I-NAISSANCE ET MONTEE DE LA MEFIANCE
ET MONTEE DE LA PEUR
La naissance et la montée de la méfiance et de la
peur observées chez les populations de Grand-Bassam résultent du
sentiment d'insécurité généralisé.
I-1- La naissance et la montée de la
méfiance
La méfiance peut être définie comme
l'attitude d'esprit d'une personne ayant la crainte d'un perpétuel
risque ou danger.
Au regard des résultats obtenus lors de notre
enquête, l'on peut expliquer la naissance et la montée fulgurante
de la méfiance au sein des populations de Grand-Bassam par deux facteurs
principaux. Il y a la croissance brutale qu'a connue la population en nombre et
en variété d'individus (assurément la résultante
des déplacements de populations du fait de la guerre), mais surtout le
niveau de la sécurité des citoyens qui se serait
détérioré ces dernières années.
En effet, les 35,50 % de nos enquêtés soutiennent
que leur méfiance vis-à-vis de leurs concitoyens prend son
origine dans le fait que nombreux sont ces nouveaux venus qui sont
méconnus d'eux aux plans physique et comportemental. Or il n'est
nullement aisé de cohabiter avec des étrangers dont on ignore
pratiquement tout (il est impossible de faire fonctionner la
société sans confiance). Mais, il faut reconnaître avec
MOSER1 que « Les citadins se
caractérisent par un certain nombre de comportements spécifiques
de repli sur soi. La confiance en autrui est moindre en ville, et les individus
lient moins facilement connaissance avec les étrangers.».
1- MOSER G. (1992), Les stress urbains, Paris,
Armand Colin.
Pour cette frange de la population, la méfiance qui
découle du niveau de sécurité est la conséquence du
désistement volontaire des FDS à accomplir leur tâche.
C'est dans cette perspective que I.M. affirmait: «Ici
à Bassam, on se méfie beaucoup des gens car souvent même ce
sont des hommes en tenue militaire qui nous volent avec des armes de dotations
policières et militaires. Ces derniers temps, nous avons de plus en plus
peur.>>.
I-2- La naissance et la montée de la peur
La peur est un sentiment violent causé par un danger
réel ou supposé. La peur actuelle au sein des populations de
Grand-Bassam résulte d'une dégradation de la
sécurité réelle, mais aussi de la psychose
créée par la rumeur entretenue par les témoins d'une
agression. Selon certains de nos enquêtés, il leur est difficile
de fréquenter certains quartiers de la ville quel que soit le moment de
la journée étant donné que ces quartiers sont au quotidien
le théâtre de toutes sortes d'infractions et de violences. Or pour
ROCHER1, «Le sentiment
d'insécurité est un processus de lecture du monde environnant. On
le saisit chez les individus comme un syndrome d'émotions (peur, haine,
jalousie) cristallisées sur le crime et ses auteurs. Comme toute
lecture, le sentiment d'insécurité est réducteur.
Voilà sa fonction : mettre le désordre en ordre, proposer des
causes et donc des solutions à son existence, rendre
compréhensible.>>. C'est pourquoi certaines populations ont
bâti des barricades autour de leurs domiciles avec par endroit des
barbelés électroniques. Ces actions traduisent pour eux le
désir de juguler la peur d'être victime des bandits selon le mot
de SEMELIN2 « Il faut frapper avant
d'être frapper.>>.
Mais il faut noter que la peur à Grand-Bassam est plus
ressentie chez les non victimes que chez les victimes d'autant plus qu'ils
pensent être les prochaines cibles des délinquants.
1- ROCHER S. (1993), Le sentiment
d'insécurité, Paris, PUF, p.20.
2- SEMELIN J. (Hiver 2000), Qu'est-ce que le crime de masse ?
: Le cas de l'ex-Yougoslavie., Paris, Variations, Critique Internationale
n°6, p 150.
II- LES CONSEQUENCES DE L'INSECURITE SUR LES FAMILLES
La famille est la cellule de base de toute
société humaine. Elle contribue à l'équilibre
émotionnel de l'enfant qui se construit déjà pendant la
grossesse et les premiers mois de la vie. Elle a un impact capital sur la
réaction comportementale de l'individu dès la naissance
jusqu'à l'adolescence. La famille donne la philosophie de base de la vie
et la formation harmonieuse de la personnalité de tout individu. C'est
le lieu oü l'on découvre aussi un système complexe
d'échanges, d'influences et de communications entre ses composantes.
Dans ce système, ce sont soit la soumission, l'amour et
l'autorité qui régissent les rapports des membres qui peuvent se
traduire en défiances qualitatives ou en défiances
quantitatives.
Analyser les conséquences de l'insécurité
sur les familles nous conduira à voir les deux niveaux la composant :
les parents et les enfants.
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