d'auteurs tels De Rosnay et Mélèze.
Pour De Rosnay, « un système est un ensemble
d'éléments en interaction dynamique, organisés en fonction
d'un but.6 » p.93. Quant à Mélèze, il
définit le système en ces termes : « Des finalités et
des buts étant exprimés sur un environnement, un système
finalisé est un ensemble organisé de moyens, méthodes,
règles et procédures qui permet d'obtenir des réponses
satisfaisantes de l'environnement.7 ».
1 EDUCATECHNOLOGIQUES : Jacques Lapointe, L'approche
systémique et la technologie de l'éducation
2 EDUCATECHNOLOGIQUES : Jacques Lapointe, L'approche
systémique et la technologie de l'éducation
3 EDUCATECHNOLOGIQUES : Jacques Lapointe, L'approche
systémique et la technologie de l'éducation
4 Watzlawick et Al
5 Le Grand Larousse, Vol.4, p. 2942, 1989.
6 Rosnay J. De, Le macroscope : Vers une vision
globale, Paris, Seuil, 1975
7 Mélèze : L'analyse modulaire des
systèmes de gestion, Puteaux, France : Editions hommes et techniques
12
Le système fait donc appel à des terminologies
telles « ensemble, relation, interaction, dynamique, organisation, but
», pour ne citer que ceux-là, qui ont servi d'outils à de
nombreux chercheurs dans le domaine des sciences sociales.
II.1.2.3. Evolution du concept
Il s'est construit peu à peu dans une acception
moderne aux Etats-Unis dans les années 1940 avec l'apport des sciences
comme les mathématiques, la physique, l'ingénierie, la gestion et
la biologie à travers les travaux de certains chercheurs parmi lesquels
l'on peut citer N. Wiener, C. E. Shannon, V. Bertalanffy qui fut l'un des
pionniers.
En 1937, V. Bertalanffy avance le concept « de
système ouvert1 » qui évolue vers la
théorie générale des systèmes. L'objectif de cette
théorie était de fournir des principes explicatifs de l'ensemble
considéré comme système à l'aide desquels on
pourrait modéliser la réalité.
C'est le français Michel Crozier, qui de retour en
France après un long séjour aux EtatsUnis, favorise le
développement de ce concept quand il crée le Centre de Sociologie
des Organisations (CSO) dans les années 1960. Avec son équipe de
chercheurs et en collaboration avec E. Friedberg, il publie son oeuvre
L'acteur et le Système, 1977 op.cit., oeuvre dans laquelle il
formalise pour la première fois la théorie de l'analyse
stratégique. Les outils de cette analyse sont les concepts de pouvoir,
stratégie, système d'actions concret (SAC). Avec ce dernier
concept, M Crozier identifie la structuration réelle des rapports entre
les éléments du système pour expliquer la quête de
pouvoir et la stratégie de positionnement de chaque
élément par rapport aux autres éléments du
système. En effet, selon l'analyse croziérienne, cette
stratégie de positionnement des éléments du système
pour le renforcement du pouvoir de chacun à l'intérieur du
même système fait insidieusement passer les acteurs sociaux de la
poursuite des objectifs de l'action collective vers celle d'objectifs
personnels, « lesquels ne sont pas nécessairement compatibles avec
ceux de l'organisation.2 ». Il n'est donc pas surprenant de
constater la survenance de conflits et de rupture dans les rapports entre les
éléments du système.
C'est pour proposer des pistes de résolution des
conflits liés à la déviation des objectifs de l'action
collective que Dominique Bériot, s'inspirant de cette analyse
croziérienne propose dans son livre Manager par l'approche
systémique, (op. cit.) l'un des outils de l'analyse
stratégique qu'est la modélisation.
1 V. Bertalanffy, La Théorie
Générale des Systèmes (General system theory).
2 Claudette Lafaye, La sociologie des
organisations, Armand Colin, 2007.
13
II.1.3. Problématique et
hypothèses
A la lumière de ce concept de la systémique, en
quels termes se posent le ou les problèmes liés au rôle de
l'AGEFOP ? Quelles réponses peuvent être avancées dans la
compréhension de ces problèmes ? La problématique nous
permet d'identifier le ou les problèmes à résoudre et par
les hypothèses nous esquissons des réponses plausibles à
ces problèmes.
