A/ Les débiteurs initiaux
1°) Les exploitants d'activités
industrielles et les propriétaires
149. C'est l'exploitant de l'activité { l'origine du
dommage qui doit non seulement être tenu pour responsable mais qui doit
aussi supporter les coûts de la réparation. A ce titre, une fois
le dommage survenu, l'exploitant doit informer sans délai
l'autorité administrative compétente. Il doit en outre prendre
les mesures idoines pour faire cesser le trouble en vue d'éviter, de
limiter ou de prévenir d'autres dommages environnementaux et leurs
incidences sur la santé humaine. Pour cela, doit-il éliminer,
traiter, faire éliminer ou faire traiter immédiatement les
substances ou produits contaminants { l'origine du dommage (article 6 de la
Directive 2004/35). Si l'exploitant ne respecte pas ses obligations,
l'État ou l'autorité administrative compétente peut l'y
contraindre. L'exploitant doit également soumettre son plan de
réparation { l'autorité publique qui doit apprécier et
donner son avis après.
2°) Les tiers intervenants :
l'État, les collectivités territoriales
150. L'État peut intervenir { double titre :soit comme
«gérant d'affaires>> pour suppléer la carence totale
de l'exploitant ou du propriétaire du site non identifié, jouer
son rôle régalien lorsque la catastrophe est
surdimensionnée, apporter la logistique complémentaire ou
nécessaire à la limitation des risques; soit pour agir en amont
lorsqu'il s'aperçoit de l'inefficacité de l'exploitant, des
mesures qu'il a prises, de son manque de volonté { réparer
promptement et rapidement le dommage qu'il a occasionné dont la
réparation requiert pourtant la prise de mesures urgentes. Dans les
catastrophes environnementales majeures, l'État a un rôle central
{ jouer en tant que garante de l'ordre public et de l'intégrité
du territoire. C'est pourquoi, dès les premières heures d'une
catastrophe écologique, l'État intervient
généralement comme gérant d'affaires en mobilisant
73 Dans le cas de la France, c'est le groupe
ASSURPOL qui offre les services spécialisés aux industriels et
exploitants pour couvrir les risques de pollution. Ce type d'assurance
supplée l'assurance responsabilité civile, mais ses primes sont
élevées. Ce système d'assurance s'identifie au
système de garantie financière prévu par le nouvel article
4-2 de la loi du 19 juillet 1976 relative aux installations classées.
VINEY G., op. cit. , p. 45.
à la fois ses structures administratives
compétentes avec toute la logistique nécessaire (avions, bateaux,
matériels de décontaminations, navires-hôpitaux, structures
vétérinaires) et le personnel qualifié
(spécialistes en environnement, médecins,
vétérinaires, biologistes, agents des eaux et forêts,
agents de sécurité pour sécuriser les lieux...). C'est au
dommageur d'endosser finalement les charges et dépenses assurées
par l'État pendant la crise écologique. Dans la marée
noire du Golfe du Mexique, les autorités américaines ont
clairement exigés de BP la prise en charge de toutes les dépenses
de secours et d'intervention des fonctionnaires comme des
bénévoles. Les lois américaines sur les pollutions marines
(OPA) fixent d'ailleurs le cadre de cette indemnisation à verser {
l'État et l'ensemble de ses démembrements impliqués.
F/ Les débiteurs finaux 1°) Les
sociétés d'assurances
151. En général, les particuliers et surtout
les industriels contractent des assurances de responsabilité civile pour
couvrir les éventuels dommages qu'il serait amenés {
causés aux personnes et aux biens ou choses. Certaines atteintes {
l'environnement étaient ainsi couvertes en droit commun par des
assurances de responsabilité civile comme des atteintes aux biens
publics ou privés. Mais la consécration du préjudice
écologique pur avec la particularisation du traitement
réservé au «res communes» ou biens collectifs non
appropriés ainsi que les coûts exorbitants des indemnisations on
peu à peu pousser les assureurs à aménager des assurances
écologiques adaptés aux dommages environnementaux. Beaucoup de
Sociétés d'assurance ({ l'image de l'ASSURPOL) se sont ainsi
spécialisées dans la couverture des risques écologiques
dus à la pollution par les déchets industriels et aux pollutions
marines. Mais l{ aussi, dans de nombreux cas, c'est plusieurs assurances
individuellement ou organisées en groupe avec option de
réassurances qui couvrent souvent une activité industrielle
donnée, ce qui leur permettant de partager plus facilement les risques.
