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Le droit international humanitaire et la protection des personnes fragiles par nature dans les conflits armés

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par Fatou Moctar FALL
Université Gaston Berger - maitrise 2010
  

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B- Règles protégeant les enfants en vertu de la Convention relative aux droits de l'enfant de 1989

A moins de raisons impérieuses, aucune Partie au conflit ne procédera à l'évacuation, vers un pays étranger, d'enfants autres que ses propres ressortissants. Lorsque l'évacuation a lieu, toutes mesures seront prises pour faciliter le retour des enfants dans leur famille et dans leur pays. Le respect de ces dispositions semble possible eu égard aux circonstances et aux caractéristiques militaires et territoriales qui sont celles des conflits armés auxquels le PA II est applicable. Selon la Convention relative aux droits de l'enfant, les États doivent respecter et faire respecter les règles du DIH dont la protection s'étend aux enfants, et ils doivent prendre «toutes les mesures possibles dans la pratique pour que les enfants qui sont touchés par un conflit armé bénéficient d'une protection et de soins»45(*). On trouve des dispositions similaires dans la Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant46(*).

Dans une résolution adoptée en 1999 sur les enfants dans des situations de conflit armé, le Conseil de sécurité de l'ONU a demandé aux parties à des conflits armés «de prendre des mesures concrètes lors des conflits armés afin de réduire au minimum les souffrances infligées aux enfants».

Le Comité des Nations Unies pour les droits de l'enfant a également rappelé que les dispositions essentielles pour permettre la réalisation des droits des enfants touchés par le conflit armé comprenaient : la protection du milieu familial, la garantie de l'assistance et des soins fondamentaux, la garantie de l'accès à la santé, à l'alimentation et à l'éducation; l'interdiction de la torture, des brutalités et de la négligence; l'interdiction de la peine de mort; la préservation de l'environnement culturel des enfants; la protection dans les situations où ils sont privés de liberté, et la garantie d'une assistance et des secours humanitaires aux enfants dans les situations de conflit armé47(*).

Les enfants de moins de quinze ans et les mères d'enfants de moins de sept ans font partie des catégories de la population civile qui peuvent être accueillies dans les zones sanitaires et de sécurité établies par les Parties à un conflit armé international conformément à l'article 14 de la IVe Convention de Genève. De même, les enfants et les femmes en couches entrent dans la catégorie des personnes civiles qui, en vertu de la IVe Convention, devraient être évacuées d'un lieu assiégé ou encerclé (art. 17).

Le PA I prévoit, à des conditions toutefois très strictes, l'évacuation temporaire des enfants, si celle-ci est rendue nécessaire pour des raisons impérieuses tenant à leur sécurité (art. 78).

Pour le conflit armé non international, le PA Il encourage, sous certaines conditions, l'évacuation temporaire des enfants d'un secteur où des hostilités ont lieu vers un secteur plus sûr du pays (art. 4, par. 3, litt. e).

La protection du lien familial a été prise en considération pour l'évacuation temporaire des enfants aux termes de l'art. 78 du PA I. Cette opération est soumise à des conditions très strictes. Le consentement des parents, des tuteurs ou des personnes à qui la loi ou la coutume attribue principalement la garde des enfants est requis (art. 78, par. 1). En outre, toutes les mesures devront être prises pour conserver l'identité des enfants évacués (art. 78, par. 3).