II.1.3.1. Problématique
C'est au séminaire de Grand-Bassam marquant
assurément un tournant décisif dans le recadrage de ses missions
que l'AGEFOP exprime mieux sa volonté de répondre à sa
vocation de Cabinet d'ingénierie de l'Etat ivoirien. Un regard sur les
nouvelles orientations arrêtées à cette rencontre et sur la
stratégie de leur mise en oeuvre révèle sur le plan
technique, la prise en compte des trois (03) niveaux d'intervention selon la
démarche d'ingénierie de la formation à savoir les niveaux
micro, mezzo et macro.
Au niveau micro, les actions telles « accroître
les effectifs de l'encadrement AGEFOP, perfectionner et former les agents
à tout le processus d'ingénierie1 » traduisent
l'intérêt porté à la formation et au renforcement
des capacités des ressources humaines de l' AGEFOP pour un meilleur
encadrement des populations cibles constituées des employés
d'entreprises, des acteurs des différents secteurs d'activités
(les coopératives, les collectivités décentralisées
etc.), et des groupements sociaux tels les femmes, les jeunes
déscolarisés, les diplômés, les retraités
etc.
Au niveau mezzo, le souci est porté sur « la
réhabilitation, l'équipement, l'extension et la création
des centres de formation par apprentissage en relation avec les secteurs
porteurs et le `village AGEFOP'2 ». Ce deuxième axe
d'action de l'agence prend en charge le cadre et l'environnement dans lesquels
les formations vont être données.
Au niveau macro, « faire le toilettage des programmes,
contenus et filières de formation pour leur adaptation aux nouvelles
orientations et défis de la formation et de l'insertion des
jeunes3 », « créer des passerelles dans tous les
ordres d'enseignement 4» sont entre autres, des actions qui
viennent compléter le plan d'action de l'agence.
Mais, la mise en oeuvre effective de cette démarche
d'ingénierie suffit-elle pour permettre à l'AGEFOP de cerner la
question de la formation professionnelle dans tout son contour ?
1 Actes du Séminaire bilan de l'AGEFOP du 23
au 25 Janvier 2007, p.105
2 Actes du Séminaire bilan de l'AGEFOP du 23
au 25 Janvier 2007, p.105
3 Actes du Séminaire bilan de l'AGEFOP du 23 au
25 Janvier 2007, p.105
4 Actes du Séminaire bilan de l'AGEFOP du 23 au
25 Janvier 2007, p.105
14
Pour élucider ce questionnement, nous avons
exploré l'environnement interne et externe de l'agence.
Au niveau de son environnement interne,
l'intérêt est porté aux ressources de l'agence. En effet,
la couverture de tout le territoire ivoirien et des différents secteurs
d'activités (secteurs primaire, secondaire et tertiaire) est un aspect
non négligeable de la question dont la prise en compte requiert que
l'agence dispose d'importantes ressources. Ces ressources sont d'autant
importantes qu'elles constituent les facteurs de production déterminants
pour l'efficacité de l'action de l'AGEFOP. L'agence en dispose-t-elle en
quantité et en qualité ? Parvient-elle à couvrir tout le
territoire et tous les secteurs d'activités susmentionnés ? Dans
quelle proportion parvient-elle à le faire face aux besoins
exprimés sur l'ensemble du territoire ? La Côte d'Ivoire
étant un pays essentiellement agricole, un équilibre est-il
observé dans l'encadrement de ces différents secteurs
d'activités ?
Au niveau de l'environnement externe, notre
intérêt s'est focalisé dans un premier temps sur les
rapports de l'agence avec les autres services publics (FDFP, AGEPE, FNS) puis
dans un deuxième temps sur ses rapports avec les autres acteurs du
secteur de la formation professionnelle.
