2) Analyse de l'orientation sectorielle de l'aide
française affectée aux pays en développement depuis 1990
Un seul point focal sera au coeur de cette partie. En effet il
sera question d'analyser l'évolution de l'APD française
affectée à divers secteurs ciblés pour tous les pays en
développement. Ces secteurs à titre de rappel sont au nombre de
quatre. Il s'agit en effet des secteurs de la santé, eau et
assainissement, éducation et agriculture que le CAD regroupe sous le
terme générique Infrastructures et services sociaux.
De manière générale, rappelons qu'en
matière d'APD, la qualité et le contenu sont tout aussi
importants que le volume. Pour contribuer efficacement à la
réduction de la pauvreté et des inégalités dans le
monde, l'APD doit se concentrer vers les pays et les populations les plus
pauvres et financer les secteurs prioritaires pour le développement
humain. Pour répondre à cet enjeu, la France et ses partenaires
de la communauté internationale ont pris toute une série
d'engagements au cours des trente dernières années,
actualisés en partie à travers l'adoption, en 2000, des OMD. La
France a même inscrit sur son projet de loi finance 2006 (P 14) que
«l'objectif principal de l'APD française est de réduire la
pauvreté (...) ».Il est donc question d'analyser tour à tour
l'aide française affectée à la santé (a) ;
à l'éducation (b) ; à l'eau (c) et l'agriculture (d)
aux pays en développement depuis 1990.
a)
L'aide française dans le secteur de la santé aux pays en
développement : une aide en baisse relative et faible en pourcentage du
volume total
Rappelons tout d'abord que l'aide à la santé
revêt un caractère générique, car le secteur
santé regroupe un ensemble de sous-secteurs parmi lesquels figurent
principalement les sous-secteurs santé de base, santé
générale, population. Ces sous-secteurs eux-mêmes
connaissent des champs plus spécifiques. Le graphique A (cf. annexe 1)
nous illustre assez bien une répartition sous sectorielle de l'aide
à la santé
S'agissant d'une définition statistique du CAD
concernant l'aide à la santé, il est à noter que les
membres du CAD attribuent à chaque activité d'aide, un secteur de
destination et à l'intérieur de ce secteur un code-objet
détaillé lui est attribué, qui identifie « le secteur
spécifique de l'économie ou de la structure sociale du pays
bénéficiaire, dont l'aide est destinée à favoriser
le développement ».
Le tableau A (cf. annexe 2) énumère les codes
objets qui définissent «l'aide à la santé».
On note au regard de ce dernier, que la définition de
l'aide à la santé exclut l'aide aux autres secteurs qui peuvent
avoir une incidence directe ou indirecte sur la situation sanitaire, comme
l'aide à la distribution d'eau et assainissement ou à
l'éducation (qui constituent par ailleurs des secteurs
spécifiques et distincts d'allocation de l'aide). L'aide médicale
en cas de catastrophe naturelle et dans d'autres situations d'urgence est
également exclue.
Afin d'éviter toute équivoque possible, il est
aussi à noter que dans ce présent travail nous allons nous
appesantir beaucoup plus sur les sous-secteurs recherche médicale,
lutte contre les maladies infectieuses et services médicaux en ce qui
concerne ce secteur car ils ressortent à nos yeux comme des secteurs
clés pour lesquels les populations constituent au premier degré
les cibles par excellence, aussi bien pour le donateur que le
récipiendaire de l'aide. Examinons dès à présent
l'évolution générale de l'aide française dans le
secteur de la santé pour tous les pays en développement.
En ce qui concerne le secteur de la santé, l'aide
française suit une évolution très contrastée pour
tous les pays en développement.
En effet comme l'indiquent le tableau 2 et le graphique 1
ci-dessous, représentant respectivement le volume de l'aide
française allouée à la santé et la courbe
évolutive conséquente , on note de manière globale que
cette aide connaît une baisse relative en volume. En 1990 par exemple la
France a alloué 293,31 millions de dollars, en 2005 cette aide s'estime
à 278,87 milliards de dollars ;ce volume qui s'affiche aussi bas
comparativement à 2004 où l'aide française a atteint le
pic de plus de 300 Millions de dollars, son meilleur score depuis 1990. On peut
ressentir ainsi un certain relâchement des efforts d'augmentation de
cette aide pourtant bien engagés depuis 2001.Les données de 2005
n`augurent pas des lendemains meilleurs car si cette trajectoire descendante
est maintenue, on risque assister dans les années à venir
à une chute progressive de l'aide française à la
santé aux pays en développement. Mais cette baisse globale ne
doit pas oblitérer les disparités de l'évolution de l'aide
française allouée à la santé. En observant la
courbe du graphique 2 on note que de 1990 à 1993 l'aide a connu une
baisse progressive, avant de connaître une hausse directe de 1993
à 1995. Mais de 1995 à 2000 l'aide connaît une fois de plus
une baisse conséquente, avant d'engager une hausse progressive qui
culmine en 2004 avec près de 300,54 millions de dollars, avant d'amorcer
un déclin timide. Cette évolution en dents de scie de l'aide
française affectée à la santé aux pays en
développement, serait le reflet d'une volonté timorée de
la France à vouloir s'investir plus significativement dans ce secteur
pourtant vital pour ces derniers, car faisant face pour la plupart à
une crise sanitaire réelle. On peut néanmoins noter que depuis
l'adoption en 2000 par l'AG/ONU de la déclaration sur les OMD, la France
a fait un effort certain d'augmenter le volume de son aide à la
santé, ce qui pourrait traduire pour certains une volonté
réelle de la France à respecter ses engagements internationaux en
vue de réaliser les OMD liés à la santé. Mais aussi
de traduire dans les faits son discours sur ses priorités en
matière d'aide aux pays en développement, parmi lesquelles
figure en bonne lice le secteur de la santé, auxquelles l'aide
française doit être plus concentrée.
Tableau 2 : APD Française à la
santé affectée aux pays en développement
(volume)
ANNEE
|
1990
|
1991
|
1992
|
1993
|
1994
|
1995
|
1996
|
1997
|
1998
|
1999
|
2000
|
2001
|
2002
|
2003
|
2004
|
2005
|
|
293,3
|
193,5
|
169,1
|
145,9
|
217,1
|
276,3
|
222,5
|
174,5
|
210,8
|
167,9
|
109,9
|
152,4
|
191,2
|
186,4
|
300,5
|
278,9
|
Source : OECD Stats 2007
Graphique 1 : Courbe évolutive de l'aide
française dans le domaine de santé aux pays en
développement
Toutefois, cette présentation quelque peu euphorique
ne doit pas nous faire oublier un détail d'une importance
indéniable : c'est la faible représentativité de l'aide
française à la santé du volume total accordé aux
pays en développement. En effet comme l'indique le tableau 3 ci-dessous
c'est avec beaucoup de peine que celle-ci a pu franchir le seuil de 10 % du
volume total de l'APD française allouée dans le grand secteur des
infrastructures et services sociaux. Elle oscille généralement
entre cinq et neuf pour cent ,ponctuée de temps en temps par quelques
années au cours desquelles elle a pu quand même franchi le seuil
des dix pour cent (notamment en 1995, 2001, 2002, 2004, 2005 avec
respectivement 13.24% , 12.21%, 12.04%, 12.32% , 15.5%). Ce n'est
qu'en 2005, que l'aide française à la santé a atteint 15 %
du volume total de l'aide au secteur global des infrastructures et services
sociaux, son meilleur taux depuis 1990. Même si on note quand même
une augmentation notoire par rapport à 1990 où elle ne
représentait que 8,29%, il n'en demeure pas moins vrai que sur le plan
général, l'aide française à la santé reste
significativement faible en terme de pourcentage du volume total.
Tableau 3 :APD
française à la santé aux pays en
développement(%)
Année
|
1990
|
1991
|
1992
|
1993
|
1994
|
1995
|
1996
|
1997
|
1998
|
1999
|
2000
|
2001
|
2002
|
2003
|
2004
|
2005
|
Infrastructure et services sociaux
|
3534
|
2089
|
2087
|
2075
|
2549
|
2806
|
2892
|
2417
|
2176
|
2136
|
1333
|
1247
|
1588
|
2009
|
2438
|
2230
|
Santé (volume)
|
293,3
|
193,5
|
169,1
|
143,9
|
217,1
|
276,3
|
222,5
|
174,5
|
210,8
|
167,9
|
109,9
|
152,4
|
191,2
|
186,4
|
300,5
|
278,9
|
Santé (pourcentage %)
|
8,29
|
9,24
|
8,1
|
6,93
|
8,51
|
13,24
|
7,69
|
7,21
|
9,68
|
7,86
|
8,23
|
12,21
|
12,04
|
9,27
|
12,32
|
15,5
|
Source : OCDE stats 2007
Cette faible représentativité en terme de
pourcentage de l'aide française à la santé allouée
aux pays en développement vient ainsi bouleverser la vision optimiste
que pouvaient avoir certains quand il fallait considérer uniquement le
volume de celle-ci. En effet la réalité décrite par les
données statistiques du tableau ci-dessus, reflète à
notre avis le désintérêt à peine masquée de
la France à l'égard de ce secteur, pourtant vital pour les pays
en développement, et ceci au mépris de son discours qui insiste
cependant sur ce secteur comme une des priorités à laquelle
l'aide française doit être plus concentrée. On semble donc
assister à un réel paradoxe, découlant de la
désarticulation entre le discours français en matière
d'affectation sectorielle de son aide au développement et la pratique
réelle sur le terrain.
En résumé on peut retenir que l'aide
française affectée à la santé relève des
disparités notables pour les pays en développement ;
néanmoins deux faits peuvent retenir notre attention :
premièrement cette aide connaît une baisse relative sur le plan
global et deuxièmement cette aide est faible en termes de
représentativité de pourcentage du volume total de l'aide
française accordée au grand secteur infrastructures et services
sociaux.
Après cette analyse de l'aide française
affectée au secteur sanitaire à tous les pays en
développement, intéressons-nous au secteur suivant.
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