En vertu du principe de l'intangibilité du statut personnel de l'enfant, énoncé dans la IVe Convention de Genève, il est interdit à une Puissance occupante de modifier la situation de famille ou l'état civil des enfants (art. 50). En ce qui concerne la protection de la famille, citons également l'art. 51 de la IVe Convention de Genève, qui interdit à une Puissance occupante d'astreindre au travail des personnes protégées âgées de moins de dix-huit ans.
Enfin, l'exposé de toutes les mesures prévues par le DIH pour préserver les liens entre l'enfant et sa famille serait incomplet si l'on ne mentionnait pas, d'une part, les dispositions qui ont pour but de garder la trace des personnes protégées, d'autre part, celles qui permettent aux membres de leur famille de connaître le sort des personnes protégées. Au vu de la IVe Convention de Genève, les Parties en conflit doivent s'efforcer de prendre des mesures pour que tous les enfants de moins de douze ans soient identifiés, notamment par le port d'une plaque d'identité (art. 24). Une Puissance occupante doit faciliter l'identification des enfants et l'enregistrement de leur filiation, et créer, au sein de son bureau de renseignements sur les personnes protégées, une section spéciale chargée de rechercher l'identité des enfants qui serait restée incertaine (art. 50). Il faut insister sur l'extrême importance d'un système d'identification des enfants et notamment des enfants en bas âge. C'est le seul moyen d'éviter que des milliers d'enfants ne soient abandonnés par suite des événements de la guerre: exodes, bombardements, destructions de villes, déportations, etc. Pour le conflit armé non international, le PA Il dispose que toutes les mesures appropriées doivent être prises pour faciliter le regroupement des familles momentanément séparées (art. 4, par. 3, litt. d). L'évacuation des enfants est subordonnée «au consentement des parents ou des personnes qui en ont la garde à titre principal en vertu de la loi ou de la coutume» (art. 4, par. 3, litt. e).

- L'environnement culturel de l'enfant

Lorsque l'enfant reste au sein de sa famille, il bénéficie de l'environnement culturel auquel il est habitué. En protégeant le milieu familial de l'enfant, le droit international humanitaire protège également les valeurs morales, la religion, la culture et les traditions dans lesquelles l'enfant a été élevé. Si l'enfant est orphelin, ou séparé de ses parents, cet environnement culturel peut être affecté par le conflit. Il ressort des dispositions du DIH relatives à cette catégorie d'enfants, que les auteurs de la IVe Convention de Genève et du PA I se sont tenus au principe selon lequel les enfants, en cas de conflit armé international, doivent bénéficier d'un environnement aussi proche que possible de celui auquel ils sont habitués. Ainsi, dans la IVe Convention de Genève, les Parties en conflit doivent en toutes circonstances faciliter, pour les enfants séparés ou orphelins, «la pratique de leur religion et leur éducation. Celle-ci sera si possible confiée à des personnes de même tradition culturelle» (art. 24).

Dans le PA, l'article relatif à l'évacuation des enfants vers un pays étranger dispose que «l'éducation de chaque enfant évacué, y compris son éducation religieuse et morale telle que la désirent ses parents, devra être assurée d'une façon aussi continue que possible» (art. 78, par. 2).

- L'enfant et sa famille

Au regard des conclusions d'une étude de l'UNESCO sur l'enfant et la guerre, les dispositions du DIH qui ont pour objet de préserver l'unité familiale dans les conflits armés revêtent une importance particulière. Selon cette étude en effet:

«Lorsqu'on approfondit la nature de la souffrance psychique chez l'enfant victime de la guerre, on découvre que ce ne sont pas les faits de guerre eux-mêmes - tels que bombardements, opérations militaires qui l'ont affecté émotionnellement. Son sens de l'aventure, son intérêt pour la destruction et le mouvement peuvent s'accommoder des pires dangers, et il ne prend pas conscience du péril s'il garde auprès de lui le protecteur qui, dans son coeur d'enfant, incarne la sécurité, et s'il peut en même temps serrer dans ses bras quelque objet familier. C'est la répercussion des événements sur ses liens affectifs familiaux et la séparation d'avec le cadre coutumier de sa vie qui affectent l'enfant et, par-dessus tout, l'arrachement brutal à sa mère»48(*). Le PA I énonce le devoir général des Hautes Parties contractantes et des Parties en conflit de favoriser le regroupement des familles qui se retrouvent dispersées après l'éclatement d'un conflit armé international (art. 74).

-L'éducation des enfants

Outre les dispositions qui viennent d'être mentionnées sur l'éducation des enfants orphelins ou séparés, la IVe Convention de Genève impose certains devoirs généraux en matière d'éducation des enfants à une Partie à un conflit armé international. La Puissance occupante doit faciliter le bon fonctionnement des établissements consacrés à l'éducation des enfants (art. 50). La Puissance détentrice doit assurer l'instruction des enfants et des adolescents internés, qui peuvent fréquenter des écoles (art. 94).