Il faut rappeler que l'AGEFOP n'est qu'un maillon dans le
dispositif mis en place par l'Etat ivoirien pour le développement de la
formation professionnelle, dispositif qui outre l'AGEFOP, comprend comme
mentionné plus haut, le FDFP chargé du financement de la
formation professionnelle, de l'AGEPE chargée de l'insertion
professionnelle des populations cibles formées et du FNS pour le
financement de projets individuels ou collectifs. Tout en ayant sa mission
inspirée et définie par le politique, chacune des
différentes structures et notamment l'AGEFOP devrait se trouver ainsi
imbriquée dans un rapport de collaboration avec les trois autres,
rapport duquel aucune d'entre elles ne devrait se soustraire - au risque de
s'isoler du dispositif et faire échec à l'objectif politique
global. Et pourtant, dans les actes du séminaire de Grand-Bassam, hormis
la récente PFS, aucune référence significative n'est faite
à un quelconque cadre de collaboration entre ces différentes
structures.
Pour nous, le rôle de l'AGEFOP ne peut être
apprécié à sa juste valeur que s'il est situé dans
le cadre de ce dispositif. Aussi, des facteurs tels l'existence même d'un
cadre de collaboration, la configuration des rapports entre les
éléments le composant et l'influence de ces rapports sur l'action
de l'agence sont à prendre en compte dans l'analyse de son rôle.
En d'autres termes, existe-t-il un cadre formel de collaboration entre l'AGEFOP
et les trois autres services publics? Bénéficie-t-elle
systématiquement du financement de ses programmes de
15
formation par le FDFP par exemple? Ses programmes de
formation répondent-ils aux résultats d'une étude
préalable du marché du travail menée par l'AGEPE? L'AGEFOP
peut-elle se passer d'un tel cadre de collaboration et mettre efficacement en
oeuvre sa mission ?
Par ailleurs, le secteur de la formation professionnelle
regorge de nombreux autres acteurs que sont les chambres consulaires comme la
Chambre Nationale d'Agriculture de Côte d'Ivoire (CNA-CI), la Chambre
Nationale des Métiers de Côte d'Ivoire (CNMCI), la Chambre de
Commerce et d'Industrie de Côte d'Ivoire (CCI-CI), les organisations
professionnelles comme la Confédération Générale
des Entreprises de Côte d'Ivoire (CGECI), la Fédération
Ivoirienne des PME/PMI (FI-PME/PMI), enfin les centres, cabinets et
écoles de formation professionnelle existant sur l'initiative
d'investisseurs privés. Quels rapports l'AGEFOP a-t-elle avec ces
acteurs de la formation professionnelle ? Sont-ils concurrents ou partenaires
de l'AGEFOP? Y a-t-il un contrôle exercé sur l'ensemble des moyens
humain, matériel et technique utilisés par ces acteurs
privés du secteur de la formation professionnelle ? Sur leurs programmes
et contenus de formation ? L'AGEFOP a-telle l'autorité institutionnelle
de certification de ces programmes en tant que cabinet d'ingénierie de
l'Etat ?
Quelles réponses à toutes ces questions ? Nous
pouvons avancer les hypothèses suivantes.
II.1.3.2. Hypothèses
Au niveau de son environnement interne :
· L'insuffisance en quantité et en qualité
des ressources dont dispose l'AGEFOP réduit considérablement la
portée de son action sur les plans géographique et sectoriel.
Au niveau de son environnement externe :
· L'efficacité du rôle de l'AGEFOP reste en
partie dépendante d'une coordination des actions entre les
différentes composantes du dispositif de la formation professionnelle
que sont le FDFP, l'AGEFOP, l'AGEPE et le FNS.
· Le positionnement de l'AGEFOP en tant que cabinet
d'ingénierie de l'Etat reste partiellement lié à sa
collaboration avec les spécialistes de la formation du monde
professionnel et académique.
16
II.1.4. Définition des concepts
Il est important de donner le contenu sémantique des
mots clés des différentes hypothèses avancées. Ces
définitions nous permettent de nous accorder sur l'interprétation
contextuelle que nous donnons à ces termes.
Dans la première hypothèse, l'on retient :
· L'insuffisance : Selon le
dictionnaire français Le Grand Larousse (p.1638), ce mot est un nom
féminin et désigne « un manque de capacités,
d'aptitudes, de qualités ou encore l'impossibilité pour un organe
ou une glande de remplir ses fonctions normales. ». Le mot manque
étant synonyme d'absence, nous ne disons pas qu'il y a absence des
ressources de sorte à rendre l'AGEFOP incapable de fonctionner mais
plutôt un déficit de ces ressources. Nous interprétons donc
insuffisance en termes de déficit.
· Les ressources : Selon Le Grand
Larousse1 (pp.2637-2638), ce mot est féminin et a pour racine
latine « resugere », c'est-à-dire « ce qui tire
d'embarras, améliore une situation difficile ». Ou encore, la
« possibilité d'action de quelqu'un, moyens intellectuels dont il
dispose. ». Enfin les « moyens et possibilités qu'offre
quelque chose. ». Nous entendons donc par ressources les moyens dont
dispose l'agence sur les plans humain, matériel et technique et qui lui
permettent d'agir pour sortir le secteur de la formation professionnelle de
l'impasse.
· La quantité: Issu du mot latin
« quantitas », c'est un nom féminin que le dictionnaire Le
Grand Larousse (p.2546) définit comme la « propriété
de ce qui peut être mesuré ou compté. ». Dans le cas
de l'AGEFOP, c'est le nombre des différentes sortes de ressources.
· La qualité : Dans le
dictionnaire français Le Grand Larousse (p.2545), c'est un nom
féminin d'origine latine « qualitas » et qui signifie la
« manière d'être de quelque chose, chacun des aspects
positifs de quelque chose qui font qu'il correspond au mieux à ce qu'on
en attend. ». A cette signification il faut ajouter
1 Le Grand Larousse, dictionnaire français,
Vol.4, pp.2637-2638., 1989.
17
celle d'un autre dictionnaire français Le Petit
Robert1 (p1574) qui trouve des synonymes tels « attributs,
caractères, propriétés. Ce qui fait qu'une chose est plus
ou moins recommandable. ». Enfin, selon AFNOR2, la
qualité est « l'ensemble des caractéristiques d'une
entité qui lui confère l'aptitude à satisfaire des besoins
exprimés et implicites. ». Sur la base de ces définitions,
nous entendons par qualité les aspects ou propriétés
positifs des différentes sortes de ressources dont l'AGEFOP dispose et
qui la rendent recommandable ou lui confèrent l'aptitude à
satisfaire les besoins exprimés ou implicites dans le domaine de la
formation professionnelle.
· La portée d'une action : C'est
« l'étendue du champ d'action de quelque chose. » selon Le
Grand Larousse (p.2466). Il s'agit donc pour nous d'avoir une idée de
l'étendue de l'action de l'AGEFOP sur les plans géographique et
sectoriel.
Dans la deuxième hypothèse, les termes tels
l'efficacité, la dépendance, la coordination ont retenu notre
attention.
· L'efficacité : La
définition donnée à ce nom féminin d'origine latine
« efficacitas » est, selon Le Gand Larousse, (p.1039), « le
caractère d'une personne ou d'un organisme qui produit le maximum de
résultats avec le minimum de moyens. L'AGEFOP arrive-t-elle à
produire suffisamment avec les moyens dont elle dispose ? Tel est le sens que
nous donnons à `son' efficacité.
· La dépendance : Selon Le Grand
Larousse (p.908), ce nom féminin désigne le « rapport de
liaison étroite entre quelque chose et ce qui le conditionne, le
régit. », ou encore « situation de quelqu'un, d'un groupe qui
n'a pas son autonomie par rapport à un autre, qui n'est pas libre d'agir
à sa guise. ». Cette définition nous éclaire car elle
nous permet d'évaluer les limites de l'AGEFOP dans ses rapports soit
avec le FDFP, soit avec l'AGEPE. Comment l'inaction ou le refus de l'AGEPE ou
du FDFP peut empêcher l'AGEFOP de jouer le rôle qui est le sien
?
1 Le Petit Robert1, dictionnaire
français, 1987
2 AFNOR : Association Française des Normes
18
· La coordination : Dans une
première définition, il désigne un nom féminin
d'origine latine « coordinatio » et renvoie à « l'action
de coordonner. Harmonisation d'activités diverses dans un souci
d'efficacité.». Dans une deuxième, c'est « l'agencement
des parties d'un tout selon un plan logique, pour une fin
déterminée. ». Ces deux définitions respectivement de
Le Grand Larousse (p.761) et de Le Petit Robert (p.389) se rapprochent et
mettent en exergue trois (03) facteurs importants qui déterminent la
coordination : le souci d'une efficacité, l'application d'un plan
logique et un objectif visé. Dans le cadre du dispositif de la formation
professionnelle mis en place par l'Etat, la mission assignée à
chacune des composantes devrait, si coordination il y a, aboutir à ces
résultats. Qu'en est-il depuis leur création ? Et après
l'avènement de la Plateforme de Service (PFS) ?
Dans la troisième et dernière hypothèse
:
· Le positionnement : Ce mot masculin
est mieux expliqué à travers son dérivé qu'est le
verbe « positionner ». Dans Le Grand Larousse (p.2473), «
positionner » c'est « déterminer la position qu'un produit
occupe sur un marché donné et le promouvoir en ciblant une
catégorie de clientèle. ». Le positionnement de l'AGEFOP
dans notre entendement renvoie donc à la détermination de sa
position dans le secteur de la Formation Professionnelle par rapport à
tous les acteurs de ce secteur.
· La collaboration : Selon Le Grand
Larousse, c'est « l'action de collaborer, de participer à une
oeuvre avec d'autres. ». Le sens du mot se précise davantage
à travers le verbe « collaborer » qui, toujours selon la
même source, signifie « travailler de concert avec quelqu'un d'autre
; participer avec un ou plusieurs autres à une oeuvre commune. »
La collaboration de l'AGEFOP avec les organisations
professionnelles, les cabinets et centres de formation professionnelle doit
donc être comprise dans ce sens.
19
Enfin dans la thématique :
· Le rôle : Entre autres
définitions, Le Grand Larousse (p.2674), définit le rôle
comme « ce que doit dire ou faire un acteur dans une pièce de
théâtre, genre d'action ou de comportement, à la place
qu'on occupe, fonction remplie par quelqu'un, attribution assignée
à une institution. ».
Notre compréhension du terme `rôle' cadre bien
avec cette définition. Nous considérons par conséquent
l'AGEFOP dans une position d'acteur, et son rôle est
déterminé par la mission à elle assignée.
· L'enjeu : C'est un nom masculin et
désigne selon Le Grand Larousse (p.2674) « ce que l'on risque dans
un jeu, en particulier une somme d'argent et qui revient au gagnant. Ce que
l'on peut gagner ou perdre dans une entreprise quelconque. ». A la
lumière de cette définition, l'on peut donc avancer que l'enjeu
est ce que mise le joueur ou encore ce qu'il met à risque. En ce qui
concerne l'AGEFOP, l'enjeu se situe à deux niveaux.
D'abord à son propre niveau en tant que service
public, elle joue sa notoriété, sa crédibilité,
ensuite sur le plan national, étant chargée de la mise en oeuvre
d'une politique de développement il y va de la stabilité sociale
du pays.
· La perspective : Toujours selon Le
Grand Larousse, p.2362, la perspective qui est un mot féminin
désigne un « ensemble d'évènements, de projets ou
évolution, devenir de quelque chose qui se présente comme
probable ou possible ; éventualité, horizon. »
Telle est notre compréhension des perspectives pour
l'AGEFOP, c'est-à-dire ce qui attend l'agence comme formes
d'évolution possibles si son rôle est renforcé avec des
moyens adéquats pour atteindre les résultats escomptés.
II.1.5. Définition des indicateurs
Les définitions des différents concepts nous
ont permis d'identifier des indicateurs à même d'aider à la
mesure des variables à expliquer dans chacune des hypothèses. Ces
indicateurs sont donnés dans les tableaux suivants :
20
Tableau 1 : l'hypothèse 1