Ces contrats d'assurances écologiques contiennent aussi, non seulement
de nombreuses clauses d'exonération (faute ou négligence de
l'assuré, cas fortuits sociétés) mais surtout un
plafonnement des indemnités suivant des critères
prédéfinis. Pour les pollutions marines que ce soit la Convention
de Bruxelles de 1969, la Convention Marpol, elle consacre un plafonnement de
l'indemnisation. Le protocole de 1992 prévoyait un plafond de 550
millions de francs français (environ 838 410 euros) maximum.
2°) Les groupements professionnels et les
fonds de garanties
152. Pour anticiper sur le futur et faire face ensemble aux
responsabilités qui pourraient leur être imputé en cas
d'atteinte { l'environnement, les exploitants d'activités dangereuses
soumises ou non { autorisation ont commencé { mettre en place des fonds
d'indemnisation. Les fonds de garanties n'excluent pas toutefois les assurances
de responsabilités, bien au contraire, dans le meilleur des cas puisque
ces assurances sont obligatoires, le fonds ne vient qu'à titre
complémentaire lorsque le maximum des indemnités { payer par
l'assureur en fonction des primes versées, ne suffit pas { couvrir la
totalité du montant de l'indemnisation. Dans ce cas le fonds supporte ce
surplus pour éviter un double-emploi, une double indemnisation. Cette
solidarité entre exploitants sur une base généralement
volontariste (par adhésion) vise en outre à contourner les
sociétés d'assurance, jugées { tort ou {
raison, imprévisibles et rigides. Ces fonds de garanties qui sont des
formes d'assurances-mutuelles entre membres d'un groupe professionnel sont de
plus en plus, obligatoires pour certaines formes d'activités comme les
exploitations d'hydrocarbures (industries, production,
transporté...).
153. Aux États-Unis, les systèmes
d'indemnisation existent depuis longtemps avec l'«Oil Pollution Act>',
crée { la suite de la grande marée noire qu'avait connu ce pays
(Exxon Valdez). Au plan international, la Convention de Bruxelles du 29
novembre 1969 a également mis en place un système de fonds de
garantie similaire à celui des américains appelé
«FIPOL>>74 ou Fonds International d'Indemnisation pour
les dommages dus { la pollution par les hydrocarbures. Pour que le FIPOL se
mette en place il faut que des demandes d'indemnisations soient
formulées { l'encontre du propriétaire du navire en cause, de son
assureur ou contre le fonds lui-même. La Directive 2004/35 a prévu
un mécanisme de garantie financière digne d'intérêt.
En effet, en application de l'article 13-1 de cette directive «les
États membres prennent des mesures visant à encourager le
développement, par les agents économiques et financiers
appropriés, d'instruments et de marchés de garantie
financière y compris des mécanismes financiers couvrant les cas
d'insolvabilité, afin de permettre aux exploitants d'utiliser des
instruments de garantie financière pour couvrir les
responsabilités qui leur incombent en vertu de la présente
directive>>.
154. Seules les questions liées aux conditions et
modalités de renflouement des caisses alimentant le fonds
soulèvent encore quelques interrogations. Faut-il opérer des
cotisations ou au contraire instaurer des sortes de taxes (écotaxes) ou
bien asseoir un système mixte? Quel montant fixé pour les
cotisations ou les taxes? Les solutions sont multiples. Mais la Convention de
1992 prévoyait en son article 10 que les contributions au fonds sont
calculées en fonction des quantités d'hydrocarbures effectivement
reçues par l'importateur au cours de l'année civile en tenant
compte des risques.
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