Pour le conflit armé non international, le PA II prévoit que les enfants «devront recevoir une éducation, y compris une éducation religieuse et morale, telle que la désirent leurs parents ou, en l'absence de parents, les personnes qui en ont la garde» (art. 4, par. 3, litt. a).

- Les droits personnels de l'enfant

La IVe Convention de Genève interdit à la Puissance occupante de modifier le statut personnel des enfants (art. 50). Leur nationalité et leur état civil ne devront donc pas subir de changements du fait de l'occupation qui complète, en faveur des enfants, les principes essentiels du respect de la personne et des droits familiaux proclamés à l'art. 27 de cette Convention. D'autre part, la Puissance occupante ne doit pas enrôler les enfants dans des formations ou des organisations dépendant d'elle (art. 50). Cette interdiction est destinée à empêcher le renouvellement des massives incorporations forcées qui se sont produites au cours de la seconde guerre mondiale, où de nombreux enfants avaient été enrôlés d'office dans des organisations et mouvements consacrés principalement à des fins politiques.


- Le respect du traitement préférentiel de l'enfant

Si la IVe Convention de Genève n'énonce pas le principe de la protection spéciale qui doit être accordée à l'enfant, deux de ses dispositions stipulent en revanche expressément que le régime de faveur accordé aux enfants par les législations nationales doit être respecté en cas de conflit armé international. En effet, bien souvent, les pays en guerre promulguent des dispositions en faveur des personnes dont la vulnérabilité appelle des mesures spéciales : octroi de cartes d'alimentation supplémentaires, facilités pour les soins médicaux et hospitaliers, assistance sociale, mesures de protection contre les effets de la guerre, etc. Les enfants de moins de quinze ans et les mères d'enfants de moins de sept ans qui sont ressortissants de la Partie adverse doivent bénéficier de tout traitement préférentiel qui est accordé aux ressortissants nationaux des catégories correspondantes (art. 38). De même, la Puissance occupante ne devra pas entraver l'application des mesures préférentielles prises en faveur de ces personnes avant l'occupation (art. 50).

- L'enfant orphelin ou séparé

Les dispositions que les Parties à un conflit armé international doivent prendre à l'égard des enfants orphelins ou séparés du fait de la guerre ont déjà été évoquées dans les paragraphes consacrés à l'enfant et sa famille et à l'environnement culturel de l'enfant. La IVe Convention de Genève accorde une importance particulière à la situation des enfants orphelins ou séparés de leur famille. Les Parties en conflit ont le devoir de prendre les mesures nécessaires pour que l'entretien et l'éducation des enfants de moins de quinze ans devenus orphelins ou séparés du fait de la guerre soient assurés, et qu'ils ne soient pas laissés à eux-mêmes et que leur accueil en pays neutre soit prévu (art. 24). Les auteurs de la Convention ont choisi la limite d'âge de quinze ans, parce qu'ils ont estimé que le développement des facultés à partir de cet âge n'imposait plus avec la même nécessité des mesures spéciales49(*). De même, la Puissance occupante doit veiller à ce que l'entretien et l'éducation des enfants orphelins ou séparés en territoire occupé soient assurés (art. 50).

Reconnaissant également les besoins et les vulnérabilités spécifiques des femmes, le DIH leur accorde un certain nombre de mesures de protection et de droits spécifiques (Section 2).

* 45 Convention relative aux droits de l'enfant (1989), art. 38.

* 46 Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant (1990), art.22.

* 47 Comité des Nations Unies sur les droits de l'enfant, rapport sur la deuxième session, doc.

Nations Unies CRC/C/10, 19 octobre 1992,

* 48 Extrait de L'enfance, victime de la guerre, une étude de la situation européenne, par le docteur Thérèse Brosse, UNESCO, 1949, Paris, pp. 11-12, cité dans le « Rapport sur les travaux de la Conférence d'experts gouvernementaux », vol.II, CICR, 1972, p. 98.

* 49 Ibid., ad article 24, p. 201.

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry